Naufrage de migrants en Méditerranée: le capitalisme tue pour défendre ses frontières

Afficher une version adaptée à l'édition sur imprimante

Une fois de plus, un naufrage ayant occasionné des centaines de disparus a eu lieu en Méditerranée, le 22 juin, au large de l’île italienne Lampedusa. Ce drame est survenu seulement huit jours après le naufrage d’une embarcation aux bords des côtes grecques. Mais ce qui est présenté comme un simple fait divers est en réalité une expression du chaos engendré par la crise dans laquelle s’enfonce le capitalisme.

La mort de dizaines de personnes dans des naufrages devient un événement récurrent. La plupart de ces voyages de fortune débutent en général au Maghreb mais de nombreux migrants proviennent, en fait, d’Afrique subsaharienne. Ainsi, les principaux pays dont sont issus les victimes de ce naufrage proviennent de la Côte d’Ivoire, du Burkina-Faso et du Cameroun. La raison de leur départ est principalement la dégradation des conditions de vie dans leur région d’origine et l’espoir de bénéficier d’un meilleur avenir. En effet, les conflits sanglants qui font régner le chaos dans ces pays rendent le simple fait d’habiter dans ces régions un calvaire.

Les guerres civiles, comme au Soudan actuellement ou au Mali, la multitude de conflits armées depuis des décennies, l’instabilité de nombreux États et gouvernements, le poids croissant des groupes terroristes comme Boko Haram ou l’État Islamique, des seigneurs de la guerre, tout cela a des conséquences dramatiques sur la population et l’oblige à fuir. Et avec le déséquilibre climatique qui cause de nombreux dégâts environnementaux, il y a encore d’autres facteurs qui pousseront les habitants de ces pays à fuir ce chaos, notamment le manque d’eau et les conséquences des sécheresses sur l’agriculture.

Les conflits ayant eu lieu dans ces pays sont, en grande partie, la conséquence des velléités impérialistes des grandes puissances qui cherchent chacune à défendre leurs sordides intérêts, tout en alimentant un chaos généralisé, une situation toujours plus incontrôlable sur le continent.

L’exploitation sauvage des ressources naturelles par les firmes européennes, américaines, russes ou chinoises, les velléités commerciales et stratégiques de ces mêmes puissances prêtes à tout pour tenter de conserver leur influence et faire main basse sur les ports, les chantiers, les marchés en tout genre… tout cela a des conséquences désastreuses sur la population. Des conséquences dont la bourgeoisie locale, corrompue jusqu’à la moelle, n’a que faire tant qu’elle peut continuer à se gaver en se maintenant coût que coût au pouvoir.

Les grandes puissances subissent donc, à travers des vagues migratoires incontrôlables, le retour de bâton de leurs politiques et de leurs interventions. Étant donné que la marge de manœuvre du capitalisme est de plus en plus réduite dans sa recherche de profit, les bourgeoisies de tous les pays ne peuvent s’encombrer de « bons sentiments » et n’ont donc comme seul choix que de se débarrasser de ce qu’elles perçoivent comme un « problème », de manière inhumaine. Les pays centraux se sont ainsi transformés en véritables forteresses, administratives et militaires : murs, barbelés, camps de concentrations, violences policières… Cela est illustré par la récente opération à Mayotte où depuis des années les autorités locales ont encouragé la haine contre les migrants comoriens. Mais les principaux pays centraux ne peuvent pas se charger eux-mêmes de tout le sale boulot, ils sous-traitent aussi la tâche à d’autres pays, comme la Turquie.

La Libye est devenue une illustration tragique de cette réalité. Après l’intervention de la coalition composée de la France, de la Grande-Bretagne et des États-Unis contre le régime de Kadhafi, la Libye est devenue une zone de non-droit, où règne la pègre, les petits chefs de guerres et une barbarie sans nom. Le pays s’est ainsi transformé en passage obligé pour de nombreux candidats à l’immigration vers l’Europe. Elle est ainsi un serviteur exemplaire et sans scrupule dans le rôle de garde-frontières de l’Union européenne. Un pays tortionnaire dont les récentes guerres civiles ont montré la brutalité dont le gouvernement est capable. On évoque notamment des trafics d’êtres humains. Le témoignage d’une des membres de la Mission d’Enquête de l’ONU sur la Libye, malgré le fait que cette initiative émane d’un repaire de brigands, est à ce titre édifiant : « Le soutien apporté par l’UE aux garde-côtes libyens en termes de refoulements, d’interceptions, conduit à des violations de certains droits de l’Homme. On ne peut pas repousser les gens vers des zones qui ne sont pas sûres, et très clairement les eaux libyennes ne sont pas sûres pour l’embarquement des migrants » ? (1) Cette situation dure depuis plusieurs années et montre la vacuité des discours soi-disant progressistes et humanistes de l’UE.

L’Europe est loin d’être le seul continent faisant preuve d’hypocrisie sur leur prétendu humanisme. L’action des États-Unis, défenseurs de la « démocratie » et des « libertés civiques », en est un autre exemple frappant. Malgré toute la campagne médiatique hypocrite autour du « mur » de Donald Trump, il existait, en réalité, déjà un grillage dans certaines parties de la frontière mexicaine construit par George Bush et Bill Clinton afin de réguler le nombre de migrants clandestins. Avant 2019, cette barrière couvrait une grande partie de la Californie et de l’Arizona.

Mais il ne faudrait pas tomber dans le piège de la défense des « droits » des migrants. Les associations d’aide aux réfugiés et la gauche du capital font persister les illusions d’un État pouvant être réformé afin de mieux prendre en compte leur situation. C’est pour cette raison que les médias mettent parfois en avant des organisations telles qu’Amnesty International : ces groupes politiques récupèrent l’indignation légitime d’une partie de la population pour l’entraîner dans des luttes parcellaires stériles. Le quinquennat du « socialiste » François Hollande a montré toute la solidarité dont l’État peut faire preuve envers les roms ou les africains.

Contrairement à ce que ces soi-disant humanistes prétendent, il n’y a pas à réclamer à l’État bourgeois de respecter les réfugiés. Il s’agit d’une mystification pour le prolétariat. Pour tous les États, la force de travail de la classe ouvrière n’est qu’une marchandise. Et le bien-être de la population mondiale n’est dans leurs esprits qu’un mensonge, un simple vernis pour assurer l’exploitation. Les réfugiés sont des victimes de la phase finale du capitalisme et le seul moyen d’arrêter ce désastre est la lutte du prolétariat avec ses frères de classe, quelles que soient leurs origines.

Edgar, 2 juillet 2023

 

Récent et en cours: 

Rubrique: 

Barbarie du capitalisme