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Depuis début septembre, période "traditionnelle" de la "rentrée sociale" , il ne se passe pas un jour sans que les médias ne nous invitent à nous intéresser au "débat politique " préparatoire aux futures présidentielles. A grands coups de shows télévisés, c’est quotidiennement que les prolétaires sont matraqués par les dissensions au sein des partis politiques.
Le rideau de fumée électoral de la bourgeoisie…
De l’UMP au PS, chaque candidat potentiel essaie de nous vendre sa soupe indigeste pour nous amener à "choisir" notre futur président. Du "débat au sein du PS" où ça flingue tous azimuts, en passant par les règlements de compte au sein de l’UMP, on a droit à toute la panoplie des "propositions alternatives" censées améliorer le sort des Français à condition que ceux-ci comprennent la nécessité d’aller voter et sachent bien pour qui voter. Au milieu de tout ce tintamarre, on nous présente Sarkozy comme l’ennemi public numéro 1, la figure de proue d’une droite ultra-libérale musclée, pro-américaine, et surtout comme le principal responsable des mesures "sécuritaires" et des attaques anti-immigrés. L’objectif de tout ce cirque électoral est clair : il faut mettre le paquet pour "battre Sarkozy " qui n’est, en réalité, que le nouvel épouvantail mis en avant par la classe politique pour faire croire que les autres candidats sont plus acceptables du point de vue des intérêts de la classe ouvrière.
Pourquoi un tel barouf médiatique à huit mois des échéances électorales ?
Tout ce cirque n’est qu’un rideau de fumée destiné à masquer l’augmentation du chômage, la baisse drastique du pouvoir d’achat des ménages, les charrettes de licenciements, les suppressions de postes et autre attaques qui ne cessent de tomber sur le dos de la classe ouvrière. L’ouverture prématurée de la campagne électorale vise ainsi à masquer que la crise économique n’a pas d’issue, qu’elle ne peut que s’aggraver et que la classe ouvrière va continuer à en faire les frais, et cela quelle que soit l’équipe au pouvoir.
Ce barouf médiatique vise encore et surtout à empêcher les prolétaires de réfléchir sur la façon dont ils doivent se défendre, non pas à travers un bulletin de vote, mais par la lutte la plus massive, solidaire et unie possible. Ainsi, ce n’est pas un hasard si on n’entend plus parler des luttes du printemps dernier contre le CPE (sauf pour nous mentir et la réduire à une "lutte étudiante") alors que toute l’attention est focalisée sur le risque de nouvelles "flambées" de violence dans les banlieues. Ce n’est pas un hasard non plus si les syndicats ont préparé une "rentrée sociale " très discrète et ne font rien pour mobiliser massivement la classe ouvrière dans tous les secteurs alors que partout le mécontentement ne cesse de croître. Au contraire, leur stratégie consiste aujourd’hui encore à émietter la colère des ouvriers en multipliant les journées d’actions sans lendemain, secteur par secteur, entreprise par entreprise à des lieux et dates différents. A travers le calendrier de leurs journées d’actions, leur seul objectif consiste non seulement à laisser la campagne électorale battre son plein, mais également à occuper tout le terrain social pour décourager les ouvriers d’entrer en lutte. C’est bien pour cela que ces journées d’actions sans lendemain, dans l’Education nationale comme à EDF/GDF ont été de véritables fiascos. Aujourd’hui, malgré la colère que ressentent la grande majorité des ouvriers, ceux-ci ne sont pas prêts à perdre des journées de salaire pour rien. Partout, les travailleurs prennent de plus en plus conscience que ces journées d’actions syndicales sont totalement stériles et que ce type de "lutte "ne sert à rien.
… vise à faire oublier les leçons essentielles de la lutte contre le CPE
C’est justement parce qu’une réflexion en profondeur est en train de mûrir dans les rangs ouvriers autour de la question "comment lutter ? " que toute la classe politique et ses syndicats visent aujourd’hui à empêcher un mûrissement de cette réflexion au sein de la classe ouvrière, surtout après la victoire remportée sur le CPE au printemps dernier. C'est justement parce que cette lutte constitue un pôle de référence majeur dans un contexte de développement de luttes à l'échelle internationale (voir notre article sur les luttes en Amérique latine en page 6) que la bourgeoisie tente de la gommer et de la dénaturer.
Ce que toute la bourgeoisie veut faire oublier, ce sont les leçons essentielles de cette expérience et de la solidarité entre les générations ouvrières qui s'y est exprimée. Ce que tous les partis politiques et les syndicats veulent nous faire oublier, c’est que seule une lutte massive, solidaire, unie de toute la classe ouvrière peut faire reculer le gouvernement et le patronat. Ce qu’a démontré le mouvement des étudiants contre le CPE, c’est que les jeunes générations de la classe ouvrière ont été capables de développer une lutte exemplaire en s’appropriant les méthodes de lutte du mouvement ouvrier. Seule la prise en charge du mouvement et de la solidarité active par les grévistes eux-mêmes, à travers la tenue d’assemblées générales ouvertes à tous les ouvriers, massives, souveraines où les décisions étaient discutées et prises collectivement, à travers l’élection de comités de grève et de délégués élus et révocables a pu freiner les attaques de la bourgeoisie. Ces assemblées générales massives ont été le véritable poumon de la lutte. C’est justement cette prise en main de leur lutte par les étudiants (et notamment l’envoi de délégations massives vers les entreprises pour aller chercher la solidarité des travailleurs sans attendre les "consignes" syndicales) qui a fait trembler la classe dominante. C'est parce que les étudiants et beaucoup de lycéens ont été capables de mettre de côté leurs revendications spécifiques, comme la réforme des diplômes au profit de revendications communes à toute la classe ouvrière : "Non au CPE ! Non à la précarité, aux licenciements et au chômage !" que leur mouvement a eu la force de faire reculer la bourgeoisie C’est aussi la solidarité des travailleurs qui se sont mobilisés dans les manifestations aux côtés des étudiants et lycéens en lutte contre le chômage et la précarité qui a obligé le gouvernement à retirer le CPE. Et c’est justement parce que la classe ouvrière est en train de réfléchir à l’efficacité des méthodes de luttes utilisées dans le mouvement contre le CPE que toute la bourgeoisie cherche à saboter cette réflexion en créant un maximum de confusion autour de la campagne électorale. Toute la classe dominante, et notamment ses syndicats, ses partis de gauche et d’extrême-gauche, veut maintenant nous faire croire que le mouvement des étudiants du printemps dernier n’était qu’une petite escarmouche et qu’il s’agit maintenant, pour les ouvriers comme pour les jeunes générations, de passer aux choses "sérieuses" : se préparer à aller voter chacun dans son coin contre l’"ultra libéralisme" et son homme de fer, Sarkozy.
Les jeunes générations, tout comme l’ensemble de la classe ouvrière ne doivent pas oublier que c’est la même rengaine qu’on nous avait servie en 2002 lorsqu’au deuxième tour des présidentielles, on nous avait appelés, manifestations à l’appui, à voter Chirac pour "faire barrage" à Le Pen et "sauver la démocratie". C’est ainsi que beaucoup sont allés remplir leur devoir de "citoyen "en votant Chirac au nom de la politique du "moindre mal ". En "battant " Le Pen, ils ont voulu "sauver la démocratie" et "protéger les immigrés". Depuis cette "victoire" électorale de 2002, notre belle démocratie française a amplement montré son vrai visage, celui de la dictature implacable du capital.
La classe ouvrière n’a pas à choisir entre ses exploiteurs. Elle n’a rien à gagner sur le terrain électoral. Il doit être clair que le duel Royal/Sarkozy qui s’ouvre aujourd’hui, de même que les dissensions au sein du PS ou de l’UMP, ne servent qu’à embrouiller la conscience des prolétaires pour les empêcher de se battre dès à présent sur leur propre terrain de lutte. Les ouvriers n’ont pas d’autre choix que de reprendre le chemin de la lutte massive, unie et solidaire entre tous les secteurs et toutes les générations .
La classe ouvrière doit garder en mémoire que la suppression du CPE, qui a empêché une aggravation supplémentaire de l’exploitation capitaliste, ne s’est pas gagnée au parlement mais dans les amphithéâtres universitaires, dans des assemblées générales ouvertes aux parents d’élèves, à tous les travailleurs, aux retraités, aux apprentis. L’expérience accumulée pendant des semaines de lutte par des dizaines de milliers de futurs travailleurs, leur éveil à la politique et leur avancée dans la prise de conscience de l’impasse que leur réserve le capitalisme sont un véritable trésor pour les futures luttes du prolétariat.
Sofiane (26 octobre)