La formation des CR, qui date de près d'un an, fut une formation où l'unanimité se porta beaucoup plus sur la lutte contre le trotskisme défini comme un mouvement passé au service de la bourgeoisie que sur une plateforme politique de regroupement des éléments d'avant-garde.
Ce courant, qui se place du côté du prolétariat malgré les scissions et l'absence des bases principielles, conserve une homogénéité organisationnelle mais est incapable, sans le problème important de l'heure, d'avoir une ligne politique suivie et conséquente.
Manquant d'éléments idéologiques basés, il s'est lancé dans ses publications, vers de véritables prophéties qui ne se sont pas réalisées.
Si l'intention qui l'animait était louable du point de vue révolutionnaire, il n'apportait aucun acquis au mouvement et, le plus souvent, aidait à maintenir la confusion et, surtout, à discréditer le travail de l'avant-garde en général par ses fantaisies politiques.
En vue de remédier à ces faiblesses politiques, la Gauche Communiste de France a considéré nécessaire de provoquer des réunions publiques et contradictoires de tous les courants d'avant-garde pour permettre à chaque courant de préciser ses positions politiques et aider aussi à la clarification dans le mouvement ouvrier.
La critique, que nous nous proposons de faire ici, est celle des 2 plateformes programmatiques en discussion chez les CR ainsi que celle des positions politiques prises à la dernière réunion publique sur la question du parti par le même courant.
Ce qui caractérise essentiellement les CR et surtout leur parrain politique, les RKD, c'est moins la méthode d'analyse que certaines positions politiques qui sont schématisées à l'extrême jusqu'à devenir, pour ces courants, un calque du mouvement ouvrier, sans vie et sans spécificité.
La méthode d'analyse, qui garantit, dans la mesure du possible, une ligne politique conséquente et révolutionnaire, leur fait défaut. Et c'est à ceci qu'est imputable, le plus souvent, leur contradiction politique.
Ainsi, considérer l'URSS, dès 1921, comme déjà un État non-prolétarien parce qu'elle fut obligée de sacrifier certaines formes pour conserver le fond (cas de la NEP) et admettre, d'autre part, la possibilité pour le parti révolutionnaire de faire un front unique avec des organisations dont on laisse dans le vague la tendance ou le camp auquel elles appartenaient, est un des caractères spécifiques de l'homogénéité de leurs positions et surtout une preuve de leur impossibilité, faute de méthode d'analyse, de coordonner et d'inter-réfléchir les divers thèmes de leurs 2 déclarations de principe.
En lisant leurs documents et en suivant leurs discussions, l'impression qui s'en dégage est celle d'un amalgame de positions disparates, plus ou moins justes, mais nullement le fruit d'un travail réfléchi et coordonné.
Si nous insistons sur ce point, c'est pour mettre en relief le propre d'une méthode.
Pour nous, une méthode d'analyse dialectique repose sur trois points essentiels :
Les CR remplissent largement les deux premiers points ; le troisième point reste dans le vague. La forme matérielle de l'instrument de la méthode, pour eux, est un empilement de principes et souvent de postulats. Aucune trame ne se décèle permettant une relation et une idée directive entre les principes.
Pour nous, l'axe, l'instrument, le point conscient de la méthode réside dans le problème du parti qui, tout en n'éliminant pas les autres facteurs du succès des luttes révolutionnaires et même en les coordonnant, constitue le critère de la nature révolutionnaire d'un mouvement ainsi que l'élément primordial pour une issue victorieuse à une période révolutionnaire.
Qu'en pensent les CR ? Ils nous renvoient au "Que faire ?" de Lénine et nous assistons à un défilé de propositions organisatives plutôt qu'à une synthèse de la nature du parti et de son rôle. Cette maladie de poser le problème organisatif avant le problème idéologique et qu'ils caractérisent de matérialiste parce qu'elle repose sur des éléments palpables -l'idéologie étant pour eux du spiritualisme, détruisant ainsi toute la base moniste de la dialectique matérialiste-, ils l'ont contractée chez les RKD dont "l'arme" ressemble plus à une nomenclature de catalogue, comparable à celle de la "Manufacture de Saint-Etienne" qu'à un exposé des enseignements de toute l'expérience ouvrière passée et présente.
Comment se situe le problème ?
Face à une IIème Internationale mal coordonnée dont l'unité révolutionnaire était dans un équilibre instable et où l'intransigeance finissait par être de plus en plus verbale, les bolcheviks répondent, par leur structure idéologique et par leur intransigeance sur le fond, aux nécessités d'une période qui quittait le libéralisme économique (l’Age d'or du capitalisme) pour l'impérialisme (décadence du capitalisme).
Leur structure politique conditionnera, dans la majeure partie (et encore il y eut des failles) leur solidité organisationnelle et surtout leur viabilité en tant qu'instrument le plus nécessaire de la lutte de classe.
Ce problème dépassant les nécessités immédiates de la lutte, les formes utopistes pour aller au fond des choses et poser le principe axial : la lutte révolutionnaire n'est possible qu'en fonction de la prise de conscience de classe du prolétariat. Sans elle, aucune situation révolutionnaire ne peut se résoudre en un mouvement révolutionnaire.
Comme le socialisme, expression de la conscience de classe achevée, et la lutte de classe ne sont pas deux éléments dont le premier est issu du deuxième, mais deux éléments parallèles, leur confluence ne peut être que le résultat d'une situation favorable et surtout de l'existence de la pensée socialiste.
La situation naît objectivement du fonctionnement même de l'économie capitaliste. Le socialisme, lui, demande des possibilités scientifiques d'étudier et de construire idéologiquement.
La classe ouvrière dans son ensemble, par sa dépendance économique totale du capitalisme, n'a pas les possibilités scientifiques d'étudier et de construire idéologiquement la pensée socialiste. Seule une minorité de transfuges de la petite-bourgeoisie et d'ouvriers libérés dans une certaine mesure de la contrainte sociale directe du capitalisme peuvent exprimer et consolider chaque fois la pensée socialiste, la conscience active de classe.
Pourquoi le problème est avant tout idéologique ? Parce ce que c'est par cette voie que l'homme fait l'histoire en rapport avec le processus de la lutte de classe.
Qu'on ne nous taxe pas, de façon ridicule, de spiritualistes. Nous savons que la révolution, c'est le prolétariat dans son ensemble qui la fait. Mais nous savons aussi que, s'il la fait, c'est qu'il a pris conscience de la nécessité du socialisme. Et, ce qui est primordial, c'est que, sans idéologie révolutionnaire, il ne la fait pas.
Une fois ce critère formé, l'expression de la révolution d'Octobre (et sa suite) devait être analysée en fonction du cours politique qu'elle a pris et non en fonction de certaines formes organisationnelles qu'elle a adoptées.
Les CR, toujours à l'affût de la recette révolutionnaire (soviets, tout le prolétariat en armes, démocratie, organisation...) nous répondent fort justement : "Mais les formes organisationnelles sont conditionnées par la nature des positions politiques."
Alors, pourquoi analyser ces formes en dehors de leur contexte idéologique et, surtout, pourquoi ne pas rechercher les leçons révolutionnaires dans le facteur déterminant qu'est le programme, au lieu de le chercher dans les facteurs dérivants que sont les formes organisationnelles ?
Car une forme organisationnelle n'est pas uniquement dépendante de l'idéologie. Elle résulte aussi d'un degré technique de mauvaise adaptation à une conjoncture locale ou momentanée. Ainsi, l'histoire des divers oppositions -de gauche, du centre et de droite- dans la 3ème Internationale reflète plus, malheureusement, des oppositions secondaires souvent justes que des oppositions de principes.
Ces oppositions ont conduit, malheureusement, les divers courants de la 3ème Internationale vers des positions politiques opportunistes et contre-révolutionnaires, ou bien vers des positions infantiles, retardataires du point de vue idéologique, improprement appelées "ultra-gauchistes".
Considérer l'interdiction de fractions organisées dans le parti, ou bien la NEP, ou bien la nécessité des syndicats révolutionnaires rattachés aux Syndicats Rouges face à la Centrale syndicale d'Amsterdam, comme des éléments qui caractérisent la transformation de l'Internationale Communiste en organisme de l'impérialisme russe en 1921, conduit à des positions politiques anti-marxistes et anti-historiques :
Et tout ceci nous ramène à Souvarine, Trotsky et Korch pour indiquer la droite, le centre et l'extrême-gauche de ces oppositions avortées de la 3ème Internationale.
Sans besoin de publicité et pas pour vanter une marchandise, seule la fraction de gauche du Parti Communiste d'Italie a su poser le problème sur ses assises politiques.
Ce n'était pas tant la répression de Kronstadt (ou la NEP) qui importait mais le fait que le mouvement de Kronstadt indiquait un retard de la conscience de classe dans un secteur donné. Et que ce retard ne se rattrapait pas par la répression mais, au contraire, par un développement du travail politique du parti et de la propagande. Que la NEP était négligeable comme influence, si la tactique révolutionnaire avait accéléré la révolution dans le monde. Et là, le problème du front unique était analysé, critiqué et combattu. Là résidait un facteur important ayant décidé de l'échec des révolutions après 1921. (...)
Nos camarades CR et RKD, jusque dans leur plateforme politique, commettent la même erreur, tentant de résoudre organisationnellement les problèmes que posent la révolution et l' État prolétarien après 1917, sans prendre en considération le cours de dégénérescence et de mort du mouvement ouvrier dans le monde, en Russie en particulier.
Ils vont jusqu'à conserver cette tactique qui détonne par rapport à leur sectarisme dans l'analyse de la 3ème Internationale.
Et, si certains de nos camarades CR rejettent maintenant le front unique, ils ne nous ont donné aucune possibilité de penser qu'ils ont saisi l'importance de ce problème.
Leur inconséquence politique va jusqu'à admettre de pair la notion du parti de Lénine du "Que faire" toute opposée aux positions des économistes, (...) et spontanéistes du mouvement révolutionnaires, avec l'égalité qu'ils posent entre le parti et les organisations unitaires du prolétariat et ses organismes d' État.
La primordialité du parti sur les organismes unitaires du prolétariat et d' État de la classe détermine le dépérissement de l' État ouvrier et ouvre la voie au socialisme. Le contraire nous donnera malheureusement un renforcement de l' État et le développement du bureaucratisme tout comme le stalinisme.
En définitive, de toutes les oppositions de la 3ème Internationale, les CR et les RKD n'ont su faire qu'un mélange des divers courants sans voir les incohérences d'une telle méthode.
Nous, nous avons préféré prendre comme critère la méthode d'analyse du seul courant qui, à juste raison, a su différencier les problèmes politiques des problèmes organisationnels : la FG du PC d'Italie.
Les tribunistes et les korchistes ont fait table rase des expériences des trente dernières années ; attention aux CR et RKD qu'ils n'en fassent de même car, alors, les enseignements les plus achevés nous viendraient de la 2ème Internationale, c'est-à-dire, pour nos sectaires, de 1903.
Parler du parti, de l'avant-garde, de son rôle, c'est avant tout parler de la classe ouvrière et de sa différence d'avec la classe bourgeoise.
La classe bourgeoise, dans sa lutte contre la féodalité, ne disposait pas, comme le prolétariat, d'un devenir historique seulement mais, il ne faut surtout pas l'oublier, d'une force économique qui allait en absorbant toutes les énergies productives de la féodalité.
Les partis de la bourgeoisie n'avaient pas à rendre conscient leur classe de la nécessité de la transformation de la société. Cette conscience, la bourgeoisie la trouvait quotidiennement dans la possession de la force économique et son besoin d'expansion.
La fonction existant, l'organe était à construire, c'est-à-dire les pouvoirs politique et juridique.
Pour le prolétariat, le problème est plus complexe. Il est autre ; du pouvoir économique il ne possède que sa force de travail qu'il est obligé de louer et, comme le salaire qu'il reçoit, il ne peut s'apercevoir de l'exploitation (de plus, sa force de travail est payée à sa valeur marchande) ; les luttes pour la revendication immédiate ne lui montre que la nécessité de marchander son travail à plus haut prix.
L'inexistence de nouvelle structure économique, structure que la bourgeoisie possédait dans la féodalité, l'empêche de sentir la nécessité d'une transformation radicale de classe de la société.
Ces luttes demeurent (...) et ne dépassant jamais le cadre du système d'exploitation sans le travail théorique de personnes qui posent la faillite et la mort du capitalisme, comme inhérentes aux lois de son fonctionnement, et (...) l'impasse dans laquelle se trouve la production capitaliste ainsi que le processus pour en sortir et dépasser ce mode de production.
Ce travail théorique est une des taches du parti, son autre rôle étant d'en faire prendre conscience au prolétariat et de le conduire à créer les conditions pour un nouveau mode de production par la prise de pouvoir politique.
Ce parti devient ainsi une représentation du prolétariat dans la défense de ses intérêts, en tant que classe ; mais le prolétariat se pose comme la seule classe susceptible de donner une solution viable à la crise permanente de la société capitaliste. Il y a, entre le parti et la classe ouvrière, fusion intime par l'expression idéologique de la lutte historique de classe.
Qui parle du parti parle de la classe dans son ensemble. Il n'y a pas de séparation dans le devenir historique.
Pour la composition ainsi que dans la situation à un moment donné, la séparation entre parti et classe résulte de l'écart existant entre une (...) avancée qui construit la théorie socialiste et les degrés de la (...) de classe.
Au moment de la confluence, le parti et le prolétariat se solidarisent dans la lutte révolutionnaire, et le facteur idéologique en est le ciment.
La dégénérescence du parti de classe n'infirme pas cette loi historique. Elle ne peut exprimer qu'un rejet de la conscience de la classe ouvrière et laisse la place au nouveau parti de classe qui, malheureusement, ne se construit pas de suite, mais est obligé d'attendre la réalisation d'un nouveau travail idéologique tendant à retrouver et enrichir la conscience de classe jusqu'à la poussée d'une crise révolutionnaire.
Les CR et les RKD n'ont pas assimilé la nature du parti parce qu'ils n'ont pas compris l'élément nouveau provenant de la condition économique de la classe ouvrière.
Ainsi se débattent-ils dans certains problèmes où le plus grand flottement existe. Ainsi le problème de la démocratie en est un, où le flottement et l'imprécision chez les CR et les RKD est caractéristique.
D'une part, fort justement, ils proclament que la question de la démocratie n'est pas de même importance que la question du parti. La loi de la majorité l'emportant sur la minorité n'est pas du tout le critère garantissant la victoire révolutionnaire, que ce soit dans la classe ouvrière ou dans le parti.
Ils devraient donc arriver à conclure que le décret interdisant la formation de fractions organisées dans le parti (les courants étant admis et autorisés) provient de l'application stricte de la démocratie, dans la lettre comme dans le fond. Mais là où tout se gâte c'est sur la question des Soviets.
Ils ont considéré que la dictature du prolétariat c'était le prolétariat en armes organisé dans les Soviets - organismes élus démocratiquement et n'étant conditionnés, dans leur nature révolutionnaire, non par la démocratie qui y règne mais par l'existence du parti. Ce subterfuge-là consiste à rejeter par la porte la démocratie comme facteur révolutionnaire primordial et à le réintroduire par la fenêtre.
En effet, baser le pouvoir ouvrier sur les Soviets, en donnant alors au parti le rôle de conseiller, revient 1) à garantir la révolution par l'élection démocratique, 2) à considérer une séparation idéologique entre le prolétariat révolutionnaire et le parti qui exprime cette révolutionnarité.
Et voilà notre principe démocratique assis à la place d'honneur, de même valeur sinon plus que le parti.
L'exemple des Soviets en Allemagne ainsi que le non-désaveu des CR et RKD de la tactique de Lénine à la veille d'Octobre - tactique rejetant le mot-d'ordre "tout le pouvoir aux soviets" par "tout le pouvoir aux comités d'usines" si le nouveau congrès ne se prononçait pas pour les bolcheviks - n'a pas éclairé d'une bougie leur entendement.
Pour eux, Soviet et Comité d'usine représentent la même chose. Il faut croire que Lénine était mal informé.
Seulement le soviet s'élisait sur la base de la localité, tandis que le comité d'usine sur la base de l'usine, représentant surtout le prolétariat en arme, mais la fraction la plus dynamique et la plus consciente.
Alors, est-ce parce que les soviets ont perdu leur caractère démocratique ou est-ce parce que le parti ou l'Internationale ont commis des erreurs se soldant par la défaite révolutionnaire que l' État ouvrier a dégénéré jusqu'à devenir capitaliste ? Ils nous répondent astucieusement : "c'est l'un et l'autre."
Non ! C'est la dégénérescence politique de l'Internationale qui a entraîner une transformation de la nature de classe des soviets.
Et le pouvoir ouvrier n'est nullement garanti par les soviets et la démocratie qui y règne, mais uniquement par la ligne politique que la classe a grâce à son avant-garde.
La formule du pouvoir ouvrier - exprimée par le prolétariat en arme, élisant démocratiquement et révoquant à chaque moment les soviets - est fausse.
Le pouvoir ouvrier, ce n'est pas les soviets ni le prolétariat en arme mais la dictature des intérêts de la classe ouvrière sur la classe capitaliste.
Nous ne rejetons pas les soviets et le prolétariat en arme, au contraire, mais nous précisons que les soviets révolutionnaires et le prolétariat en arme sont une résultante de la conscience de la classe, concrétisée et développée par le parti, se généralisant grâce à une situation montante et à l'action du parti dans la classe ouvrière.
Le problème des organismes de l' État ouvrier a son importance du point de vue idéologique en ce qu'il invite et forme les ouvriers à la gestion de l' État et, du point de vue technique, pour une planification. Mais il demeure secondaire face à la nécessité qu'a l' État de défendre la classe ouvrière d'un retour de flamme du capitalisme et de former le prolétariat en vue de l'organisation de la société.
Pendant toute la période de l' État ouvrier, nous sommes en pleine direction de la société et (...) organisme des classes est plus préparé, plus apte que le parti à diriger ?
Si le facteur principal de l' État ouvrier n'est pas le parti, c'est-à-dire l'idéologie active, dynamique de classe de tous les organismes, supra-organisme que l'on créera le plus démocratiquement dans la classe ouvrière, ne pouvant pas donner à l' État sa caractéristique prolétarienne.
De là à dire que l' État prolétarien c'est le parti, il y a un abîme.
Les organismes soviets démocratiquement élus - parce qu'il n'y a pas d'autre moyen de trancher certains problèmes en un sens juste ou faux - expriment un contenu révolutionnaire si le parti de classe détient la majorité et dirige en fraction de la généralisation de la conscience révolutionnaire qui s'exprimera par la majorité.
Mais c'est la conscience révolutionnaire qui est l'élément primordial car, si le parti dégénère du fait de fautes politiques qui renforcent l'opportunisme en son sein, la majorité démocratique sera encore là pour aider la contre-révolution, marquant par là une baisse conséquente du prolétariat au niveau de sa conscience.
Le parti n'est pas l' État, il le dirige en tant qu'expression la plus élevée de la conscience de classe.
Là encore les CR et RKD font une confusion. Pour eux, il y a ou bien dictature du parti ou bien dictature du prolétariat.
Nous leur demanderons seulement : s'il y a dictature du parti, que défend cette dictature ? Et si elle défend les intérêts du prolétariat, alors c'est la dictature du prolétariat. Quels sont les organismes qui exécutent cette dictature ? Ce n'est sûrement pas le parti mais l' État ouvrier.
Qui dirige l'exécution de la dictature ? C'est immanquablement le parti car, au fur et à mesure que le parti ne la dirige plus, c'est que nous nous acheminons vers le socialisme ou la société sans classe.
Si le parti ne défend pas les intérêts de classe du prolétariat, c'est qu'alors il n'est plus le parti de la classe.
Pour nous, il n'existe pas deux dictatures ; la dictature du prolétariat est l'expression de la fusion idéologique du parti avec la classe ouvrière.
Nous ne nous sommes, en définitive, attaqués qu'aux points centraux du problème que l'avant-garde a résolu et doit compléter.
Notre exposé a été peut-être trop théorique. Mais, concernant notre plate-forme, nous rappellerons que deux documents ont paru. L'un à la formation du noyau en 1942, "la déclaration de principe" (où nous reprenions, d'une manière condensée, la notion de parti et la notion de fraction) qui fera l'objet d'une critique dans un article des RKD sur la faillite des courants ouvriers et révolutionnaires issus de la 3ème Internationale. De plus, à la conférence de juillet 1945, nous avons repris les principaux points de notre "déclaration" de 1942 et les avons développés et enrichis dans le document "Résolution et taches de la période transitoire".
Que les CR et RKD fassent une critique de ces documents.
Concernant les points tels le front unique, les questions nationale et coloniale, les CR et RKD, bien qu'ayant défendu sur la classe capitaliste.
Nous ne rejetons pas les soviets et le prolétariat en arme, au contraire, mais nous précisons que les soviets révolutionnaires et le prolétariat en arme sont une résultante de la conscience de la classe, concrétisée et développée par le parti, se généralisant grâce à une situation montante et à l'action du parti dans la classe ouvrière.
Le problème des organismes de l' État ouvrier a son importance du point de vue idéologique en ce qu'il invite et forme les ouvriers à la gestion de l' État et, du point de vue technique, pour une planification. Mais il demeure secondaire face à la nécessité qu'a l' État de défendre la classe ouvrière d'un retour de flamme du capitalisme et de former le prolétariat en vue de l'organisation de la société.
Pendant toute la période de l' État ouvrier, nous sommes en pleine direction de la société et (...) organisme des classes est plus préparé, plus apte que le parti à diriger ?
Si le facteur principal de l' État ouvrier n'est pas le parti, c'est-à-dire l'idéologie active, dynamique de classe de tous les organismes, supra-organisme que l'on créera le plus démocratiquement dans la classe ouvrière, ne pouvant pas donner à l' État sa caractéristique prolétarienne.
De là à dire que l' État prolétarien c'est le parti, il y a un abîme.
Les organismes soviets démocratiquement élus - parce qu'il n'y a pas d'autre moyen de trancher certains problèmes en un sens juste ou faux - expriment un contenu révolutionnaire si le parti de classe détient la majorité et dirige en fraction de la généralisation de la conscience révolutionnaire qui s'exprimera par la majorité.
Mais c'est la conscience révolutionnaire qui est l'élément primordial car, si le parti dégénère du fait de fautes politiques qui renforcent l'opportunisme en son sein, la majorité démocratique sera encore là pour aider la contre-révolution, marquant par là une baisse conséquente du prolétariat au niveau de sa conscience.
Le parti n'est pas l' État, il le dirige en tant qu'expression la plus élevée de la conscience de classe.
Là encore les CR et RKD font une confusion. Pour eux, il y a ou bien dictature du parti ou bien dictature du prolétariat.
Nous leur demanderons seulement : s'il y a dictature du parti, que défend cette dictature ? Et si elle défend les intérêts du prolétariat, alors c'est la dictature du prolétariat. Quels sont les organismes qui exécutent cette dictature ? Ce n'est sûrement pas le parti mais l' État ouvrier.
Qui dirige l'exécution de la dictature ? C'est immanquablement le parti car, au fur et à mesure que le parti ne la dirige plus, c'est que nous nous acheminons vers le socialisme ou la société sans classe.
Si le parti ne défend pas les intérêts de classe du prolétariat, c'est qu'alors il n'est plus le parti de la classe.
Pour nous, il n'existe pas deux dictatures ; la dictature du prolétariat est l'expression de la fusion idéologique du parti avec la classe ouvrière.
Nous ne nous sommes, en définitive, attaqués qu'aux points centraux du problème que l'avant-garde a résolu et doit compléter.
Notre exposé a été peut-être trop théorique. Mais, concernant notre plate-forme, nous rappellerons que deux documents ont paru. L'un à la formation du noyau en 1942, "la déclaration de principe" (où nous reprenions, d'une manière condensée, la notion de parti et la notion de fraction) qui fera l'objet d'une critique dans un article des RKD sur la faillite des courants ouvriers et révolutionnaires issus de la 3ème Internationale. De plus, à la conférence de juillet 1945, nous avons repris les principaux points de notre "déclaration" de 1942 et les avons développés et enrichis dans le document "Résolution et taches de la période transitoire".
Que les CR et RKD fassent une critique de ces documents.
Concernant les points tels le front unique, les questions nationale et coloniale, les CR et RKD, bien qu'ayant défendu
La guerre impérialiste éclatée en 1939, parce qu’une date décisive pour le prolétariat français.
Elle est l'aboutissement et le point culminant d'une période de recul du prolétariat, période au cours de laquelle tous les efforts de reconstruire l'organisme politique de la classe se sont heurtés au cours historique objectif de la guerre et se sont soldés par des échecs.
L'organisation trotskiste, par ses positions politiques et méthodes d'organisation, ne pouvait pas regrouper les éléments révolutionnaires et devait sombrer rapidement en tant qu'organisation révolutionnaire. Son entrée dans le parti de la 2ème Internationale est le point terminal de son existence en tant qu'organisation prolétarienne. Ses positions politiques prises par la suite -à l'occasion de la guerre d'Éthiopie, de la guerre impérialiste en Espagne, sur l'antifascisme, sur la défense de la Russie et sur la guerre impérialiste mondiale- sont autant de manifestations de son évolution et de sa nature anti-prolétarienne.
Les groupes issus du Trotskisme et unifiés autour de l'Union Communiste représentaient à l'origine incontestablement une réaction prolétarienne. Mais l'absence de principes programmatiques et la confusion politique ont fait de l'UC un groupe éclectique où coexistaient des éléments et des tendances politiques hétéroclites allant des positions du Raten Komunisten hollandais à celles du POUM espagnol.
La guerre impérialiste en Espagne a été la pierre de touche, une épreuve historique décisive pour l'ensemble des groupes se réclamant du prolétariat révolutionnaire.
Les positions prises par l'UC dans la guerre impérialiste en Espagne, en dépit de ses (...) et réserves, ont situé celle-ci dans le camp des défenseurs de la "République" et de la "démocratie" aux côtés du POUM, des trotskistes et de tous les groupes prisonniers de l'idéologie bourgeoise de l'antifascisme.
Désormais les positions de la classe ne pouvaient être sauvegardées qu'en dehors de ces formations politiques, dans la rupture idéologique et organisationnelle avec elles. Le regroupement des révolutionnaires ne pouvait et ne devait se faire que dans la lutte contre et en dehors de ces organisations tombées dans l'engrenage du capitalisme.
Les scissions qui se produisent autour de la question espagnole dans la Fraction Italienne de la Gauche Communiste, dans la Ligue des Communistes Internationalistes en Belgique, les sorties de l'UC et la formation du Groupe des Travailleurs Marxistes du Mexique ont le même caractère et sont de la même nature que la rupture des bolcheviks avec la 2ème Internationale lors de la 1ère guerre impérialiste en 1914.
Il faudra attendre l'éclatement de la guerre impérialiste en 1939, la liquidation définitive idéologique et organisationnelle de ces anciens groupes en France pour qu'au cours de la guerre, à la faveur de conditions historiques nouvelles, surgissent et se regroupent des éléments révolutionnaires, donnant naissance à des groupes nouveaux et indépendants.
La formation du premier noyau en 1942 qui se transforma ensuite en Fraction Française de la Gauche Communiste et la formation du groupe CR en 1944 sont autant de manifestations d'un processus de rassemblement de révolutionnaires en France et expriment la tendance historique du prolétariat de se donner une organisation politique de classe.
Quelle qu'ait été leur faiblesse numérique, leur insuffisance programmatique, leurs erreurs et leurs crises intérieures, ces formations sont le produit d'une situation internationale de reprise des luttes sociales, représentant le caractère de cette situation nouvelle, contiennent des prémices d'évolution et de popularisation révolutionnaire et, par là-même, n'ont rien de commun dans leurs fonctions avec les groupes existant avant la guerre, qui devaient se liquider avec l'éclatement de celle-ci.
Désormais, l'élaboration des programmes de la révolution, base fondamentale du futur parti, la formation et la réélection des cadres pour le futur parti, ne pouvaient se faire qu'à travers ces groupes et dans la confrontation politique publique de ces groupes.
La Fraction Française de la Gauche Communiste représentait, à ce titre, une preuve de garantie politique parce qu'elle représente une continuité politique plus directe. Ses éléments ne venaient pas exclusivement du Trotskisme, parce qu'ils se sont reformés -mais pas longtemps- dans l'organisation anti-prolétarienne du Trotskisme et ont été moins infestés par cette idéologie ; parce qu'ils ont plutôt su rompre individuellement avec les organisations qui participaient à la guerre impérialiste ; ou ils n'ont pas tenté de former, pendant les longues années de guerre, des oppositions stériles qui, involontairement, se sont rendues néanmoins complices politiquement de ces organisations étrangères au prolétariat. La Fraction Française s'est formée sur la base d'une déclaration de principes sans cesse complétée par des documents programmatiques portant sur les problèmes brûlants posés par l'expérience russe et par les luttes du prolétariat international entre les deux guerres, problèmes non résolus ou mal résolus par l'IC. La Fraction Française se rattache, de par sa formation, au corps idéologique de la Gauche Communiste Internationale qui représente incontestablement les positions de classe les plus avancées à la veille de la guerre impérialiste et qui représente historiquement le chaînon qui relie la 3ème à la future 4ème Internationale Communiste, tout comme les bolcheviks ont représenté le lieu et la continuité historique entre la 2ème et la 3ème Internationale.
Mais si notre organisation pouvait avec raison prétendre vouloir jouer le rôle de la Fraction en France et œuvrer dans ce sens par son travail théorique et pratique ; ce rôle de Fraction qui est le canal qui va de l'ancien Parti enlevé par le capitalisme à la construction du nouveau Parti de classe, se faisant sur les bases programmatiques et organisationnelles de la Fraction ; elle a toujours rejeté la caricature grotesque de la notion de fraction basée sur une prétention infantile et consistant à proclamer qu'en dehors de la Fraction aucune possibilité ne subsiste d'existence de groupes à nature prolétarienne et révolutionnaire.
Ces contre-vérités historiques furent déjà dénoncées à l'aube du mouvement ouvrier, par Karl Marx, dans le Manifeste Communiste. Les communistes sont les représentants les plus conséquents, les plus conscients des buts historiques du prolétariat et des moyens de leur réalisation, mais non l'expression unique. De plus, l'histoire a, maintes fois, apporté la preuve que la réalité suit parfois des voies plus complexes que la théorie ne l'annonce.
Théoriquement il reste vrai que le processus le plus directe, le plus économique de la construction de nouveaux Partis, après la trahison des anciens, est là le processus qui se fait par la succession Fraction-Parti. Mais, dans la réalité, des facteurs multiples peuvent contrecarrer ce processus et l'obliger à emprunter un long détour.
Aussi, dans le passage entre les partis de la 3ème Internationale et ceux de la 4ème, seul le prolétariat italien est parvenu, pour des raisons historiques déterminées, à se (muer [?]) le processus direct à travers la succession Fraction-Parti. En Belgique, ce processus est déjà beaucoup moins direct. En France, encore moins.
La gangrène stalinienne et la décomposition trotskiste ont été des facteurs historiques puissants pour contrecarrer le processus de formation de fraction. Aussi, voyons-nous surgir des groupes aux positions politiques plus ou moins achevées, représentant et contenant des éléments de nouveaux partis à construire.
Le marxiste ne pose pas d'ultimatum à l'histoire mais tient compte du déroulement des cours objectifs, participe à ces cours en vue de contribuer à leur détermination dans la direction où se trouvent les intérêts historiques du prolétariat. Toute autre voie mène à la fixation des révolutionnaires en sectes, chapelles et systèmes qui sont tôt ou tard privés de la vie et liquidés par la réalité mouvante.
L'ouvrage de la guerre n'est pas passé sans que son souffle dévastateur ne se fasse sentir jusque dans les rangs de la Gauche Communiste Internationale. L'isolement d'abord, la guerre impérialiste ensuite ont déterminé, au sein de la Gauche Communiste, la formation d'un courant révisionniste dont les positions commencent par la négation des antagonismes inter-impérialistes et, en conséquence, par celle du danger d'une guerre impérialiste généralisée, qui a développé au cours de la guerre des théories sur l'existence sociale du prolétariat, sur une nouvelle ère de prospérité économique dite "de l'économie de guerre", sur la négation de tout travail révolutionnaire et internationaliste au cours de la guerre, sur l'impossibilité de la notion de la transformation de la guerre impérialiste en guerre civile et sur la nécessité de son rejet. Ce courant révisionniste, qui a été une terrible entrave au regroupement et à l'activité de la Gauche Communiste au cours de la guerre, a fini, après la cessation de l'occupation allemande, par préconiser et par s'intégrer dans des comités antifascistes, organisations en apparence au-dessus des classes et inter-partis, en réalité des officines de la bourgeoisie "démocratique".
Ce courant qui quittait le terrain de classe n'avait plus de place dans la Gauche Communiste. Une partie de la Fraction Italienne groupée autour du comité de Marseille et la Fraction Française ont proclamé la rupture politique avec ce courant et ont voté son exclusion organique.
L'attitude à prendre envers ce courant (avec lequel une partie de la GCI se refusait à rompre) et les positions politiques qu'il défendait, l'analyse et l'appréciation des événements de 1943 en Italie dans lesquels certains éléments de la GCI niaient l'intervention du prolétariat, l'appréciation de l' État russe que d'autres éléments continuaient à considérer, après 4 ans de guerre, comme non-impérialiste, comme un État prolétarien dégénéré tout en répétant la défense de cet État, et enfin l'attitude à avoir envers d'autres groupes révolutionnaires surgis au cours de la guerre, comme le RKD et le CR, révélèrent des divergences d'une profondeur telle qu'on ne pouvait plus parler d'une UNITÉ POLITIQUE de la GCI sans se duper soi-même et sans tromper les autres.
Le problème du regroupement de l'avant-garde à l'échelle nationale et internationale ne se posait plus simplement en termes de rapports entre l'assemblée des fractions regroupées dans la GCI et les groupes extérieurs à celle-ci mais passait désormais à l'intérieur même des fractions, dans le regroupement des révolutionnaires et leur rupture avec le courant révisionniste, anti-prolétarien au sein de la GCI.
La Fraction Française de la Gauche Communiste devait reproduire en son sein les luttes de tendances existant dans l'ensemble de la Gauche Communiste. Ces luttes, souvent obscurcies par des questions contingentes, par des choses secondaires, par des polémiques à caractère personnelle, par la calomnie, apparaissent aujourd'hui dans leur fond politique véritable, révèlent leur nature profonde.
Une tendance, celle de Freder-Al, constamment ballottée entre la position révolutionnaire et la position révisionniste, marchant sans cesse en zigzag entre nous et le courant Vercesi, s'est lentement formée au sein de la Fraction Française. À chaque pas en avant que cette tendance faisait vers des positions révolutionnaires de la majorité de la Fraction Française, elle refaisait, le lendemain, DEUX PAS EN ARRIÈRE vers le courant Vercesi. L'opportunisme ne suit pas toujours une ligne droite, ouvertement opportuniste, mais le plus souvent camoufle sa nature réelle, surtout au commencement, sous des phrases de gauche, prenant des attitudes spectaculaires d'intransigeance. Pour apprécier correctement la nature d'un courant politique, pour mettre à jour une tendance opportuniste, il faut se garder de le juger d'après des positions isolées, dans des circonstances isolées, mais le suivre dans sa tendance générale, faire la somme de ses zigzags et établir le sens de sa ligne courbe.
À titre d'exemple typique, nous rappellerons la rage soudaine et inattendue de la tendance Française, préconisant, dans un de ses accès brusque d'intransigeance verbale, l'exclusion sans discussion de Vercesi. Notre Fraction - qui a combattu politiquement et de plus en plus violemment la tendance opportuniste de Vercesi, qui l'a combattu publiquement dès le premier jour (voir Bulletin International année 1943-44, Internationalisme en 1945, les brochures "Notre réponse" de mai 1944 et "Quand l'opportunisme divague" de mai 1945) - répugnait à cette méthode d'exclusion dans l'ombre. La majorité de notre Fraction a toujours proclamé la nécessité d'une réparation avec la tendance Vercesi. Mais, pour que cette réparation ait une valeur, représente un enrichissement idéologique de l'organisation, assure son évolution révolutionnaire, il fallait que cette réparation se fasse en pleine clarté, après une discussion politique publique, après que nous ayons apporté publiquement la démonstration de la nature opportuniste de la tendance Vercesi. C'est à cette condition que les scissions se justifient, sont révolutionnairement fécondes et ne sont pas le produit de réactions passagères (...) rage de nos champions de l'intransigeance verbale qui a duré tout juste deux mois, leur a servi pour leur éviter d'être obligé de combattre ouvertement les positions politiques de l'opportunisme, de même que l'exclusion de Vercesi (...) sans explication publique leur a permis de se regrouper (...) avec Vercesi contre la Fraction.
Tout militant révolutionnaire expérimenté connaît la signification de l'intransigeance verbale. Il suffit d'attendre un peu pour voir apparaître sous la couche verbale d'intransigeance la pratique constante du plus vulgaire opportunisme. L'exemple historique le plus frappant peut-être est donné par la fin (...) de l'anarchisme. L'anarchisme, dans sa lutte violente contre le Marxisme, s'est gargarisé, pendant 75 ans, de phrases ronflantes contre l'étatisme, contre l'autoritarisme, contre la dictature du prolétariat. A la théorie marxiste de l'inévitabilité d'une phase transitoire après la révolution, dans laquelle le prolétariat est obligé de recourir à la violence et à l'exercice du pouvoir politique, les anarchistes apportaient le communisme "libératoire" immédiat et autres fantaisies de ce genre. Mais, après 75 ans de bavardages et de phrases creuses, quand l'anarchisme a trouvé à même, pour la première fois, de traduire dans la pratique, dans son pays (...), l'Espagne, ses élucubrations théoriques, il a non pas instauré un gouvernement révolutionnaire du prolétariat mais a adhéré à un gouvernement capitaliste d'union sacrée et de guerre impérialiste.
Mais là où l'intransigeance opportuniste atteignit son comble, ce fut dans les questions d'appréciation et de rapports à avoir avec d'autres groupes révolutionnaires tels les RKD et les CR. Non pas que les "intransigeants" aient apportés la moindre critique sérieuse des erreurs des RKD et des CR ; ce travail critique fut insuffisant et fut laissé extérieur à la majorité de la Fraction, se contentant de déclamer et réciter verbalement des principes abstraits, appris par cœur et non-assimilés, et réclamant la rupture de tout contact politique et organisationnel avec ces groupes.
L'attachement purement verbal (ce qui est dans leur nature) à la Gauche Communiste leur servait de je-ne-sais quelle ceinture de chasteté contre tout ce qui est extérieur à la Gauche Communiste, considéré en bloc comme un danger mortel de souillure de la pureté virginale de la Gauche Communiste. Au fond, cela permettait d'abriter derrière le talisman de la Gauche Communiste tout révisionnisme, tout opportunisme (...)
L'opportunisme, fidèle à lui-même, préfère toujours l'attachement sentimental (...), mais qui nous semblaient susceptibles de servir de critères de délimitation.
Ces quatre points sont :
Ce sont ces quatre points que notre Fraction a présenté comme critère de délimitation afin de permettre aux groupes existants afin de permettre aux groupes, existant nationalement et internationalement, en accord avec ces points, d'établir, sur cette base politique, des contacts et des discussions de clarification et de confrontation. Cette méthode de clarification et de discussion politiques entre les divers groupes véritablement révolutionnaires comporte, à nos yeux, l'avantage 1) de se délimiter d'abord des groupes antiprolétariens, comme le trotskisme, le POUM et autres courants opportunistes camouflés ; 2) de permettre une discussion politique féconde entre les divers groupes révolutionnaires, discussion qui, seule, peut révéler les possibilités de regroupement ultérieur, sur la base de positions politiques principielles ; 3) d'établir une solidarité entre ces groupes révolutionnaires et des actions communes circonstancielles si elle sont nécessitées par des situations particulières.
Aujourd'hui il est possible à tout militant le fond de l'explosion, de l'indignation de nos intransigeants en parole qui décrivaient alors ces quatre points comme une manifestation de néo-trotskisme.
Aujourd'hui qu'ils ont constitué un bloc sans principe avec des éléments qui défendent la participation dans des comités antifascistes ou que l' État russe n'est pas un État impérialiste, on comprend que l'intransigeance d'hier contre les quatre points n'a été dictée que par la volonté de ne pas se lier les mains par (...) des positions principielles et de laisser aussi la porte ouverte à toutes sortes de combinaisons opportunistes. Le refus de discuter avec les CR et les RKD, l'attitude sectaire à leur égard devait être d'autant plus grande et la scission effectuée avec la Fraction Française - sur des questions de procédure organisationnelle et de questions personnelles pour camoufler le fond politique - devait être d'autant plus hâtive qu'on préparait, dans le silence, en sous-mains, des tractations d'unification avec le courant opportuniste de Vercesi.
Le petit groupe qui vient de se former, pour couvrir son caractère d'amalgame opportuniste, d'un titre politique. Pour cela, il n'a pas craint de recourir à des procédés scandaleux d'usurpation du (...) de notre organisation et de s'intituler également de Fraction Française de la Gauche Communiste. La volonté de créer la confusion entre eux et nous est manifeste. Nous protestons et dénonçons ce procédé (...). Ce premier acte, par lequel se manifeste ce groupe, le caractérise et le (...) pleinement. Il est nécessaire encore pour donner une idée exacte de ce groupe (...) et de qui se (...) cet amalgame.
1. La base politique et numérique de ce groupe est donnée par la minorité de la Fraction Italienne exclue par la Fraction en 1937 à la suite des événements espagnols. Quelle qu'ait pu être l'exagération polémique, nous continuons à penser que la position prise par cette minorité dans la question espagnole, participant dans les milices "antifascistes" et dans la guerre impérialiste d'Espagne, a justifié la séparation avec elle et son exclusion de la Gauche Communiste Internationale. Cette minorité, loin de renoncer à ses positions prises dans le passé, les revendique toujours. Avec raison elle considère la participation du courant Vercesi dans le comité antifasciste de Bruxelles comme la continuation et le triomphe de ses positions et (...) à cette politique. L'admission sans discussion de cette minorité, faisant d'elle l'axe du nouveau groupe, c'est la capitulation devant ses positions, c'est l'annulation de la signification de la rupture faite avec elle en 1937, c'est une condamnation posthume, une critique implacable contre la scission faite dans la Ligue Communiste
Internationaliste qui a donné naissance à la Fraction Belge de la Gauche Communiste. Cette admission honorifique c'est l'annulation pure et simple de toute l'activité des Fractions de 1936 à 1943, la condamnation de la création du Bureau International de la Gauche Communiste et de toute son activité.
2. A cette minorité se joignent deux responsables de l'ancienne Union Communiste avec qui les Fractions de la Gauche Communiste ont rompu toute relation politique dès 1936, considérant avec raison que l'Union Communiste, de par ses positions et notamment sa défense du POUM, se situait en dehors des positions de classe du prolétariat. Dans la question syndicale, l'Union Communiste a toujours combattu la position communiste du droit de fraction dans les syndicats, en faveur de la politique de (...) syndicale qu'elle a toujours pratiquée. Un trait de plus, caractéristique du manque de sérieux et de principes des uns et des autres, s'est manifesté sur la notion de la fraction. Sur ce point d'une (...) l'Union Communiste combattait violemment la Fraction Italienne pendant plus de dix ans. Il a suffi de 15 minutes à Ver. de la FI et à Dar. de l'UC pour tomber complètement d'accord et s'apercevoir la divergence de dix ans n'était qu'un regrettable malentendu. L'opportunisme n'a pas de vertèbres. Il va sans dire que ces représentant de l'Union Communiste rentrent dans l'amalgame en ne renonçant à rien de leur idéologie de banqueroute. L'Union Communiste est morte, vive l'Union Communiste.
3. Deux jeunes camarades qui furent aussi intransigeants dans l'organisation que Fr et Al dans la Fraction Française. C'est probablement au nom de la lutte contre toute action commune entre les CR et la Fraction "bordiguiste" pour mieux combattre l'"opportunisme" des quatre points que ces camarades "intransigeants" s'allient à Union Communiste, à la minorité italienne, à Vercesi et à leurs cousins en intransigeance, Fr et Al. Pour ne pas se laisser mouiller par la pluie, sautons dans le fossé !
4. Pour compléter l'équipe, nos deux étudiants, Fr et Al, dans leur naïveté, se sont pris pour des professeurs de... l'intransigeance. La jeunesse politique de ces camarades peut expliquer bien des choses, mais excuser pas toujours. Au lieu de tourner comme une girouette, tous les trois mois, ils feraient mieux de s'arrêter et de réfléchir. Scission, unification, exclusion, vote, cela doit avoir un sens pour un militant sérieux (...) est admissible de voter dans l'ombre l'exclusion de Vercesi, simplement pour avoir (...) le plaisir de s'unifier à lui deux mois plus tard dans une unité politique plus grande.
Et toute cette équipe est formée sous le haut patronage de Vercesi et par son initiative personnelle.
En résumé et pour récapituler, ce groupe se compose de la minorité italienne exclue par la Fraction Italienne et par Vercesi en 1937, de Fr et Al qui ont voté l'exclusion de Vercesi de la Gauche Communiste en mars 1945, du représentant de l'Union Communiste sœur du POUM, d'anciens poumistes qui condamne le POUM, de camarades PI. de CR dont une résolution en octobre 1943 déclarait la position de Vercesi comme contre-révolutionnaire, de deux camarades de CR en mal d'intransigeance et de Vercesi lui-même.
Les couleurs de ces groupes sont l'arc-en-ciel, c'est également leur fond politique. Aucune homogénéité, aucune ligne politique. Tous les opportunistes, du POUM au Comité antifasciste, y ont élu leur (...). Une seule chose les unit : leur version de la clarté politique, de la définition des principes et des positions révolutionnaires conséquentes, non pas en paroles mais dans l'activité continue.
Aucune déclaration politique n'a servi de base à cet amalgame. L'opportunisme se rassemble dans le vague et dans le flou.
Il se réclame bien, dans les grandes lignes, des "Thèses de Rome" et de la plateforme de la Gauche Italienne de 1926, tout en laissant à chacun l'interprétation libre des textes. Sur toutes les questions brûlantes posées par la période la plus (...) et la plus riche en défaites du prolétariat, les questions du fascisme et de l'antifascisme, celles se rapportant à la contre-révolution en Russie, celle de la tendance réalisée du capitalisme vers le capitalisme d' État. Toutes ces questions, y compris les problèmes post-révolutionnaires se rattachant aux rapports entre l' État, le parti et la classe après la victoire de la révolution, sont laissées intentionnellement dans le vague et à la merci des opinions personnelles. Quelle valeur, quel intérêt politique présente dans ces conditions un tel groupe ? Les "Thèses de Rome" et la plateforme de 1926 sont des feuilles de vigne destinées à couvrir le néant politique, la nudité frileuse de l'opportunisme.
Les hommes des Comités antifascistes se réfèrent aux "Thèses de Rome", tout comme les socialistes de l'union sacrée se référaient au "Manifeste Communiste" de Marx et comme les ministres "communistes" se réclament de Lénine.
Tout particulièrement doit être dénoncée la méthode qui a servi à ce regroupement.
Les communistes, les révolutionnaires n'ont pas à cacher leurs buts ni leurs positions. Ils combattent au grand jour. Les scissions nécessaires avec les opportunistes et, encore plus, les regroupements souhaitables entre révolutionnaires, ils les font toujours après discussions politiques, après confrontation et clarification politique loyale, ouvertement devant le prolétariat. Rien n'est plus étranger aux communistes que ces intrigues diplomatiques, les jeux d'influence personnelle et ce véritable maquignonnage politique qui ont présidé à la formation de ce nouveau groupe par (...) individuel de transfuges de tous les groupes.
Cette entreprise de confusion et d'opportunisme - au moment précis où des groupes se réclamant du marxisme révolutionnaire en France se sont enfin engagés dans la voie de la discussion et de la confrontation politique de leurs positions respectives - doit être publiquement dénoncée, avec la dernière énergie.
Le Fraction Française de la Gauche Communiste s'adresse à tous les groupes et à tous les militants révolutionnaires. Elle les appelle à être vigilants contre la nouvelle édition du trotskisme en France.
Pour la délimitation avec les opportunistes sur la base des quatre points avancés par notre Fraction.
Pour la poursuite de la discussion de clarification commencée, seule méthode et seule garantie d'un regroupement de l'avant-garde sur la base solide des principes et d'un programme de la révolution communiste.
Fraction Française de la Gauche Communiste
01/11/1945
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