Derrière
l'esbroufe des effets d'annonces du gouvernement en France (période
pré-électorale oblige !) pour masquer la dégradation
accélérée des conditions d'existence des
prolétaires (prétendue baisse des impôts,
pseudo-diminution du chômage, soi-disant augmentation du
pouvoir d'achat des ménages, "réduction" du
déficit de la sécurité sociale), les attaques
anti-ouvrières se poursuivent et s'intensifient sans la
moindre relâche.
Chaque semaine, de nouveaux plans de licenciements tombent et des milliers de salariés sont impitoyablement jetés sur le pavé dans tous les secteurs d'activité, dans toutes les régions : 832 suppressions d'emploi chez le câblo-opérateur Noos, 123 salariés licenciés à la chocolaterie Suchard à Strasbourg, fermeture du site de Cernay de l'équipementier automobile Dalphimetal avec 191 salariés, 700 emplois sont menacés dans les 2 prochaines années chez Bosch à Rodez, la papeterie Stora-Enso à Corbehem ferme ses portes après l'échec du plan de reprise par les salariés eux-mêmes. On licencie aussi bien chez Conforama que dans le personnel hôtelier. Même la CGT à Montreuil en Seine Saint Denis ne se prive pas de virer ses salariés comme n'importe quel autre patron. Le secteur automobile est particulièrement visé avec l’annonce de suppression de 10 000 emplois chez Peugeot-Citroën, les mises en chômage technique se multiplient à Renault Sandouvillle alors que Citroën ne recrute plus que des intérimaires. Les emplois industriels sont en baisse à un rythme de 2,5 % par an alors que les emplois en intérim explosent (hausse de 8% depuis un an) ; la précarité se généralise.
Dans le secteur public, ce sont 15 000 emplois qui doivent à leur tour disparaître et le gouvernement s'apprête à poursuivre non seulement l'attaque contre les retraites (voir article page 3) mais aussi contre les régimes spéciaux. On nous vante que le déficit de la Sécurité sociale a été ramené à 9 milliards d'euros pour le régime général et à 15 milliards tous régimes confondus. On planque en réserve jusqu'au lendemain des élections le rapport alarmiste de la Cour des comptes qui prévoit 39 milliards de déficit pour 2009 en préparation d'autres mauvais coups accélérant le démantèlement de la protection sociale.
L'ampleur
de ces attaques est noyée et masquée par un barouf
électoral qui ne va cesser d'enfler au cours des prochains
mois. Toute la bourgeoisie française s'efforce déjà
aujourd'hui de polariser l'attention sur les prochaines élections
présidentielles de mai 2007. Et les projecteurs des médias
se braquent alternativement sur les moindres faits, les gestes, les
paroles des deux principaux rivaux, favoris des sondages, Nicolas
Sarkozy et Ségolène Royal. Il n'y a aucune illusion à
se faire : quel que soit le vainqueur de ce cirque, il poursuivra de
plus en plus férocement les attaques contre les conditions de
vie de la classe ouvrière.
La classe ouvrière n'a qu'une façon de répondre aux attaques : développer ses luttes. Comment ? Là est toute la question qui se pose ouvertement aux prolétaires. Toute la bourgeoisie exploite les hésitations à entrer en lutte, les interrogations suscitées par les journées d'action stériles proposées par les syndicats malgré l'accumulation d'un ras-le-bol général, d'une colère grandissante qu'exprime épisodiquement tel ou tel secteur : on l'a vu récemment avec la manifestation parisienne du 25 septembre qui a rassemblé environ 5000 pompiers professionnels civils pour protester contre la suppression d'une prime de risque sur leur paie et pour réclamer une revalorisation de leur retraite assujettie à la loi Fillon.
Il est de plus en plus manifeste que, pour résister, les ouvriers ne peuvent pas compter sur les syndicats. L'objectif de ceux-ci n'est nullement de défendre les ouvriers mais au contraire de saboter leurs luttes. Cela s'est illustré une fois de plus dans le secteur de l'enseignement. L'annonce à la veille des vacances de la suppression de 8700 postes dans le seul secteur de l'Education nationale avait suscité une levée de boucliers de la part des syndicats qui s'étaient portés immédiatement en première ligne pour dénoncer le caractère "inacceptable" de ces coupes budgétaires dans ce secteur prioritaire et avaient promis bruyamment une "rentrée chaude". Or, qu'a-t-on vu en réalité ? Il était prévu dès le 6 septembre une forte mobilisation qui a fait long feu, grâce à un vague projet d'une journée de mobilisation élargie à toute la fonction publique le 28 septembre. Finalement, quelques jours avant cette date, on apprend que les syndicats "ont renoncé" à cette large mobilisation sous prétexte de ne pas noyer les revendications propres aux enseignants ou à l'Education nationale. En fait, cela n'a servi qu'à isoler et étouffer les revendications dans un cadre corporatiste et, autant que possible, école par école.
En même temps, ce sabotage a été accompagné d'un "black-out" médiatique quasiment complet, aucune publicité n'a été faite à cette journée de grève. Même dans le secteur de l'enseignement, les syndicats ont fait circuler le minimum de tracts. A la place a été organisé un grand battage sur la carte scolaire qui permettait de mettre en valeur la concurrence entre établissements. Résultat : tous les médias ont pu mettre en avant un "échec" de cette journée avec un taux de grévistes oscillant entre 15 et 30% selon les établissements et une manifestation qui n'a pu rassembler qu'autour de 5000 personnes à Paris, plus quelques milliers en province (alors qu'elle rassemblait les 5 principales fédérations d'enseignants, des parents d'élèves, des étudiants et des lycéens). La bourgeoisie et ses syndicats ont tout intérêt à éviter que ça bouge dans toute la fonction publique et de mettre de l'huile sur le feu. Ils ont ainsi pu exploiter à fond une hésitation à entrer dans la lutte dans l'Education nationale, un secteur déjà éprouvé par une longue bataille en 2003, qui s'est retrouvé totalement isolé et dont la grève n'a débouché que sur une cuisante défaite lors de la lutte contre la "réforme" du régime des retraites. De même prédomine aujourd'hui, là comme dans l'ensemble de la fonction publique, une lassitude face à des journées d'action syndicales vécues comme stériles. Dans ce secteur, comme dans le reste de la classe ouvrière, non seulement un sentiment croissant de "ras-le-bol" et une volonté de se battre demeure, de même que grandit aussi une interrogation sur comment on peut se battre.
Mais dans
l'immédiat, ces doutes et ces hésitations à
entrer en lutte sont exploités à fond par la
bourgeoisie pour accentuer le déboussolement et accroître
le climat de confusion au sein de la classe ouvrière afin de
la démoraliser, de la décourager, et finalement la
pousser à la résignation pour tenter de rabattre un
maximum d'ouvriers sur le terrain électoral.
A la base de ces manœuvres pour anesthésier ou désamorcer la combativité ouvrière, il y a le fait que toute la bourgeoisie s'efforce ainsi d'effacer les traces de la lutte contre le CPE et d'empêcher les ouvriers d'en tirer les leçons essentielles pour l'avenir. Dans les facultés et les lycées, les jeunes générations de prolétaires ou de futurs prolétaires ont déjà démontré au printemps dernier, il y a seulement quelques mois, quelle était la véritable voie à suivre. Elles ont montré à l'ensemble de la classe ouvrière que le seul moyen de se battre, de faire reculer la bourgeoisie et de freiner ses attaques, c'était de ne pas attendre les consignes syndicales, de se mobiliser de façon unie et massive en refusant les manœuvres de division, de chercher à étendre la lutte en allant chercher la solidarité d'autres travailleurs. Pour pouvoir lutter efficacement, il faut, comme l'ont montré les étudiants et lycéens au printemps dernier, prendre nos luttes en mains à travers des assemblées générales massives, souveraines et ouvertes à tous les prolétaires, avec des délégués élus et révocables à tout moment.
C'est justement pour faire oublier cette expérience et ses leçons que la bourgeoisie déploie aujourd'hui des trésors d'énergie pour tenter d'en effacer la mémoire dans la conscience des ouvriers.
Wim (29 septembre)
Le récent conflit entre Israël et le Hezbollah au Liban a été une nouvelle fois l'occasion, dans bon nombre de pays, d'entendre des voix s'élever contre "l'impérialisme américain" comme principal, voire unique, semeur de guerre et de déstabilisation. Les gauchistes sont souvent les premiers dans ce registre. En France, les trotskistes de LO et de la LCR en particulier ne ratent jamais une occasion de stigmatiser l'impérialisme américain, et celui de son allié israélien qualifié "d’expansionnisme sioniste", qui massacrent, pillent, occupent et exploitent les "peuples" et les "nations" opprimées .
Mais la première puissance mondiale n’a pas le monopole de l'impérialisme. Bien au contraire , ce dernier est une condition sine qua non à la survie de chacune des nations. La période de décadence du capitalisme, commencée il y a près d'un siècle, marque l'entrée du système dans l'ère de l'impérialisme généralisé auquel aucune nation ne peut se soustraire. Cet affrontement permanent contient la guerre comme perspective et le militarisme comme mode de vie pour tous les Etats, qu'ils soient grands, petits, forts, faibles, agresseurs ou agressés.
Pour en donner une définition très générale, l’impérialisme est la politique d’un pays qui cherche à conserver ou à étendre sa domination politique, économique et militaire sur d’autres pays, territoires, ce qui renvoie à de très nombreux moments de l’Histoire humaine (depuis les anciens empires assyrien, romain, ottoman ou aux conquêtes d’Alexandre le Grand jusqu’à nos jours). Seulement, dans le capitalisme, ce terme prend un sens très particulier. Comme l’écrivait Rosa Luxembourg, "la tendance du capitalisme aux expansions constitue l’élément le plus important, le trait remarquable de l’évolution moderne ; en fait l’expansion accompagne toute la carrière historique du capital, elle a pris dans sa phase finale actuelle, l’impérialisme, une énergie si impétueuse qu’elle met en question toute l’existence civilisée de l’humanité" 1 [4]. Il est donc vital de comprendre ce qu’est l’impérialisme dans un système capitaliste devenu décadent, ce qui engendre aujourd’hui partout des conflits mettant la planète à feu et à sang, ce qui dans la "phase finale actuelle […] met en question toute l’existence civilisée de l’humanité".
Dès lors que le marché mondial a été constitué au début du 20e siècle et a été partagé en zones commerciales et d'influences entre les Etats capitalistes avancés, l'intensification et le déchaînement de la concurrence qui en résultaient entre ces nations a conduit à l'aggravation des tensions militaires, au développement sans précédent d'armements et à la soumission croissante de l'ensemble de la vie économique et sociale aux impératifs militaires de la préparation permanente de la guerre.
Rosa Luxembourg a fait voler en éclats les bases de la mystification qui fait d'un Etat, ou d'un groupe particulier d'Etats, ceux qui disposent d'une certaine puissance militaire, les seuls responsables de la barbarie guerrière. Si tous les Etats ne disposent pas des mêmes moyens, tous ont la même politique. Si effectivement les ambitions de domination mondiale ne peuvent éclore que parmi les Etats les plus puissants, il n'en reste pas moins que les plus petits partagent les mêmes appétits impérialistes. Comme dans le milieu de la mafia, seul le grand parrain peut dominer la ville entière, tandis que le maquereau de quartier ne règne que sur une seule rue. Pourtant, rien ne les distingue au plan des aspirations ou des méthodes de gangsters. C'est ainsi que tous les petits Etats développent avec autant d'énergie que les autres leur ambition à devenir une plus grande nation aux dépens de leurs voisins.
C'est pourquoi il est impossible de faire une distinction entre Etats oppresseurs et Etats opprimés. En effet dans les rapports de force qui s'imposent entre les requins impérialistes, tous sont également concurrents dans l'arène mondiale. Le mythe bourgeois de l'Etat agresseur ou du bloc "d'agression" au militarisme viscéral sert de justification à la guerre "défensive". La stigmatisation de l'impérialisme le plus agressif ne constitue que la propagande de chaque adversaire pour embrigader les populations dans la guerre.
Le militarisme et l'impérialisme constituent des manifestations de plus en plus ouvertes de l'entrée du système capitaliste dans sa décadence, à tel point qu'ils provoquent dès le début du 20e siècle un débat parmi les révolutionnaires.
Face au phénomène de l'impérialisme, différentes théories ont été développées par le mouvement ouvrier pour l'expliquer, notamment par Lénine et Rosa Luxembourg. Leurs analyses se sont forgées à la veille et au cours de la Première Guerre mondiale contre la vision de Kautsky qui faisait de l'impérialisme une option parmi d'autres politiques possibles pour les Etats capitalistes et qui pouvait déboucher sur une "phase de superimpérialisme, d'union et non de lutte des impérialismes du monde entier, une phase de la cessation des guerres en régime capitaliste, une phase d'exploitation en commun de l'univers par le capital financier uni à l'échelle internationale." 2 [5]
A contrario, les approches marxistes ont en commun de considérer l'impérialisme non seulement comme un produit des lois du capitalisme mais de plus en plus comme une nécessité inhérente à son déclin. La théorie de Lénine revêt une importance particulière car elle lui a permis dans le premier conflit mondial de défendre un strict internationalisme devenant ensuite la position officielle de l'Internationale Communiste. Cependant Lénine aborde surtout la question de l'impérialisme d'une façon descriptive sans parvenir à expliquer clairement l'origine de l'expansion impérialiste. Pour lui, elle est essentiellement un mouvement des pays développés ayant pour caractéristique principale d'exploiter dans les colonies le capital des métropoles "en surabondance" en vue d'obtenir des "superprofits" en profitant d'une main d'œuvre moins chère et de matières premières abondantes.
Dans cette conception, les pays capitalistes avancés deviennent les parasites des colonies ; l'obtention des "superprofits", indispensables à leur survie, explique l'affrontement mondial pour conserver ou conquérir des colonies. Elle a pour conséquence de diviser le monde en pays oppresseurs d'une part et en pays opprimés dans les colonies, d'autre part. "L'insistance de Lénine sur le fait que les possessions coloniales étaient un trait distinctif et même indispensable de l'impérialisme n'a pas tenu l'épreuve du temps. Malgré la prévision que la perte des colonies, précipitée par les révoltes nationales dans ces régions, ébranlerait le système impérialiste jusque dans ses fondements, l'impérialisme s'est adapté tout à fait facilement à la "décolonisation". La décolonisation [après 1945] n'a fait qu'exprimer le déclin des anciennes puissances impérialistes et le triomphe des géants impérialistes qui n'étaient pas entravés par un grand nombre de colonies au moment de la première guerre mondiale. C'est ainsi que les Etats-Unis et l'URSS purent développer une politique cynique "anti-coloniale" pour mener à bien leurs propres objectifs impérialistes, pour s'appuyer sur les mouvements nationaux et les transformer immédiatement en guerres inter-impérialistes par "peuples" interposés." 3 [6]
En partant de l'analyse de l'ensemble de la période historique et de l'évolution du capitalisme comme système global, Rosa Luxembourg parvient à une compréhension plus complète et plus profonde du phénomène de l'impérialisme. Elle a mis en évidence la base historique de l'impérialisme dans les contradictions mêmes du système capitaliste. Alors que Lénine se borne à constater le phénomène de l'exploitation des colonies, Rosa Luxembourg analyse que les conquêtes coloniales ont constamment accompagné le développement capitaliste nourrissant l'insatiable nécessité de l'expansion capitaliste et a représenté, par la pénétration de nouveaux marchés, l'introduction des rapports capitalistes dans des zones géographiques où ils n'existaient pas encore : "L'accumulation est impossible dans un milieu exclusivement capitaliste. De là résultent dès la naissance du capital son besoin d'expansion dans des pays et des couches non capitalistes, la ruine de l'artisanat et de la paysannerie, la prolétarisation des couches moyennes, la politique coloniale (la politique "d'ouverture" des marchés), l'exportation des capitaux. L'existence et le développement du capitalisme depuis son origine n'ont été possible que par une expansion constante dans des domaines de la production et des pays nouveaux." 4 [7]
C'est ainsi que l'impérialisme s’est considérablement accentué dans le dernier quart du 19e siècle. . "Le capitalisme, à la recherche aride et fiévreuse de matières premières et d'acheteurs qui ne fussent ni capitalistes, ni salariés, vola, décima et assassina les populations coloniales. Ce fut l'époque de la pénétration et de l'extension de l'Angleterre en Egypte, de la France au Maroc, à Tunis et au Tonkin, de l'Italie dans l'Est Africain, sur les frontières de l'Abyssinie, de la Russie tsariste en Asie Centrale et en Mandchourie, de l'Allemagne en Afrique et en Asie, des Etats-Unis aux Philippines et à Cuba, enfin au Japon sur le continent asiatique." 5 [8]
Mais cette évolution enferme le capitalisme dans la contradiction fondamentale : plus la production capitaliste étend son emprise sur le globe, plus deviennent étroites les limites du marché créé par la recherche effrénée du profit, par rapport au besoin d'expansion capitaliste. Au-delà de la concurrence pour les colonies, Rosa Luxembourg identifie dans la saturation du marché mondial et la raréfaction des débouchés non capitalistes un tournant dans la vie du capitalisme : la faillite et l'impasse historiques de ce système qui "ne peut plus remplir sa fonction de véhicule historique du développement des forces productives." 6 [9]. C’est aussi la cause, en dernière analyse, des guerres qui caractérisent désormais le mode de vie du capitalisme décadent.
Une fois atteintes les limites du globe terrestre par le marché capitaliste, la raréfaction des débouchés solvables et des nouveaux marchés ouvre la crise permanente du système capitaliste alors que la nécessité d'expansion reste une question vitale pour chaque Etat. Désormais, cette expansion ne peut se faire qu'au détriment des autres Etats dans une lutte pour un repartage par les armes du marché mondial.
"A l'époque du capitalisme ascendant les guerres (nationales, coloniales et de conquêtes impérialistes) exprimèrent la marche ascendante, de fermentation, d'élargissement et de l'expansion du système économique capitaliste. La production capitaliste trouvait dans la guerre la continuation de sa politique économique par d'autres moyens. Chaque guerre se justifiait et payait ses frais en ouvrant un nouveau champ d'une plus grande expansion, assurant le développement d'une plus grande production capitaliste. (…) La guerre fut le moyen indispensable au capitalisme lui ouvrant des possibilités de développement ultérieur, à l'époque où ces possibilités existaient et ne pouvaient être ouvertes que par la violence." 7 [10]
Désormais, "La guerre devient le seul moyen non pas de solution à la crise internationale mais le seul moyen par lequel chaque impérialisme national tend à se dégager des difficultés avec lesquelles il est aux prises, aux dépens des Etats impérialistes rivaux." 8 [11] Cette nouvelle situation historique impose dans tous les pays du monde le développement du capitalisme d'Etat.
Chaque capital national est condamné à la compétition impérialiste et trouve dans l'Etat la seule structure suffisamment forte pour mobiliser toute la société afin d'affronter ses rivaux économiques sur le plan militaire.
"La
crise permanente pose l'inéluctabilité, l'inévitabilité
du règlement des différends impérialistes par la
lutte armée. La guerre et la menace de guerre sont les aspects
latents ou manifestes d'une situation de guerre permanente dans la
société. La guerre moderne est une guerre de matériel.
En vue de la guerre une mobilisation monstrueuse de toutes les
ressources techniques et économiques des pays est nécessaire.
La production de guerre devient aussi l'axe de la production
industrielle et principal champ économique de la société."
9 [12]
C'est pourquoi le progrès technique est entièrement
conditionné par le militaire : l'aviation est développée
d'abord militairement pendant la première guerre mondiale,
l'atome utilisé comme bombe en 1945, l'informatique et
Internet conçus comme outils militaires par l'OTAN. Le poids
du secteur militaire dans tous les pays absorbe toutes les forces
vives de l'économie nationale en vue de développer un
armement à utiliser contre d'autres nations.
A l'aube de
la décadence, la guerre était conçue comme un
moyen de repartage des marchés.
Mais au fil du temps, la guerre impérialiste perd de plus en plus sa rationalité économique. Dès le début de la décadence, la dimension stratégique prend le pas sur les questions strictement économiques. Il s'agit de conquérir des positions géostratégiques contre tous les autres impérialismes dans la lutte pour l'hégémonie, afin de s'imposer comme puissance et de défendre son rang. Dans cette période du déclin du capitalisme, la guerre représente de plus en plus un désastre économique et social. Cette absence de rationalité économique de la guerre ne signifie pas que chaque capital national s'abstienne de piller les forces productives de l'adversaire ou du vaincu. Mais cette "rapine", contrairement à ce que pensait Lénine, ne constitue plus le but principal de la guerre. Alors que certains imaginent encore, officiellement par fidélité à Lénine, que la guerre puisse être motivée par des appétits économiques (le pétrole étant premier au hit-parade sur cette question), la réalité se charge de leur répondre. Le bilan économique de la guerre en Irak menée par les Etats-Unis depuis 2003 n’a pas l’air franchement penché du côté de la "rentabilité". Les revenus du pétrole irakien, même espérés pour les 100 prochaines années, pèsent bien peu face aux dépenses abyssales effectuées par l'Etat américain pour mener cette guerre, sans pour le moment entrevoir leur ralentissement.
L'entrée du capitalisme dans sa phase de décomposition porte à l'incandescence les contradictions contenues dans la période de décadence. Pour tous les pays, chaque conflit particulier dans lesquels ils sont engagés entraîne des coûts qui dépassent largement les bénéfices qu'ils peuvent en tirer. Les guerres n'ont pour résultat, sans parler même des massacres, que des destructions massives laissant complètement exsangues et dans la ruine complète les pays où elles se déroulent et qui ne seront jamais reconstruits. Mais aucun de ces calculs de profit ou de perte n'écarte la nécessité pour les Etats, tous les Etats, de défendre leur présence impérialiste dans le monde, de saboter les ambitions de leurs rivaux, ou d'accroître leurs budgets militaires. Au contraire, ils sont tous pris dans un engrenage irrationnel au point de vue économique et de la rentabilité capitaliste. Méconnaître l'irrationalité de la bourgeoisie revient à sous-estimer la menace réelle de destruction pure et simple qui pèse sur l'avenir de l'humanité.
(d'après Révolution Internationale n° 335 - mai 2003)
1 [13] Rosa Luxembourg, L’Accumulation du capital, Œuvres IV, Edition Maspero, p219.
2 [14] Lénine, L'impérialisme stade suprême du capitalisme, Editions de Pékin, p. 112.
3 [15] Revue Internationale n°19, p. 11.
4 [16] Rosa Luxembourg, Critique des critiques. Dans L'Accumulation du capital, elle montre que la totalité de la plus-value extraite de l'exploitation de la classe ouvrière ne peut être réalisée à l'intérieur des rapports sociaux capitalistes, car les ouvriers dont les salaires sont inférieurs à la valeur créée par leur force de travail, ne peuvent acheter toutes les marchandises qu'ils produisent. La classe capitaliste ne peut pas consommer toute la plus-value puisqu'une partie de celle-ci doit servir à la reproduction élargie du capital et doit être échangée. Donc le capitalisme, considéré d'un point de vue global, est constamment obligé de rechercher des acheteurs à ses marchandises en dehors des rapports sociaux capitalistes.
5 [17] Le Problème de la guerre par Jehan, 1935, cité dans la Revue Internationale n°19.
6 [18] Rosa Luxembourg, Critique des critiques.
7 [19] Rapport à la conférence de juillet 1945 de la Gauche Communiste de France.
8 [20] Ibid.
9 [21] Ibid.
Depuis quelques années le bulletin Négatif 1 [23] s’attache à tirer les leçons des luttes les plus significatives de la dernière décennie. C’est de façon tout à fait valable qu’il souligne le rôle qu’y ont joué les syndicats : "En 1995, mais aussi en 2002/2003, nous avons pu constater que non seulement les centrales syndicales n’ont rien fait pour radicaliser la lutte contre l’Etat et sa politique de régression sociale, mais qu’elles ont tout mis en œuvre pour éviter une telle radicalisation. (…) L’histoire récente, de 1968 à 2003, fournit des exemples particulièrement frappants de la duplicité des directions syndicales labellisées par l’Etat et le patronat sous le nom de ‘partenaires sociaux’, de leur action néfaste ayant fortement contribué à l’échec des mouvements sociaux. (…) les luttes ouvrières du 20e siècle ont été loin de se confondre avec l’action syndicale (…) dans les moments où a soufflé l’esprit révolutionnaire, les ouvriers ont toujours trouvé face à eux, pour leur faire reprendre le chemin des ateliers et de la sacro-sainte production, les grandes organisations syndicales." 2 [24] La question de la nature et du rôle des syndicats est de toute première importance pour le prolétariat dont les mouvements actuels expriment la recherche de la solidarité et de l’unité la plus large possible et se heurtent justement à l’obstacle syndical.
Il est donc à saluer que Négatif affirme "nous devons nous auto-organiser en dehors des partis et des syndicats" et il "est souhaitable que l’assemblée générale soit l’instance de décision souveraine dans un mouvement". Cependant, dans son analyse et sa critique, ce groupe s’arrête en chemin. Ne comprenant pas réellement la nature du syndicalisme, ses racines, il retombe finalement dans le piège du syndicalisme révolutionnaire ou ‘radical’. Ainsi, Négatif est attiré par l’expérience des Industrial Workers of the World (IWW), qui ont développé leur activité aux Etats-Unis au début du 20e siècle.
En dépit de son effort pour développer sa critique des syndicats en faisant appel à l’histoire de la classe ouvrière, en s’appuyant sur des écrits de militants authentiquement prolétariens comme B. Péret et A. Pannekoek, Négatif ne retient que les côtés les plus faibles de ces contributions. En résumé, pour Négatif "la critique de [l’]action [des syndicats] à tel ou tel moment de leur histoire se confond (…) avec celle d’une bureaucratie toute puissante, qui a réussi à maintenir son emprise sur l’ensemble des salariés et à sauvegarder ses intérêts propres". L’approche de Négatif qui a pour conséquence d’admettre qu’un syndicalisme débarrassé de toute bureaucratie peut constituer un moyen pour la lutte des classes, est une importante faiblesse politique. Elle ouvre grand la porte aux mystifications constamment avancées par la bourgeoisie justement lorsque les ouvriers expriment ouvertement leur méfiance vis-à-vis du travail de sabotage des luttes par les syndicats et s’en détachent : celle de la possibilité d’un syndicalisme soit disant différent de celui des centrales, plus radical, plus ouvrier, de base ou révolutionnaire.
Dans sa critique des syndicats Négatif ne tient pas compte d’un argument central de Pannekoek : "Leur puissance contre-révolutionnaire ne sera pas anéantie, pas même entamée, par un changement de dirigeants, le remplacement des chefs réactionnaires par des hommes de ‘gauche’ ou ‘révolutionnaires’. C’est bel et bien la forme d’organisation elle-même qui réduit les masses à l’impuissance ou tout comme, et qui leur interdit d’en faire les instruments de leur volonté." 3 [25]
Négatif en vient ainsi, pour notre époque, à admettre la possibilité d’un syndicalisme en période de prospérité : "le syndicalisme fonctionne bien quand les classes dirigeantes sont disposées à admettre un partage minimum des richesses. Lorsque cela n’est pas le cas, comme aujourd’hui, les syndicalistes ne peuvent rien faire d’autre que négocier la régression sociale et apporter ainsi leur contribution à l’éternel retour de la défaite." Il perd de vue que depuis 1914 c’est en permanence et en toutes circonstances que les syndicats constituent un organe anti-ouvrier et un élément essentiel du totalitarisme étatique du capitalisme décadent pour soumettre le prolétariat aux impératifs du capital national, pour prévenir et défaire toute tentative de développement révolutionnaire.
Négatif retricote même l’histoire en fonction de ses lubies antiautoritaires : "les syndicats vont s’institutionnaliser et se bureaucratiser après la première guerre mondiale", sous l’impulsion de "la ‘bolchevisation’ [de la CGT]". Exit la trahison ignominieuse du prolétariat et de l’internationalisme par l’ensemble des syndicats dans tous les pays en 1914 ! Exit le passage des syndicats avec armes et bagages au service de leurs bourgeoisies respectives, scellant leur sort à celui de l’Etat capitaliste en proclamant l’Union Sacrée et l’interdiction de la lutte des classes ! Exit le rôle de sergent recruteur joué par la CGT anarcho-syndicaliste chauvine pour mobiliser le prolétariat dans la guerre mondiale au profit de l’impérialisme français !
Là encore le prisme déformant de la vision apolitique et ‘économiste’ typique de l’anarchisme dont est prisonnier Négatif l’aveugle sur la nature bourgeoise des syndicats, organes intégrés à l’Etat capitaliste à notre époque. Dépourvu d’une méthode basée sur des critères de classe pour faire l’analyse critique de l’histoire, Négatif ne voit pas non plus la faillite du syndicalisme révolutionnaire au début du 20e siècle. Celui-ci n’a pas connu un sort différent de celui du syndicalisme en général, passant dans le camp du capital, comme ce fut le cas pour la CGT et la CNT espagnole, ou bien il a quasiment disparu de la scène sociale, comme les IWW aux Etats-Unis. Négatif fait complètement fausse route en cédant à sa fascination pour le "mode de fonctionnement" des IWW, qui, "à la structure rigide et sclérosée des vieux syndicats, opposaient une forme d’organisation souple appelée à varier en fonction de la situation politique et sociale" et dont le but " n’était pas de devenir un syndicat de masse, mais d’aider le prolétariat à s’émanciper et à mener la lutte pour son propre compte, c'est-à-dire consciemment." Outre le fait que les IWW avaient une conception particulièrement confuse de la nature de la révolution prolétarienne réduite à un acte économique pouvant ignorer le pouvoir d’Etat de la bourgeoisie, ils développaient la double confusion intrinsèque au syndicalisme révolutionnaire. D’une part, leur conception de l’organisation pouvant être en même temps révolutionnaire (regrouper des agitateurs conscients et des militants révolutionnaires) et une organisation unitaire ouverte à tous les ouvriers dans la lutte de classe, ainsi que les tensions générées par cette contradiction, les amenèrent à une existence instable et à se préoccuper surtout de la construction d’une organisation syndicale au détriment des principes révolutionnaires. D’autre part, en dépit de leur engagement réel pour défendre les intérêts de leur classe, la lutte de l’unionisme industriel contre le syndicalisme de métier ou réformiste, au moment où la forme d’action syndicale elle-même devenait inadaptée à la lutte des classes, ne constituait déjà plus qu’un anachronisme. Justement, ce que l’expérience de IWW nous montre, c’est l’impossibilité de construire des syndicats "vraiment ouvriers" dans la période de décadence du capitalisme. 4 [26]
Si Négatif a raison de dire que "la force d’un mouvement réside dans le niveau de conscience de ceux qui y participent. La forme d’organisation qu’ils se donneront dépendra de ce niveau de conscience", il se fourvoie quand il affirme que celles-ci "restent à inventer." En considérant ainsi que le combat de la classe part de zéro, Négatif tourne le dos aux apports de la longue expérience de lutte du prolétariat.
Comme classe dépourvue de tout moyen de production dans la société le prolétariat ne dispose comme armes dans son combat pour son émancipation que de sa conscience et de son unité. Le processus d’unification d’une part, et la nécessité d’élever son niveau de conscience d’autre part, constituent pour la classe ouvrière deux tâches indispensables dont elle doit s’acquitter de façon organisée. C’est pourquoi le prolétariat s’est toujours donné deux formes fondamentales d’organisation :
- les organisations politiques, fondées sur une plate-forme politique et des critères politiques stricts d’adhésion et dont la fonction est de contribuer à l’approfondissement et à la généralisation de la conscience révolutionnaire de la classe ;
- les organisations unitaires regroupant tous les travailleurs, du simple fait de leur qualité d’ouvrier, indépendamment de leurs idées politiques, dont la fonction est de contribuer au rassemblement, à l’unification du prolétariat et au développement de sa conscience.
Si, au 19ème siècle, les syndicats étaient des instruments de la lutte des classes, ce n’est pas grâce à la baguette magique de l’anarchisme comme le pense Négatif (selon lequel c’est "après les années 1880, lorsque les anarchistes se tournent vers l’action syndicale [que] les syndicats deviennent des instruments de la lutte des classes") mais justement parce qu’à cette époque-là, ils constituaient les organes unitaires du prolétariat.
Les marxistes, tout en sachant dès le départ qu’effectivement les syndicats n’étaient pas voués à devenir les organes de la révolution, comprenaient qu’ils pouvaient et devaient concourir à la préparation des forces du prolétariat à la bataille à venir de la révolution, justement en ne limitant pas leur action aux seules revendications économiques (comme le préconisaient les réformistes mais aussi… les anarchistes), afin de jouer pleinement leur rôle "de foyers organisateurs de la classe ouvrière dans le grand but de son émancipation radicale" et pour "aider tout mouvement social et politique tendant dans cette direction." 5 [27]
En même temps, en tant qu’action engagée sur le terrain même de l’ordre capitaliste et qu’activité orientée vers l’obtention de réformes, il était clair que la lutte syndicale ne constituait pas une fin en soi. Elle ne formait (tout comme la lutte parlementaire, complémentaire) qu’une "simple phase, un stade dans la lutte prolétarienne globale dont le but final dépasse aussi bien la lutte parlementaire que la lutte syndicale" 6 [28]
La plongée du système capitaliste dans sa phase de déclin historique irréversible, où se pose désormais la lutte pour le communisme, bouleverse profondément les conditions de la lutte des classes.
De nouvelles formes de luttes, les grèves de masse, et de nouveaux organes unitaires, adaptés au but de la première révolution massive et consciente de l’histoire, surgissent des luttes qui, désormais tendent à faire éclater au grand jour, leur contenu révolutionnaire, les conseils ouvriers, avec "une double fonction : d’une part se poser en organes d’autogestion et de défense des intérêts ouvriers ; d’autre part œuvrer simultanément sur le plan politique en vue de renverser le régime. Il s’agissait en fait de deux aspects complémentaires qui reflétaient ce mélange inextricable de lutte économique contre le patronat et de lutte politique contre l’ordre établi, qui dans son essence caractérisa la révolution ouvrière de 1905." 7 [29]
Ces assemblées générales de délégués, mandatés par les assemblées générales de travailleurs, organes de l’unification de la classe où se forgent les forces prolétariennes de l’attaque contre l’Etat capitaliste, possèdent une spécificité : elles ne peuvent surgir que lors d’une lutte généralisée de la classe ouvrière et n’ont une existence permanente que lorsque la lutte devient elle-même permanente, c’est-à-dire lors du processus révolutionnaire. Lorsque la lutte n’atteint pas ce stade, elle se développe sous la forme d’assemblées générales de grévistes coordonnées entre elles par des comités de délégués élus et révocables, responsables en permanence devant elles. Avec le reflux de la lutte, et le retour à la passivité du prolétariat, ces formes de luttes disparaissent. Cette situation où le prolétariat semble "disparaître" entre deux phases de luttes, ne doit pas plus être la cause de panique ou de démoralisation que la "disparition" du soleil chaque soir à son coucher : c’est la caractéristique même des conditions de la lutte prolétarienne dans la décadence du capitalisme. Ces éclipses ne sont qu’une phase dans une situation historique d’impasse complète du système capitaliste qui rend nécessaire et inéluctable la reprise et le développement de ses luttes par le prolétariat. Sa vitalité politique continue à se manifester à travers l’existence et l’activité de ses minorités révolutionnaires organisées qui défendent en permanence le programme communiste et le but de la révolution.
La lutte de classe ne prend plus la forme syndicale du fait de l’impossibilité d’obtenir des réformes durables et une amélioration des conditions de vie du prolétariat. Les syndicats sont intégrés à l’Etat capitaliste. Mais avec leur disparition comme instruments de la lutte prolétarienne, la classe ouvrière perd aussi la possibilité de s’organiser de façon unitaire en dehors des périodes de lutte. Les syndicats n’étaient pas seulement des formes d’organisation pour la lutte ouverte, mais de véritables pôles permanents de regroupement unitaire de la classe ouvrière, du fait de leur fonction : la lutte systématique pour l’obtention de réformes, autour de laquelle les travailleurs pouvaient se regrouper et créer un véritable lieu vivant de formation de la conscience de classe. Lorsque la lutte syndicale est devenue inefficace, "La seule activité qui peut engendrer une organisation stable sur un terrain de classe en dehors des périodes de lutte est une activité qui ne peut être conçue à court terme, une activité qui doit se placer au niveau du combat historique et global de la classe et qui n’est autre que celle de l’organisation politique prolétarienne, tirant les leçons de l’expérience historique ouvrière, se réappropriant le programme communiste et faisant un travail d’intervention politique systématique. Or c’est là une tâche de minorité qui ne peut en aucun cas constituer une base réelle de regroupement unitaire de la classe." 8 [30]
C’est l’incompréhension de ces questions qui est à l’origine de l’échec et de la dislocation des IWW. Aujourd’hui, pour qui veut réellement travailler au renforcement du combat de classe du prolétariat, réitérer l’expérience des IWW constitue une impasse.
Scott
1 [31] Bulletin-negatif.org
2 [32] Négatif n°5, octobre 05, (toutes les citations de Négatif en proviennent)
3 [33] cité par Gorter, Réponse à Lénine, 1920, chapitre 2, la question syndicale
4 [34] Lire Les IWW (1905-21) : l’échec du syndicalisme révolutionnaire aux Etats-Unis dans la Revue Internationale n°124 et 125.
5 [35] Résolution sur les syndicats, 1er Congrès de l’AIT, Genève, 1866.
6 [36] R. Luxembourg, Grèves de masses, Parti et Syndicats, chapitre 8
7 [37] O. Anweiler, Les Soviets en Russie, p68
8 [38] Les Syndicats contre la classe ouvrière, brochure du CCI, p.53
A la mi-septembre, le clan Sarkozy a une fois de plus fait la Une de tous les journaux pour des déclarations jugées provocatrices et scandaleuses par l’ensemble de la classe politique. François Fillon a en effet "lâché" son intention de réformer "les régimes spéciaux" des retraites "dès le début de la prochaine législature", propos immédiatement soutenus par Nicolas Sarkozy lui-même : "Nous ferons la réforme parce que la réforme doit être faite".
A droite comme à gauche, de hauts cris de protestations ont immédiatement fusé. Jean-Louis Debré a jugé ces déclarations "inutiles, inopportunes et maladroites" et Jacques Chirac a assuré n’avoir "aucune intention de modifier" ces régimes. Evidemment, le Parti Socialiste et le Parti Communiste se sont empressés d’enfiler leur costume de défenseurs émérites des travailleurs. Jack Lang est "tombé des nues" et s’est demandé si François Fillon "avait perdu la tête ?". La secrétaire nationale du PCF, Marie-George Buffet s’est dite "choquée" et son député Alain Bocquet a dénoncé fermement "la logique pure et dure du libéralisme gouvernemental".
Toutes ces gesticulations ne doivent tromper personne. Depuis plus de 15 ans, droite et gauche se donnent la main pour attaquer sans relâche les retraites. Depuis plus de 15 ans, les gouvernements se succèdent et la politique anti-ouvrière demeure. Il n’y a aucune illusion à avoir. Sarkozy vient d’annoncer aujourd’hui ce que Royal ou un autre fera dès demain, quel que soit le président élu en mai 2007.
La dégradation continuelle des conditions de vie des prolétaires s’inscrit dans la logique même du capitalisme. Face à une crise économique insurmontable, la bourgeoisie démantèle peu à peu toutes les structures de l’Etat providence et en particulier l’un de ses piliers, le régime des retraites.
En 1991, le premier ministre socialiste Michel Rocard publiait ce qui est considéré par les spécialistes comme "l’acte fondateur de la réforme du régime des retraites" : son fameux "livre blanc". Au nom de la lutte contre les déficits, une très large propagande fut lancée à l’époque sur la nécessité impérieuse pour la société de faire passer à 42 ans la durée de cotisation pour tous. En réalité, le but n’était pas alors d’attaquer frontalement et immédiatement l’ensemble de la classe ouvrière mais de préparer les esprits aux sacrifices à venir. Depuis lors, les gouvernements qui se succèdent, quelle que soit leur couleur, appliquent progressivement l’ensemble des mesures de ce plan Rocard en usant toujours de la même ficelle : cibler un secteur particulier de la classe ouvrière et justifier la réforme au nom de l’équité, de la solidarité et de la sauvegarde du système paritaire. Au bout du compte, année après année, paquets par paquets, ce sont tous les prolétaires qui subissent les attaques sur les pensions de retraite.
Ainsi, en 1993, Balladur s’est concentré sur le secteur privé pour imposer un allongement des cotisations de 37,5 ans à 40 ans et une base de calcul des pensions sur les 25 meilleures années (au lieu des 10 meilleures). Cette mesure a impliqué une chute brutale du niveau de vie avec des pensions amputées jusqu’à 40%.
En 1995, le célèbre Plan Juppé (celui qui avait engendré les mouvements sociaux de décembre de la même année) mettait déjà en avant la réforme des régimes spéciaux. Il s’agissait alors d’une véritable provocation. La bourgeoisie savait très bien qu’il était inacceptable pour le prolétariat de tolérer une attaque aussi brutale remettant si profondément en cause les conditions de travail et de vie de centaines de milliers d’ouvriers. Après le retrait de cette "mesure phare", les syndicats avaient pu crier victoire et redorer un blason bien terni après des années de sabotage des luttes. Mais ce recul gouvernemental avait en réalité permis à Juppé puis à Jospin de faire passer en coulisse l’ensemble des autres mesures du Plan, à savoir la réforme du financement de la sécurité sociale et l’institution d’un nouvel impôt appliqué à tous les revenus.
A partir de 1997, le gouvernement Jospin n’avait donc aucune raison de revenir, même partiellement, sur des mesures que son parti avait très largement contribué à instaurer. Au contraire ! Au pouvoir, les socialistes ont poursuivi le sale boulot en préparant le terrain à des nouvelles mesures anti-ouvrières. Ainsi, Jospin avait envisagé et élaboré pour l’après-2002 un ensemble de "réformes progressives" visant tout le secteur public et destinées à allonger jusqu’à 42,5 ans la durée nécessaire de cotisation ! Mais Chirac étant sorti vainqueur des urnes, c’est à la droite qu’est revenue la responsabilité de mener ce nouveau train d’attaques.
Ainsi, en 2003, l’équipe Raffarin, avec Fillon en figure de proue, s’attela à faire trinquer à leur tour les ouvriers du public. Toujours au nom de l’égalité et de la justice sociale. Toujours en divisant et en dressant les ouvriers les uns contres les autres. A ce stade, les fonctionnaires furent désignés une fois encore comme des privilégiés refusant de faire les mêmes "efforts" que les autres. Finalement, le nouveau gouvernement de droite ne fit ici qu’appliquer les mesures préparées quelques mois auparavant par les socialistes. D’ailleurs, dans le cadre confidentiel de l’université d’été du Medef, Jean-Pierre Raffarin a rendu fort justement un bel hommage au gouvernement socialiste de Lionel Jospin : "Sans le travail préparatoire qu’il avait engagé, je n’aurais pas pu faire la réforme des retraites." 1 [41]
Aujourd’hui, c’est au tour des ouvriers d’EDF, de GDF, de la SNCF ou de la RATP d’être dans le collimateur. Mais ce qui était une mesure provocatrice en 1995 est aujourd’hui appliquée progressivement et inexorablement. Le régime spécial dont bénéficiaient les postiers a été totalement démantelé dès 2003 par la loi Fillon. En août 2004, le parlement a voté une loi remettant déjà partiellement en cause le régime spécial des agents d'EDF et GDF. Depuis, le régime spécial des chambres de commerce a été aboli comme celui de La Poste et la réforme de celui de la RATP est quasiment bouclée. Quant à celui de la Banque de France, il est déjà tout prêt sur le bureau de Thierry Breton. Et une chose est certaine, tous les partis bourgeois vont continuer à se donner la main pour mener la poursuite de ces attaques. S’il revient au pouvoir, le PS fera comme il a toujours fait : il enrobera ces mesures d’une phraséologie doucereuse pour mieux poignarder dans le dos la classe ouvrière. Il suffit de lire les déclarations. Pour Ségolène Royal, "il y a un chantier d’harmonisation à conduire dans le système de réforme des retraites". Pour Lionel Jospin, "Il faudra prendre ce problème" par le biais du "dialogue". Dans la bouche de Laurent Fabius, "Il faut rouvrir le dossier des régimes spéciaux". Et pour François Hollande, "Bien sûr qu’il faudra réformer ces régimes" mais "ça se fera dans le cadre concerté". Bref, le PS tapera autant sur la classe ouvrière que l’UMP mais en lui faisant croire que c’est pour son bien et avec son accord !
Après les régimes spéciaux, il est prévu de faire passer la durée de cotisation à 41 annuités en 2012 pour tous, puis 42 en 2016, 43 en 2020... Les objectifs du "Livre Blanc" de Rocard seront alors atteints et largement dépassés. En planifiant ces attaques, l’Etat avoue d’ailleurs qu’il ne croit pas lui-même à tous ses mensonges sur les perspectives de croissance économique car en réalité ce rythme d'attaques planifiées par les lois de 2003 seront forcément revues à la hausse, compte tenu de l'aggravation catastrophique de la crise et du niveau de l'endettement de l'Etat.
Ici, une absurdité manifeste saute aux yeux. Pourquoi repousser toujours plus loin l’âge de la retraite alors qu’il n’y a déjà pas assez de boulot pour tout le monde ? Pourquoi augmenter les trimestres de cotisation quand les boîtes licencient à tour de bras les plus de cinquante ans ? C’est tout simplement que le principal but visé n’est pas de faire trimer jusqu’à 65 ans (ou plus) les ouvriers usés. Non, c’est en réalité de diminuer les pensions.
Les premiers régimes de retraites sont nés au 19e siècle dans les mines, les chemins de fer puis pour les électriciens ou les gaziers. Il s’agissait à l’époque pour la bourgeoisie d’attirer vers ces secteurs de pointe une main d’œuvre qualifiée et de l’encourager à ne pas aller voir ailleurs. Bien plus tard, après la Seconde Guerre mondiale, le régime des retraites fut généralisé à l’ensemble de la classe ouvrière pour inciter les ouvriers à retrousser leurs manches pour la reconstruction de l’économie nationale. La classe dominante avait en effet besoin d’ouvriers au maximum productifs et donc en bon état physique.
Aujourd’hui, compte tenu de la profondeur de sa crise économique, le capitalisme n’a même plus les moyens de cette politique, il n’a que faire de la santé de sa main d’œuvre. C’est pourquoi la retraite, dans tous les pays et sous tous les gouvernements, est peu à peu repoussée à des âges canoniques et donne lieu à des pensions de plus en plus maigres. Tant pis si ces ouvriers sexagénaires ne peuvent plus assumer leur tâche. Et surtout, tant pis s’ils sont malades et épuisés, ou plutôt, tant mieux. Car c’est bien là le calcul de la classe dominante : que les ouvriers qui n’ont pas été licenciés en cours de route soient contraints à laisser tomber leur emploi, résignés et au bout du rouleau, sans avoir obtenu leur nombre de trimestres. Qu’ils crèvent à la tâche ou qu’ils partent avec leur pension de misère !
Aujourd’hui déjà, plus d’un million de retraités vivent avec moins de 600 euros par mois. Et cette situation de misère ne va cesser de croître au fur et à mesure que toutes ces réformes vont s’appliquer aux nouveaux retraités.
La seule réponse est la lutte ! En refusant d’être attaquée paquets par paquets, la classe ouvrière doit répondre par une mobilisation la plus unie et solidaire possible.
Pawel (25 septembre)
1 [42] Marianne n°491 du 16 septembre 2006.
Le cinquième anniversaire des attentats du 11 septembre 2001 sur le World Trade Center a été une fois de plus l'occasion pour la bourgeoisie internationale de se vautrer dans cette attitude de contrition et cet humanitarisme hypocrites dont elle a le secret. Du couple Bush déposant, la larme à l'œil, des fleurs sur l'emplacement des Twin Towers à Kofi Annan déplorant ce "crime contre l’humanité" en passant par Chirac qui appelait à communier "dans le souvenir des victimes, de leurs familles et de leurs proches" et a rendu "hommage à toutes les victimes du terrorisme à travers le monde", pas une voix n’a manqué dans la classe dominante pour rappeler l’horreur de l’événement et montrer du doigt la monstruosité que représente le terrorisme.
Le rappel des évènements ne peut en effet que faire froid dans le dos. Ce sont près de 3000 personnes qui ont trouvé la mort en deux heures à New York, 189 à Washington et 44 en Pennsylvanie. Et la sinistre statistique du nombre de tués n’est pas seule à inscrire ces attaques terroristes dans les mémoires. Ainsi, 70% des 40 000 personnes présentes dans le voisinage immédiat de Ground Zero dans les jours et les semaines qui ont suivi les attaques aériennes sont aujourd’hui atteintes de troubles pulmonaires aigus. Membres des services municipaux, volontaires venus des quatre coins des Etats-Unis, habitants proches, policiers, pompiers, sont touchés par la "toux du World Trade Center". Il ne s’agit pas d’un syndrome passager mais d’une maladie qui va inévitablement frapper mortellement nombre d’entre eux dans les années à venir, conséquence de l’inhalation des produits hautement toxiques, dont de l’amiante en très grande quantité, pulvérisés lors de l’incendie et de l’effondrement des tours.
Toute cette population, ces victimes passées et à venir du terrorisme et de la guerre, c’étaient et ce sont dans leur immense majorité des ouvriers et des employés. Comme à Madrid il y a deux ans, comme à Londres l’an dernier, comme à Bombay cet été, comme partout, même lorsque les médias parlent de "touristes", ce sont des ouvriers, des salariés qui sont frappés, ce sont eux qui partout paient le prix fort de la violence aveugle et destructrice résultant de la guerre entre cliques bourgeoises, qu’elles soient "occidentales", islamistes ou autres. La bourgeoisie peut bien se répandre en lamentations, on sait bien qu’elle n’en a cure. Elle peut bien nous abreuver de films comme celui d’Oliver Stone, World Trade Center, pour faire pleurer dans les chaumières, c’est pour mieux exalter le nationalisme et au bout du compte la guerre. Et bien pire, car en définitive, ces attentats ont été une véritable aubaine, pour la bourgeoisie américaine mais aussi pour toute la classe dominante.
L’Amérique, sous prétexte de "guerre au terrorisme", a ainsi pu lancer une offensive militaire et stratégique visant à rétablir et imposer un leadership de plus en plus remis en question sur l’ensemble de la planète. C’est à elle que le crime du 11 septembre a réellement profité à l’époque, pas à Ben Laden ou à sa clique de "fous de Dieu". Dans sa logique de coups tordus, la bourgeoisie n’a jamais hésité à utiliser, voire provoquer ou organiser elle-même des destructions de grande ampleur, afin d’arriver à ses fins. Pour choisir un événement parmi les plus connus, on peut citer le bombardement de la base américaine de Pearl Harbour par les Japonais en décembre 1941, prélude à l’entrée en guerre des Etats-Unis. On sait que l’administration Roosevelt connaissait parfaitement le projet japonais d’attaque de la base et qu’elle a au moins laissé faire, provoquant devant cet acte odieux, l’adhésion à l’entrée en guerre des Etats-Unis d’une opinion publique jusqu’alors hostile à la participation américaine dans la Seconde Guerre mondiale (Voir nos Revue Internationale n° 107 et 108 sur le sujet).
Aujourd’hui, le terrorisme est une arme de guerre de toutes les bourgeoisies, grandes ou petites. Aussi, la croisade "du bien contre le mal", faisant suite au 11 septembre 2001 et annoncée dès le 16 comme allant durer "jusqu’à l’éradication de tous les groupes terroristes à portée mondiale", a permis aux Etats-Unis de réunir une des plus formidables coalitions de l’histoire, incluant la Russie, les pays de l’OTAN, l’Ouzbékistan, le Tadjikistan, le Pakistan, l’Arabie Saoudite et les autres pays du Golfe, et l’accord tacite de l’Iran et de la Chine (voir notre Revue Internationale n° 107, 4e trimestre 2001), et d’aller envahir un pays comme l’Afghanistan. Si cette alliance contre le régime des talibans s’est ensuite progressivement délitée, en particulier suite à l’invasion de l’Irak, il faut se rappeler du concert commun de toutes ces puissances prêtes à aller prétendument casser du terroriste, en réalité accourant pour défendre leurs propres intérêts impérialistes.
Et si cette meute enragée était prête à mettre sans états d’âme l’Afghanistan à feu et à sang, elle n’a pour autant pas oublié ses propres populations. C’est ainsi que l’ouverture de la "guerre contre le terrorisme" a permis dans de nombreux pays un renforcement de la répression et du flicage de la population, aux Etats-Unis comme dans les pays d’Europe. Au pays de la "Liberté", le "USA Patriot Act", voté sans même passer par les législateurs immédiatement après le 11 septembre, introduisait de nombreuses mesures d’intrusion dans la vie privée : espionnage du courrier, des mails, fouilles systématiques des gens se rendant au travail, jusqu’à l’obligation par les bibliothèques de fournir la liste de leurs abonnés et celle de leurs emprunts de livres. La Grande-Bretagne en profitait pour accélérer sa surveillance des villes par caméras vidéo et la France relançait diverses mesures policières comme le plan Vigipirate devenu dès lors permanent.
Et c’est régulièrement depuis cinq ans qu’on nous remet une louche de psychose du terrorisme pour renforcer encore les mesures policières.
Dans le cirque médiatique fait autour du 11 septembre, à côté des lamentations hypocrites, sont ainsi réapparues de façon plus virulente que jamais les critiques faites à l’incompétence de Bush et de ses services secrets, et même clairement la dénonciation de l’organisation des attentats du 11 septembre par Bush et sa clique, comme dans le film Loose Change, visible gratuitement sur internet, c’est-à-dire dans le monde entier. Rappelons qu’après le 11 septembre, dans l’ambiance d’hystérie nationaliste de l’époque, le CCI était intervenu pour dénoncer ces attentats comme servant en fait les intérêts impérialistes américains, alors que nous évoquions la probabilité que l’administration Bush ait laissé faire les attentats. A l’époque, on nous avait traité de tous les noms en nous accusant d’avoir une vision machiavélique de l’histoire. Aujourd’hui, étonnamment, c’est au sein de la bourgeoisie elle-même que l’on voit mettre en avant la thèse de la machination fomentée par l’équipe au pouvoir.
L’Union sacrée d’après 2001 a donc fait son temps. Finie l’embellie nationaliste durant laquelle on pouvait voir le drapeau américain flotter sur chaque véhicule et à chaque fenêtre de New York, jusque dans les quartiers les plus déshérités. Finies les déclarations percutantes rassemblant Démocrates et Républicains dans la sacro-sainte guerre contre le "terrorisme international" désigné par avance. L’heure est à la désunion, aux critiques de Bush et des services secrets. Malgré le lancement à grands frais de films comme World Trade Center, qui exalte le "courage" et "l’esprit de sacrifice" des policiers et des pompiers de New York, cherchant ainsi à renouer avec la "grande communion" de l’après-11 septembre 2001, le cœur n’y est plus, de toute évidence. Les 3000 Gi’s morts officiellement (certaines sources parlent de 10 000) en Irak en trois ans, les 278 morts en Afghanistan depuis 2002, ne peuvent que raviver dans l’opinion publique américaine le "syndrome du Vietnam" et, avec le rejet de la guerre, celui des raisons qui l’ont justifiée. Ainsi, ce sont plus de mille déserteurs américains qui se seraient réfugiés au Canada depuis deux ans.
Plus d’un tiers des Américains et près de la moitié des New-yorkais pensent qu’il s’est agi d’un coup monté par Bush pour justifier la guerre au Moyen-Orient. Sur des dizaines de sites internet, dans les interventions de scientifiques et d’universitaires foisonnent les arguments défendant cette thèse du complot, Démocrates et Républicains confondus.
Les attaques contre Bush vont également bon train en dehors des Etats-Unis. Car alors que le 11 septembre 2006 a permis aux dirigeants de la planète d’exprimer leur "émotion profonde" et de pleurer sur les malheurs du monde, cela a encore été pour eux l’occasion d’étaler de nombreuses critiques virulentes sur la politique américaine en Irak, au Moyen-Orient. Cet "anniversaire" a donc en définitive été une manifestation générale de l’inexorable affaiblissement de l’Amérique sur l’arène impérialiste mondiale et cela malgré l’omniprésence militaire d’une Amérique qui, prétendant lutter contre le terrorisme n’a fait que renforcer celui-ci et lui donner une dimension inconnue jusqu’ici. Un très récent rapport confidentiel des services secrets américains, intitulé "Tendances du terrorisme mondial : implications pour les Etats-Unis", concluait ainsi que la guerre en Irak avait "accru la menace terroriste".
La situation en Irak est telle que les Etats-Unis y sont complètement coincés et contraints d’y rester pour colmater autant que faire se peut les brèches de plus en plus larges qui s’ouvrent vers un chaos total du pays, le tout sans aucune perspective d’y gagner quoi que ce soit. C’est dans cet échec phénoménal de la politique américaine avec toutes les retombées qu’il a et aura pour les intérêts américains que se trouve la véritable raison de ce déferlement d’accusations anti-Bush. L’enlisement dans une telle situation a exacerbé les oppositions au sein de la bourgeoisie américaine comme les rapports de force avec les autres puissances sur la planète. Si l’offensive américaine avait été une réussite, ne doutons pas que la plupart de tous ces accusateurs ronronneraient dans le giron de celui-là même qu’ils vouent à présent aux gémonies, tandis que d’autres comme la France aurait mis plusieurs bémols à la virulence de leurs attaques.
Car tous n’ont que faire de la vie humaine. Ils crient au fou et à l’assassin, dénoncent la bande à Bush qui s’en met plein les poches grâce à la mainmise sur le pétrole, mais ils ne valent pas mieux. Leurs critiques n’ont pas pour but de rétablir une quelconque vérité ni de tenter de renverser la vapeur. Reflet de cette lutte à mort que se mènent les fractions bourgeoises de par le monde, elles ont aussi pour fonction de dévoyer toute réflexion sur le terrain bourgeois, de la ramener sur le terrain du faux choix entre telle ou telle clique bourgeoise, de la canaliser vers la "défense de la démocratie". Dans un tel "débat", ce n’est pas le système capitaliste, ce n’est pas la bourgeoisie qui sont visés, mais des "méchants", des "rapaces", des "salauds", qui ne respectent rien, et surtout pas les vies humaines. Bien sûr, Bush et ses complices méritent bien les épithètes dont on les gratifie. Mais cette imagerie populaire cultivée à foison a pour but de rendre confuse toute réflexion et de la dévier sur des individus, bien sûr responsables, pour appeler à les remplacer par d’autres, qu’on espère meilleurs ou moins mauvais, et au bout du compte à faire confiance à la classe exploiteuse qui gouverne le monde et qui est la première responsable de la misère, de la guerre et des massacres.
Ce ne sont pas des individus qui font ce qu’est le capitalisme, c’est ce système en pleine déliquescence qui les produit en tant que dignes représentants de la classe bourgeoise décadente, une classe qui se défend bec et ongles face à sa propre agonie, n’hésitant pas à entraîner avec elle l’humanité toute entière dans la barbarie. Qu’un gouvernement comme celui des Etats-Unis laisse faire, voire organise, une monstruosité comme les attentats du 11 septembre pour finir par se mettre dans un guêpier comme l’Irak est une illustration évidente du niveau extrême de décadence et de décomposition dans lequel se trouve le capitalisme aujourd’hui.
Cela donne une idée de ce qui attend l’humanité dans la période à venir de la part de ceux qui se proclament les garants du bien-être de milliards d’êtres humains alors que ce sont eux et le système capitaliste qui sont les véritables responsables. Une telle situation ne peut que renforcer le questionnement grandissant qui naît dans l’ensemble du prolétariat, et de la part des soldats eux-mêmes, issus dans leur grande majorité de familles ouvrières, vis-à-vis de la justification anti-terroriste des guerres actuelles. Allié aux luttes ouvrières qui se développent un peu partout dans le monde y compris aux Etats-Unis contre les attaques économiques, ce questionnement doit ouvrir la voie à une prise de conscience que c’est tout le capitalisme qui nous entraîne vers la misère et le chaos le plus total, et qu’il faut le détruire.
Mulan (26 septembre)
Dans la nuit du 19 au 20 août, le Probo Koala, navire aux dimensions colossales spécialisé dans le transport de pétrole, s’est allègrement délesté dans la ville d’Abidjan, en Côte d’Ivoire, de plusieurs centaines de tonnes de déchets toxiques. La société hollandaise Trafigura, employeur du cargo, parlera quant à elle "d’eaux usées"… La population d’Abidjan, ses 8 morts et ses 7000 victimes d’intoxication, appréciera sans nul doute la formule !
Ainsi, à son réveil, la ville était garnie d’une douzaine de nouvelles décharges, en plein air et à proximité des habitations, accueillant les "slops" (déchets maritimes) du Probo Koala. Des "slops" particulièrement gratinés puisque composés de sulfure d’hydrogène dont la forte concentration est mortelle pour tout être vivant.
Devant ce crime, la bourgeoisie évidemment se scandalise et s’agite sous le regard des caméras pour nous promettre de faire le ménage et nous débarrasser de ces "pollueurs d’Afrique", ces "entrepreneurs sans scrupules qui prennent le monde pour une poubelle et n’ont aucune considération pour les vies humaines".
"La justice est en route…". Pour preuves, pas moins de trois enquêtes sont en cours : celles du parquet et de la ville d’Amsterdam en plus de celle diligentée par le ministre néerlandais des Transports.
"…Et les responsables seront châtiés !", puisque d'ores et déjà deux dirigeants de Trafigura ont été interpellés à l’aéroport d’Abidjan.
Mais derrière tout ce cirque et ces belles paroles, se cache le véritable coupable, celui que la bourgeoisie cherche désespérément à planquer et qui n’est autre que son "propre" monde.
Finalement, le périple et la destination macabre du navire hollandais ne sont qu’une illustration, à la fois frappante et quotidienne, de la logique meurtrière d’un système capitaliste en faillite. En effet, pour rivaliser dans une situation de concurrence exacerbée et pouvoir espérer réaliser des profits, chaque entreprise se doit d’être la plus compétitive sur le marché ; "être compétitif ou périr !" … il n’y a pas d’autre choix. Il faut donc réduire les coûts de production par tous les moyens, même si c’est au prix de la destruction de l’environnement et de vies humaines.
C’est ainsi que le Probo Koala commence sa course, le 2 juillet, dans le port d’Amsterdam avec l’annulation des opérations de nettoyage de ses "eaux sales". L’explication du porte-parole de Trafigura, Jan Maat, sera sans détours : "Nous avons d’abord décider d’en traiter la moitié à Amsterdam et la moitié à Rotterdam, mais les délais nous auraient fait perdre beaucoup d’argent, 35 000 dollars par jour de retard au port d’Amsterdam et 250 000 dollars de pénalités au port suivant. Nous avons alors repompé les déchets à bord du navire et cherché un autre port." Par la suite, le navire fera escale en Estonie pour charger une cargaison de pétrole. Selon le quotidien néerlandais De Volkskrant, ce pétrole brut aurait été transformé en essence à bord même du navire par l’addition de soude et de naphta. Ce raffinage sauvage, qui évite des procédés de transformation trop coûteux à terre, a aussi le mérite de produire des déchets extrêmement toxiques, ceux-là mêmes qui finiront leur voyage au beau milieu de la population d’Abidjan !
La bourgeoisie a vite fait de montrer du doigt les entrepreneurs "sans foi ni loi" ainsi que les Etats corrompus du tiers monde, "tous prêts au pire pour quelques dollars de plus". Ainsi, le problème ne se résume plus qu’à un simple jeu entre "corrupteurs et corrompus" violant la législation vertueuse des saintes démocraties. "Les habitants d’Abidjan vivent un drame exemplaire… Et, une fois de plus, ce sont les habitants d’un pays d’Afrique noire, maillon faible par excellence en raison de turbulences politiques internes, qui trinquent. Chaque fois qu’un Etat baisse la garde, ou pire, se livre au plus offrant, des flibustiers des temps modernes se précipitent et y déversent les rebuts de la partie la plus développée de la planète." (Libération du 14 septembre).
Et pourtant, faire des économies, rogner sur tous les postes de dépenses (salaires, effectifs, normes de sécurité, etc…) au nom de la rentabilité et du profit n’est certainement pas l’apanage de quelques brebis galeuses du capitalisme, les "flibustiers des temps modernes", mais bien la règle général du système. En effet, les largages de déchets toxiques ou les explosions d’usines lâchant sur des dizaines de milliers de personnes leurs nuages toxiques ou radioactifs n’ont pas seulement lieu à la périphérie du système comme à Bhopal en 1984 ou Tchernobyl en 1986 mais aussi en plein cœur de cette "partie développée" et "vertueuse" du capitalisme. Il suffit de se souvenir de l’explosion en 1976 d’un réacteur chimique à Seveso déversant des tonnes de dioxine sur les populations alentour en Italie, de la fusion d’un réacteur nucléaire en 1979 sur l’île de Three Mile Island aux Etats-Unis, de l’explosion de l’usine chimique AZF à Toulouse en 2001 ou encore des innombrables marées noires sur les côtes françaises ou espagnoles. Ce florilège de catastrophes industrielles est la preuve que derrière les patrons et les Etats véreux que la bourgeoisie cloue au pilori, se cache le vrai responsable, le système capitaliste.
Le pavillon traditionnel de la piraterie, tête de mort et sabres croisés, est aujourd’hui l’emblème le plus approprié pour symboliser le capitalisme, flottant comme une menace au-dessus de l’humanité.
Jude (26 septembre)
Alors que l’horizon politique semble assombri par la guerre et la barbarie, la perspective prolétarienne vit toujours et se développe. C’est ce que démontrent non seulement le développement des luttes de la classe ouvrière dans de nombreuses régions, mais aussi l’apparition dans différents pays de petits groupes et d’éléments politisés cherchant à défendre les positions internationalistes qui sont la marque distinctive de la politique prolétarienne.
Le groupe "Enternasyonalist Komunist Sol" ("Gauche communiste internationale") en Turquie est une expression de cette tendance. Nous reproduisons ci-dessous un tract que ce groupe a produit en réponse à la guerre au Liban. L’émergence de cette voix internationaliste en Turquie est d’autant plus significative que le nationalisme (colporté notamment par la gauche) est particulièrement fort dans ce pays. De plus, la Turquie est profondément impliquée dans les rivalités inter-impérialistes, qui ravagent cette région. L’Etat turc est sur le point de lancer une nouvelle offensive contre les nationalistes kurdes du PKK – une campagne militaire qui sera certainement justifiée idéologiquement par la récente vague d’attaques terroristes dans plusieurs villes turques, attribuées aux factions nationalistes kurdes. La question kurde est directement liée à la situation en Irak et en Syrie, et la Turquie est un des quelques Etats à avoir des liens étroits avec Israël. La guerre au Liban pèse fortement sur les ouvriers en Turquie ; en même temps, la classe ouvrière turque qui a une longue tradition de luttes combatives, pourrait jouer un rôle majeur dans le développement d’une alternative prolétarienne à la guerre impérialiste dans la région.
Le 12 juillet, juste après le kidnapping de soldats israéliens par le Hezbollah, le président israélien Ehoud Olmert a promis aux libanais une "réponse très douloureuse et de grande ampleur". Le 3 juillet à l’aube, l’Etat d’Israël commençait une invasion et poussait sa classe ouvrière dans une nouvelle guerre nationaliste et impérialiste. L’Etat d’Israël a lancé cette invasion pour ses propres intérêts et sans se soucier du sang qui pourrait être versé. En 15 jours, environ 400 civils libanais ont perdu la vie. Le récent cessez-le-feu ne garantit pas que les massacres ne recommenceront pas puisque l’Etat d’Israël a montré qu’il détruirait tout ce qui menace ses propres intérêts, pas seulement dans le dernier conflit mais aussi à travers la torture continuelle des palestiniens.
Cependant, nous ne devons pas oublier qu’Israël n’est pas le seul responsable de ce conflit. Ni le Hezbollah qui attire actuellement l’attention du monde par les combats qu’il livre contre les israéliens avec une violence qui égale la leur, ni l’OLP et le Hamas qui ont mené une guerre nationaliste en Palestine depuis des années, ne peuvent être considérés comme "clean". Le Hezbollah qu’Israël a montré du doigt au monde avant le début du conflit, a tué des civils israéliens avec des roquettes provenant de Syrie et d’Iran, pendant toute la guerre. Le Hezbollah est une organisation anti-sémite et fondamentaliste. Plus important encore, contrairement à ce que pensent certains, le Hezbollah ne s’est pas battu pour protéger le Liban. Au lieu de cela, c’est pour ses propres intérêts qu’il a forcé la classe ouvrière libanaise à rejoindre le front nationaliste et il ne s’est battu que pour défendre les territoires qu’il contrôle et l’autorité qu’il détient. L’OLP qui a poussé les ouvriers palestiniens du terrain de la lutte de classe dans les griffes de leur bourgeoisie nationale et le Hamas qui est aussi réactionnaire, violent, anti-sémite et fondamentaliste que le Hezbollah, ne font eux aussi que défendre leurs propres intérêts. Ici, il est nécessaire de décrire brièvement ce qu’est l’impérialisme. Contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, l’impérialisme n’est pas une politique qu’exercent les puissants Etats nationaux afin de prendre le contrôle des ressources des Etats nationaux plus faibles. Au contraire, il s’agit de la politique de tout Etat national, ou d’organisations fonctionnant comme un Etat national, qui contrôlent une certaine zone, les ressources de cette zone et qui exercent leur autorité sur la population de ce territoire. Plus simplement, l’impérialisme est la politique naturelle que pratique n’importe quel Etat national ou n’importe quelle organisation fonctionnant comme un Etat national. Comme nous l’avons vu dans le dernier conflit entre Israël et Hezbollah, dans certaines situations, les Etats nationaux ou les organisations fonctionnant comme un Etat national ont des conflits d’intérêt et ces conflits aboutissent à une guerre inter impérialiste.
Dans une telle situation, ce que disent les gauchistes en Turquie et dans le monde, s’avère encore plus ridicule et incohérent. En Turquie comme dans le monde, la plupart des gauchistes ont apporté leur soutien total à l’OLP et au Hamas. Dans le dernier conflit, ils se sont exprimés d’une seule voix pour dire "nous sommes tous le Hezbollah". En suivant cette logique qui consiste à dire "l’ennemi de mon ennemi est mon ami", ils ont pleinement soutenu cette organisation violente qui a poussé la classe ouvrière dans une désastreuse guerre nationaliste. Ce soutien des gauchistes au nationalisme nous montre pourquoi ils n’ont pas grand chose à dire qui diffère de ce que dit le MPH (parti du mouvement national - les Loups gris fascistes) non seulement sur le Hezbollah, l’OLP et le Hamas mais aussi sur d’autres sujets. En Turquie, tout particulièrement, les gauchistes n’ont aucune idée de ce dont ils parlent.
La guerre entre le Hezbollah et Israël et la guerre en Palestine sont toutes les deux des guerres inter impérialistes, et les différents camps en jeu utilisent tous le nationalisme pour entraîner la classe ouvrière de leur région dans leur camp. Plus les ouvriers sont aspirés dans le nationalisme, plus ils perdront leur capacité à agir en tant que classe. C’est pourquoi ni Israël, ni le Hezbollah, ni l’OLP, ni le Hamas ne doivent être soutenus en aucune circonstance. Ce qui doit recevoir un soutien pendant ce conflit, c’est la lutte des travailleurs pour survivre, pas les organisations nationalistes ou les Etats qui les font tuer. Et plus important encore, ce qu’on doit faire en Turquie est d’œuvrer pour la conscience de classe et la lutte de classe qui se développeront ici. L’impérialisme et le capitalisme enchaînent les pays les uns aux autres ; c’est pourquoi l’indépendance nationale est impossible. Seul le combat de la classe ouvrière pour ses propres besoins peut offrir une réponse.
Pour l’internationalisme et la lutte de classe !
Enternasyonalist Komunist Sol
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