Submitted by Révolution Inte... on
"Un autre monde est possible." Ce slogan nous le connaissons tous, il est devenu la marque de fabrique de ce fameux courant anti-mondialisation dans lequel la Ligue Communiste Révolutionnaire occupe, du moins en France, une place de choix.
C'est donc sans surprise que nous retrouvons cette profession de foi
dans le récent bouquin (Révolution ! 100 mots pour changer
le monde) du porte-parole de la LCR, Olivier Besancenot.
"…'un autre monde est possible'. Penser la révolution,
c'est commencer à expliquer quel type d'autre monde est possible."
C'est tout l'objet de ce livre et de ce point de vue, il faut bien l'avouer,
le défi est largement relevé. Bravo Monsieur Besancenot
!
Si ce dernier nous donne "100 mots pour changer le monde",
derrière chacun de ces mots, il en est un, seul et unique, qui
les résume tous : démocratie !
Voilà donc cette terre promise dont il nous fait un éloge
baveux tout au long de ses 320 pages.
Ainsi, la LCR nous offre son "alternative anti-capitaliste"
une "révolution…", certes, mais "… démocratique"
tout de même.
"L'accusation principale que nous lançons contre la démocratie
libérale, c'est que précisément les choix politiques,
sociaux et économiques échappent à la volonté
populaire." La perspective de lutte est alors toute tracée,
il faut conquérir la "vraie démocratie" confisquée
par les méchantes multinationales. Et pour les mécréants
ou autres Saint Thomas, récalcitrant aux sirènes démocratiques
de la LCR, Monsieur Besancenot les rattrape au collet en leur servant
sur un plateau la preuve irréfutable que ce "chambardement
démocratique" est le seul avenir possible en exhibant fièrement
la ville mythique du mouvement anti-mondialisation : Porto Alegre. "C'est
une ville du sud du Brésil, Porto Alegre, dirigée par
la gauche du Parti des travailleurs, qui a rallumé la flamme
des espérances démocratiques (…) Porto Alegre pratique
la démocratie participative. Depuis plus de dix ans, (…)
la municipalité laisse à la population le soin de décider
de l'utilisation du budget de la ville."
Mais c'est justement à travers l'exemple de Porto Alegre que
l'on s'aperçoit le mieux de toute la supercherie échafaudée
par les gauchistes de l'alter-mondialisme. La démocratie participative
dans cette "ville laboratoire" (et ce "depuis plus de
dix ans" !) ne correspond en rien à la remise en cause du
système capitaliste mais se résume simplement à
la participation de la population à la gestion de la misère
et de la pénurie engendrée par ce dernier.
De plus, il ne s'agit là, dans le fond, que d'une resucée
des mystifications autogestionnaires dont les ouvriers, notamment en
Europe dans les années 1970, ont fait les frais puisqu'elle s'est
révélée n'être qu'une gestion de leur propre
exploitation et non sa remise en cause. Ce n'est pas par hasard si Besancenot
nous ressort l'exemple de la lutte des ouvriers de Lip en 1973 et son
slogan, inspiré par les syndicalistes de la CFDT : "On contrôle,
on fabrique, on vend, on se paie." Ce que les trotskistes présentent
comme le summum de l'émancipation ouvrière, la démocratie
directe ou autogestion, est en fait une arme de la bourgeoisie contre
le prolétariat. Ce que le CCI a résumé dans le
point 12 de sa plateforme :
"- arme économique du capital, [l'autogestion] a pour finalité
de faire accepter par les travailleurs le poids des difficultés
des entreprises frappées par la crise en leur faisant organiser
les modalités de leur propre exploitation.
- arme politique de la contre-révolution, elle a pour fonction
:
de diviser la classe ouvrière en l'enfermant et l'isolant usine
par usine, quartier par quartier, secteur par secteur ;
d'attacher les travailleurs aux préoccupations de l'économie
capitaliste qu'ils ont au contraire pour tâche de détruire;
de détourner le prolétariat de la première tâche
qui conditionne son émancipation : la destruction de l'appareil
politique du capital et l'instauration de sa propre dictature au niveau
mondial."
En fin de compte, la tentative de la LCR n'est ni plus ni moins que
de distiller la perspective révolutionnaire de la classe ouvrière
dans le vieil alambic réformiste, d'enrayer sa conscience en
lui faisant croire qu'elle peut atteindre pacifiquement son émancipation
dans une sorte de nirvana démocratique sans remettre en cause
violemment les fondements même de la société capitaliste.
"Les révolutionnaires sont favorables aux réformes,
tout progrès, toute amélioration pour la majorité
de la population, toute nouvelle conquête sociale et démocratique
est bonne à prendre. Nous ne sommes pas partisans du tout ou
rien." Voilà qui est clairement énoncé et
illustre le "projet révolutionnaire" de Monsieur Besancenot
: "redonner un sens à la démocratie".
Et après cela, la LCR ose encore se prétendre l'héritière
de Trotsky ! Mais il n'existe pas de pire insulte pour celui qui fut
l'une des plus grandes figures de la Révolution russe, l'organisateur
de l'insurrection et de la prise de pouvoir de la classe ouvrière
en Octobre 1917.
Amender le capitalisme, le rendre plus humain en le rendant "plus
démocratique" alors qu'il est devenu, depuis son entrée
dans sa phase de décadence annoncée par le déclenchement
de la première boucherie mondiale de 1914-1918, une menace permanente
pour l'humanité, est un piège dans lequel la LCR (entre
autres) souhaite voir le prolétariat s'empaler.
Non content d'orienter les ouvriers vers une lutte stérile pour
l'amélioration de ce système, les trotskistes de la LCR
ajoutent l'appel à la défense de la démocratie,
non seulement contre les vilains patrons "qui braquent la démocratie
comme on braque une banque" mais aussi contre les courants néofascistes
qui "ne tolèrent aucune forme d'expression démocratique".
Comme si les ouvriers avaient quelque chose à défendre
dans ce monde, des acquis à préserver. Besancenot pense
notamment au suffrage universel qui serait "un acquis démocratique
précieux", c'est pourquoi "il mérite qu'on ne
le boude pas, la LCR se présente donc aux élections"
et en profite par la même occasion pour entretenir dans la classe
ouvrière les pires illusions sur la nature de ce monde. Les "élections
démocratiques" ne sont en réalité que la feuille
de vigne servant à masquer la dictature du capital.
"La démocratie est en danger ! Vite ! Prenons les armes
pour nous porter à son secours". Autant demander au prolétariat
de se suicider. La démocratie n'est qu'une forme (la plus efficace
d'ailleurs) de la dictature qui réprime la classe ouvrière
et défend la bourgeoisie et ses privilèges de classe exploiteuse.
C'est ce que rappelle Lénine dans ses Thèses sur la démocratie
bourgeoise et la dictature du prolétariat écrites en mars
1919 pour le premier congrès de l'Internationale Communiste :
"…dans aucun pays civilisé, dans aucun pays capitaliste,
il n'existe de démocratie en général : il n'y a
que la démocratie bourgeoise." et "…plus la démocratie
est évoluée, 'pure', (…) plus le joug du capitalisme
et la dictature de la bourgeoisie se manifeste dans toute leur pureté."
"Ainsi, il se confirme une fois de plus, de façon absolument
évidente, que tous ces cris en faveur de la démocratie
ne servent en réalité qu'à défendre la bourgeoisie
et ses privilèges de classe exploiteuse." C'est exactement
le cas de Monsieur Besancenot, de son organisation, et du mouvement
anti-mondialiste dans lequel il s'inscrit. Leur objectif est clair,
dévoyer la classe ouvrière de son terrain, lui faire perdre
son identité, son histoire, celle d'une classe révolutionnaire
dont la perspective est le communisme, en la gavant de guimauve interclassiste,
de lutte citoyenne pour la démocratie.
"Seattle a rassemblé des syndicalistes coréens, des
paysans sans-terre du Brésil, des étudiants des campus
américains, des féministes du Maghreb, des réseaux
de lutte pour l'annulation de la dette du Tiers-monde, des cinéastes
et même des défenseurs de tortues…" C'est l'"internationalisme
renaissant" qui "élargit ses horizons", c'est
vraiment le moins que l'on puisse dire ! Monsieur Besancenot est donc
fin prêt pour ériger l'internationale fourre-tout des "citoyens
du monde".
Comme tout groupe trotskiste, la LCR n'a de révolutionnaire que
les mots ! Besancenot veut faire croire qu'il joue au "chamboule
tout", notamment pour happer les éléments qui ressentent
une révolte vis-à-vis d'un système incapable d'engendrer
autre chose que misère et barbarie, mais en fait il ne chamboule
rien du tout. Bien au contraire, le rôle de la LCR, en tant que
"gauche authentique, une gauche 100% à gauche"…du
capital comme elle oublie chaque fois de le préciser, est de
masquer qu'un autre monde est à la fois possible et nécessaire
pour la survie de l'humanité et que cet avenir, c'est la classe
ouvrière exclusivement qui le porte dans le développement
de ses luttes.
Marx et Engels dès 1848 dans le Manifeste du Parti communiste
montraient déjà que "Les prolétaires n'ont
rien à perdre que leurs chaînes" qu'"ils ont
un monde à gagner", que ce monde, c'est le communisme et
qu'ils ne le gagneront que par le "renversement violent de tout
l'ordre social passé".