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Pendant la trêve des confiseurs, plusieurs faits divers ont marqué l’actualité en France. Le 24 décembre, un enfant de 3 ans est décédé à l’hôpital Saint-Vincent de Paul à Paris, victime de l’erreur d’une infirmière qui a administré du chlorure de magnésium dans sa perfusion. L’infirmière est immédiatement mise en examen et inculpée pour homicide involontaire. Quelques jours plus tard, c’est un homme de 57 ans qui, après plusieurs heures d’attente, est décédé d’un arrêt cardiaque, faute de pouvoir trouver un lit dans un service d’urgence de la région parisienne.
Pour la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, ces incidents ne sont bien sûr nullement le résultat de l’incurie croissante des hôpitaux publics confrontés à la baisse des effectifs, à la fermeture des lits et à la dégradation croissante des conditions de travail du personnel hospitalier. Ces décès ont été immédiatement attribués par les pouvoirs publics à un problème de “désorganisation” dans le fonctionnement administratif des hôpitaux. S’il y a eu un problème d’effectifs, c’est parce que les infirmières veulent toutes prendre leurs congés pendant les fêtes de Noël, au détriment de l’intérêt des patients (alors qu’on sait que cette période est propice aux épidémies hivernales).
Ce n’est pas tout à fait le même son de cloche qu’on a entendu de la bouche de l’urgentiste Patrice Pelloux qui dénonce ainsi le manque de moyens : “Avec les restrictions budgétaires, les établissements ferment les lits les jours fériés pour maintenir tant bien que mal leur budget. Ce qui fait qu’à Noël, alors qu’on est en pleine épidémie de gastro-entérite et de grippe, on n’arrive plus à hospitaliser les malades” (cité par Libération du 30 décembre).
La mauvaise foi de Madame Bachelot est d’autant plus évidente que chacun sait que le “plan hôpital 2012” de dix milliards d’euros et programmé sur 5 ans ne vise nullement à donner des moyens supplémentaires à l’hôpital public : il s’agit essentiellement de financer les opérations immobilières permettant la fermeture de services et d’établissements hospitaliers afin d’en améliorer la “compétitivité”. On sait aussi que des dizaines d’hôpitaux publics qui ont refusé de fermer leur maternité et leur service de chirurgie ont vu leurs projets de modernisation refusés. On sait enfin que ce plan prévoit la fermeture de lits avec des suppressions massives d’emplois d’infirmières, d’ouvriers, de personnels administratifs et de médecins. Les départs en retraites ne seront pas remplacés et face à la pénurie d’infirmières, l’État français avait déjà été obligé d’embaucher des infirmières espagnoles sous-payées et des intérimaires pour pallier aux situations les plus critiques.
Ce n’est d’ailleurs un secret pour personne que la profession d’infirmière est elle-même en pleine crise. Suite au décès de cet enfant de 3 ans à la veille de Noël, une infirmière des urgences pédiatriques de l’hôpital Robert-Debré à Paris exprimait ainsi son ras-le-bol : “J’en ai marre. J’ai trois enfants. Je rentre toujours hyper-fatiguée. Avant, on avait des grosses journées les week-ends. Maintenant, c’est toute la semaine. On passe la journée à courir dans tous les sens. On est moins disponible pour les gens. On va plus vite. Quand il y a beaucoup de monde, on passe et on jette un œil à la file, pour vérifier qu’un bébé n’est pas en train de s’étouffer dans son maxi-cosy”. Et un médecin affirmait également : “On manque de temps. Les infirmières démissionnent les unes après les autres. Celles qui restent sont épuisées. Cet hiver, on a une trentaine de lits de moins que l’hiver dernier. Il y a des enfants plein les couloirs (…) J’accepte encore de travailler pour dix euros de l’heure. Mais je vais me lasser. On n’a plus de vie personnelle. Ici, il y a un taux de divorce inimaginable” (cité par Libération du 2 janvier).
La faillite de l’hôpital public, les coupes claires dans les budgets de la santé ne sont qu’un révélateur supplémentaire de la fin de l’État providence. Elles signent la faillite de l’économie capitaliste. L’incapacité croissante de la bourgeoisie à subvenir aux besoins de santé de ceux qu’elle exploite, de même que l’aggravation catastrophique des conditions de travail du personnel hospitalier, ne peut qu’accroître la colère dans ce secteur comme dans tous les secteurs de la classe ouvrière. Ce n’est pas la mauvaise “organisation” des services hospitaliers qui tuent les malades. C’est le capitalisme en crise qui est le seul responsable des “erreurs humaines” !
Sofiane