Depuis l’implosion de l’URSS, la guerre est revenue au premier plan dans cette partie du monde. Qu’il s’agisse de la situation en Tchétchénie, du déchaînement du militarisme entre la Géorgie et la Russie en 2008, ou de la tendance larvée dans plusieurs régions du Caucase à déraper vers le chaos, tous ces drames posent à la classe ouvrière et aux minorités politiques qui se réclament de son combat, la question de leur réaction envers la guerre impérialiste et les campagnes nationalistes permanentes.
Dans un forum en Ukraine en juillet 2009 dans lequel intervenait le CCI, une partie des discussions a abordé ce que la classe devrait faire en de telles circonstances. Différentes positions qui prétendent représenter les intérêts de la classe ouvrière, aux contenus très différents et parfois complètement antagoniques, y ont été développées. Nous laissons momentanément de coté (pour la traiter ultérieurement) la défense par de nombreux courants trotskistes et certains groupes anarchistes du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes qui prétend permettre de lutter contre l’impérialisme. Nous allons examiner les propositions faites au prolétariat contre les abominations de la guerre consistant à solliciter son soutien en faveur des actions pour la paix. Ainsi, lors du forum, partant du constat qu’« aucun conflit récent, que les autorités ont essayé de résoudre par la force, n'a jamais été réglé ; ni en Afghanistan, ni en Yougoslavie, en Irak ou en Tchétchénie », les participants, à l’exception de notre organisation qui s’est exprimée contre, ont majoritairement soutenu l’initiative du Moscow Helsinki Group for Northern Caucasus pour la création d’un ‘Centre Civil International pour le Rétablissement de la Paix’ à Grozny en Tchétchénie, « une structure spéciale, engagée dans l’investigation sur les causes du conflit »i pour élaborer des techniques internationales pour résoudre les ‘conflits gelés mais non réglés’.
Naturellement, l’aspiration à la paix existe au sein du prolétariat, d’autant plus que c’est la classe ouvrière qui paie toujours le prix le plus élevé de la guerre dans ses conditions d’existence et dans son sang. Comme classe dépourvue de toute propriété et de tout moyen de production dans la société capitaliste, le prolétariat ne dispose dans sa lutte que des armes de sa conscience et de son organisation. Dans son combat contre l’exploitation et contre la barbarie guerrière, il est pour lui vital de penser et d’agir de façon autonome pour défendre ses intérêts de classe spécifiques : la condition sine qua non pour s’affirmer contre l’Etat capitaliste comme force révolutionnaire agissant pour la défense de ses propres intérêts et comme classe porteuse de la perspective d’une nouvelle société, c’est d’accéder à une conscience claire des buts finaux de sa lutte et des moyens pour les atteindre : dans cette perspective, lui est-il possible d’intégrer à sa lutte les initiatives pacifistes et de leur apporter son soutien ? Lui est-il possible de faire progresser sa cause en prenant pour alliés ceux qui prétendent agir pour la paix ?
Suivons la logique des buts que poursuit la proposition pacifiste et examinons ce que peut en retirer la classe ouvrière dans son combat.
La paix, quelle paix ? Cette paix n’est absolument pas émancipatrice, c’est celle de la « normalisation » par la terreur imposée par la clique Kadyrov-Poutine. Elle s’établit sur les cadavres des 200 000 à 300 000 victimes des bombardements intensifs de Grozny en 1999-2000 et livre la population à l’arbitraire et aux rivalités meurtrières des clans mafieux des « Kadyrovtsy » et des forces du ministère de l’intérieur. La déstabilisation qu’a provoquée ce « conflit, longtemps circonscrit à la République même, [qui] a fini par développer des métastases dans les républiques voisine [et] semble se déplacer vers des républiques voisines, russe, l’Ingouchie et le Daghestan, »ii ne fait que préparer d’autres convulsions. La « normalisation » a conduit à une recrudescence de la violence dans toutes les républiques du Caucase, y compris là où il n’y a jamais eu historiquement de troubles antirusses par le passé. Depuis l'été 2009, les attentats, les embuscades et les fusillades se multiplient partout et sont devenus quotidiensiii à tel point que certains voient l’imminence d’une troisième guerre de Tchétchénie. Cette « paix » n’est rien d’autre que la paix des cimetières et ressemble plutôt à un état de guerre permanent !
Améliorer le sort des populations sur place ? La seule ‘amélioration’ possible dans le cadre de tout état national, pour les populations et les ouvriers, du fait de la crise économique et de la guerre au niveau international comme au niveau local se traduit par l’exploitation féroce, des sacrifices toujours plus grands imposés par la classe dominante pour la défense des intérêts du capital national, leur prise en otage par les différentes cliques bourgeoises dans leurs affrontements sanglants. De plus « en dépit d’une reconstruction de façade, la Tchétchénie est toujours en ruines, mise en coupe réglée par le clan Kadyrov, et le conflit (…) a engendré une génération de desperados qui n’ont rien connu d’autre que la guerre, des vagues de réfugiés et la diffusion d’un islam radical. (…) les infrastructures sont détruites, une génération entière de Tchétchènes n’a pas connu autre chose que le chaos et n’a pas été scolarisée. »ivUne partie de ces jeunes sans perspective condamnés au chômage continue à rejoindre les maquis de « boeviki » dans les montagnes. Le capital ne sera pas plus mesure ici qu’ailleurs d’apporter une solution au problème social à l’intérieur de ses seules frontières nationales !
Servir de ‘think tank’ pour la paix ? En quoi ce rôle revendiqué par le Centre se différencie-t-il de celui des organismes internationaux, tels l’ONU et autres ONG, avec l’effet que l’on sait ? L’histoire des 80 dernières années nous montre à quel point la Société des Nations, puis l’Organisation des Nations Unies ont non seulement été impuissantes à rétablir la « paix » où que ce soit, mais n’ont servi que de couverture idéologique aux nations instigatrices des guerres pour ensanglanter le monde. Peut-on s’imaginer qu’à jouer les bons offices à la manière de ces repaires de brigands impérialistes, sous le seul prétexte d’agir ‘local’ parce qu’« il n'est pas réaliste de traiter de Bruxelles ou de New York les problèmes des zones de conflit dans la région du Caucase du nord »v il puisse parvenir à un autre résultat ? C’est se condamner par avance à n’être que la marionnette aux mains d’intérêts qui ne sont pas ceux du prolétariat et à opérer contre les intérêts de ce dernier.
Permettre un arbitrage entre les protagonistes de la guerre ? Dans ce monde de gangsters bourgeois qui s’entredéchirent, où seule règne la loi du plus fort, il ne résulte que de la loi du vainqueur, du diktat du grand parrain qui impose ses conditions à tous les autres maffieux. Faire miroiter aux autorités de Grozny que la création du Centre est « une opportunité unique de montrer au monde qu’elles entreprennent tous les efforts pour mettre un terme au conflit, et qu’elles agissent pour le développement pacifique de la région » vi, constitue une belle proposition d’allégeance, et leur offre à bon compte la respectabilité dont elles ont bien besoin pour couvrir leurs crimes perpétrés au nom de la ‘paix’ et de la lutte contre le terrorisme !
Agir conjointement avec les autorités et les organisations publiques ? « Soumis aux présidents d’Ingouchie, de Tchétchénie et du Daghestan », le projet de Centre propose de s’acoquiner avec les sanguinaires cliques de Poutine, les bandes criminelles de Kadyrov et du soudard Beck-Evkurov, installées pour garantir par tous les moyens l’emprise impérialiste de la Russie sur le Caucase. Il racole en faveur d’une clique hystériquement belliciste qui défend que « la Russie doit se doter d’une stratégie militaire pour résister aux Etats-Unis et aux autres puissances occidentales, qui impulsent le désordre dans le Caucase du nord pour détruire la Russie » qui « devrait attaquer la Géorgie et l’Ukraine afin d’éradiquer pour de bon cette affliction qui touche la Russie » !vii Il n’y a aucun terrain commun possible entre la classe ouvrière et cette racaille nationaliste !
Décidément, le prolétariat n’a vraiment rien à gagner à soutenir ce type d’initiative pacifiste, mais tout à y perdre : non seulement elle condamne les ouvriers à l’impuissance mais elle ne fait que les pousser à pactiser avec l’Etat capitaliste, les amener poings et pieds liés à se soumettre au nationalisme de ses exploiteurs et à les faire entrer dans le jeu impérialiste de la bourgeoisie !
D’ailleurs, dans tous les moments cruciaux de la guerre impérialiste, le prolétariat a été confronté à la mystification pacifiste pour récupérer la crainte et l'aversion des ouvriers face à la guerre afin d’empoisonner leur conscience et les amener à soutenir un camp bourgeois contre un autre. Ainsi, par exemple, les gigantesques manifestations pacifistes de l’été 1914 à Paris n’ont-elles servi qu’à illusionner et démoraliser le prolétariat face au danger de guerre pour lui faire accepter son sacrifice dans les tranchées comme une fatalité. L’expérience du mouvement ouvrier montre que le pacifisme constitue le meilleur complice du bourrage de crâne belliciste. Il fait partie, comme chaque fois que la bourgeoisie a eu besoin de faire accepter aux prolétaires sa logique meurtrière, d'un partage du travail entre différentes fractions du capital.
La lutte pour la paix sans lutter pour la destruction du capitalisme a toujours constitué une tromperie maintes fois dénoncée par les révolutionnaires. La lutte contre l’impérialisme ne passe que par la lutte contre le système capitaliste dont il est indissociable. La classe ouvrière, lors de la Première Guerre mondiale, a fait la preuve d’une telle aptitude en Russie en 1917, en Allemagne en 1918 : en développant sa perspective révolutionnaire et ses organes de luttes, les conseils ouvriers, elle s’est affirmée comme la seule force capable de mettre un terme aux carnages guerriers perpétrés par la bourgeoisie et à offrir une perspective à la société humaine.viii Mais elle n’a pu faire aboutir son combat, non pas en le menant avec les "pacifistes" mais malgré et contre eux. A partir du moment où il devint clair que seule la lutte révolutionnaire permettait d'arrêter la boucherie impérialiste, les prolétaires de Russie et d'Allemagne se sont trouvés confrontés non seulement aux "faucons" de la bourgeoisie mais aussi et surtout aux pacifistes de tout poil (socialistes-révolutionnaires, sociaux-patriotes, etc.) qui, armes à la main, ont défendu le monde capitaliste au nom de ce qui leur est le plus cher : rendre inoffensive pour le capital la révolte des exploités contre la guerre.
Les seuls alliés sur lesquels la classe ouvrière peut compter dans son opposition à la guerre ce sont sur ses frères et sœurs de classe de chaque côté des frontières nationales, culturelles et religieuses, et la seule communauté d’intérêt c’est celle qu’elle partage avec eux, dans la lutte contre l’exploitation et pour la création d’une société véritablement humaine, débarrassée du profit capitaliste et de la guerre. C’est ce qu’a proclamé par exemple le KRAS (Confédération révolutionnaire des anarcho-syndicalistes) dans sa prise de position internationaliste lors de la guerre en Géorgie : « Ces combats n'apporteront rien aux travailleurs, qu'ils soient Géorgiens, Ossètes, Abkhazes ou Russes, rien d'autre que du sang et des larmes, d'incalculables désastres et privations. (…) Nous ne devons pas tomber sous l'influence de la démagogie nationaliste qui nous demande l'unité avec « notre » gouvernement et déploie le drapeau de la « défense de la patrie ». L'ennemi principal des gens simples n'est pas le frère ou la sœur de l'autre côté de la frontière ou d'une autre nationalité. L'ennemi, c'est les dirigeants, les patrons de tout poil, les présidents et ministres, les hommes d'affaire et les généraux, tous ceux qui provoquent les guerres pour sauvegarder leur pouvoir et leurs richesses. Nous appelons les travailleurs en Russie, Ossétie, Abkhazie et Géorgie à rejeter le joug du nationalisme et du patriotisme pour retourner leur colère contre les dirigeants et les riches, de quelque côté de la frontière qu'ils se trouvent. »ix Cette position correspond aux intérêts immédiats comme historiques de la classe ouvrière.
Cependant, tout en disant partager cette position internationaliste, certains participants au forum ont été perméables à des arguments dénigrant celle-ci comme « dogmatique » et « superficielle ». Cédant aux arguments qu’il faut « oser s’impliquer sur le terrain » et de « faire des choses pratiques pour changer les choses, d’agir même petitement, pour la paix » ils ont appuyé la proposition de création de Centre pour la paix. Considérant la position internationaliste « valable en principe », celle-ci, selon eux, « n’est pas formellement applicable à la Tchétchénie » et ne voient pas de contradiction à appuyer l’initiative du Centre, même si « elle ne peut fournir de réponse définitive sur le fond ». En s’engageant dans cette logique, les camarades se rendent-ils compte qu’ils répudient complètement leur dénonciation des Etats capitalistes et du nationalisme pour se retrouver à cautionner et à préconiser la collaboration avec ceux qu’ils condamnent (et donc à leur prêter main forte) ? Contrairement à ce que pensent ces camarades, cette initiative pacifiste ne forme pas pour le prolétariat une voie possible complémentaire à la lutte des classes ‘en attendant mieux’ ni ne créent ou préparent une dynamique pour sa lutte, mais le détourne de la lutte des classes et des buts du mouvement ouvrier. En répandant la mystification de l’existence au sein du monde bourgeois « d’une solution pour la paix », le pacifisme ne trompe pas seulement les ouvriers otages directs de la guerre sur place, mais également les prolétaires de tous les autres pays sur la signification des guerres, sur leurs responsabilités et les moyens de s’y opposer vraiment.
L’un des principaux arguments qui a permis d’emporter leur adhésion affirme que « se revendiquer de l’unité de la classe ouvrière n’a aucun sens alors qu’il n’y a pas de classe ouvrière en Tchétchéniex, comme partout ailleurs dans le Caucase ». Poser ainsi cette question sous l’angle uniquement national pose un important problème de méthode pour aborder le combat de la classe ouvrière et la perspective qu’elle renferme. C’est négliger, que pour la classe exploitée, par définition internationale du fait des conditions universelles qui lui sont imposées par le capitalisme au niveau mondial, la dimension de son combat (ainsi que toutes les questions qui s’y rattachent) est d’abord internationale. Si effectivement le drame de la Tchétchénie n’a pu avoir lieu qu’en raison de la faiblesse du prolétariat, incapable d’opposer un frein à la barbarie capitaliste, les révolutionnaires doivent avoir la lucidité de reconnaître qu’il n’existe pas de solution locale ou immédiate au drame de la guerre impérialiste. Le problème de la guerre se pose à la classe ouvrière d’un point de vue international, non pas local et d’un point de vue historique, non pas immédiat. Les révolutionnaires ont la responsabilité d’indiquer à leur classe la direction dans laquelle elle doit engager sa lutte. Pour cela, ils doivent s’appuyer sur la classe ouvrière au plan mondial, en particulier sur ses fractions les plus fortes et les plus expérimentées dans les grands pays d’Europe et d’Amérique, pour préparer à l’échelle internationale le développement politique de sa force et de son action afin qu’elle impose, par l’essor de sa lutte, la seule alternative viable aux guerres impérialistes, le renversement du système capitaliste par la révolution prolétarienne et l’instauration du Communisme au plan mondial.xi
Il est très important pour les internationalistes de tous les pays compte tenu de la prolifération des conflits militaires et de la domination de l’idéologie impérialiste pro-russe, que s’élève une voix internationaliste en ex-URSS. Dans la situation présente, ce n'est pas le succès immédiat qui importe. Il s'agit plutôt de parvenir à rester fermement à contre-courant de l’opinion publique et y compris, le cas échéant, de l'atmosphère empoisonnée régnant au sein de sa propre classe, pour être capable de s’opposer à la guerre et surtout de se lier aux réactions de classe du prolétariat. Séparée de la lutte des classes, la lutte contre la guerre ne peut que s’enliser dans un mouvement interclassiste, impuissant. Depuis 2008, l’aggravation sans précédent de la crise économique ne peut que provoquer la riposte du prolétariat et, à terme, des luttes massives, en Russie comme au niveau international. La lutte internationale de la classe ouvrière face à la crise de l'économie mondiale a le potentiel de devenir un mouvement apte, par un processus de politisation croissante, à intégrer la question de la lutte contre la guerre à la lutte des classes : c’est le même système qui l’exploite, la condamne à la misère et qui provoque les guerres et perpètre les massacres qui ensanglantent le monde et qui doit être détruit.
Svetlana
i International peacemaking centre to be set up in Northern Caucasus, May 23, 2009, "Caucasian Knot",
ii www.vie-publique.fr/eclairage [1]
iii Depuis la tenue du forum, « Entre juin et août (2009), 436 personnes ont été tuées, contre 150 pendant les mêmes mois en 2008. Et le nombre d’attentats a bondi de 265 à 452. (…) Des hauts fonctionnaires sont mitraillés à l’arme automatique, pris pour cible par des snipers (…) ou attaqués avec des véhicules bourrés d’explosifs. (…). Et les attentats- suicide sont de retour en Tchétchénie après une pause de plusieurs années. » https://www.nytimes.com/2009/08/30/world/europe/30chechnya.html?pagewanted=1&_r=3&hp [2]
iv www.vie-publique.fr/eclairage [1]
v Peacekeeping Center is proposed to establish in the North Caucasus, May 23, 2009, “Islamic News”.
vi Idem
vii Dixit Kadyrov [3] en décembre 2009.
viii Voir notre article, К 90-летию революции в Германии [4].
ix Prise de position du KRAS : NON À LA NOUVELLE GUERRE CAUCASIENNE ! Été 2008
x C’est faire peu de cas des ouvriers employés dans l’industrie du pétrole et du bâtiment !
xi Voir l’article Почему пролетариат есть коммунистический класс [5].
La traduction publiée ci-dessous est aussi disponible sur notre site en espagnol [8].
Nous saluons évidemment cette lette qui est une expression vivante de ce qu’est la solidarité ouvrière !
Bonjour camarades !
Nous vous écrivons ce texte depuis le district 43 de La Poste de Madrid. Nous sommes en tant que facteurs toute la journée dans la rue ; en tant que travailleurs, comme n’importe qui d'entre nous, nous habitons à des kilomètres de notre lieu de travail [ce sont d’ailleurs les patrons qui ont imposé les délocalisations, en obligeant les travailleurs à faire des déplacements de plus en plus éloignés et éreintants], ; c'est nous qui souffrons et payons, en tant que secteur public, le festin auquel le gouvernement a invité les banques ; nous sommes en train d’être privatisés, nous sommes aussi des travailleurs parfois en CDI, mais surtout précaires et à contrat discontinu, et, comme vous, travailleurs du métro, nous ne sommes même plus des fonctionnaires. Nous voulons vous envoyer notre soutien le plus déterminé, nous voulons que vous sachiez que nous sommes nous aussi obligés d’aller au boulot en bus en empruntant de plus longs trajets1, mais nous avons retrouvé le sourire aux lèvres pour la simple raison que vous avez démontré qu’on peut arriver à se défendre, qu’il n’y a pas de raison pour que nous soyons toujours et sans fin des victimes écrasées par cette pourriture de monde, vous nous avez rendu un peu de notre dignité perdue depuis si longtemps.
Nous voulons que vous sachiez que nous, qui parlons tous les jours avec des centaines de personnes à cause de nos postes de travail, savons parfaitement que l’image de votre mouvement n’est pas celle que donnent les médias : il y a des gens mécontents, mais il y en a aussi beaucoup que votre mouvement a rempli d’espoir, il y a des discussions partout dans les bus, dans les rues, dans les bars, il n’y a pas du tout une seul et unique réaction de condamnation unanime de votre grève.
Nous sommes avec vous, parce que vous nous donnez de l’espoir. Dans notre district, pendant notre travail, on peut entendre des commentaires : « C’est toujours les mêmes qui paient », auxquels d’autres répondent : « ça, c'est une lutte qui a des c... » ; il y en a qui disent : « Voilà ce que c’est qu’une véritable grève et non pas ces arrêts de travail bidon d’une journée ». Vous êtes en train de nous montrer la voie.
Nous apprenons avec vous. Des leçons comme, par exemple : les grèves se décident à main levée par les travailleurs, on ne décide pas à notre place, nous en avons plus que marre de nos syndicats, marre et plus que marre des mille et une fois où ils nous ont vendus et trahis.
Ainsi, nous finirons notre lettre en vous disant que nos cœurs battent plus vite depuis lundi, que nous sommes là pour faire front avec vous, que nous défendons votre grève partout où nous allons.
Ne vous laissez pas intimider, nous savons bien qu’Aguirre ou Zapatero, la COPE ou Prisa2, ont des intérêts à l’opposé des nôtres, on sait qu’ils ont l’habitude de nous attaquer. Ils savent ce qu’ils veulent, ils savent que des milliers de travailleurs ont le regard posé sur vous, parce vous êtes l’AVENIR et non pas le futur grisâtre qu’ils veulent nous vendre.
Si vous avez besoin de nous, sachez que nous sommes là ; en attendant nous continuerons à vous défendre face à tous ceux qui oseront vous dénigrer.
FACTEURS ET FACTRICES DU DISTRICT 43
1er JUILLET 2010.
1 Ces postiers font peut-être ici référence au fait que pendant la grève, le gouvernement a mis en place un service de bus alternatif pour transporter les gens dans des conditions que le pouvoir a exploitées jusqu’à plus soif contre les grévistes du métro.
2 La COPE est la radio de droite et Prisa l’entreprise de communication de gauche (El País, …)
Les deux traductions ci-dessous ont d’abord été publiées sur notre site en langue espagnole [11].
Ils font écho à notre article « Espagne : Solidarité avec les travailleurs du métro de Madrid [12] » publié dans Révolution internationale nº 415 de septembre 2010.
Présentation du CCI
Nous publions ci-dessous un commentaire écrit par les camarades du CREE (Colectivo Revolucionario Espartaquista Estudiantil) sur la grève du métro de Madrid de la fin juin, une grève déclenchée en riposte aux réductions salariales généralisées et imposées par les différentes administrations gouvernementales quelle que soit leur couleur politique, et dans ce cas concret par celle de la région de Madrid.
Nous voulons, en premier lieu, saluer ce texte parce qu’il met au centre de la lutte l’activité des travailleurs eux-mêmes, leur effort pour la prendre en charge, pour avoir confiance en leur propres forces, en essayant de dépasser la forme de « lutte » syndicale, qu’elle soit radicale ou pas, parce qu’elle restera toujours emberlificotée dans les filets de la légalité bourgeoise.
Cette prise de position du CREE sur la grève du métro doit servir, à notre avis, à ce que d’autres camarades et d’autres collectifs prolétariens puissent aussi débattre sur cette question, sur la préparation de nouvelles luttes, pour la recherche de la confiance dans nos propres forces ; voilà un débat que nous devons tous encourager. Et dans ce sens, nous voudrions déjà faire deux remarques concernant le texte du CREE qui pourront servir à stimuler cette discussion :
1) La force d’une lutte n’est pas basée nécessairement sur une radicalité de la grève définie en tant que blocage de la production ou des services, mais dans la recherche d’une unité qui doit se forger avec l’extension et la solidarité, dans le développement d’un rapport de forces face à l’État bourgeois. Dans la période actuelle, avec l'accumulation de stocks invendables, l’arrêt de la production dans telle ou telle usine ne signifie pas forcément une menace pour la bourgeoisie, surtout, si elle n’est pas accompagnée de la solidarité et de l’unité de la classe telles qu'elles étaient conçues dans les expériences passées. Lors des grèves dans les services, comme on a pu le constater lors de celle du métro madrilène, le blocage total du service s’est retourné contre les travailleurs, dans la mesure où cette lutte est restée isolée. Lors de cette grève, le fait d’aller contre le service minimum exprimait la volonté et la tentative de briser le carcan dans lequel la loi de l’Etat et des syndicats essaye d’enfermer et d’isoler les luttes. Mais dans la recherche d’une lutte efficace, une lutte qui possède la force d’imposer les revendications, le fait de rester figés dans le mot d’ordre de ne pas respecter le service minimum, le mot d’ordre de grève totale mais dans l’isolement, n’a pas été la force de la lutte mais sa faiblesse ; cela a prêté le flanc au fait que la propagande de la bourgeoisie a réussi à opposer les intérêts des autres travailleurs et de la population à ceux des ouvriers du métro de telle sorte que ceux-ci sont restés isolés.
2) Une autre précision que nous voudrions apporter concerne ce que les camarades du CREE appellent le Front unique prolétarien. Même si nous comprenons qu’avec cette expression, les camarades du CREE appellent à l’unité de la classe ouvrière, à notre avis, le concept de « front unique » fait référence à une unité qui se construit sur la base d’organisations et dans le cas qui nous occupe, des syndicats ; autrement dit, on fait référence à l’unité syndicale. Mais l’unité de la classe ouvrière est le produit de sa solidarité, de sa nature de classe, du fait qu’en son sein il n’existe pas d’intérêts divergents ; tandis que l’unité syndicale est le produit des magouilles et des arrangements pour la distributions de privilèges et des « places », etc., souvent avec l’objectif de tromper la classe ouvrière et d'empêcher précisément que celle-ci construise sa véritable unité dans des assemblées générales ouvertes et avec les organes issus de ces assemblées et révocables à tout moment.
CCI - 16 août 2010
Les caisses de l’État grec ont reçu il y a quelques mois un apport non négligeable de milliards d’euros de la part du FMI et une aide de la BCE pour pallier à la crise de la dette que ce pays a cumulé pendant la période de prospérité économique. Ce n’était évidemment pas le pays le plus puissant, ni le plus riche, même pas le plus intéressant médiatiquement de tous les pays qui composent l’Union Européenne ; mais il était au bord de la banqueroute et il fallait le sauver coûte que coûte pour empêcher que l’Euro ne se trouve plongé dans un coma profond. A partir de ce moment-là, tel un château de cartes construit avec des mains tremblantes, d’autres pays ont commencé à chuter. L’alarme a sonné pour la Hongrie : le feu y a été éteint paraît-il. L’État espagnol, quant à lui, est depuis des mois le point de mire des spéculateurs, qui ont déjà fait un assaut contre lui. L’Italie ne parvient pas à renverser sa situation d’hyper-endettement. Nous nous trouvons dans cette nouvelle période de la crise, marquée par l’endettement des Etats, pressés par l’urgence du paiement des crédits qui arrivent à échéance. L’État capitaliste est en manque de ressources, et c’est maintenant la classe ouvrière (avec cette rengaine suivant laquelle « nous sommes tous fautifs ») qui va servir de caution au remboursement des dettes. Les différentes politiques d’austérité qui parcourent la planète du Nord au Sud ne fonctionnent qu’avec cette logique.
24 juin, en France, des dizaines de milliers de personnes ont parcouru les rues pour protester contre les réformes imposées par l’administration Sarkozy, incluses dans un plan d’austérité si particulier qu’il ne dit pas son nom. 25 juin en Italie : des centaines de milliers de personnes se mobilisent contre les réductions des budgets publics, le gel salarial et la réforme des retraites. 29 juin, en Grèce : énième grève générale qui débute le même jour où commencent les discussions au parlement sur la nécessité d’imposer de nouvelles mesures qui puissent permettre au pays de respecter les conditions imposées au moment de l’octroi des crédits quelques mois auparavant par le FMI. Ce même jour, lors d’une assemblée générale, les travailleurs du métro de Madrid décident d’appeler à une grève totale où l’on n’accepte pas le service minimum imposé par la région de Madrid.
En balançant par-dessus bord une convention collective qui va jusqu’en 2012 et donc sa propre légalité, le pouvoir exécutif régional madrilène, décide d’imposer une réduction salariale de 5% aux travailleurs du métro, en s’alignant sur les mesures imposées aux salaires de tous les fonctionnaires par le gouvernement central de Zapatero (voilà donc enfin trouvée la « différence » que certains proclament entre la « gauche » et la droite). Au delà de la réduction salariale imposée, les luttes ont surgi comme réponse justement, à la rupture unilatérale de ce qui avait été signé lors de la convention collective, ce qui voulait dire rupture de la négociation traditionnelle sur les conditions de travail, en fomentant ainsi une négociation au cas par cas. À la suite de cela, une grève fut donc décidée pour protester. La région décida alors d’exiger 50% de service minimum. Et les travailleurs, dans une action courageuse que l'on n’a pas vu depuis longtemps, décidèrent en assemblée de ne pas respecter ledit service minimum. Les 29 et 30 juin, dans Madrid aucun métro n’a circulé, malgré le fait que le ministère de l’Intérieur ait mis des milliers de policiers à la disposition de la région. Les piquets de grève réussirent à mener à bien avec succès leur action malgré les pressions du patronat et de la région de Madrid.
Dans la mesure où aujourd’hui il nous est très difficile de comprendre ce qui se passe, si ce n’est par le biais des moyens de (des)information, beaucoup de gens sur tout le territoire espagnol ont ressenti comme une agression ce qui n’était qu’une action de légitime défense de la classe ouvrière face à un nouveau « decretazo »1 qui sapait ses conquêtes historiques. Les mass media, s'en sont donnés à cœur joie dans une protestation unanime contre ce prétendu « acte de vilénie » de ces « travailleurs privilégiés » du métro, en n’hésitant pas à criminaliser toutes leurs revendications et en y mettant tous les moyens à leur disposition. En premier lieu, ces média ont ignoré le besoin d’approfondir les causes du conflit social pour ainsi donner aux lecteurs une vision un peu plus complète et moins simpliste de la situation réelle. Les problèmes des usagers du métro à la recherche de nouveaux moyens de transports pour se déplacer étaient bien plus importants que les assemblées ouvrières. Les voix des usagers mécontents étaient bien plus importantes que celles des travailleurs mécontents qui voyaient comment leurs droits étaient bafoués. Pas question de traiter d'une convention collective dont laquelle se moquait la présidente de la région, mais d’une « simple » réduction de salaire face à laquelle ces malotrus de travailleurs du métro de Madrid trépignaient comme des enfants gâtés en réclamant le maintien de leurs « privilèges ». Pour charger la mule, les media n’ont pas hésité à identifier les travailleurs d’une entreprise privée avec les fonctionnaires publics. Ils ont répété jusqu’à la nausée qu’ils étaient des fonctionnaires auxquels il fallait appliquer la même mesure qu’aux autres, et que, par conséquent, leur lutte était injustifiée. Ils se moquaient d’utiliser là un mensonge patent, il s’agissait surtout d’éviter que l’exemple ne s’étende. Voilà comment agissent les messagers des la Société de la (des)Information.
En deuxième lieu, ils n’ont pas hésité à fabriquer l'image d’une grève totalement incontrôlée, en utilisant l’adjectif « sauvage ». Il aurait suffi que quelqu’un d’une rédaction se soit renseigné un tant soit peu pour savoir que « sauvage » veut dire toute grève appelée par les travailleurs sans compter avec (et presque toujours contre) les syndicats. Une grève n’est pas sauvage parce qu’elle n'a pas tenu compte du service minimum imposé. Une grève n’est pas une grève s’il y a du service minimum, ce n’est qu’une pantomime.
La campagne hystérique de harcèlement et de criminalisation menée aussi bien par les media que par les différentes organisations et partis politiques bourgeois réussit à créer un malaise chez les ouvriers en grève, qui ont fini par se soumettre à la pression exercée par les appareils du gouvernement et des média. C’est ainsi qu’on comprend que les mobilisations ultérieures aient respecté un service minimum parfaitement abusif. Oui, le patronat a accepté de s’asseoir à la table du dialogue le 10 juillet. Mais, au jour d’aujourd’hui, il n’y a pas le moindre accord et il y a toujours la menace de 2000 mises à pied disciplinaires pour non-respect du service minimum les 29 et 30 juin. La réduction de 5% est passée à 1,5%, mais les travailleurs restent sanctionnés et la Convention collective est passée à la trappe.
La grève des travailleurs du métro de Madrid est un exemple. C'est un exemple pour tous les travailleurs d’Espagne. La conscience de l’union et la solidarité de classe a été plus forte que les estampilles des syndicats, qui ont été contraints de créer sous leur sigle des organes de lutte collectifs, même si ceux-ci sont antagoniques aux nôtres. On a récupéré la méthode par excellence de l’organisation ouvrière : les assemblées générales, le germe des futurs conseils ouvriers, là où les ouvriers s’expriment et prennent des décisions, des organes de la véritable démocratie ouvrière. De plus, on y a confronté de manière directe ce que veut dire l’amputation du droit de grève, passant outre le service minimum, ce qui a été l’expression légitime de la nature de la grève : la condition requise pour qu’une revendication aboutisse est celle d’arriver à ce que le blocage de ton activité ait une répercussion suffisante.
On doit tenir compte cependant du fait que la solidarité de la classe ouvrière, condition sine qua non pour faire aboutir les revendications ouvrières et ainsi affronter l’isolement que les forces bourgeoises essayent toujours d’imposer, a été faible et insuffisante, même si elle a existé de façon minoritaire. Et ceci non pas seulement à cause du bombardement idéologique auquel on nous a soumis, mais aussi parce que la propagande a été négligée de la part des travailleurs du métro madrilène, de sorte que l’activité des piquets d’information n’est pratiquement pas sortie des sous-sols. La nécessité impérative de sortir dans la rue et de combattre les calomnies qui y circulaient a été encore plus à l’ordre du jour que jamais, mais elle a été délaissée et à cause de cela, on n’a pas pu obtenir le véritable soutien des autres branches de travailleurs. Si on avait réussi à se lancer dans cette activité de propagande, peut-être qu’aujourd’hui on pourrait parler d’une table de négociations favorable aux travailleurs et même de quelque chose de plus grand encore.
Et c’est justement pour cela, parce que le soutien n’a pas pu être obtenu et qu’il n’y a pas eu de grèves de solidarité, que les ouvriers du métro n’ont pas tardé à se sentir coupables, presque comme s'ils étaient de véritables bandits, se soumettant très tôt à la grève avec un service minimum imposé, ce qui n’a servi qu’à étouffer leurs revendications. La mobilisation s’est, dès lors, affaiblie et on n’a rien pu faire pour retrouver les revendications initiales de respect de la convention collective. Le mot d'ordre « Nous allons faire exploser Madrid » a fait un "flop", mais il ne faut pas perdre courage. Madrid n’est qu’un premier pas dans la récupération des meilleures traditions de la lutte ouvrière dans cette nouvelle période de montée de la combativité prolétarienne. Le Front unique prolétarien que le CREE défend a trouvé une concrétisation dans cette lutte sans qu’il fût nécessaire d’en faire la propagande. Ceci nous encourage à continuer à travailler parce que nous sommes sur la bonne voie. Nous envoyons d’ici notre soutien aux travailleurs madrilènes du métro, qui nous ont donné une première leçon importante de la façon dont la classe ouvrière pourra un jour s’affronter à l’ordre social bourgeois qui nous est imposé.
1 Le CREE fait ici référence au décret du gouvernement Zapatero sur les mesures d’austérité mises en pratique en mai 2010. Le fait d’utiliser le terme dérivé plus populaire « decretazo » veut dire quelque chose comme recevoir un coup de décret derrière la tête.
De spectaculaires nouvelles ont été relayées dans la presse : le rapprochement avec le gouvernement Yanoukovitch et la signature d’un accord permettant la présence de bases militaires russes à long terme en Ukraine ; la signature d’un contrat avec Ankara pour la construction d’une centrale atomique russe à Akkuyu au sud de la Turquie ; la visite « fraternelle » de Medvedev en mai en Syrie et les rumeurs que l’élimination du gouvernement de Bakiev au Kirghizistan serait complètement en faveur de Moscou. Cette succession d’événements a produit la forte impression que l’impérialisme russe gagne de plus en plus du terrain. Est-ce bien vrai?
Sans doute, la situation des années 1990 est-elle révolue. La Russie avait connu alors un affaiblissement énorme. Elle avait perdu tous ses anciens états satellites, et, à l'intérieur, sous Eltsine, s’était ouverte une ère de fonctionnement ouvertement mafieux après 1989. L'État russe était soumis à l’urgence de replacer les affaires intérieures et extérieures sous le contrôle de son appareil. L’arrivée au gouvernement de la fraction bourgeoise autour de Poutine en 2000 était significative de l’effort de restaurer les forces de l'État en Russie et au profit de sa politique impérialiste.
Mais est-ce que pour autant les succès remportés par la Russie autorisent à parler d’une marche en avant victorieuse de l’impérialisme russe ? Certainement pas ! En réalité, la Russie se trouve aujourd'hui dans une lutte désespérée contre l’instabilité dans la région de l’ex-bloc de l’Est. La perte de contrôle et l’instabilité constituent une tendance générale dont surtout les USA, premier gendarme du monde, souffrent le plus fortement. Il n’est pas possible à la Russie, qui aspire à maintenir son rôle de leader dans la région, de durablement profiter de l’affaiblissement des USA parce qu’elle elle ne peut pas non plus échapper à cette dynamique internationale du « chacun-pour-soi ».
A première vue, le renversement du gouvernement au Kirghizistan en avril 2010 peut sembler un point marqué par la Russie dans le jeu impérialiste : la clique gouvernementale de Bakiev ayant rompu la promesse faite à la Russie de fermer la base militaire américaine installée dans le pays, on peut facilement penser que la nouvelle clique gouvernementale d’Otunbaïeva s’installe au pouvoir avec le soutien officieux de la Russie pour prendre sa revanche sur Bakiev qui a manqué à sa parole. Mais la situation au Kirghizistan se présente de façon beaucoup plus complexe. Il n’est pas possible de la réduire à une lutte entre fractions bourgeoises interposées inféodées à la Russie et aux USA, comme on l’a classiquement connu dans nombre de pays du Tiers-monde lors de la guerre froide. Et il est faux de s’imaginer qu’avec le renversement du gouvernement Bakiev la mise est remportée par l’impérialisme russe pour un bon bout de temps, et que la situation va se calmer.
Ce qui se manifeste au contraire au Kirghizistan, c’est une extension du chaos et des luttes entre cliques nationales. L’impérialisme russe est loin de sortir « grand vainqueur » de la situation. Avec les tensions au Sud du pays, dans la région de Djalalabad et Och, une instabilité ouverte se développe aux portes de la Russie dans un pays-frontière avec la Chine - un impérialisme de plus en plus agressif. Le Kirghizistan constitue déjà une importante voie d'accès des produits chinois sur le marché de la CEI. Mais même si la Russie et la Chine sont fondamentalement d’implacables rivaux impérialistes pour gagner de l’influence au Kirghizistan, ils ont dans cette région un souci commun : la crainte que des conflits incontrôlables entre cliques régionales qui se manifestent par des pogromes ethniques, comme actuellement au Kirghizistan, s’étendent aussi à d'autres républiques voisines multiethniques. Et sans doute, même les USA ne vont pas accepter que leur présence militaire au Kirghizistan soit remise en question! Finalement le Kirghizistan forme un pays de plus en plus difficile à gouverner du fait de l’absence d’une bourgeoisie nationale unie. Et il forme maintenant exactement un exemple du danger de perte de contrôle que craignent les grandes puissances impérialistes. Les événements sanglants de juin a Och ont montré clairement la situation délicate de l’impérialisme russe : appelé à l’aide militairement par le gouvernement de Otunbaïeva pour juguler le chaos, la Russie hésite et ne veut pas s’enliser dans un second Afghanistan. Indépendamment de la question des cliques locales au pouvoir, il est pour la Russie, fortement ébranlée par la crise économique, difficile, du fait des coûts financiers énormes à engager que cela suppose, d’intervenir pour maintenir son influence. Mais cette politique indispensable aux intérêts du gendarme impérialiste régional se prépare à être sabotée aussi par les autres rivaux régionaux de la Russie : ce n’est pas par hasard si un petit requin impérialiste régional comme le gouvernement de Loukachenko en Biélorussie a immédiatement essayé de pousser les feux par l’asile offert à Bakiev déchu.
Sans aucun doute, les élections de février 2010 en Ukraine ont mis au pouvoir une fraction de la bourgeoisie plus ouverte envers la Russie. En avril, l’Ukraine a contracté un accord significatif avec la Russie garantissant jusque 2042 la présence militaire russe à Sébastopol et de massives remises économiques pour les livraisons de gaz russe à l’Ukraine jusque 2019. En juin, l’Ukraine a pris la décision de stopper les plans d’entrée dans l’OTAN, portés surtout par l’ex-gouvernement de Youchtchenko. Les relations avec l’Ukraine sont loin de permettre à la Russie de pavoiser et montrent le dilemme qui se présente à la Russie.
Même si l’Ukraine est fortement ébranlée par la crise économique et a besoin d’assouplissements financiers immédiats, l'État ukrainien ne se réfugie ni définitivement dans les bras puissants du grand frère – ni sans contreparties offertes par la Russie. La Russie doit rémunérer le bon-vouloir temporaire du gouvernement de Yanoukovitch à coups de milliards de réductions négociées du prix du gaz, ceci seulement pour maintenir sa présence militaire dans le port de Sébastopol. Mais les véritables ambitions et nécessités impérialistes de la Russie envers l’Ukraine sont beaucoup plus importantes que ce qui vient d’être fixé avec le nouveau gouvernement. Du point de vue géographique, l’Ukraine représente un lieu de passage pour l’exportation du gaz russe vers l’occident, dont l’économie russe dépend énormément. Pour éviter cette dépendance vis-à-vis de l’Ukraine (et même de la Biélorussie) la Russie est obligée d’entreprendre des projets de contournement très onéreux comme le pipeline Northstream.
Pour la Russie, une relation stable à long terme avec l’Ukraine est une nécessite, pas seulement sur le terrain économique du transport du gaz, mais surtout sur le terrain géostratégique pour sa protection militaire. Mais l’Ukraine, avec sa bourgeoisie très divisée, ne forme pas du tout un partenaire stable et le gouvernement de Yanoukovitch n’offre aucune garantie à long terme. Si la fraction autour de Timochenko reconquiert le gouvernement, de nouvelles frictions ne se feront pas attendre. Pour la bourgeoisie ukrainienne, fondamentalement mue par ses intérêts nationaux propres, l’orientation de sa politique présente n’a rien à voir avec une profonde histoire d’amour avec la Russie. Ce sont la faiblesse de l'Union européenne, qui fait que le rapprochement avec celle-ci n’est aujourd’hui pas encore une option pour la bourgeoisie ukrainienne, l’urgence économique et la chasse à l’énergie la moins chère, qui la poussent à ce cours typique de l’impérialisme d’aujourd’hui : caricaturalement immédiatiste, instable et dominé par le chacun pour soi.
Même si, lors de la guerre contre la Géorgie en 2008, l’impérialisme russe a gagné du terrain et contrôle de nouvelles zones géographiques, comme l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie, et si leur enlisement en Irak et en Afghanistan n’a pas permis aux États-Unis d’intervenir en faveur de leur « amie », la Géorgie, la situation de la Russie ne s’est nullement consolidée dans le Caucase. La Russie n’a pas pu vraiment mettre à profit l'affaiblissement américain. Cette guerre a fondamentalement été le signe d’une nouvelle étape dans les confrontations impérialistes, parce que, pour la première fois depuis l’effondrement des blocs en 1989, les vieux rivaux USA et Russie s’affrontaient à nouveau directement.
Mais cette guerre a aussi montré clairement qu’il est complètement faux de penser dans la situation actuelle de l’impérialisme qu’une guerre produise automatiquement un vainqueur et un vaincu. Finalement cette guerre n’a produit que des perdants. Non seulement du côté de la classe ouvrière (qui est dans chaque confrontation impérialiste le perdant de tous les côtés !) mais aussi parmi les impérialismes impliqués. La Géorgie est affaiblie ; les États-Unis ont perdu de leur influence dans la région et massivement de leur prestige de « big brother » sur qui on peut compter ; la Russie est confrontée à une aggravation du chaos impossible à maîtriser dans le Caucase.
Outre la nécessité de défendre ses intérêts économiques et stratégiques immédiats, l’agressivité de l’impérialisme russe possède aussi une dimension historique. Fondée sur une extension territoriale permanente depuis les premiers temps du tsarisme, la Russie est aujourd'hui rejetée dans ses limites territoriales du 18ème siècle – ravalée à une situation d’affaiblissement historique que la bourgeoisie ne peut pas accepter.
Dans beaucoup de régions du Caucase, territoires officiels de la Fédération de Russie, comme le Daghestan ou l’Ingouchie, les forces armées de l’impérialisme russe jouent plus le rôle d’une force d’occupation que d’un appareil d'État à l’autorité bien enracinée. Mais la situation dans cette région se présente encore une fois d’une façon plus complexe : la police et l’armée russe agissent de façon extrêmement brutale, mais finalement impuissante contre les multiples clans locaux qui s’affrontent.
Les attentats en mai dernier à Moscou, non loin du siège des services secrets et à Stavropol montrent clairement que des actes terroristes provoquent directement l’autorité de l’appareil d'État russe. Les efforts actuels d’augmenter les prérogatives des services secrets russes (le FSB) ne sont pas un signe de la force mais de la peur de la bourgeoisie. La situation dans le Caucase du Nord où la Russie se trouve en état de guerre quasi-ouverte sur son propre territoire national – c'est-à-dire face à une situation de perte de contrôle risquant en permanence de s’étendre et de servir d’exemple pour entrainer d’autres cliques locales dans la contestation – recèle une dynamique d’affaiblissement pour la Russie. Une telle situation forme une spécificité de la Russie, que les autres grands rivaux impérialistes comme les USA, l’Allemagne ne connaissent pas ou bien à un moindre degré, comme la Chine. Même si l’impérialisme russe s’efforce de surmonter la crise historique qu’il a connu avec l’effondrement de l’organisation stalinienne du capitalisme d'État, le développement des forces centrifuges dans sa zone d’influence historique demeure et s’aggrave toujours plus.
Toute la situation dans la zone d`influence de la Russie forme un exemple typique de l’impasse et de l’irrationalité du capitalisme. Même en se militarisant toujours davantage, la bourgeoisie n’est plus en mesure de contrôler son propre monde.
Mario (29. 6. 2010)
Depuis de nombreuses décennies deux gangs rivaux de la classe capitaliste sont occupés à répandre le sang de la population exploitée de Jammu et du Cachemire, au nom de « l'unité nationale», d'une part et de la «libération» du Cachemire, d'autre part. Aussi, cela fait longtemps que cette «vallée des roses» s'est transformée en vallée de la mort, de la dévastation, de la misère et du chaos. Des centaines et des milliers de personnes ont été violemment déracinées et contraintes de fuir le Cachemire soit par le biais d'un processus de nettoyage ethnique à l'encontre des hindous du Cachemire soit en terrorisant la population musulmane en recherche de subsistance. Les séparatistes et l'Etat Indien ont toujours essayé de nier l'existence même de la classe ouvrière et d'étouffer ses luttes avec la mystification selon laquelle il n'y aurait qu'une seule lutte au Cachemire, celle qui oppose ces deux gangs sanglants.
Et pourtant, le fait est que la classe ouvrière au Cachemire a tenté résolument de s'affirmer, en particulier au cours des deux dernières années, et qu'elle a mené un certain nombre de grèves et de luttes importantes.
Le cycle actuel des luttes des ouvriers au Cachemire peut être vu comme une suite logique de leur combat en 2008. En mars 2008, la JKSRTC (Corporation d'Etat des Transports Routiers de Jammu et du Cachemire) déclarait qu'elle faisait des pertes parce qu'elle avait trop d'ouvriers. Le gouvernement déclarait son intention de réduire le nombre des salariés et annonçait un VRS (Projet de Retraite Volontaire). Mais il n'y a pas eu beaucoup de volontaires pour le VRS en dépit des tactiques coercitives. Le gouvernement a déclaré qu'il ne pouvait pas payer les années de COLA [Indemnité de Vie Chère] et d'autres arriérés de salaires. Face à ces attaques sur leurs emplois et au refus des patrons de payer leurs arriérés de salaires, les travailleurs ont essayé de développer leurs luttes. Sentant la colère des travailleurs, les syndicats de transport ont essayé de stériliser leur mécontentement en le canalisant dans une lutte rituelle: une marche de deux heures jusqu'aux bureaux du gouvernement, etc La direction et les syndicats ont alors réussi à mettre le couvercle sur ce mécontentement, d'abord en faisant la «promesse» d'examiner les revendications des travailleurs et ensuite en faisant semblant donner crédit à ces promesses.
Un an plus tard, la menace du VRS devenait plus urgente. En même temps, rien n'était sorti des promesses de la direction. Au lieu de cela les travailleurs n'ont pas été payés pendant des mois. Leurs arriérés de salaires s'accumulaient. La situation économique s'était aussi aggravée avec une inflation sur les produits alimentaires qui restait supérieur à 16%. Cela a provoqué une nouvelle vague de colère et de combativité chez les travailleurs du transport. Vers le milieu 2009, il y a eu un certain nombre de grèves et de manifestations courtes de la part des travailleurs de la JKSRTC. Mais les ouvriers de la SRTC n'ont pas réussi à unifier leur mouvement et à le transformer en une grève plus importante. Ils se sont trouvés isolés des autres secteurs des salariés de l'Etat. Une fois de plus, les syndicats ont réussi à affaiblir les travailleurs et à diluer leur colère au moyen de rituels stériles et théâtraux. Par exemple, au lieu d'encourager une grève combative, les syndicats ont demandé aux salariés d'amener leurs enfants aux manifestations avec des pancartes: « payez le salaire de mon papa! ». Cela peut paraître touchant pour un petit bourgeois sentimental, mais elle n'avait aucun impact sur les patrons. De façon similaires d'autres agitations futiles ont été utilisées par les syndicats pour affaiblir la détermination des ouvriers et stopper l'élan vers une grève plus importante.
Mais les salariés de la SRTC n'ont pas été les seuls à tenter de résister aux attaques des patrons. Bien que l'agitation des travailleurs de la SRTC ait exprimé une plus grande volonté de se battre, d'autres secteurs des salariés de l'Etat ont fait face aux mêmes attaques. Tous les salariés du gouvernement ont remboursé les années accumulées que le gouvernement ne payait pas. Pour eux, l'agitation récurrente des ouvriers du transports a agi comme une impulsion et un point de ralliement.
Depuis Janvier 2010, les salariés du gouvernement de Jammu et du Cachemire ont essayé d'unifier leur lutte autour de revendications communes: le paiement des arriérés de salaires, de meilleurs salaires et la régularisation des travailleurs permanents et temporaires de l'Etat. Ces luttes ont été rejointes par les salariés permanents et temporaires ainsi que par les enseignants. Bien que les syndicats aient réussi à conserver le contrôle, cela a été une expression de la force de la mobilisation des salariés et de leur détermination à combattre au point que les syndicats ont dû appeler à une ou deux journées de grève en janvier 2010. Quatre cent cinquante mille salariés d'Etat se sont impliqués dans ces luttes. Bien que les syndicats aient tout tenté, ils n'ont pas été vraiment en mesure d'arrêter l'élan vers des luttes plus combatives.
Ceci est apparu clairement lorsque les salariés du gouvernement d'Etat ont à nouveau commencé à pousser à la grève. La grève des 450 000 salariés a commencé le 3 avril 2010. Les revendications des salariés étaient toujours les mêmes: de meilleurs salaires, le paiement des arriérés de salaires qui s'élevait maintenant à près de 4300 millions de roupies et la régularisation des salariés permanents et temporaire. Depuis le 3 avril les transports publics a été arrêtés, les salles de classe des écoles gérée par l'Etat ont été verrouillées et toutes les administrations ont été fermées. Même les bureaux du gouvernement du district ont été fermés et l'administration a été paralysée.
Face à cette grève déterminée menée par tous ses salariés, l'Etat a commencé à montrer son vrai visage: le visage hideux de la répression.
L'Etat a visé en premier lieu ce qu'il pensait être les secteurs les plus vulnérables des salariés. Le gouvernement a mis en garde les permanents et les contractuels que dans le cas où ils continueraient leur grève, ils perdraient leur droit à être régularisés. Les journaliers auraient à subir les mêmes conséquences s'ils prenaient part à la grève. Mais les menaces n'ont pas pu briser la grève.
Pour accélérer la répression, le 5 avril 2010, le gouvernement de Jammu & Kashmir a invoqué le Essential Services Maintenance Act (ESMA) (je suppose équivalent du service minimum, ndt) contre les employés de l'Etat en grève. Le ministre des Finances a déclaré que le gouvernement a été contraint par les employés à invoquer l'ESMA et que les employés en grève subiraient un an d'emprisonnement. Un autre ministre a accusé les employés de « prendre la société en otage ».
Mais le gouvernement de J&C n'est pas le premier ni le seul à invoquer cette loi draconienne contre les salariés en grève et à user de la menace et du chantage pour briser les grèves. Ces derniers mois le gouvernement central et différents gouvernements des Etats ont montré un égal empressement à recourir à la répression contre les actions de grève par différents secteurs de la classe ouvrière dans différentes parties du pays. Ils ont tous été également impitoyables dans la répression des actions de grève. Tout cela pour montrer la peur qu'a la bourgeoisies de la classe ouvrière et de ses luttes.
Le gouvernement de J&C n'est pas resté les bras croisés après avoir invoqué l'ESMA. Il a continué à semer la divisions parmi les salariés et à faire subir une nouvelle répression aux salariés en grève. Les processions et les manifestations des salariés en grève ont été dispersées par la police. Le 10 avril, treize salariés en grève ont été arrêtés. Lorsque les salariés ont essayé de marcher vers le centre-ville de Srinagar pour s'opposer à l'arrestation de leurs camarades, la police a tenté de briser la marche en chargeant à la matraque. Cela s'est traduit par des affrontements entre les grévistes et la police. Malgré cela de nombreux salariés ont réussi à atteindre Lal Chowk, où encore plus de salariés ont été arrêtés.
Étant donné la réputation de Lal Chowk, à Srinagar, en tant que site ayant connu un certain nombre de coups de feu entre l'Etat indien et les gangs séparatistes, les affrontements entre la police et les travailleurs en grève y étaient évidemment exceptionnels. Cette contre-attaque des travailleurs de l'Etat était comme une affirmation que, parmi toutes ces guerres de gangs de différentes factions de la bourgeoisie, les salariés ont été en mesure de préserver leur identité de classe et sont capables de se battre pour leurs intérêts de classe.
Alors que les employés tentaient de renforcer leur grève et de résister à la répression du gouvernement de l'État, les syndicats étaient occupés à diviser les salariés. C'est ce qu'ils firent sous l'apparence de contribuer à la grève. Il y a de nombreux syndicats parmi les différents secteurs des salariés de l'Etat: les syndicats du personnel du secrétariat, de la JCC, des «Comités d'Action des Salariés » [EJAC], le syndicat des ouvriers du transport, etc. Alors que les salariés étaient déjà en grève depuis plusieurs jours, chacun de ces syndicats ont commencé à présenter leurs plans d'action distincts, travaillant ainsi à diviser les salariés et à affaiblir l'élan de leur lutte. JCC a déclaré une nouvelle grève de 7 jours. Un autre a déclaré un autre programme. Au milieu de tous ces efforts de division et de répression de l'Etat, les salariés ont été en mesure de maintenir leur grève pendant 12 jours.
À la fin des 12 jours, l'un des syndicats, EJAC, s'est déclaré satisfait par sa conversation avec le Premier Ministre et par les promesses du gouvernement. Il a ordonné aux salariés de retourner au travail. Ainsi, après 12 journées de grève, les salariés devaient une nouvelle fois se contenter des promesses des patrons et retourner au travail sans aucun gain matériel.
La grève d'avril de 450 000 salariés de l'Etat de J & K a été une lutte majeure des ouvriers dans l'État depuis de nombreuses années. Située au milieu de l'extension mondiale de la combativité ouvrière, elle a été un produit de l'accumulation de la colère chez différents secteurs de salariés de l'État au fil des ans. Sa route a été tracée par la répétition de courtes grèves et luttes de la part des travailleurs du transport, les employés de banque et d'autres secteurs. Face aux idéologies totalitaires et violents de l'Etat indien et des séparatistes, la grève a été une affirmation puissante de l'identité de classe de l'unité de la classe ouvrière. En dépit de ses faiblesses majeures, cette grève a montré une perspective différente de celle montrée par la bourgeoisie. Alors que toutes les factions de la bourgeoisie au Cachemire représentent une perspective de haine diabolique, de divisions violentes, de meurtres au quotidien, de terreur et de barbarie, la classe ouvrière a pour le moins montré que des travailleurs de religions et de régions différentes peuvent combattre ensemble, dans la solidarité , pour des intérêts de classe communs.
Le recul que la grève a subi tend à montrer que, la prochaine fois que les ouvriers de l'Etat de J & C entreront en lutte, ils devront rejeter à la fois les idéologies séparatistes et d'unité par la répression, comme ils viennent de le faire. En outre, ils auront à déjouer les manoeuvres des syndicats et réaliser que les syndicats ne sont pas leurs amis. Les salariés auront à prendre leur lutte en mains et les mener par eux-mêmes. C'est la seule façon de mener une lutte efficace.
Mais pour eux, mettre un terme à une vie de pauvreté, de terreur, de violence et de peur, ils devront développer leur lutte dans un combat pour la destruction du capitalisme et de son cadre national et pour le communisme et la communauté humaine.
Akbar (10 mai 2010)
Links
[1] https://www.vie-publique.fr/eclairage
[2] https://www.nytimes.com/2009/08/30/world/europe/30chechnya.html?pagewanted=1&_r=3&hp
[3] https://www.telegraph.co.uk/expat/expatnews/6858882/Chechen-president-says-the-West-wants-to-destroy-Russia.html
[4] https://ru.internationalism.org/content/140/k-90-letiyu-revolyucii-v-germanii
[5] https://ru.internationalism.org/content/pochemu-proletariat-est-kommunisticheskiy-klass
[6] https://fr.internationalism.org/en/tag/vie-du-cci/correspondance-dautres-groupes
[7] https://fr.internationalism.org/en/tag/5/60/russie-caucase-asie-centrale
[8] https://es.internationalism.org/node/2892
[9] https://fr.internationalism.org/en/tag/5/41/espagne
[10] https://fr.internationalism.org/en/tag/recent-et-cours/luttes-classe
[11] https://es.internationalism.org/cci-online/201008/2924/que-lecciones-podemos-sacar-de-la-huelga-del-metro-de-madrid
[12] https://fr.internationalism.org/content/espagne-solidarite-travailleurs-du-metro-madrid
[13] https://fr.internationalism.org/en/tag/7/304/tensions-imperialistes
[14] https://fr.internationalism.org/en/tag/5/119/asie