Face aux fermetures d'usine, aux suppressions de postes, aux baisses de salaire... une seule réponse : la solidarité ouvrière

Afficher une version adaptée à l'édition sur imprimante

Aujourd’hui, tous les ouvriers sont confrontés à la dégradation continue de leurs conditions de vie. Cette réalité incontestable, la bourgeoisie tente malgré tout de la dissimuler, ne reculant pour cela devant aucun mensonge ni devant aucun stratagème pour faire diversion.

A quoi sert le cirque électoral ?

Les élections présidentielles n’auront lieu qu’au mois de mai, et pourtant elles saturent déjà l’espace médiatique depuis plusieurs mois. Sarkozy et Royal s’étalent à la Une de tous les magazines. Pas moyen d’y échapper ! Et pour relancer en permanence l’intérêt du show électoral, la bourgeoisie n’hésite pas à tirer sur les grosses ficelles en maintenant un suspens haletant…"Alors ? candidat ou pas ?" C’est ce battage assourdissant auquel nous avons eu droit autour de l’investiture de Madame Royal. Maintenant, c’est au tour de l’UMP d’entretenir le"suspense" : Sarkozy sera-t-il confronté à une concurrence "démocratique" au sein de son parti ? Michèle Alliot-Marie va-t-elle "oser" se présenter ? Jacques Chirac remettra-t-il le couvert ? Evidemment, le PCF et l’extrême-gauche occupent aussi la scène avec leurs discussions et leurs négociations pour un candidat unitaire de la "cause anti-libérale". Et pour renforcer encore ce bourrage de crâne, les guest-stars façon José Bové ou Nicolas Hulot posent un jour, pour retirer le lendemain, leur projet de candidature.

La bourgeoisie pilonne sa propagande, ne laissant pas une seule seconde souffler les ouvriers afin d’éviter à tout prix qu’ils aient le temps de réfléchir. En focalisant ainsi tous ses médias sur le cirque électoral, elle espère détourner l’attention des préoccupations réelles des prolétaires : les charrettes de licenciements, les fermetures d’usines, la baisse des salaires, la hausse des prix et l’inaccessibilité au logement. La bourgeoisie peut bien crier sur tous les toits que"tout va bien", que le pouvoir d’achat est en hausse et que "les Français sont moins pauvres qu’il y a dix ans" 1, tous ces mensonges sont trop gros pour être crédibles. Le cinglant zéro pointé pour la croissance économique du troisième trimestre en France révèle la profondeur réelle de la crise. D’ailleurs, en regardant de plus près les derniers chiffres de l’INSEE publiés à grand renfort de publicité, on s’aperçoit que, malgré tous les traficotages statistiques, le nombre de Rmistes ne cesse de croître et que les personnes vivant sous le seuil de pauvreté (moins de 788 euros par mois) sont 100 000 de plus chaque année.

Des attaques toujours plus fortes contre la classe ouvrière

Comment pourrait-il en être autrement ? Tous les secteurs de la classe ouvrière, mois après mois, sont touchés de plein fouet par une pluie incessante d’attaques.

Dans le privé, depuis la rentrée, les annonces de "restructurations" (comme ils disent) accompagnées de leurs cortèges de licenciements et de reclassements bidons se multiplient. La fermeture de l’usine Thomé-Génot dans les Ardennes, jette 300 salariées à la rue. Le groupe pharmaceutique, Sanofi-Aventis, supprime 500 postes ; pour Valéo, dans la Somme, ce sera 130 postes en moins et 150 intérimaires n’auront pas de renouvellement de contrat ; pour Delphimétal, ces suppressions concernent 300 emplois et 792 postes pour le cablo-opérateur Noos. Les ouvriers du textile ont essuyé quant à eux une véritable rafale : Well perd 300 emplois, Aubade 180 et Arena 169. Et dans certaines branches, c’est en milliers que l’on compte : chez Peugeot et Citroën, 10 000 emplois seront supprimés d’ici fin 2006 (non renouvellement des contrats temporaires et non remplacement des départs à la retraite) ; dans l’industrie du verre, 7000 emplois sont menacés et des dizaines de milliers de suppression d’emplois sont programmées à La Poste et chez Orange (France-Télécom). Même Airbus, cette industrie de pointe, fleuron de l’économie nationale, est en pleine déconfiture. Les chiffres sont encore inconnus, mais ce n’est pas une fantaisie de dire que les victimes se compteront en dizaines de milliers (les 1000 CDD non reconduits dès à présent n’étant qu’un avant-goût de l’attaque qui se prépare). L’ampleur de la saignée ne peut même plus être dissimulée par la presse. Des titres du genre "Des milliers d’emplois perdus cette année" ou encore "Industrie : Les plans sociaux se multiplient en 2006 en France" 2 s’étalent ainsi dans les journaux.

Le secteur public n’est évidemment pas épargné. Par exemple, à la SNCF, uniquement pour le fret, 7000 postes ont déjà été supprimés ces trois dernières années et cette "réorganisation" se poursuit, notamment au nom de la flexibilité. 35 000 emplois seront supprimés dans la Fonction publique (dont 8500 postes d’enseignants à la rentrée 2007), conséquence du non remplacement des départs à la retraite et de la baisse des recrutements par concours, ce qui implique une surcharge de travail pour ceux qui restent. C’est en fait dans toutes les administrations, dans tous les services que les effectifs fondent comme neige au soleil par ce système ou par la non reconduction des contrats précaires.

Ne pouvant cacher totalement l’ampleur de ces attaques, la bourgeoisie se fait forte de promesses électorales. En votant pour tel ou tel candidat, elle nous le jure la main sur le cœur, l’économie nationale se redressera : car tantôt pour la droite, elle sera plus compétitive, tantôt pour la gauche, elle sera gérée de façon plus humaine. Mais une nouvelle fois, tous ces mensonges ne tiennent pas si l’on jette un simple coup d’œil au delà des frontières. Partout sur la planète, quel que soit le gouvernement, qu’il soit de gauche ou de droite, le même constat, les mêmes attaques. Volkswagen, après avoir supprimé plus de 20 000 emplois en Allemagne, vient d’annoncer la suppression de 4000 postes en Belgique, 10 000 en comptant les sous-traitants. En Espagne, Renault a mis 1300 ouvriers au chômage technique, ce qui implique dans la réalité une menace directe pour 5000 emplois (équipementiers et autres sous-traitants ). Le groupe d’aluminium Alcoa va supprimer 6700 emplois dans le monde, notamment au Mexique et au Portugal. Les déboires d’Airbus impliquent aussi des dizaines de milliers de licenciements supplémentaires en Allemagne. Une liste complète des licenciements annoncés serait interminable. Mais déjà ce bref tour d’horizon révèle la faillite du système capitaliste et son incapacité à sortir de la crise.

Les syndicats, spécialistes de la division et de l’éparpillement des luttes

Face à toutes ces attaques, le battage médiatique autour des prochaines élections ne peut suffire à dévoyer le mécontentement et la réflexion. La colère et la combativité au sein de toute la classe ouvrière ne font que croître. Dans ce contexte, l’expérience de la lutte des étudiants contre le CPE fait peur à la bourgeoisie. Il est hors de question pour elle que se renouvelle un tel mouvement porteur d’unité, de solidarité et de confiance pour toute la classe ouvrière, pour tous les travailleurs. Ses chiens de gardes, les syndicats, déploient donc une immense énergie pour saucissonner les luttes, pour isoler la riposte des ouvriers usine par usine, entreprise par entreprise, secteur par secteur.

Ainsi, les journées d’actions par branche se multiplient : grève nationale le 14 octobre pour la métallurgie, le 8 novembre pour la SNCF, le14 novembre pour La Poste et le même jour mais séparément pour le ministère des finances, le 21 novembre pour le secteur de la recherche. Et quand des ouvriers sont touchés par les"restructurations" et les fermetures d’usines ou réclament des augmentations de salaire, tout est fait pour enfermer ceux-ci dans leur usine par des occupations parfois de plusieurs semaines ou les isoler dans des actions coups de poing. Dans les Ardennes, par exemple, confrontés à la fermeture de Thomé-Génot, les syndicats ont maintenu la colère des 300 salariés dans les murs de l’usine (exception faite pour une journée-défouloir"Ardennes mortes"), durant des semaines - alors que toutes les autres usines du département sont menacées de fermeture d’ici 2008. A l’usine Alstom-Belfort, la grève d’une cinquantaine d’ouvriers partie des ateliers de machines électriques depuis le 13 novembre pour réclamer une augmentation de 150 euros sur le salaire de base et une prime de fin d’année de 1000 euros a été rapidement canalisée par les syndicats qui ont poussé les ouvriers à rester repliés dans l’usine. Ce que Libération du 24 novembre résume en une formule édifiante :"C’est une grève en vase clos". Car le but des manœuvres syndicales est de diviser les ouvriers, de les cloisonner entre eux, d’éparpiller leur riposte, d’épuiser leur combativité et d’écarter ainsi tout risque d’unification de leur luttes. A ce titre, la manifestation des pompiers civils professionnels du mardi 21 novembre pour la défense de leurs retraites et l’octroi d’une prime supplémentaire de risque est très révélatrice. Devant des conditions de travail de plus en plus intolérables et la baisse continuelle du salaire réel, ces travailleurs sont animés d’une grande combativité. Ils subissent ce que subit toute la classe ouvrière. Pourtant, c’est bien une journée d’action nationale particulière, avec des revendications spécifiques, qui fut organisée par les syndicats. Pire, ces forces d’encadrement ont organisé un véritable piège en appelant à manifester près du pont d’Austerlitz à Paris alors que les forces de l’ordre très nombreuses bloquaient tous les accès vers le centre de la capitale et obligeaient les manifestants à se replier vers les boulevards extérieurs. Tout a été fait pour que les pompiers très remontés se retrouvent coincés face à des CRS chauffés eux aussi à blanc. Le but était clair : créer des affrontements, des explosions de violence. La bourgeoisie a pu ainsi faire tourner en boucle sur les écrans de télévision les images de ces pompiers jetant tout ce qui leur tombait sous la main contre les flics dans une véritable bataille rangée. Là encore, il s’agissait de diviser la classe ouvrière, de l’effrayer, de la décourager d’entrer en lutte et surtout l’empêcher d’exprimer tout sentiment de solidarité. Chaque fois, les syndicats sabotent les luttes en les conduisant vers des pièges et des impasses en poussant les ouvriers vers l’isolement le plus complet dans l’usine, dans le cadre le plus corporatiste possible ou vers le déchaînement de la violence la plus aveugle. Toutes ces manœuvres visent à faire obstacle au besoins les plus vitaux de la lutte : la mise en œuvre de son extension et de la solidarité.

Il n’y a aucune illusion à se faire ni sur les élections, ni sur les syndicats qui sont des rouages du maintien de l’exploitation capitaliste au service de la classe exploiteuse et de son Etat. Devant la massivité des attaques, la prise en main des luttes par les travailleurs eux-mêmes est la seule réponse possible pour pouvoir affirmer, développer et unir leurs forces dans un même combat de classe !


Régis (25 novembre)

1 Le Monde du 23 novembre 2006.

2 Le Parisien du 24 novembre 2006.

Récent et en cours: