Une avalanche d’attaques économiques s’abat partout sur la classe ouvrière

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Partout dans le monde, la bourgeoisie fait payer au prolétariat le coût de la crise économique de son système et de l’expansion du militarisme à travers un déluge d’attaques qui s’abattent sur les ouvriers. C’est ce cumul d’attaques conduisant à un processus de paupérisation massif qui provoque aujourd’hui une colère toujours plus forte au sein de la population, en particulier de la classe ouvrière, une volonté de riposter et de ne pas accepter les sacrifices demandés.

De nouvelles attaques contre les travailleurs sont irrémédiables

Pour survivre à la guerre économique dans l’arène internationale, pour financer les préparatifs de guerre, la bourgeoisie n’a pourtant d’autre solution que d’imposer des mesures d’austérité de plus en plus draconiennes à la classe ouvrière. Mais loin de constituer une solution à la crise, celles-ci ne font qu’aggraver les contradictions du système capitaliste. Alors que les dettes sont abyssales et que d’un côté elle coupe tous les budgets sociaux, la bourgeoise dépense de l’autre des sommes astronomiques pour les dépenses d’armement. Pour toutes les puissances, des plus petites jusqu’aux plus grandes, la logique est la même : fournir un effort de guerre historique que la classe ouvrière doit payer ! Cette orientation est déjà à l’œuvre dans les pays industrialisés d’Europe et d’Amérique du Nord. Et n’ayons aucune illusion, tout retour à une situation antérieure plus supportable est exclu tout comme le sont les moyens d’apaiser une colère légitime. Qu’on en juge ! Les pays les plus industrialisés d’Europe, se trouvent au cœur de la tourmente :

En Belgique, depuis le début de 2025, la classe ouvrière s’est mobilisée contre les mesures du gouvernement fédéral pour imposer 26 milliards d’économies budgétaires afin d’accroître la compétitivité et la rentabilité de l’économie nationale tout en dépensant des dizaines de milliards pour l’achat de matériel militaire. Ce large programme d’austérité impactera fortement toute la classe ouvrière, alors que les travailleurs des entreprises privées sont déjà licenciés en masse, l’indexation automatique des salaires et des allocations est érodée, les primes pour les heures supplémentaires et le travail de nuit sont réduites, la flexibilité du travail augmentée, le droit aux allocations de chômage restreint. De plus, des coupes sombres sont opérées dans les pensions et l’assurance maladie, le nombre total de fonctionnaires est réduit, la titularisation du personnel enseignant est mise en péril, etc.1

En Allemagne aussi, le nouveau gouvernement prévoit d’économiser plusieurs milliards d’euros sur le revenu universel (Bürgergeld) au cours des deux prochaines années. Les dépenses devraient diminuer de 1,5 milliard d’euros l’année prochaine. Cette économie devrait atteindre 3 milliards d’euros en 2027. En même temps 10 000 emplois industriels sont détruits chaque mois et les entreprises allemandes prévoient encore de licencier plus de 125 000 travailleurs. En outre, le nombre de chômeurs a dépassé en août la barre des 3 millions et une étude de l’Institut der deutschen Wirtschaft (IW) propose de réduire la durée des allocations chômage pour les seniors.

Et quand un pays comme l’Espagne se présente comme une exception à cette tendance générale avec un taux de croissance du PIB de 2,5 % à faire rêver les États voisins, la réalité pour le prolétariat espagnol est moins idyllique : la « bonne santé » économique est soutenue par une forte pression à la baisse sur les salaires, par l’accueil massif d’une main-d’œuvre étrangère sous-payée qui pousse les salaires moyens vers le bas, de plus en plus découplés de l’augmentation du coût de la vie.

Le cas le plus récent et « spectaculaire », illustratif de cette situation, concerne la France où le prolétariat va aussi être frappé très durement. Le premier ministre Bayrou a annoncé, le 15 juillet, une série de mesures pour réduire le déficit public colossal de l’économie française, qui ne font pas dans la dentelle : suppression pure et simple de deux jours fériés pour tous les salariés, contrôle et surveillance renforcée avec un énième durcissement des règles d’indemnisation de centaines de milliers de chômeurs, réduction des effectifs dans la fonction publique (à travers le non-remplacement d’un fonctionnaire sur trois), gel des pensions et des prestations sociales, libéralisation du marché de l’emploi… À cela il faut ajouter toutes les mesures constituant des obstacles supplémentaires à l’accès aux soins ou à l’indemnisation des arrêts maladie sous prétexte « d’équité sociale » et de « chasse aux abus ». L’hypocrisie sans nom de leur justification ne cède en rien à la violence de ces annonces.

Aucune fraction du prolétariat mondial n’est épargnée

Dans des pays comme l’Argentine2 ou les Philippines,3 la bourgeoisie pousse à l’extrême les conditions d’exploitation de la classe ouvrière. En Inde, la « réforme » massive du Code du travail constitue une attaque frontale contre les conditions de travail en affaiblissant, voire en supprimant, toute forme de sécurité ou de droits légaux, tels que le salaire minimum, les horaires de travail fixes et la sécurité de l’emploi et du lieu de travail. En outre, l’envolée du chômage suite à l’augmentation des droits de douane américains, combinée à la poussée de l’inflation impactent durement les conditions de vie de la classe ouvrière.

La classe ouvrière en Chine n’est pas épargnée. Les faillites en cascade dans le secteur immobilier ont déjà entraîné des centaines de milliers de licenciements, ainsi que d’importantes réductions salariales dans les entreprises de construction, de gestion immobilière et de la chaîne d’approvisionnement. Des géants de la technologie tels qu’Alibaba, Tencent et ByteDance annoncent d’importantes réductions d’effectifs. Des ouvriers sont privés de leur salaire depuis des mois. Les municipalités, fortement endettées, privilégient le remboursement des obligations plutôt que le paiement des salaires des fonctionnaires. Le chômage des jeunes a déjà atteint des niveaux sans précédent, un jeune travailleur chinois sur quatre étant sans emploi.

Loin d’être à l’abri de violentes attaques économique, la classe ouvrière des pays d’Amérique du Nord est directement exposée à toutes les conséquences de la guerre économique, du chaos croissant et de l’expansion explosive du militarisme. Au printemps, aux États-Unis, des coupes de près de 1 000 milliards de dollars étaient décidées dans les budgets sociaux pour la Santé (Medicaid). Concrètement, cela se traduira par la perte de la couverture santé pour près de 15 millions de personnes. Des mesures similaires étaient prises contre le Programme d’aide alimentaire (SNAP), où des coupes de 186 milliards de dollars entraînent la perte d’une partie ou de la totalité des prestations d’aide alimentaire pour 22,3 millions de personnes. Il a également été annoncé le licenciement d’environ 225 000 fonctionnaires fédéraux, qui seront sans doute suivis par des dizaines de milliers de licenciements dans le secteur de l’Éducation en raison d’une réduction budgétaire de 7 milliards d’euros, ainsi que des réductions budgétaires similaires affectant les prêts étudiants fédéraux et les pensions des employés fédéraux.4

La crise économique mondiale et les tensions guerrières au cœur des attaques

Comment en sommes nous arrivés là ? Suite à la crise bancaire de 2007-2008 et des dettes souveraines dans la zone euro en 2010-2012, la bourgeoisie a éprouvé des difficultés importantes pour maintenir son système économique à flot. Une telle vulnérabilité allait se répercuter dans sa gestion chaotique lors de la crise du COVID en 2020 et s’illustrer lors de l’irruption de la guerre en Ukraine et au Moyen-Orient. Ces conflits ont impliqué un accroissement gigantesque de la production militaire, la mise au rencart de « l’économie verte » et provoqué la déstabilisation des marchés des matières premières, des objectifs industriels et des routes commerciales. « L’économie capitaliste était alors déjà en plein ralentissement, marqué par le développement de l’inflation, des pressions croissantes sur les monnaies des grandes puissances et une instabilité financière grandissante, la guerre aggrave désormais la crise économique à tous les niveaux ».5

La politique économique de l’administration Trump 2 constitue à son tour un facteur de premier plan d’instabilité économique mondiale en particulier du fait de ses orientations protectionnistes (symbolisées par sa politique des droits de douane), de son abandon du multilatéralisme et de la gestion de l’économie mondiale à travers des conférences et instances internationales (OMC, Banque Mondiale, traité du GATT, etc.) au bénéfice de négociations bilatérales d’État à État. Une telle politique est en totale contradiction avec les besoins de l’économie capitaliste mondiale.

Ce à quoi on assiste, c’est « la tentative actuelle des États-Unis de démanteler les derniers vestiges politiques et militaires de l’ordre impérialiste mondial établi en 1945 [qui] s’accompagne de mesures qui menacent clairement toutes les institutions mondiales mises en place à la suite de la Grande Dépression et de la Seconde Guerre mondiale pour réguler le commerce mondial et contenir la crise de la surproduction ».6 La suppression de ces institutions aura les mêmes effets que le protectionnisme qui a suivi la dépression de 1930 et aggravé la crise mondiale.

Les soubresauts de plus en plus violents et incontrôlables de l’économie ne font que mettre à nu le problème insoluble auquel se heurte la bourgeoisie : la crise mondiale de surproduction généralisée du capitalisme décadent qui pousse chaque capital national à exploiter plus durement la classe ouvrière pour tenter de rester compétitif sur un marché mondial sursaturé. En effet, le monde est aujourd’hui confronté de manière généralisée et définitive, à ce que Marx au 19e siècle appelait « une épidémie qui, à toute autre époque, eût semblé une absurdité, [qui] s’abat sur la société : l’épidémie de la surproduction ».7

La surproduction, de cyclique au XIXe siècle est devenue globale et permanente depuis l’entrée du capitalisme en décadence.

Il n’existe pas de solution à la crise du capitalisme au sein de ce système décadent et pourri. Aujourd’hui, la classe ouvrière est appelée à se serrer la ceinture, demain elle sera appelée à se faire trouer la peau dans des guerres du capitalisme comme c’est déjà le cas dans différents pays. Face aux mensonges de la bourgeoisie faisant croire que la crise serait le produit de la cupidité, des « riches », ou de la bêtise de tel ou tel gouvernement, la responsabilité des organisations révolutionnaires est de mettre clairement en évidence les enjeux historiques et la nécessité de combattre le système capitaliste comme un tout et le piège des illusions démocratiques qui l’accompagne en cehrchant à le dédouanner, tous ces discours hypocrites et perfides de la bourgeoisie sur la nécessaire concertation et les alternatives possibles à concrétiser à travers la représentation démocratique qui, d’une manière ou d’une autre, orientent le mouvement social vers les urnes. Ces discours ont pour finalité de brouiller les cartes, de pourrir les consciences et les conditions de la lutte. La tâche fondamentale à laquelle le prolétariat doit se préparer est donc de répondre par une lutte indépendante, sur son propre terrain de classe au sabotage de l’extension et de l’unification de son combat par les syndicats et à la mystification d’un gouvernement « populaire » prônée par les politiciens de gauche, ces faux amis des travailleurs qui, derrière des discours fallacieux, préparent toujours l’austérité en cherchant à désarmer la classe ouvrière.

Stopio, 28 août 2025

 

 

 

 

 

1 « Le combat ne fait que commencer ! Comment renforcer notre unité et solidarité ? », tract sur les luttes en Belgique disponible sur le site web du CCI.

2L’inflation y atteint déjà 214,4 %, un taux bien plus élevé que celui prévu lors de l’arrivée au pouvoir du gouvernement Milei en 2023. Depuis lors, 3 millions de personnes ont sombré dans l’indigence absolue (la pire depuis 20 ans) et la malnutrition infantile a atteint des niveaux que l’on ne retrouve aujourd’hui que dans des endroits comme Gaza ou l’Afrique subsaharienne.

3Augmentation constante du prix des produits de base alors que les salaires stagnent.

5« Résolution situation internationale du 26° congres CCI », Revue internationale n° 174 (2025)

6Idem.

7Marx, Manifeste du Parti communiste (1844).

Rubrique: 

Crise du capitalisme