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Dernièrement, les syndicats, la gauche et l’extrême-gauche ont lancé, ensemble et unis, une grande opération médiatique pour lutter contre la privatisation de La Poste en organisant un référendum intitulé “votation citoyenne”. Olivier Besancenot, porte-parole du NPA, s’est même réjoui de mener cette action “révolutionnaire” aux côtés du PS. Et face à l’horrible vague de suicides chez France Telecom, tous les syndicats et toutes les organisations de gauche ont dénoncé avec virulence la privatisation de l’entreprise qui induit d’après eux ces “méthodes de management” insoutenables et cette “pression pour atteindre des résultats”.
Indéniablement, aujourd’hui, chaque processus de privatisation est accompagné d’un cortège d’attaques : flexibilité, intensification des cadences, harcèlements, licenciements... Mais est-ce sur le terrain de la “défense du service public”, comme ils nous le proposent, que l’on peut combattre cette forte dégradation des conditions de vie et de travail ?
Tout d’abord, une mise au point s’impose. Les différents partis de gauche ont beau jeu aujourd’hui de pousser des cris d’orfraie face aux horreurs induites par la privatisation de France Telecom ou pour dénoncer le changement de statut de La Poste. Ce sont eux qui hier, quand ils étaient au pouvoir (1), ont préparé la privatisation de France Télécom et d’Air France entre 1997 et 1998, ce sont eux qui ont décidé de l’“ouverture à la concurrence du marché de La Poste” en 2000, ce sont eux qui ont programmé les privatisations (ou l’ouverture du capital) de Thomson, du Gan, du CIC, du CNP, d’Eramet, du Crédit Lyonnais, d’Aerospatiale, d’Autoroutes du Sud de la France… Quant aux syndicats, durant ces différentes périodes, aucun d’eux n’a mené campagne ni appelé à des manifestations. Quand la droite a modifié le statut d’EDF en 2004, les syndicats étaient vent-debout. Mais quand les mêmes mesures sont prises par la gauche, ils sont alors ventre à terre.
Toutes les gesticulations actuelles de la gauche et des syndicats ne sont donc que pure hypocrisie.
Les ouvriers de La Poste et de France Telecom sont légitimement inquiets et en colère. Mais aller chercher la protection de l’État, est-ce vraiment la solution ? Car en luttant “contre la privatisation et pour la défense des services publics” c’est bien de cela qu’il s’agit. En formulant ainsi les revendications de la lutte, les syndicats, la gauche et l’extrême-gauche veulent faire croire à la classe ouvrière que l’Etat peut être de leur côté, qu’il peut les protéger contre les méfaits du capitalisme et de l’exploitation. Cette idéologie s’appuie sur plusieurs idées répandues :
– les fonctionnaires ont des conditions de travail privilégiées, ou en tout cas moins dures que dans le privé ;
– les entreprises d’Etat sont là non pour faire du bénéfice mais pour rendre service à la collectivité ;
– la vague de nationalisation des années 1945-1950 a permis une amélioration substantielle des conditions de vie et de travail.
Vérifions tout cela point par point : il est vrai que certains postes de bureau, dans les administrations, sont souvent moins pénibles. Cela dit, même cette idée très répandue est à relativiser car aujourd’hui dans les bureaux comme ailleurs, les conditions de travail se détériorent. Les collègues partant à la retraite n’étant pas remplacés (ou même parfois ceux qui mutent), la charge de travail pour ceux qui restent augmente considérablement. Ensuite, de nombreux fonctionnaires ont des boulots épuisants physiquement ou nerveusement. Il ne faut pas oublier que c’est à l’Education nationale, chez les enseignants, que le taux de suicide est le plus élevé. Les charges horaires d’une infirmière des Hôpitaux de Paris ou d’un interne, par exemple, sont insoutenables.
Enfin, l’Etat est le champion des emplois précaires. Il paye certains “emplois aidés” (comme les assistants d’éducation) sous le SMIC horaire. Il multiplie ainsi les CDD de 2 mois par-ci, 3 mois par-là. Certains sont ainsi embauchés durant des années en vivant en permanence dans le stress de ne pas être renouvelés ! Un récent fait d’actualité résume à lui seul toute l’inhumanité dont est capable l’Etat : des travailleurs africains sans papiers se sont filmés en train de charrier des seaux fumants remplis de goudrons à 300 °C, sans gants ni bottes, et ce durant toutes les heures de la nuit dans les tunnels du métro parisien. Qui était leur patron ? L’Etat ! Enfin, pour être précis, car l’Etat n’est pas avare d’hypocrisie, le patron était un sous-traitant d’un autre sous-traitant embauché par la RATP, entreprise semi-publique ! (2)
Les entreprises d’Etat, comme toutes les entreprises, sont là pour faire du bénéfice. L’exploitation n’y disparaît pas comme par enchantement. Ainsi, les grèves très combatives des employés de La Poste dans les années 1970, 1980, 1990 démontrent à l’évidence que ce “service public” n’était pas aussi social et humain que le prétendent la gauche et les gauchistes. Ce n’est pas pour rien que l’Etat, comme toute entreprise capitaliste aujourd’hui, supprime des postes chaque année, et par dizaines de milliers ! Nos détracteurs souligneront que certaines branches (comme la Sécurité sociale ou l’Education nationale) ne font pas de profits, qu’elles sont juste là pour le bien de la collectivité. Cela rejoint la question des nationalisations des années 1945-1950.
Les privatisations actuelles et les nationalisations de l’après-Seconde Guerre mondiale sont en fait le fruit d’une seule et même logique : la volonté de chaque Etat de s’appuyer sur des entreprises compétitives pour défendre ou accroître ses parts sur le marché mondial. Seul le contexte a changé. En 1945, chaque bourgeoisie nationale tentait de “reconstruire” son économie. Pour ce faire, il fallait absolument que l’Etat prenne directement en main les secteurs clefs de l’économie nationale : les transports, l’énergie, l’éducation, la santé. Pour ces deux derniers, il s’agissait d’avoir une main-d’œuvre qualifiée et en bonne santé, autrement dit des travailleurs très productifs, prêts à travailler pleinement et sans limite, à se “sacrifier” sur l’autel de la défense du capital national. Les déclarations du secrétaire général du PCF, M. Thorez, devenu ministre d’Etat de la Fonction publique entre 1945 et 1947 et vice-président du Conseil, qui appelaient les ouvriers français à “Produire, [car] c’est aujourd’hui la forme la plus élevée du devoir de classe” et à “retrousser les manches” sont tout à fait explicites.
Si les services publics rendent donc effectivement “service” à une communauté, il ne s’agit pas de la communauté en général mais de cette communauté particulière nommée “bourgeoisie nationale”.
La politique de défense des services publics et de lutte contre la privatisation est donc un piège tendu à la classe ouvrière. Le but est de lui faire oublier que l’Etat est son pire ennemi. Ce n’est rien d’autre qu’une tentative de jeter les ouvriers dans la gueule du loup.
En diminuant par dizaines de milliers le nombre de fonctionnaires, en créant de nouveaux impôts et taxes, en diminuant les remboursements des frais médicaux, en allongeant l’âge de la retraite, en orchestrant en sous main les restructurations dans les grandes entreprises… l’Etat mène des attaques féroces contre toute la classe ouvrière. Le comprendre, c’est permettre une lutte unie de tous les ouvriers contre le représentant principal du capital.
Privé-public : une même exploitation, une même lutte ! Ce n’est qu’en empruntant ce chemin que l’on pourra réellement honorer la mémoire de ceux qui n’ont pas supporté cette pression, notamment ce travailleur de France Telecom qui disait : “j’espère que mon geste servira à quelque chose.”
Dam (22 octobre)
1) En particulier le gouvernement Jospin et sa “majorité plurielle” : PS, PCF et Verts.
Nous publions ci-dessous la traduction d’un article réalisé par World Revolution, organe de presse du CCI en Grande-Bretagne.
L’une des manifestations de lutte de classe les plus significatives en Corée du Sud, depuis de nombreuses années, a été l’occupation de l’usine de construction de voiture Ssangyong, à Pyeongtaek près de Séoul, qui s’est terminée début août (1).
Après avoir occupé l’usine pendant 77 jours dans des conditions de siège où la nourriture, l’eau, le gaz et l’électricité leurs étaient refusés, et avoir résisté à des assauts répété de la police soutenue par une unité de rangers, de nervis et de briseurs de grève, les ouvriers ont été obligés d’abandonner leur occupation avec beaucoup de leurs revendications principales non satisfaites, et ils ont été immédiatement soumis à une vague de répression sous forme d’arrestations, d’interrogatoires et dans certains cas d’amendes exorbitantes.
L’économie sud-coréenne ne s’est jamais vraiment remise de l’atterrissage en catastrophe des “Tigres et Dragons”, en 1997 – un précurseur de l’actuel krach du crédit. Depuis lors, l’ensemble de l’industrie automobile est en crise profonde. La Ssangyong Motor Company, qui est maintenant sous le contrôle d’un conglomérat de véhicules automobiles chinois, a graduellement réduit sa main-d’œuvre et a proposé un plan pour offrir l’usine en garantie afin de s’assurer les prêts dont elle avait besoin pour échapper à la faillite. Ce plan impliquait beaucoup plus de licenciements – 1700 ouvriers contraints à une retraite anticipée et la mise à la porte de 300 travailleurs occasionnels – ainsi qu’un transfert de technologie vers la Chine avec l’objectif éventuel de s’approvisionner sur le marché de gros du puissant voisin de la Corée où la main-d’œuvre est disponible à prix réduit.
La grève et l’occupation d’usine, qui ont commencé au matin du 22 mai, étaient accompagnées de la demande de ne licencier personne, de ne précariser personne et de ne pas s’approvisionner à l’extérieur. Pendant l’occupation, le millier d’ouvriers qui occupait l’usine a fait preuve d’un courage et d’une ingéniosité exemplaires pour se défendre contre des forces de police équipées d’hélicoptères, de gaz lacrymogènes, de pistolets paralysants et autres matériels militaires. Cette résistance a exigé non seulement la fabrication d’armes improvisées (tubes en métal, cocktails Molotov, frondes) mais également le sens de la stratégie et de la tactique de défense – par exemple, ils ont répliqué à la supériorité écrasante des forces de répression par un repli vers le département de la peinture, calculant (correctement) que les matériaux inflammables qui y étaient entreposés dissuaderaient la police d’utiliser les gaz lacrymogènes, particulièrement à la suite d’une tragédie récente à Séoul où cinq personnes sont mortes dans un incendie allumé au cours d’une confrontation avec la police.
Ces actions réclament un sens aigu de l’initiative et de l’auto-organisation. Il semble que les ouvriers s’étaient organisés en 50 ou 60 groupes de dix membres chacun, chacun de ces groupes choisissant un délégué pour coordonner l’action.
L’occupation a également inspiré des actes de solidarité de la part d’autres ouvriers, beaucoup d’entre eux se trouvant face au même avenir incertain. Les ouvriers de l’usine voisine d’automobiles de Kia-Hyundai ont été particulièrement actifs, avec des centaines d’ouvriers venant à l’usine pour la défendre contre l’attaque concertée de la police. Des tentatives pour atteindre les grilles de l’usine, et apporter de la nourriture et diverses provisions aux occupants, se sont heurtées à une violence aussi brutale que celle exercée contre les ouvriers à l’intérieur. Il n’y a aucun doute que l’occupation a été considérablement soutenue par toute la classe ouvrière coréenne – un fait qui s’est reflété dans la position de la fédération syndicale nationale, le KCTU, qui a appelé à une grève générale de deux jours et à un rassemblement de solidarité nationale fin juillet.
Mais bien que certaines des mesures proposées à l’origine par les patrons aient été annulées à la fin de la grève, l’occupation s’est achevée dans la défaite. Les ouvriers sont sortis de l’occupation vaincus et meurtris, certains sérieusement blessés, et avec une certaine recrudescence des suicides parmi les salariés ou leurs familles.
“Dans les négociations finales, le secrétaire du syndicat local était d’accord avec la retraite anticipée proposée (c’est-à-dire licenciement avec concession d’une indemnité de licenciement) pour 52 % des travailleurs, et avec un congé pour 48 % d’entre eux pendant une année sans salaire, après quoi ils seraient réembauchés si les conditions économiques le permettaient. La société paierait également une indemnité mensuelle de 550 000 wons pendant une année à quelques ouvriers transférés sur des postes commerciaux.
“Les jours suivants aux insultes se sont ajoutés les coups au cours de la période de détention, à l’encontre de nombreux d’ouvriers emprisonnés, en attendant le dressage des actes d’accusation et un procès intenté par la société contre le syndicat KMWU pour lui réclamer 500 000 000 de wons (45 000 000 $ US). Comme on l’a indiqué, la législation du travail coréenne autorise en ce cas des procès individualisés et des poursuites qui ont déjà par le passé laissé certains ouvriers sans aucune ressource. La société réclame en la circonstance un dédommagement de 316 milliards de wons (258,6 millions de $) équivalant à une perte de production estimée à 14 600 véhicules, à cause de la grève” (2).
Ce que cette défaite démontre surtout, c’est que même si on organise au mieux la défense et l’occupation d’une usine, si la lutte ne s’étend pas, celle-ci échouera dans la grande majorité des cas. Le besoin central de tout groupe d’ouvriers confronté aux licenciements est d’aller à la rencontre d’autres ouvriers, de se rendre dans d’autres usines et bureaux, et d’expliquer la nécessité d’une action commune, afin d’établir un rapport de forces qui peut contraindre les patrons et l’Etat à reculer. La solidarité active montrée par les ouvriers de Kia-Hyundai et d’autres à l’extérieur des grilles de l’usine prouve que ce n’est pas utopique, mais que le mouvement doit aller prioritairement vers l’extension plutôt que d’opposer une simple résistance aux attaques de la police contre une usine occupée, quelle que soit la nécessité de cette dernière. Les ouvriers qui réfléchissent à propos de cette défaite doivent poser la question : pourquoi ces authentiques expressions de solidarité ne se sont-elles pas traduites par une extension directe de la lutte, à Kia et dans d’autres lieux de travail ? Plus que cela : ces minorités militantes qui se trouvent en train de remettre en cause la stratégie des syndicats doivent se réunir dans des groupes ou des comités afin de pousser à l’extension et à l’organisation indépendante de la lutte.
Pour nous, la clef du problème est que la question de l’extension a été laissée aux mains des syndicats, pour lesquels le déclenchement de la grève fait partie d’un rituel bien rodé, avec des actions symboliques qui n’avaient absolument pas pour objectif de mobiliser un grand nombre d’ouvriers, y compris à travers leur soutien à l’occupation de Ssangyong, laissant de côté l’extension de la lutte pour mettre en avant leurs propres revendications. A l’intérieur de l’usine, le syndicat (le KMWU) semble avoir maintenu un contrôle global de la situation. Loren Goldner, qui était en Corée quand la lutte a commencé et a pu se rendre dans l’usine, raconte sa discussion avec un ouvrier qui a participé à l’occupation : “J’ai parlé à un ouvrier qui participait activement à l’occupation et qui critiquait le rôle du syndicat. D’après lui, le KMWU gardait le contrôle de la grève. Cependant, contrairement au rôle des syndicats dans la lutte de Visteon au Royaume Uni et dans le démantèlement de l’industrie automobile aux Etats-Unis, le KMWU a soutenu les actions illégales d’occupation de l’usine et de préparation à sa défense armée. D’un autre côté, dans les négociations avec la société, il s’est concentré sur la demande de ne licencier personne et il a mis la pédale douce par rapport aux demandes de sécurité d’emploi pour tous et contre l’externalisation.”
L’extension de la lutte ne peut pas être laissée entre les mains des syndicats. Elle ne peut être prise en charge effectivement que par les ouvriers eux-mêmes. Quand les syndicats soutiennent des actions illégales et quand leurs représentants locaux participent à une lutte, cela ne prouve pas que les syndicats puissent parfois être du côté de la lutte. Cela montre au mieux que les dirigeants syndicaux subalternes, comme dans le cas du secrétaire local de KMWU, sont souvent aussi des ouvriers et peuvent encore agir en tant qu’ouvriers ; mais au mieux cela sert à maintenir l’illusion que les syndicats, au moins au niveau local, sont encore des organes de lutte du prolétariat.
Goldner tire les conclusions suivantes de la défaite : “La défaite de Ssangyong ne peut pas être seulement attribuée au rôle bancal de l’organisation nationale du KMWU, qui, dès le début, a permis aux négociations d’être canalisées vers l’objectif étroit du “aucun licenciement”. La défaite ne peut non plus être entièrement expliquée par l’ambiance de la crise économique. Ces deux facteurs ont assurément joué un rôle majeur. Mais au-dessus et au-delà de leur impact indéniable, c’est le recul, année après année de la classe ouvrière coréenne, surtout à travers la précarisation, qui affecte maintenant plus de 50 % de la main-d’œuvre. Des milliers d’ouvriers des usines voisines ont à plusieurs reprises apporté leur aide à la grève de Ssangyong, mais cela n’a pas été suffisant. La défaite des grévistes de Ssangyong, en dépit de leur héroïsme et de leur ténacité, ne fera qu’approfondir la démoralisation régnante jusqu’à ce qu’une stratégie se développe qui puisse mobiliser un plus large soutien, non pour livrer simplement des batailles défensives mais pour pouvoir passer à l’offensive”.
Nous sommes assurément d’accord sur le fait que l’atmosphère de crise économique a certainement un effet paralysant sur de nombreux ouvriers, qui peuvent voir que l’arme de la grève est souvent inefficace quand l’usine ferme de toutes façons, et qui ont vu tellement d’occupations contre les fermetures étranglées après un siège prolongé. Le processus de précarisation joue également un rôle en atomisant la main-d’œuvre, bien que nous ne pensions pas que ce soit le facteur décisif et qu’il ne s’applique certainement pas seulement à la Corée. En tous cas, c’est en lui-même un aspect de la crise, une des nombreuses mesures que les patrons utilisent pour réduire le coût de la main-d’œuvre et pour disperser la résistance.
Finalement, Goldner a raison de dire que les ouvriers devront passer à l’offensive, c’est-à-dire se lancer dans la grève de masse qui a pour objectif, à terme, de renverser le capitalisme. Mais c’est précisément la prise de conscience naissante de l’ampleur de la tâche qui, dans un premier temps, peut également inciter les ouvriers à hésiter à s’engager dans la lutte.
Une chose est certaine : la question du passage des luttes défensives aux luttes offensives ne peut pas être posée seulement en Corée. Cela ne peut qu’être le résultat d’une maturation internationale de la lutte de classe, et dans ce sens, la défaite chez Ssangyong et les leçons à en tirer peuvent apporter une véritable contribution à ce processus.
Amos (1er septembre).
1) Une vidéo de cet événement est consultable sur notre site internet : https://fr.internationalism.org/icconline/20009/la_defaite_a_ssangyong_coree_du_sud_montre_la_necessite_de_l_extension_de_la_lutte.html [4]
2) Cette citation est de Loren Goldner qui est un intellectuel engagé d’origine américaine ayant longuement résidé en Corée du Sud. Il est l’auteur de nombreux articles traitant souvent de manière très pertinente la crise économique du capitalisme et la lutte de classe, en particulier en Corée du Sud. Il a notamment dressé ce bilan détaillé de la lutte à l’usine de Ssangyong consultable sur libcom.org. dont est extraite cette citation et les suivantes.
Nous publions ci-dessous un tract émanant du collectif “Unité à la base de Tours” (1). Ces camarades, pour la plupart de jeunes étudiants, ont su se réunir pour animer des assemblées générales ouvertes à tous, refusant l’enfermement corporatif dans lequel les syndicats cherchaient à enfermer la lutte. Ils ont mené une activité intense au cours de laquelle ils ont tenté de rejoindre les salariés sur leur lieu de travail, afin de discuter et d’appeler à étendre la lutte. Ce tract a le grand mérite de poser la question de la perspective révolutionnaire en mettant en avant la nécessité de remettre en cause la société capitaliste. Il essaye en même temps de tirer des leçons et de faire un bilan des derniers combats. Il s’agit là, selon notre point de vue, d’une démarche politique importante et nécessaire pour préparer les luttes futures.
La crise économique se développe. Partie du secteur financier, elle s’est étendue à tous les secteurs de l’économie. Les délocalisations et les fermetures d’usines en sont les manifestations les plus flagrantes. Le bâtiment, par exemple, connaît aussi de graves problèmes. Mais les entreprises de ce secteur sont de taille plus réduite. Elles attirent moins l’attention des médias.
Cherchant essentiellement des événements spectaculaires, conduisant à des surenchères médiatiques.
Cette crise dont la bourgeoisie (les propriétaires des moyens de production et du capital) est responsable, ce sont les travailleurs et les futurs travailleurs de tous les pays qui la payent. Les fermetures d’usines, les délocalisations, les licenciements, les cas de chômage technique et partiel..., dont souffrent les travailleurs ne se comptent plus. La crise a pour conséquence une augmentation de la violence dans les rapports sociaux entre les classes. Dans les faits, cela se traduit d’un côté, par des attaques répétées contre les acquis sociaux, bientôt réduits à néant : volonté d’augmenter la durée du travail (“travailler plus pour gagner plus”...), repousser l’âge du départ à la retraite (67, voire 70 ans…), attaques contre le code du travail (travail dominical...), etc. Tout ceci n’a qu’un but : renforcer l’exploitation ! De l’autre côté, cela se traduit par une volonté des travailleurs de résister à ces attaques, de manière de plus en plus combative : séquestrations de cadres dirigeants (3M...), grèves dures avec occupation du lieu de travail (Continental...), développement des liens nationaux et internationaux : rencontres des salariés de plusieurs usines au siège de leur groupe (Michelin, Caterpillar...) et liaisons avec les travailleurs d’autres pays (Continental avec l’Allemagne...), certains allant même jusqu’à menacer de faire sauter leur usine pour obtenir des indemnités de licenciement décentes (New Fabris...).
Mais ces luttes semblent prendre une nouvelle tournure. Beaucoup de travailleurs mobilisés n’ont plus l’espoir de pouvoir conserver leur emploi et donc de maintenir leur site industriel. Ce qu’ils veulent c’est de faire en sorte que les “plans sociaux” (langage technocratique pour dire licenciements massifs) leur donnent un maximum d’argent. Ainsi, d’une part, les actionnaires seront dans l’obligation de débourser un peu plus que ce qu’ils avaient prévu ; d’autre part, ces travailleurs pourront tenir un peu plus longtemps malgré la faiblesse des allocations liées au chômage. C’est donc les questions de dignité et de conditions de vie qu’ils posent. Mais il n’en reste pas moins vrai qu’ils – nous sommes) – sont dans une impasse.
C’est à une véritable crise de perspectives auxquelles nous sommes confrontés. Les confédérations syndicales, de par leur stratégie d’accompagnement de la crise, n’offrent aucun moyen pour sortir de cette voie sans issue. Cela montre que la nécessité de s’organiser autrement, en essayant de reconstruire de nouvelles perspectives en rupture avec le capitalisme devient à la fois urgente et vitale. Comment parvenir à un partage égalitaire des richesses ? Comment sortir de la domination des actionnaires et autres petits chefs qui ruinent notre quotidien ? C’est bien de notre vie de tous les jours, mais aussi du devenir de l’humanité, de l’avenir de la planète dont il est question : un choix de société ! Est-ce que les confédérations syndicales sont capables de construire des espaces où nous pourrions réfléchir sur notre quotidien, commencer à le transformer ? Peut-on envisager que les bureaucraties syndicales puissent favoriser l’imagination et la lutte pour un devenir dans lequel les rapports sociaux deviennent la préoccupation centrale de l’organisation sociale et non plus la recherche de profits pour une minorité toujours plus avide ?
Les succès des grandes mobilisations des 29 janvier et 19 mars ont été porteurs d’espoir. Force est de constater que les suites données par les directions syndicales n’ont pas été à la hauteur de nos espérances. La plupart des directions des grandes centrales se sont contentées de discuter avec le gouvernement, d’organiser “des journées coup de poing”. Rien de réellement positif ne s’est concrétisé pour renforcer le camp des travailleurs et de tous les dominés : pour construire la solidarité de classe. Cela a conduit logiquement aux débandades des 26 mai et 13 juin.
Beaucoup d’entre nous (travailleurs, précaires, chômeurs, retraités, syndiqués...) espérions, chuchotions, gueulions, agissions pour la grève générale reconductible. Mais rien n’y a fait. L’étau des bureaucraties syndicales est encore efficace ! Il est maintenant vital de se donner des perspectives révolutionnaires pour en finir radicalement avec la société capitaliste. Nous devons nous organiser à la base, développer la solidarité de classe, construire des outils de lutte pour prendre nos affaires en main et construire dès à présent un autre futur !
Dans les usines, dans les quartiers, dans les facs..., construisons nos comités, nos collectifs et toutes formes d’outils de lutte que nous jugerons opportuns !
Sortons des logiques corporatistes qui nous affaiblissent !
Solidarité entre tous les exploités et les dominés, syndiqués ou non !
Bâtissons
l’unité de notre classe
en reconnaissant nos camarades de nos
ennemis !
Marre des miettes, prenons le four a pain !
Collectif Unité à la Base de Tours
Ce tract illustre bien le fait que la classe ouvrière, par le biais de certaines de ses minorités, ne se résout pas à la passivité. Elle n’accepte pas les conditions d’exploitation auxquelles la bourgeoisie, le gouvernement et les syndicats, veulent la contraindre.
Ce qui nous semble très intéressant dans ce tract, même si nous n’en partageons pas tous les points de vue ni toutes les formulations, c’est qu’il pose centralement la question de la perspective révolutionnaire : “Il est maintenant vital de se donner des perspectives révolutionnaires pour en finir radicalement avec la société capitaliste”. Cette question est effectivement le principal problème auquel se heurte le prolétariat aujourd’hui : “C’est à une véritable crise de perspectives auxquelles nous sommes confrontés”. Et pourtant, comme le dit le tract, conscient de la gravité des enjeux : “c’est bien de notre vie de tous les jours, mais aussi du devenir de l’humanité, de l’avenir de la planète dont il est question .» Cela pose effectivement le problème d’“un choix de société” et nous partageons pleinement cette préoccupation du tract, une préoccupation qui montre que cette question de la perspective révolutionnaire est en émergence. Il s’agit donc d’une contribution du tract à cet effort de conscience de la classe ouvrière.
Dans ce cadre, ce texte se place d’emblée du point de vue des intérêts de la lutte de classe en réaction à la crise et aux attaques brutales menées par la bourgeoisie. C’est pour ces raisons qu’il en arrive rapidement à dénoncer le sabotage des luttes ouvrières par les syndicats : “Les succès des grandes mobilisations des 29 janvier et 19 mars ont été porteurs d’espoir. Force est de constater que les suites données par les directions syndicales n’ont pas été à la hauteur de nos espérances. La plupart des directions des grandes centrales se sont contentées de discuter avec le gouvernement, d’organiser “des journées coup de poing”. Rien de réellement positif ne s’est concrétisé pour renforcer le camp des travailleurs et de tous les dominés : pour construire la solidarité de classe. Cela a conduit logiquement aux débandades des 26 mai et 13 juin.”
Les ouvriers se sont donc trouvés dans des “impasses”. Et comme le souligne le tract, “l’étau des bureaucraties syndicales est encore efficace.” Chaque lutte est restée et reste encore bien enfermée sur elle-même, les ouvriers ne pouvant créer un véritable rapport de force débouchant sur un mouvement de plus large ampleur. A travers leurs réactions et dans ce contexte, “les questions de dignité et de conditions de vie qu’ils posent” témoignent davantage d’un potentiel pour les luttes futures que d’une réponse à la hauteur des attaques portées.
Afin d’effectuer un pas en avant pour développer la lutte de façon plus efficace, le tract donne un certain nombre d’orientations politiques très importantes qui se résument un peu dans la phrase suivante : “nous devons nous organiser à la base, développer la solidarité de classe, construire des outils de lutte pour prendre nos affaires en mains et construire dès à présent un autre futur !”.
La question de “s’organiser” pour le prolétariat est essentielle. Mais que doit-on entendre par cette expression du tract “nous devons nous organiser” ? Quelles formes de luttes développer ?
Nous pensons que ce sont ces questions centrales qui doivent effectivement être débattues dans la classe ouvrière et qu’il est nécessaire de préciser, afin de les confronter pour nourrir la réflexion.
Nous
pensons, pour notre part, dans un contexte où le prolétariat est
frappé de plein fouet par la crise, que les porteurs de la défense
d’une perspective cherchant à remettre en cause le capitalisme
doivent assumer un rôle forcément minoritaire pour la préparation
politique à l’action et à l’intervention dans les futures
luttes.
Après les premiers coups de massues d’une crise
économique amenée à se prolonger, lorsque la classe ouvrière
reprendra le chemin du combat, il lui faudra alors reprendre
elle-même ses luttes en main, ses initiatives et sa créativité,
selon les modalités d’un combat réellement collectif, où les
décisions émaneront de véritables AG, ouvertes et souveraines. Les
AG futures, réellement vivantes, constituerons le seul et unique
moyen de mener le combat de façon efficace et autonome. Ce
seront aux participants eux-mêmes et non aux syndicats, qui
paralysent et sabotent les luttes, de décider ce qu’il convient de
faire. Ce sont les ouvriers eux-mêmes qui doivent exprimer leur
solidarité, dans et par la lutte, collectivement, en envoyant par
exemple des délégations massives dans les autres usines ou sur
d’autres lieux de travail, afin de rejoindre les salariés pour une
lutte commune. Ce sont les initiatives d’AG communes,
interprofessionnelles, ouvertes, qui doivent constituer le poumon du
combat ! C’est à la condition de cette prise en main par les
ouvriers eux-mêmes qu’une solidarité active, réelle, en
direction de leurs frères de classe en lutte sera possible. A ces
objectifs, se dresseront évidemment de nombreux obstacles. Ce sera
encore aux ouvriers eux-mêmes, dans ces mêmes AG d’en discuter et
d’étudier la façon de les surmonter collectivement. Les AG, à
n’en pas douter, restent le mode d’organisation authentiquement
prolétarien permettant de contrôler collectivement la lutte. Elles
constituent en quelque sorte les embryons des futurs conseils
ouvriers. Ces organes, rassemblant les masses ouvrières, par
lesquels elles s’unifient, s’érigent comme force révolutionnaire
en vue du renversement du capitalisme. Ils permettront un dépassement
des rapports sociaux d’exploitation en vue de la création d’une
nouvelle société.
Pour conclure, soulignons que c’est avec le souci de contribuer à la réflexion engagée que nous nous sommes permis ces quelques commentaires.
CCI
1) Il s’agit d’un collectif qui s’est constitué, regroupant des éléments jeunes et combatifs, dont le noyau dur était très impliqué dans le mouvement étudiant (notamment contre la LRU).
Mardi 6 octobre, Cobo Center (1), ville de Détroit. Des bénévoles attendent la venue des plus démunis pour leur distribuer 5000 formulaires de demande d’aide financière temporaire (pour le paiement des loyers et des factures de services publics) et d’aide au logement (pour les sans-abri ou ceux qui le seraient en l’absence de ces aides) (2). La veille déjà, près de 25 000 de ces documents ont été retirés auprès des différents services de la mairie. Mais en ouvrant les portes ce jour là, les bénévoles n’en croient pas leurs yeux : ce n’est pas quelques centaines de personnes, les plus pauvres des quartiers, qui attendent là dès l’aube, mais plusieurs milliers ! Entre 15 000 et 50 000 selon les estimations ! En fait, à l’annonce de cette nouvelle distribution, des sans-abris, des chômeurs de longue date, mais aussi des ouvriers récemment licenciés, des travailleurs précaires ou menacés par d’éventuels dégraissages et des membres de la “classe moyenne” (des professeurs ou des fonctionnaires par exemple) qui sont en train de plonger à leur tour dans la pauvreté… bref, la majorité de la classe ouvrière de la région s’est amassée dans la froideur du petit matin dans l’espoir d’obtenir quelques miettes d’aides pour ne pas perdre son logement ou pour manger ou simplement pour “tenir” encore un peu. De longues queues serpentent donc devant l’entrée du bâtiment et cheminent jusque dans la rue. Personne ne s’attendait à une telle foule. Les bénévoles, éberlués, sont littéralement pris d’assaut. Les personnes ayant la chance d’obtenir un formulaire s’empressent de le remplir sur place sous peine de se le faire voler. Des photocopies (non reconnues et donc non valides) circulent pour 20 dollars pièce. Pour limiter cette escroquerie et éviter les heurts, les bénévoles finissent par distribuer eux-mêmes des photocopies sans pour autant savoir si celles-ci seront prises en compte par l’administration.
Aux Etats-Unis, la crise économique frappe avec une brutalité extrême et aucun secteur de la classe ouvrière n’est épargné. Comme l’exprime le pompier Dan McNamara, la ruée de cette foule en détresse “est tout à fait représentative des difficultés de la classe moyenne en Amérique” (3). Tony Johnson, sans emploi depuis trois ans, présent dès 5 heures du matin, exprime ainsi sa colère : “il n’y a pas de tranquillité parce qu’il n’y a pas d’emplois. Tout le monde est à la recherche d’un extra, d’un coup de main. Ils ne me comptabilisent pas comme chômeur parce que je n’ai pas d’allocation. C’est comme si je n’existais même pas. Mais j’existe. Regardez autour de vous. Il y a des milliers... des millions dans ce cas” (4).
Malgré tous ses trucages et autres “artifices statistiques”, la bourgeoisie américaine ne peut plus masquer la paupérisation criante de toute la population. Le taux de chômage est passé de 4,7 % en septembre 2007 à 9,8 % en septembre dernier, chiffre record depuis 1983. Il a donc doublé en seulement deux ans ! (5)
En Europe, il est de coutume de dire que les Etats-Unis ont toujours quelques années d’avance, qu’ils montrent le chemin en quelque sorte, qu’ils indiquent l’avenir. La classe ouvrière du monde entier sait donc à quoi s’attendre !
Cela dit, il faut croire que la crise et la misère traversent les frontières plus vite que la mode. En Espagne, le taux de chômage s’élevait à 13,9 % au quatrième trimestre 2008 avec plus de 3,3 millions de chômeurs. C’est le record dans l’Union européenne et la plupart des analystes considèrent que ce chiffre pourrait atteindre 19 % en 2010 (soit plus de 4 millions de chômeurs) (6) ! Quant à l’Irlande, surnommée le “Tigre celtique” suite à ses “exploits économiques” du début des années 2000 (il y a deux ans encore, cette île battait des records avec 5,1 % de croissance et “seulement” 4,4 % de chômeurs), son taux de chômage devrait prochainement atteindre 15 % ! (7)
La bourgeoisie peut donc bien nous servir à toutes les sauces ses grossiers mensonges sur la “reprise”, “la fin de la crise”, le “bout du tunnel”… La réalité, c’est ce que ressentent dans leur chair les travailleurs, les précaires et les chômeurs du monde entier : la dégradation terrible des conditions de vie. Le capitalisme ne peut engendrer que toujours plus de misère, il est devenu un système définitivement décadent qu’il faut abattre.
Lisa, le 22 octobre
1) Centre d’exposition et de conférence de la ville.
2) La ville de Détroit a en effet entrepris de répartir l’aide fédérale perçue au titre des programmes de Prévention des Sans-abris et du Relogement Rapide, soit 15,2 millions de dollars.
3) Par classe moyenne, il faut entendre cette partie de la classe ouvrière qui avait un emploi stable.
4) Toutes ces citations et tous ces faits sont issus d’un article diffusé sur le site Contreinfo (www.contreinfo.info [8]). Une vidéo y est d’ailleurs accessible.
5) Source : www.romandie.com/infos/news/200910221854040AWP.asp [9]
Vendredi 9 octobre. Quelques heures avant la cinquième réunion en deux semaines de son conseil de sécurité nationale, consacré cette fois à l’Afghanistan, le président américain Barack Obama se voyait attribuer le prix Nobel de la Paix, “pour ses efforts extraordinaires en faveur du renforcement de la diplomatie et de la coopération internationales entre les peuples” selon l’annonce du jury d’Oslo. En recevant ce prix, Obama rappela qu’il était “le commandant en chef d’un pays qui a une guerre à terminer”. Et quelques jours plus tard, le Washington Post annonçait que le même Obama avait décidé d’envoyer un renfort de quinze mille soldats supplémentaires en Afghanistan !
Loin d’être une exception, il est de coutume que le prix Nobel de la Paix soit régulièrement attribué aux plus féroces va-t-en-guerre de la bourgeoisie mondiale, comme le rappelle l’historien américain Howard Zinn dans The Guardian du 10 octobre 2009 :
“[...] Thomas Woodrow Wilson, Theodore Roosevelt et Henry Kissinger avaient également reçu le Nobel de la Paix. [...] Oui, Wilson est crédité de la création de la Société des Nations – cet organisme inefficace qui n’a rien fait pour empêcher la guerre. Mais il a également ordonné le bombardement de la côte mexicaine, envoyé des troupes occuper Haïti et la République dominicaine, et impliqué les Etats-Unis dans le massacre à grande échelle qui se déroulait en Europe durant la Première Guerre mondiale – laquelle peut aisément prétendre à la première place dans la liste des guerres stupides et sanglantes. Certes, Theodore Roosevelt a joué les intermédiaires pour conclure la paix entre le Japon et la Russie. Mais c’était aussi un amoureux de la guerre qui a pris part à la conquête de Cuba par les Etats-Unis, qui prétendait libérer cette petite île du joug espagnol tout en l’emprisonnant dans des chaînes américaines. Et une fois président, il mena une guerre sanglante pour soumettre les Philippins, allant jusqu’à féliciter un général américain qui venait de massacrer six cents villageois sans défense. [...] »
Plus tard enfin, le comité estima qu’il était juste de décerner un prix de la paix à Henry Kissinger, qui avait signé l’accord final mettant un terme à la guerre du Vietnam, dont il avait pourtant été l’un des instigateurs. Kissinger, qui avait servilement approuvé Nixon dans sa volonté d’étendre la guerre en procédant au bombardement de villages au Vietnam, au Laos et au Cambodge. Kissinger, qui correspond très exactement à la définition du criminel de guerre, s’est vu attribuer un prix de la paix ! [...] Obama poursuit une action militaire sanglante et inhumaine en Irak, en Afghanistan et au Pakistan.” 1
Parmi les sanguinaires pacifistes nobélisés, n’oublions pas l’égyptien Anouar el-Sadate, les Israéliens Menahem Begin, Shimon Peres et Yitzhak Rabin, et le Palestinien Yasser Arafat, qui ensanglantèrent le Proche-Orient pendant des décennies. Ni l’Américain Jimmy Carter ni le Russe Mikhaïl Gorbatchev, protagonistes de la guerre froide.
Le prix Nobel de la Paix n’est rien d’autre qu’un comble d’hypocrisie et de cynisme, dont l’unique objectif est d’attribuer un gage de respectabilité aux fidèles serviteurs de l’impérialisme, exemplaire du mode vie capitaliste décadent.
DM
Le samedi 10 octobre, les médias français étaient sous le choc : le centre-ville de Poitiers était “attaqué” par une horde d’environ 200 militants dits “d’ultra-gauche”.
Ce qui était annoncé comme un “Rassemblement festif” par le “Collectif contre la prison de Vivonne”, initialement prévu pour protester contre un transfert de détenus, prévu le lendemain, entre l’ancienne et la nouvelle prison de la ville, c’est-à-dire avec une tonalité plutôt bon enfant, rassemblement autorisé par la préfecture de la Vienne, se transformait brutalement en saccage ciblé de quelques vitrines de banques, d’assurances et d’une boutique Bouygues, et de plusieurs abribus, avec deux blessés très légers (dont un policier). Saccage certes, mais bien loin des descriptions apocalyptiques que nous ont faites à l’unisson les médias.
Selon ces derniers, qui nous ont quasiment présenté Poitiers à feu et à sang, il s’agissait de hordes de “jeunes, grands, qui portaient des masques argentés en forme de flamme avec des grands bambous, des bâtons qu’ils ont balancés dans les vitrines. C’était de la violence pour la violence. (…) Ceux qui n’étaient pas masqués portaient des écharpes, des bonnets, on ne pouvait pas voir leurs visages (…) Le plus impressionnant, c’est la peur qui se lisait sur le visage des gens et des enfants qui sont rentrés se réfugier dans la pharmacie”, dit Sabrina. “Et ces bombes rouges, la fumée qu’il y avait, on a senti les gens très apeurés, c’était la panique” (la Nouvelle république du 11 octobre). Une cache d’armes avec des marteaux, des masses et des explosifs était même découverte par la police dans la ville, tandis que le maire PS de Poitiers, se prenant pour Charles Martel, renchérissait sur France 3 : “Nous avons évité une catastrophe.” Bagdad, Kaboul Beyrouth, de la gnognote à côté des ces événements, hypergonflés par la presse aux ordres, la police et le gouvernement !
Le collectif organisateur s’est immédiatement démarqué des ces “casseurs” tout en dénonçant l’exagération manifeste de ces événements, tendant forcément à le discréditer. Mais là n’est pas l’essentiel car ces prétendues émeutes ont toutes les caractéristiques de la manipulation policière. Ainsi, malgré l’autorisation de manifester, il est étrangement “interdit de prendre des photos”, précise une journaliste de une Coccinelle à Poitiers du 10 octobre, tout en ajoutant : “maintenant je comprends mieux pourquoi. Je ne suis pas extra lucide mais m’étant faite serrer pour que je ne prenne pas de photos, je comprends que des choses se préparent. J’ai déjà connu cela par le passé en région parisienne.”
Un membre du collectif raconte sur le site Le Post.fr : “Ça se passait bien jusqu’au départ du cortège. A 17 h 15, plein de gens qui n’étaient pas au départ de la manif’ sont arrivés en masse des rues adjacentes. Ils étaient cagoulés, équipés, très bien organisés. 10 minutes après, ça dégénérait et ça commençait à casser, les fumigènes sont sortis, etc. J’ai vite quitté la manif, la violence ne m’intéresse pas. Surtout en plein festival de théâtre de rue, avec des familles, des enfants...”
Un témoin qui a vu passer la vague de “casseurs” près de son domicile racontait sur Europe 1: “C’étaient des gens entraînés, cagoulés, avec des talkies-walkies… comme des militaires.” Eléments qui permettent au député-maire de Poitiers, aux côtés de Brice Hortefeux, de s’inquiéter encore de ce “groupe anarchiste très organisé qui a utilisé la prison comme prétexte à ses actions”.
La police réussissait au bout du compte un beau coup de filet : 18 personnes interpellées dont une gamine de 14 ans et bon nombre de SDF, tous probablement issus de cette “mouvance anarchiste insurrectionnelle” qui prône “la destruction du pouvoir par l’insurrection”. Tous les médias ont massivement diffusé le même message : les autorités et la police auraient été “surpris” par le caractère soudain et imprévisible de cette violence. Tu parles...
Tout cela n’est pas sans nous rappeler de récents coups bas de la police française en matière de provocation. Le 1er mai dernier par exemple, à la fin du défilé, un employé de la Protection judiciaire à la jeunesse et sa compagne “remarquent un curieux manège : une dizaine d’hommes en civil sort d’un car de CRS. Crânes rasés, foulards, capuches, autocollants CGT ou “Rêve générale” – la panoplie complète du manifestant (…) les hommes se dispersent par groupe de deux ou trois et déboulent place de la Bastille” puis provoquent des gardes mobiles, en train de déloger de jeunes “punks”, à coups de “Police partout, justice nulle part”, “Casse-toi pauv’ con”. Certains des jeunes seront arrêtés, pas les flics, bien sûr ; et surtout le témoin gênant sera lui aussi arrêté. (https://www.liberation.fr/societe/0101577634-1er-mai-un-proces-pour-avoir-denonce-des-policiers-deguises [16]).
Ces policiers n’agissent pas en free-lance. Ils font partie d’une “compagnie de sécurisation” officiellement créée en 2005 par Sarkozy au moment des manifestations lycéennes contre la loi Fillon au nom du “provoquer plus pour coffrer plus” (le Canard enchaîné du 6 mai 2009) et sous prétexte de “protéger les manifestants” contre les provocateurs, les casseurs, les voleurs, etc. On verrait cela dans un film, on aurait du mal à y croire.
De tous temps, les classes dirigeantes ont utilisé des agents provocateurs pour attirer les masses en révolte dans des guets-apens et finalement les réduire à leur merci. La bourgeoisie est passée maîtresse dans cet art de la provocation policière destinée à justifier le renforcement de sa surveillance policière en poussant des éléments confus à la baston stérile avec ses flics, à entraîner les manifestations dans des violences inutiles, à faire passer les expressions de la lutte de la classe ouvrière pour de la violence gratuite et salir les groupes politiques prolétariens en les amalgamant à des sortes de débiles primaires à l’assaut de la méchante flicaille : en résumé pour détruire la réflexion et la prise de conscience au sein du prolétariat que la violence nécessaire contre la bourgeoisie et le capitalisme ne se résume pas et n’est pas un affrontement physique mais essentiellement d’abord politique. Et que, dans cet affrontement, les organisations politiques ont une place prépondérante qu’il s’agit pour la bourgeoisie de dénigrer autant que faire se peut.
Elément significatif : alors que tout le monde avait oublié l’épisode poitevin, le journal le Monde du 21 octobre publiait la revendication des violences du 10 octobre, intitulée “Coucou, c’est nous” d’un groupe “insurrectionnaliste” signant “quelques casseurs”, et dont un mot d’ordre est : “La destruction est source de joie”. Tout aussi significatif est le fait que cet article paraît au moment même où commence le procès de Julien Coupat et de ses amis, qualifiés eux aussi d’éléments de “la mouvance ultra-gauche”, éléments probablement sincères mais tout aussi probablement manipulés, pour des sabotages de caténaires du TGV l’an dernier (1).
Et la bourgeoisie, quant à elle, n’aura jamais de cesse tant qu’elle survivra d’attaquer la conscience de son fossoyeur potentiel, le prolétariat, et de tenter de l’effrayer ou de l’intimider en faisant l’amalgame entre les organisations politiques prolétariennes et toute une frange désespérée de la classe ouvrière, se réclamant de façon erronée et confuse du prolétariat et de sa lutte, par là même offerte aux crapuleries et autres manipulations policières. D’ailleurs, quelques jours plus tard, le ministre de l’Intérieur Hortefeux profitait de ces “événements” pour justifier la proposition d’une nouvelle mouture du très controversé fichier Edvige, nettement orienté contre les “agitateurs” d’extrême-gauche qui “fomentent des troubles à l’ordre public” et qui, lors des futures luttes ouvrières, pourra être utilisé contre les éléments prolétariens les plus combatifs et les organisations révolutionnaires.
Wilma (23 octobre)
1) A moins qu’ils ne soient innocents et faussement accusés, ce qui est tout à fait possible, et que les véritables auteurs de ces sabotages soient là aussi des flics.
Nous publions ci-dessous un article que nous venons de recevoir de la part de camarades en Australie sur la récente grève de conducteurs de bus à Sydney.
Le lundi 24 août, 130 chauffeurs de bus de Sydney ont mis en place une grève sauvage défiant les patrons, les bureaucrates d’Etat et également les syndicats, grève dénoncée par tous. Les ouvriers de Busways au dépôt de Blacktown à l’est de Sydney ont arrêté le travail à 3 h 30 du matin, provoquant l’annulation des services de période de pointe dans les zones de Blacktown, Mount Druitt et Rouse Hills.
La décision des ouvriers de se mettre en grève a été prise après la rupture de la négociation entre les syndicats et l’administration de Busways sur la réforme des horaires qui devait être mise en application en octobre. Face à une économie en ruines et à un système de transports en commun à la dérive, les dirigeants des autobus privés, de concert avec le gouvernement, essayent de réduire radicalement les coûts et d’imposer des accélérations de cadence. Les conducteurs ont protesté contre les nouveaux horaires, invoquant le fait que ces derniers représentent une attaque contre les conditions de travail des conducteurs et qu’il sera impossible de les mettre en application car elles sont un empiétement sur les périodes de repos et font pression sur les conducteurs pour qu’ils dépassent des limites de vitesse, mettant en danger la vie des passagers et des autres automobilistes. “Le nouvel horaire signifie moins de temps pour accomplir nos itinéraires. Nous courrons après le retard et serons blâmés par le public. Puisque nous courrons après le retard, il y aura aussi moins de temps de repos”, expliquait un travailleur (1).
Depuis des mois, le TWU (le syndicat des travailleurs du transport) et la compagnie font traîner en longueur les négociations sur ces nouveaux horaires qui ne peuvent déboucher sur le moindre résultat positif pour les conducteurs. Pire encore, le TWU a également été complice des attaques contre les conditions de vie et de travail de ces dernières années, notamment à travers les divers accords pour accroître la “flexibilité”. Après la rupture complète des négociations, les ouvriers, irrités par le manque de soutien et par la trahison pure et simple du syndicat, ont pris la décision d’arrêter le travail sans consulter le TWU et la direction de Busways tout en se défiant d’eux. Un ouvrier déclare : “Nous n’en pouvons plus. Nous avons essayé, à travers le système, d’obtenir des changements et rien ne s’est jamais produit. Nous ne pouvons strictement rien obtenir avec le syndicat Le but des syndicats était censé être d’améliorer les conditions, pas de les aggraver” (2) et un autre que “le syndicat a dénoncé les ouvriers pour ce qu’ils ont fait. Nous avons décidé que nous ne pouvions plus rien attendre du syndicat. Le syndicat ne s’inquiète que des 60 $ mensuels que nous devons lui verser”.
La réponse des patrons et du syndicat devant cette grève était de faire en sorte qu’elle se termine le plus rapidement possible. Concernant la gestion des horaires de Busways, la direction et le TWU ont fait volte-face, se déclarant d’accord dans les négociations sur les horaires proposés par les chauffeurs, les conducteurs ayant pris la décision au bout de 6 heures de discussions de retourner au travail à 9 h 30 du matin, après avoir attendu la fin des services de pointe du matin. Malgré cette décision, les conducteurs ont exprimé leur intention de déclencher de nouvelles actions de grève si la compagnie refusait de revoir à la baisse son programme de réformes. Cependant, l’évocation de cette perspective a provoqué la décision d’interdire d’autres actions de grève ainsi que des menaces de répression, de la part de la Commission des relations industrielles.
La réaction rapide du syndicat pour contenir et arrêter la grève confirme que c’est seulement si les ouvriers prennent leur lutte dans leurs propres mains, comme l’ont fait les conducteurs, que la défense des conditions de vie et de travail peut être efficace. Cependant, le résultat de la grève n’a pas encore été une victoire pour les conducteurs. Le nouveau round de négociations entre le TWU et la direction de Busways s’est conclu sur un accord pour procéder à la réforme des horaires, ce qui était déjà cyniquement prévu dès le début, c’est-à-dire de suivre les décisions de la direction de la compagnie.
Nous apportons notre entière solidarité aux ouvriers de Busways et nous considérons cette grève comme un moment important du développement de la lutte de classe en Australie. En réponse à la faillite du système capitaliste et aux attaques contre des ouvriers par le capital, la classe ouvrière doit prendre confiance en sa propre force et en celle de sa lutte, à la fois pour se défendre au quotidien et finalement, pour affirmer ouvertement ses propres intérêts de classe. Pour cet objectif, il est absolument essentiel que les ouvriers prennent la lutte dans leurs propres mains, et plus encore, qu’ils se battent pour étendre et généraliser cette lutte. L’isolement dans lequel les conducteurs se sont trouvés, combiné au spectacle hystérique de la dénonciation des conducteurs qualifiés dans cette ignoble campagne de “bolchos”, de “brutes”, par tous les médias aux ordres de la classe dirigeante, est une cause fondamentale de l’étouffement de la lutte. C’est seulement en prenant directement leur lutte en mains, en dehors du cadre syndical, et en la généralisant, contre toutes les divisions sociales, sectorielles et géographiques, que la classe ouvrière peut trouver la force nécessaire pour développer son combat.
NIC (9 septembre)
1) WSWS, Australie : grève des chauffeurs de bus au mépris du syndicat [18], 26 août 200.
2) Idem.
Chaque année, les médias égrènent des accidents d’avion en tous genres et des crashs aériens qui tuent en quelques minutes des centaines de personnes. Généralement, la responsabilité de ces catastrophes est rejetée sur le dos des pilotes ou bien du personnel de maintenance. Concernant le crash de l’airbus A330 d’Air France entre Paris et Rio le 1er juin, on aura là encore tout entendu, de la possibilité d’une attaque par missile à celle d’un orage inattendu par sa taille (démenti par Météo-France) en passant par l’incurie des pilotes. Dans le même registre de l’hypocrisie et du mensonge, le crash aux Comores le 30 juin d’un avion affrété par la compagnie Yemenia, qui se trouve sur la liste noire des compagnies indésirables dans certains pays du fait du mauvais entretien de leur flotte, avait fait l’objet de toute une campagne de l’Etat français, afin de détourner l’attention de l’opinion sur ces “compagnies-voyous”, et faire passer Air France-KLM pour une compagnie des plus sérieuses.
Ce qui s’est passé le 1er juin est en réalité une illustration de ce mépris total que toutes les compagnies aériennes, quelles qu’elles soient, et avec elles, des Etats qui les parrainent et les protègent, cultivent à l’égard de la vie humaine. Car cette merveille de la technologie qu’est l’avion serait en effet bien plus sûr pour le transport des êtres humains si les lois du profit, de la rentabilité et de la concurrence capitaliste n’ouvraient sur toutes sortes de malversations et d’économies… mortelles.
L’équipage et les 228 morts du vol entre Paris et Rio ne sont plus là pour raconter ce qui s’est passé. Les 10 millions d’euros dépensés pour retrouver les fameuses boîtes noires qui nous auraient dit toute la vérité l’ont été en pure perte. Comme le disait le 22 août un des correspondants du site www.eurocokpit.com [19] (1), et alors que le BEA (2) affirmait au lendemain de la catastrophe que l’Airbus gisait “en un seul morceau” : “A l’heure où l’on sait repérer une molécule d’eau (vieille de plusieurs centaines de millions d’années) dans la zone polaire de Mars, on nous “informe” qu’il est impossible de localiser 200 tonnes de ferraille à 4 km sous les quilles de nos plus beaux fleurons nucléaires et électronico-subaquatiques.” En réalité, la vérité sur ce qui s’est passé, que tous les pilotes dénoncent de longue date, et que savaient tout aussi bien les dirigeants d’Air France et d’Airbus, c’est la défaillance des sondes Pitot de marque française Thalès (d’EADS). Ces dernières ont été choisies préférentiellement à celles de marque américaine Goodrich et avaient été certifiées à l’origine par Airbus pour ce type d’avion, pour de pures raisons de concurrence économique et sans essais préalables réellement probants. Le rôle de ces sondes est primordial, car elles permettent de mesurer la vitesse de l’avion mais aussi divers paramètres conduisant à apprécier les conditions atmosphériques, l’altitude, etc. En résumé, où se trouve l’appareil, où il va et quels risques il encourt. Depuis 15 ans (!), les difficultés provoquées par les sondes Pitot de maque Thalès étaient connues. En 1994, un prototype d’A330 s’était écrasé à Toulouse, dont la faute avait été évidemment attribuée à une “erreur de pilotage”. Jusqu’en 2008, de nombreux Air Safety Reports (ASR, rapports d’incidents signalant les défaillances des sondes) avaient été émis, mais jamais la compagnie Air France, soutenue par le BEA et l’EASA, n’avait pris la moindre mesure (3). Pire, alors que ces sondes ont de plus en plus clairement été incriminées dans l’accident de l’AF 447, le BEA et la direction d’Air France ont fait disparaître purement et simplement les comptes-rendus circonstanciés d’incidents répertoriés durant le vol de l’AF447 et tous ceux identiques à celui ayant conduit au crash du 1er juin. Les enjeux à l’origine d’un tel comportement sont considérables pour l’Etat français et pour l’aéronautique européenne :
– la mise à nu de pratiques scandaleuses exposant volontairement des vies humaines (scandaleuses d’ailleurs même du point de vue du capital, quand on sait l’effort énorme consenti pour le développement des équipements et leur intégration dans l’avion afin de prendre en compte les contraintes de sécurité) ;
– le risque d’astreinte d’Air France au paiement de dédommagements astronomiques aux familles des victimes si la responsabilité de la compagnie venait à être établie (4) ;
– les retombées commerciales des plus négatives pour Airbus.
Hélas pour Air France, une nouvelle preuve du type de celles effacées refaisait son apparition avec l’incident, identique aux autres de la série, se produisait de nouveau le 13 juillet sur un vol Paris-Rome, et remettant à nouveau en question sur le devant de la scène la fiabilité des sondes Thalès. Air France décidait donc dans l’urgence de changer un certain nombre des sondes Thalès de ses A320 et A330 par des Goodrich… le 30 juillet. C’est-à-dire deux mois après le crash du 1er juin, deux mois durant lesquels c’est sciemment que des milliers de vol, transportant des centaines de milliers de personnes ont été effectués avec le risque permanent de se crasher !
Mais Airbus comme Air France n’en sont plus à cela près. Plusieurs accidents aériens impliquant l’A320 et son système de navigation avaient eu lieu au mont Saint-Odile et à Bangalore, et là aussi les pilotes avaient été mis en cause. Or, pour gagner du temps, Airbus avait validé ce système expérimenté sur Boeing sans faire des essais suffisants pour le certifier de façon fiable sur l’A320 dont le système d’exploitation informatique est configuré différemment. Résultat, le système fournissait de fausses informations au pilote sur l’altitude et la direction de l’avion au décollage, informations mortelles de nuit ou par temps nuageux !
Rappelons la catastrophe du 25 juillet 2000 à Gonesse, où 113 personnes trouvaient la mort au décollage d’un Concorde affrété par la Continental Airlines. On nous a assuré que c’était la faute à un bout de ferraille qui traînait sur la piste, résultat “évident” de la négligence des employés de l’aéroport. Cependant, huit ans après, cinq personnes, ainsi que la compagnie américaine, se retrouvaient au tribunal pour “homicides et blessures involontaires”. Car une des causes principales du crash résidait dans un “défaut important” du Concorde, au niveau de l’aile de l’avion. “Or ce défaut était connu du constructeur (Aerospatiale puis Airbus et enfin EADS), comme de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC) dès 1979, après l’accident d’un Concorde à Washington (Etats-Unis) précurseur de celui de Gonesse. Le ministre des Transports de l’époque Joël Le Theule en avait été informé. On ne trouve pas la trace de ce “défaut important” dans le rapport du BEA sur l’accident de Washington. Tous les noms des enquêteurs et celui du coordinateur de l’enquête sont masqués” (5). Et malgré 16 incidents graves et 6 accidents précurseurs rapportés sur 24 années d’exploitation d’une flotte de 13 avions, le BEA écrivait que “cet accident n’était pas prévisible” !
Le Manuel de gestion de la sécurité aérienne (OACI) précise :
“Parmi les principaux facteurs qui déterminent un contexte favorable aux accidents et aux incidents, on peut citer la conception du matériel, les infrastructures d’appui, les facteurs humains et culturels, la culture de sécurité de l’entreprise et les facteurs de coûts.”
En mars 2004, la Mission d’information de l’Assemblée nationale sur la sécurité du transport aérien de voyageurs relevait dans son rapport que “ le problème des pièces détachées dont la traçabilité n’est pas établie et qui font l’objet de copies ou de trafics illicites (contrefaçon, pièces d’occasion recyclées...)”.
Le rapport faisait donc la pieuse et stérile recommandation “d’assurer une meilleure traçabilité des pièces détachées et de lutter contre le trafic de pièces non conformes, de contrefaçon ou d’occasion”.
Lorsqu’on sait que “le prix d’une pièce est multiplié environ par dix par rapport à son coût de fabrication, en raison des frais induits par la certification et les tests” (6), on ne peut assurément que s’en remettre aveuglément au sens moral de ces compagnies aériennes, dont l’objectif final et essentiel est de faire du profit, pour s’assurer de la fiabilité de ces pièces de rechange !
Avant chaque vol, un membre de l’équipage technique fait “le tour de l’avion” ainsi que l’équipe de maintenance. Il s’agit d’effectuer un certain nombre d’opérations de contrôle : intégrité de la cellule, des ailes, des réacteurs, absence de fuites de carburant, huile, hydraulique, état des pneus, etc. “Cette “visite prévol” est une phase très importante du vol. La négliger peut conduire à un accident. Jusqu’où va-t-on aller pour améliorer la productivité, car c’est bien de cela dont il s’agit : diminuer au maximum la durée des escales et donc l’immobilisation au sol de l’avion !” (7)
Ces visites sont de plus en plus réduites et les pilotes soumis à des pressions grandissantes pour en diminuer le temps, comme ils sont par ailleurs soumis à des conditions de travail draconiennes.“Dans une étude réalisée en décembre 2006, la DGAC (Direction générale de l’aviation civile) notait que le niveau de fatigue des pilotes augmentait avec le nombre d’étapes réalisées par jour... et que le nombre d’étapes était un élément à prendre en compte. Une nouvelle réglementation est pourtant appliquée en Europe depuis juillet 2008. Un pilote peut désormais effectuer un nombre d’étapes illimité en 11 heures de temps de service car le nombre d’étapes n’est pas réglementé.
“La DGAC ne tient pas compte des études scientifiques sur la fatigue afin de ne pas porter atteinte à la “procuctivité” des équipages et donc aux intérêts économiques du transport aérien” (8).
Pourtant, dans une étude sur la fatigue en aéronautique remise à la DGAC en novembre 1998, le Laboratoire d’anthropologie appliquée (LAA) affirmait que pour la prévention efficace de la fatigue des équipages, “dans le contexte de forte concurrence que connaissent actuellement les compagnies aériennes françaises et étrangères les conduisant à se placer aux limites maximales autorisées, il apparaît indispensable que cette réglementation évolue de manière à réduire les risques sur le plan de la sécurité des vols.”
Depuis, rien n’a changé... ! De nombreux pilotes et personnels aériens ne cessent de plus en plus de les dénoncer des conditions de travail tellement éreintantes qu’ils ne sont plus fiables aux commandes d’un appareil.
Nous n’avons fait qu’effleurer différents aspects de cette incurie calculée des compagnies aériennes pour faire du fric. La bourgeoisie des pays développés peut toujours établir des listes “noires” ou “grises” des compagnies aériennes à éviter dans certains pays, elle n’a rien de mieux à proposer. Mais elle sait mieux mentir et camoufler la monstrueuse réalité.
Mulan (22 octobre)
1) Nombre des informations de cet article proviennent de ce site animé par des pilotes professionnels.
2) Bureau d’enquêtes et d’analyses, organisme officiel chargé d’enquêter sur les accidents et incidents de l’aviation civile. Cet organisme gouvernemental est spécialisé dans la falsification la plus honteuse d’évènements divers aériens et maritimes pour mentir sur les véritables raisons de certaines tragédies. Ainsi, le BEA-Mer s’était lancé en septembre 2009 dans des explications “les plus fumeuses pour expliquer le naufrage du Bugaled Breizh, ce chalutier de 24 mètres ayant – selon la version officielle – été happé vers le fond par un banc de sable disparu aussitôt après avoir commis son forfait, alors qu’il a été établi qu’un sous-marin avait accroché ses chaluts.” www.eurocokpit.com [19]
3) Signalons au passage que le Syndicat national des pilotes de ligne a fait le jeu de la direction et de la DGAC, ne demandant que des “aménagements” ridicules en termes d’efficacité.
4) Deux familles américaines viennent ainsi récemment de porter plainte contre Air France, mettant en avant le caractère “défectueux et déraisonnablement dangereux” de l’A330.
5) Les dossiers noirs du transport aérien. Henri Marnet-Cornus.
6) Idem.
7) Idem.
8) Idem.
Un lecteur signant JM a posté sur notre site Internet un commentaire très intéressant qui pose la question de la nécessaire collaboration entre les différents groupes révolutionnaires. Dans son message intitulé “Conditions des alliances et des rapprochements des organisations” (1), ce camarade demande sur quels critères se base le CCI pour essayer de travailler, ou non, avec une autre organisation.
Notre réponse publiée ci-dessous s’appuie en grande partie sur les différents commentaires postés par le CCI au cours de cette discussion. Nous profitons d’ailleurs de cet article pour encourager tous nos lecteurs à venir débattre sur notre site pour commenter, critiquer, compléter ou questionner nos articles.
Par vos articles, vous essayez parfois de vous rapprocher d’autres groupes politiques. Par exemple avec les anarchistes.
Avez-vous un document officiel qui traite des conditions des alliances et des rapprochements ? Ou bien, vous faites toujours au cas par cas ?
Par exemple, le CIQI, une organisation trotskiste, a récemment abandonné le soutien aux syndicats qu’il défendait depuis très longtemps. Il s’est donc, sur ce point, rapproché de la Gauche communiste (https://wsws.org/francais/News/2009/sep2009/opel-s19.shtml [21])
On a parfois l’impression que les rapprochements et les éloignements des organisations entre elles se règlent d’après des principes bureaucratiques pour ne pas dire opportunistes. Dans un cas, une organisation ne voudra pas discuter avec une autre parce que la première pourrait se faire absorber par la deuxième. Cela dénote une faiblesse organisationnelle. Dans un autre cas, c’est parce que les militants de la première organisation ne sont pas sûrs et pourraient “mal” être influencés par la deuxième. Cela dénote une faiblesse théorique.
On peut aussi admettre que toute discussion n’est pas souhaitable si elle n’apporte pas un éclairage théorique ou bien une collaboration sur quelque chose de concret. Mais mon sentiment est qu’on ne mutualise pas suffisamment les tâches techniques, qui sont habituellement neutres politiquement (transport, hébergement, renseignements...), et que la collaboration politique sur des points précis (interventions en AG...) se fait un peu au petit-bonheur, sans suite après le mouvement.
A mon avis, il faudrait un document résumant à quelles conditions et pourquoi il pourrait y avoir une collaboration entre militants. Il faudrait que ce document ne soit pas excessivement restrictif ni permissif pour ne pas paralyser ou pourrir l’organisation. Ce serait un document très utile. Qu’en pensez-vous ?
“Seuls peuvent redouter des alliances temporaires, même avec des éléments incertains, ceux qui n’ont pas confiance en eux-mêmes. Aucun parti politique ne pourrait exister sans ces alliances” (Que faire ?, Lénine).
Dans ces quelques lignes, JM pose une question cruciale. Depuis quelques années, la classe ouvrière a ré-amorcé un processus lent mais profond de réflexion. Il y a une conscience de plus en plus grande de l’état désastreux du capitalisme et de son incapacité à offrir un quelconque avenir à l’humanité. Concrètement, au-delà des luttes encore trop rares, cette dynamique s’incarne surtout à travers une vie plus riche au sein du milieu révolutionnaire. Des groupes relativement anciens (comme OPOP au Brésil) et d’autres plus jeunes ou même naissants, ainsi que des individus, essayent de construire un tissu international au sein duquel se développe un débat franc et fraternel (2). Les révolutionnaires sont aujourd’hui encore peu nombreux à travers le monde ; et il n’y a rien de plus néfaste que l’isolement. Créer des liens et débattre à l’échelle internationale est donc vital. Les divergences, les désaccords, quand ils sont discutés ouvertement et sincèrement, sont une source d’enrichissement pour la conscience de toute la classe ouvrière.
Mais ces évidences ne vont pas de soi pour tout le monde. Il règne aujourd’hui encore, au sein du camp révolutionnaire, une certaine dispersion, peu de travail en commun voire, pire, du sectarisme ! Les différents points de vue et analyses, au lieu d’engendrer de sains débats, sont trop souvent un prétexte au repli sur soi. Il y a une tendance à la défense de “sa chapelle”, une sorte d’esprit de boutiquier qui n’a rien à faire dans le camp de la classe ouvrière (c’est d’ailleurs pour illustrer cela qu’au terme “alliances” utilisé par JM, le CCI lui préfère ceux de “collaboration”, “travail en commun”, “prise de position commune”…). Les révolutionnaires ne sont pas des concurrents les uns des autres ! Nous sommes donc parfaitement d’accord avec JM quand il dit : “On a parfois l’impression que les rapprochements et les éloignements des organisations entre elles se règlent d’après des principes bureaucratiques pour ne pas dire opportunistes. Dans un cas, une organisation ne voudra pas discuter avec une autre parce que la première pourrait se faire absorber par la deuxième. Cela dénote une faiblesse organisationnelle. Dans un autre cas, c’est parce que les militants de la première organisation ne sont pas sûrs et pourraient “mal” être influencées par la deuxième. Cela dénote une faiblesse théorique.”
JM a aussi raison de demander à ce que de telles collaborations s’appuient sur des critères clairs et non suivant des choix tactiques intéressés.
La société capitaliste, et c’est là la base du marxisme, est divisée en deux camps irréconciliables aux intérêts antagoniques : la bourgeoisie et le prolétariat. Toute la politique de notre organisation est basée sur cette approche. Pour le CCI, il faut en effet à la fois la plus grande collaboration entre les organisations appartenant au camp prolétarien et la plus grande fermeté face au camp bourgeois. Cela implique forcément de déterminer ce qui distingue fondamentalement ces deux camps. A première vue, on pourrait croire cette distinction évidente. Après tout, chaque organisation se réclame officiellement d’un courant, soit en soutenant ouvertement le système actuel (généralement la droite), soit en affirmant défendre les intérêts de travailleurs (la gauche et l’extrême-gauche). Nombreux sont les groupes se proclamant révolutionnaires : il y a les communistes, les trotskistes, les maoïstes (un peu moins aujourd’hui), les anarchistes officiels… Mais en réalité, ce que dit une organisation d’elle-même ne peut suffire. L’histoire fourmille d’exemples d’organisations jurant la main sur le cœur défendre la cause du prolétariat pour mieux le poignarder dans le dos. La social-démocratie allemande se disait prolétarienne en 1919 en même temps qu’elle assassinait Rosa Luxemburg, Karl Liebknecht et des milliers d’ouvriers. Les partis staliniens ont écrasé dans le sang les insurrections ouvrières de Berlin en 1953 et de Hongrie en 1956 au nom du “communisme” (en fait dans l’intérêt de l’URSS).
Si “l’emballage” ne suffit pas pour définir la nature d’une organisation, comment alors en évaluer le “contenu” (le programme, la plate-forme présentant les positions politiques) ?
JM souligne qu’un groupe trotskiste, le CIQI, vient d’abandonner le soutien aux syndicats, affirmant ainsi que “sur ce point” le CIQI s’est “rapproché de la Gauche communiste” (courant dont est issu le CCI). Mais ce seul critère n’est pas suffisant ou déterminant d’un tel rapprochement. N’a-t-on pas vu dans les années 1970, en France, des organisations maoïstes comme la Gauche prolétarienne (qui publiait la Cause du peuple) qui considéraient eux aussi les syndicats comme des organes bourgeois, ce qui ne les empêchait pas de se réclamer de Staline et de Mao, deux ennemis jurés et assassins de la classe ouvrière ! Toute position politique ne peut donc pas déterminer, à elle seule, la nature d’une organisation. Pour le CCI, il existe des critères fondamentaux. Soutenir le combat de la classe ouvrière contre le capitalisme signifie à la fois lutter de façon immédiate contre l’exploitation (lors des grèves, par exemple) et ne jamais perdre de vue l’enjeu historique de ce combat : le renversement de ce système d’exploitation par la révolution. Pour ce faire, une telle organisation ne doit jamais apporter son soutien, de quelque manière que ce soit (même de façon “critique”, par “tactique”, au nom du “moindre mal”…), à un secteur de la bourgeoisie : ni à la bourgeoisie “démocratique” contre la bourgeoisie “fasciste” ; ni à la gauche contre la droite ; ni à la bourgeoisie palestinienne contre la bourgeoisie israélienne ; etc. Une telle politique a deux implications concrètes :
1) il s’agit aussi de refuser tout soutien électoral, toute collaboration, avec des partis gérants du système capitaliste ou défenseurs de telle ou telle forme de celui-ci (social-démocratie, stalinisme, “chavisme”, etc.) ;
2) surtout, lors de chaque guerre, il s’agit de maintenir un internationalisme intransigeant, en refusant de choisir entre tel ou tel camp impérialiste. Au cours de la Première Guerre mondiale comme au cours de toutes les guerres du xxe siècle, toutes les organisations qui n’ont pas fait ce choix, qui ont abandonné le terrain de l’internationalisme en défendant l’une des forces impérialistes en présence, ont en fait trahi la classe ouvrière et ont été définitivement emportés dans le camp de la bourgeoisie.
Le court message de JM soulève en fait la double question : dans quel camp, pour le CCI, se situent les anarchistes et les trotskistes ?
Les anarchistes, pour la plupart, ne se réclament pas du marxisme et ont sur de nombreux points de grandes divergences avec le CCI. Pourtant, comme l’a remarqué JM, “Par vos articles, vous essayez parfois de vous rapprocher d’autres groupes politiques. Par exemple avec les anarchistes”. En effet, depuis quelques années, il existe des discussions entre certains groupes ou individus anarchistes et le CCI. Par exemple, nous collaborons avec le KRAS en Russie (section de l’AIT anarcho-syndicaliste), en publiant et en saluant ses prises de positions internationalistes face à la guerre en Tchétchénie, par exemple. Le CCI considère ces anarchistes avec qui il discute, malgré les divergences, comme faisant partie du camp du prolétariat. Pourquoi ? Parce qu’ils se démarquent de tous ces autres anarchistes (comme ceux de la Fédération anarchiste) et de tous ces “communistes” (comme ceux du PCF) qui défendent en théorie l’internationalisme mais qui s’y opposent en pratique, en défendant lors de chaque guerre un camp belligérant contre un autre. Il ne faut pas oublier qu’en 1914, lors de l’éclatement de la guerre mondiale, et en 1917, lors de la Révolution russe, les “marxistes” de la social-démocratie étaient du côté de la bourgeoisie contre le prolétariat alors que la CNT espagnole dénonçait la guerre impérialiste et soutenait la révolution ! C’est d’ailleurs pour cela qu’elle avait été invitée au IIe congrès de l’Internationale communiste.
Quant au trotskisme, la majorité sympathisant avec ce courant pense sincèrement se battre pour l’abolition du capitalisme (comme au sein de la mouvance anarchiste d’ailleurs). Les jeunes attirés par le NPA sont souvent authentiquement révoltés par l’inhumanité de ce système d’exploitation. Mais notre lecteur devrait s’interroger si, au regard des “critères fondamentaux” que nous venons de décrire, le trotskisme, comme courant (avec les organisations qui s’en réclament), n’est pas passé dans le camp de la bourgeoisie : participation à la Seconde Guerre mondiale dans les rangs de la Résistance ; défense de l’URSS (en fait du camp impérialiste russe) ; soutien à Hô Chi Minh pendant la guerre du Vietnam ; soutien à Chavez aujourd’hui ; appel au vote pour la gauche au second tour des élections (voire pour Chirac en 2002) ; alliances électorales avec le PC ou le PS (notamment aux municipales) ; campagne commune avec ces partis pour le NON au référendum de mai 2005 sur la Constitution européenne, etc.
Mais justement, face à cette politique faussement prolétarienne et clairement bourgeoise dans les faits, il est tout à fait possible que des ouvriers, même s’ils militent dans ces organisations, se posent des questions, soient poussés par leurs réflexions à s’en détacher et se rapprochent des positions prolétariennes. Si une organisation, en tant que telle, ne peut pas passer du camp bourgeois au camp prolétarien (comment imaginer LO renier d’un seul coup toute son histoire ?), il est toujours possible que de petites minorités ou, plus probablement, que des éléments s’éloignent individuellement du nationalisme du trotskisme pour se rapprocher de l’internationalisme prolétarien. C’est d’ailleurs ce qui se produit actuellement en partie en Amérique latine où l’extrême-gauche au pouvoir (Chavez, Lula…) révèle chaque jour un peu plus sa véritable nature anti-ouvrière aux yeux de certaines minorités.
Avec tous ceux là, le CCI est toujours prêt à discuter ouvertement… et avec enthousiasme !
Tibo, le 16 octobre
1) Ce commentaire [22] a été posté à la suite de notre article sur les luttes à Freescale qui ont eu lieu entre avril et juin (“Freescale : comment les syndicats sabotent les efforts des ouvriers pour lutter”, Révolution internationale no 404, septembre 2009).
2) Notre presse de ces dernières années témoigne de ce processus embryonnaire. Voici deux exemples parmi tant d’autres : “Déclaration internationaliste depuis la Corée contre la menace de guerre [23]” et “Une rencontre de communistes internationalistes en Amérique latine [24]”.
Ces derniers mois, ont fleuri sur les rayons des librairies des couvertures aux titres tapageurs sur lesquelles s’étalaient de grands portraits de Marx. Il y en a eu pour tous les goûts. Le biblique : “Marx est toujours vivant”. Le classique : “Marx, le retour” . L’emphatique : “Marx, les raisons d’une renaissance”. Le répétitif en manque d’imagination : “Le grand retour de Marx”. Ou le sobre mais en lettre majuscule : “MARX”1. Tous ces magazines, à leur façon et en pimentant le tout de quelques critiques, ont encensé le génie de ce “grand penseur” !
Cet amour soudain peut surprendre. Il y a quelques années encore, Marx était présenté comme le diable ! Françoise Giroud a d’ailleurs même écrit une biographie de Jenny Marx, la femme de Karl, en titrant tout bonnement : Jenny Marx ou la femme du diable ! C’est à lui qu’on devait les horreurs du stalinisme, les camps de travail en Sibérie et en Chine, les dictatures sanguinaires de Ceausescu ou de Pol Pot.
Alors pourquoi ce revirement ? C’est que la crise économique est passée par-là. La situation actuelle inquiète profondément la classe ouvrière. Et une partie d’entre elle, une petite partie, essaye de comprendre pourquoi le capitalisme est moribond, comment résister à la dégradation des conditions de vie, comment lutter et surtout – ce qui est le plus difficile aujourd’hui – savoir si oui ou non un autre monde est possible… Et tout naturellement, quelques-uns se tournent vers Marx. Les ventes du Capital ont d’ailleurs dernièrement connu un certain regain. Il ne s’agit pas d’un phénomène massif concernant toute la classe ouvrière mais quand même, ce début de réflexion minoritaire, et parfois souterrain, inquiète la bourgeoisie. La classe dominante a horreur que les ouvriers se mettent à penser par eux-mêmes ! Elle s’empresse toujours de les gaver de sa propagande, de ses mensonges et, aujourd’hui, de sa vision de Marx, de sa vision du marxisme.
Présenter Marx comme le diable ne suffisant plus aujourd’hui à repousser de son œuvre les plus curieux, la bourgeoisie a été contrainte de changer de tactique. Elle s’est faite doucereuse, aimable et révérencieuse, voire louangeuse avec le vieux barbu… pour mieux le dénaturer et le réduire à une icône inoffensive comme la momie de Lénine !
A en croire tous ces magazines, Marx était un génie de l’économie (n’avait-il pas dénoncé, bien avant Benoît XVI, le rôle funeste de l’argent, principal vecteur de l’injustice ?), un grand philosophe, un grand sociologue et même un précurseur de l’écologie ! La bourgeoisie est aujourd’hui prête à reconnaître tous les talents à Marx, tous sauf un, qu’il était un grand révolutionnaire, un combattant de la classe ouvrière ! Et le marxisme est une arme théorique forgée par la classe ouvrière pour renverser le capitalisme ! Ou, pour reprendre une expression de Lénine “Le marxisme est la théorie du mouvement libérateur du prolétariat.”2.
Marx n’est pas né communiste. Il l’est devenu. Et c’est la classe ouvrière qui l’y a “converti”. Jeune, Marx était même très critique envers les théories communistes. Voici ce qu’il en disait :
On “ne saurait accorder aux idées communistes sous leur forme actuelle ne fût-ce qu’une réalité théorique, donc moins encore souhaiter leur réalisation pratique, ou simplement les tenir pour possibles” (3). Ou encore, le communisme est “une abstraction dogmatique” (4). Au début, Marx jugeait donc les “idées communistes” idéalistes et dogmatiques. Pourquoi ?
Depuis qu’il y a des opprimés sur terre, les hommes rêvent d’un monde meilleur, d’une sorte de paradis sur terre, d’une communauté où tous les hommes seraient égaux et où régnerait la justice sociale. C’était vrai pour les esclaves. C’était vrai pour les serfs (les paysans). Dans la grande révolte de Spartacus contre l’Empire romain, les esclaves révoltés ont tenté d’établir des communautés. Les premières communautés chrétiennes prêchaient la fraternité humaine universelle et ont tenté d’instituer un communisme des biens. John Ball, l’un des leaders de la grande révolte des paysans en Angleterre en 1381 (et il y a eu de nombreuses révoltes paysannes contre le féodalisme) disait : “Rien ne pourra aller bien en Angleterre tant que tout ne sera pas géré en commun ; quand il n’y aura plus ni lords, ni vassaux ”. Seulement, il ne pouvait s’agir chaque fois que d’un beau rêve. Sous la Grèce ou la Rome antiques, au Moyen Age, bâtir un monde communiste était impossible. Tout d’abord, la société ne produisait pas suffisamment pour satisfaire l’ensemble des besoins. Il ne pouvait y avoir qu’une minorité, qui en exploitant la majorité, pouvait vivre “confortablement”. Ensuite, il n’existait pas de force sociale suffisamment puissante pour bâtir un monde égalitaire : les esclaves ou les paysans ne pouvaient que se faire massacrer à chaque révolte. Bref, les “idées communistes” ne pouvaient être qu’utopiques.
Et la classe ouvrière, en tant que classe elle-aussi exploitée, a repris à son compte ces vieux rêves. Au xviiie et au début du xixe siècle, elle a, en Angleterre, et surtout en France, tenté d’instaurer de-ci de-là des communautés. Des penseurs ont essayé d’élaborer, à partir de leur imagination, un monde parfait. C’est d’ailleurs pour ça qu’à “utopique”, Marx ajoutait l’adjectif “dogmatique”. Ces “idées communistes” étaient “dogmatiques” parce qu’inventées de toute pièce à partir d’idéaux intemporels et immuables comme la Justice, le Bien, l’Egalité… elles ne se construisaient pas peu à peu, avec un aller-retour permanent entre la réalité matérielle et le cerveau des hommes mais la réalité était priée de se plier aux exigences de la pensée et à ses désirs de Justice, d’Egalité…
Mais alors, pourquoi Marx va-t-il finalement vouer sa vie au combat pour le communisme ? En fait, voir ce qu’est la classe ouvrière et vivre ses grèves, vont totalement le bouleverser. A travers les luttes des tisserands de Silésie de 1844 ou de celles du prolétariat, un peu plus tard, en France en 1848, Marx va découvrir ce qu’est la classe ouvrière, ce qu’est son combat. Et il va voir dans la réalité de ce combat le moteur indispensable à la transformation du monde, une promesse vivante pour l’avenir, une possibilité pour la première fois réelle d’aller vers le communisme. Voici quelques lignes qui montrent à quel point Marx fut frappé par ce qu’il vécut : “Lorsque les ouvriers communistes se réunissent, leur intention vise d’abord la théorie, la propagande, etc. Mais en même temps ils s’approprient par-là un besoin nouveau, le besoin de la société toute entière. (...) La compagnie, l’association, la conversation qui vise l’ensemble de la société les comblent ; pour eux la fraternité humaine n’est pas une phrase, mais une vérité, et, de leurs figures endurcies par le travail, la noblesse de l’humanité rayonne vers nous” (5).
C’est un peu lyrique mais ce que voit Marx ici c’est que, contrairement aux classes exploitées du passé, le prolétariat est une classe qui travaille de manière associée. Cela veut dire, pour commencer, qu’elle ne peut défendre ses intérêts immédiats que par le moyen d’une lutte associée, en unissant ses forces. Mais cela veut dire aussi que la réponse finale à sa condition de classe exploitée ne peut résider que dans la création d’une réelle association humaine, d’une société fondée sur la libre coopération. Et surtout, cette “association” a pour la première fois “les moyens de ses ambitions” car elle peut s’appuyer sur les énormes progrès apporté par l’industrie capitaliste. Techniquement, l’abondance est possible. Avec les progrès apportés par le capitalisme, il est possible de satisfaire les besoins de toute l’humanité. C’est tout cela que Marx a vu grâce à la classe ouvrière.
Pour résumer, Marx, mais aussi évidemment Engels, en se plaçant du point de vu de la classe ouvrière et en faisant leur son combat révolutionnaire, en comparant d’un côté le potentiel du prolétariat et de l’autre les crises et les contradictions qui frappent le capitalisme, sont peu à peu parvenus à comprendre que le communisme devenait à la fois possible et nécessaire. Possible et nécessaire grâce :
– au développement des forces productives, à l’échelle mondiale, sans lequel il ne peut y avoir d’abondance ni de pleine satisfaction des besoins humains ;
– à la naissance du prolétariat, première classe exploitée qui, en affrontant ce capital mondial, sera conduit à être le fossoyeur du vieux monde ;
– à la nature forcément éphémère du capitalisme.
Marx et Engels n’auraient jamais compris tout cela s’il n’avait pas été, avant tout, des combattants de la classe ouvrière ! En effet, seule une classe dont l’émancipation s’accompagne nécessairement de l’émancipation de toute l’humanité, dont la domination sur la société n’implique pas une nouvelle forme d’exploitation mais l’abolition de toute exploitation, pouvait avoir une approche marxiste de l’histoire humaine et des relations sociales. Toutes les autres classes en étaient, et en sont encore, forcément incapables. On l’a déjà dit, pour les esclaves ou les serfs, un autre monde ne pouvait être qu’imaginaire. Leur démarche, leur pensée, ne pouvait donc être a fortiori qu’utopiste, idéaliste. Quant aux classes dominantes, les maîtres, les nobles ou les bourgeois, il leur était et il leur est toujours impossible de regarder en face la réalité, d’étudier objectivement l’évolution de l’histoire humaine et leur propre monde car sinon ils seraient irrémédiablement contraints de voir que leur classe, leur monde, leurs privilèges étaient ou sont condamnés à disparaître.
La noblesse se croyait investie d’un devoir divin et donc éternel. Comment pouvait-elle comprendre quoi que ce soit à l’évolution des sociétés humaines ?
Un autre exemple, plus concret et d’actualité celui là. Marx est aujourd’hui salué par tous les économistes qui cherchent dans son célèbre Capital des solutions pour faire face à la crise actuelle. Cela ressemble fort à la quête du Graal, vaine et irrationnelle. Ces économistes pourront lire, et relire encore, toutes les pages du Capital, les tordre dans tous les sens, il n’en sortira pas une seule goutte d’eau de jouvence permettant au capitalisme de rester éternellement jeune. Au contraire ! Si Marx s’est plongé dans l’économie, c’est justement pour comprendre par quels mécanismes le capitalisme est rongé de l’intérieur et donc condamné à périr. Il ne s’agissait pas pour lui de trouver des remèdes aux maladies du capitalisme mais de le combattre et de préparer son renversement. Tous nos docteurs es sciences, et autres spécialistes de l’enfumage idéologique, ne pourront jamais rien comprendre aux ouvrages économiques de Marx car ses conclusions leur sont forcément inacceptables et même insoutenables !
Adopter une démarche scientifique et objective sur la question de l’histoire des sociétés humaines, sur la question sociale, signifie percevoir qu’il y a eu le communisme primitif, puis l’esclavagisme, puis le féodalisme, puis le capitalisme (et peut être ensuite le communisme) parce que nos capacités productives évoluaient, parce que donc la façon dont la société devait s’organiser pour produire – nos rapports de production – devaient évoluer de pair et qu’enfin tout cela s’est incarné à travers l’histoire de la lutte des classes. On comprend pourquoi le marxisme – cette “démarche scientifique et objective sur la question de l’histoire des sociétés humaines et sur la question sociale” – est forcément inaccessible à la bourgeoisie… Tout simplement parce que la conclusion logique de cette approche est que le capitalisme doit disparaître et les privilèges de la bourgeoisie avec !
En nous parlant aujourd’hui, à tort et travers, de Marx et du marxisme, c’est tout cela que la bourgeoisie tente de cacher derrières ses mensonges et ses falsifications. Comme disait Lénine, “Les grands révolutionnaires ont toujours été persécutés durant leur vie : leur doctrine a toujours été en butte à la haine la plus féroce, aux campagnes de mensonge et de diffamation les plus ineptes de la part des classes oppresseuses. Après leur mort on tente de les convertir en icônes inoffensives, de les canoniser pour ainsi dire, d’entourer leur nom d’une auréole de gloire pour la consolation des classes opprimées et pour leur duperie, en même temps qu’on émascule la substance de leur enseignement révolutionnaire, qu’on en émousse le tranchant, qu’on l’avilit” (6). Cette fin de phrase est particulièrement appropriée à la propagande actuelle : “… on émascule la substance de leur enseignement révolutionnaire, on en émousse le tranchant, on l’avilit”.
Nous devons donc, nous, au contraire affirmer que Marx était un combattant révolutionnaire. Et même plus : seul un militant révolutionnaire peut être marxiste. Cette unité entre la pensée et l’action est justement un des fondements du marxisme. C’est aussi ce que disait Marx : “Jusqu’ici les philosophes n’ont fait qu’interpréter le monde de différentes manières; il s’agit maintenant de le transformer !” (7) ou encore “Les conceptions théoriques des communistes ne reposent nullement sur des idées, des principes inventés ou découverts par tel ou tel réformateur du monde. Elles ne sont que l’expression générale des conditions réelles d’une lutte de classe existante, d’un mouvement historique qui s’opère sous nos yeux” (8).
Le marxisme n’est ni une discipline universitaire ni une énième théorie sage et bien inoffensive, ni une utopie, ni une idéologie, ni un dogme. Au contraire ! Nous reprendrons ici le style flamboyant de Rosa Luxemburg en finissant par cette dernière citation : “Le marxisme n’est pas une chapelle où l’on se délivre des brevets d’“expertise” et devant laquelle la masse de croyants doit manifester sa confiance aveugle. Le marxisme est une conception révolutionnaire du monde, appelée à lutter sans cesse pour acquérir des résultats nouveaux, une conception qui n’abhorre rien tant que les formules figées et définitives et qui n’éprouve sa force vivante que dans le cliquetis d’armes de l’autocritique et sous les coups de tonnerre de l’histoire” (9).
Pawel (8 octobre 2009)
1) Respectivement : Challenges (décembre 2007), Courrier International (juillet 2008), le Magazine Littéraire (octobre 2008), Le Nouvel Observateur (août 2009), Le Point (spécial hors-série de juin/juillet 2009).
2) La faillite de la IIe Internationale, 1915.
3) Le communisme et la Allgemeine Zeitung d’Augsbourg.
4) Lettre à Ruge.
5) Manuscrits philosophiques et économiques de 1844.
6) Lénine, l’Etat et la révolution.
7) Thèses sur Feuerbach.
8) Le Manifeste communiste.
9) Rosa Luxemburg, l’Accumulation du capital.
Links
[1] https://fr.internationalism.org/files/fr/RI_406.pdf
[2] https://www.dailymotion.com/video/xaszy5
[3] https://fr.internationalism.org/en/tag/situations-territoriales/lutte-classe-france
[4] https://fr.internationalism.org/icconline/20009/la_defaite_a_ssangyong_coree_du_sud_montre_la_necessite_de_l_extension_de_la_lutte.html
[5] https://fr.internationalism.org/en/tag/5/232/coree
[6] https://fr.internationalism.org/en/tag/recent-et-cours/luttes-classe
[7] https://fr.internationalism.org/en/tag/vie-du-cci/correspondance-dautres-groupes
[8] https://www.contreinfo.info/
[9] http://www.romandie.com/infos/news/200910221854040AWP.asp
[10] http://www.lejdd.fr/International/UE/Depeches/Espagne-Hausse-sans-precedent-du-chomage-112846
[11] http://www.la-croix.com/Irlande-les-precedents-scrutins-et-la-donne-economique/article/2395557/55404
[12] https://fr.internationalism.org/en/tag/5/50/etats-unis
[13] https://fr.internationalism.org/en/tag/recent-et-cours/crise-economique
[14] https://www.lemonde.fr/idees/article/2009/10/17/un-prix-nobel-des-promesses_1255256_3232.html
[15] https://fr.internationalism.org/en/tag/personnages/barack-obama
[16] https://www.liberation.fr/societe/0101577634-1er-mai-un-proces-pour-avoir-denonce-des-policiers-deguises
[17] https://fr.internationalism.org/en/tag/5/36/france
[18] https://www.wsws.org/en/articles/2009/08/wild-a26.html
[19] http://www.eurocokpit.com
[20] https://fr.internationalism.org/en/tag/recent-et-cours/catastrophes
[21] https://wsws.org/francais/News/2009/sep2009/opel-s19.shtml
[22] https://fr.internationalism.org/ri404/freescale_comment_les_syndicats_sabotent_les_efforts_des_ouvriers_pour_lutter.html#omment-1431
[23] https://fr.internationalism.org/ri374/coree.html
[24] https://fr.internationalism.org/Internationalisme/2009/343/une_rencontre_de_communistes_internationalistes_en_amerique_latine.html
[25] https://fr.internationalism.org/en/tag/vie-du-cci/courrier-des-lecteurs
[26] https://fr.internationalism.org/en/tag/heritage-gauche-communiste/marxisme-theorie-revolution