Courrier de lecteur: Octobre 1917, un phare pour l’avenir

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Nous publions ci-dessous le courrier d’un lecteur qui nous a écrit pour défendre la nature prolétarienne de la révolution en Russie, soutenir notre Manifeste sur Octobre 1917 et engager le débat sur de multiples questions cruciales pour l’avenir. Cette démarche militante, nous la saluons fort chaleureusement, tout comme cet effort pour clarifier des questions politiques indispensables ; tous nos lecteurs sont invités à participer à ce débat par leurs contributions, écrites ou orales.

Courrier de lecteur

J’ai lu ce Manifeste [du CCI sur la Révolution Russe] plusieurs fois. Je suis tout à fait d’accord avec le texte, mais je voudrais ajouter ceci à mon avis : en effet, la révolution russe reste l’événement le plus important de l’histoire mondiale. C’est une expérience historique. Le prolétariat est la seule classe qui peut faire une révolution dans le monde entier. En 2017, beaucoup ont oublié l’Internationale et la Révolution russe. Nous nous souvenons de l’histoire et savons qu’avec la montée du prolétariat, des organisations surgiront. Si le prolétariat se souvient peu de son passé, il ne s’est pas oublié lui-même, ni qui il est.

Le prolétariat mène sa lutte depuis la première Internationale. Cette lutte ne cesse pas d’exister chez tous les travailleurs. C’est une lutte de classe. Même si la classe ouvrière oublie ses valeurs historiques, nous révolutionnaires, nous préserverons toute l’expérience du passé. A l’heure décisive, les révolutionnaires viendront à la rescousse. Car nous faisons partie du prolétariat, nous faisons partie de la lutte.

A propos du paragraphe : Le capitalisme s’est survécu, je voudrais ajouter qu’il n’y a pas assez d’explications concernant les marchés et débouchés. Il était nécessaire de faire des ajouts pour étendre plus largement le sujet et expliquer les raisons de la décadence et la phase de décomposition.

Le passé a montré que la défaite de la révolution prolétarienne a entraîné les conséquences suivantes : les camps en Russie, la terreur, le nazisme en Allemagne, le fascisme en Italie. Je crois qu’il est impossible de gagner sans utiliser la force matérielle contre le capitalisme. Marx a écrit à ce sujet dans son ouvrage : Contribution à la critique de la philosophie du droit de Hegel (1844) : “la force matérielle ne peut être abattue que par la force matérielle”.

J’avais encore une question : pourquoi, après la défaite de la révolution, le fascisme ou le nazisme ne sont-ils pas survenus en Russie ? A mon avis : Staline était au départ membre du parti bolchevique. Plus tard, il l’a utilisé à ses propres fins. Ou il n’y avait pas d’autre issue, que de transformer tout en mensonge : le vrai devint le mensonge, et le mensonge le vrai.

En défense d’Octobre, pour la première fois dans l’histoire, l’humanité a essayé de transformer complètement le monde. La révolution russe (avec sa continuation en Allemagne, en Hongrie, etc.) est la seule révolution d’une telle expérience de toute la période de décadence du capitalisme. Il y a eu des erreurs : le parti s’est emparé de tout le rôle de la révolution, la répression des matelots de Cronstadt. C’est l’une des principales erreurs. En effet, le parti est nécessaire au prolétariat pour le guider dans la bonne direction. Le passé nous en a donné l’expérience.

Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !

Salutation fraternelle.

Réponse du CCI

Dans le cadre de ces colonnes, il n’est pas possible de répondre à l’ensemble des questions soulevées, mais nous tenions à souligner et soutenir plusieurs idées essentielles exprimées dans ce courrier :

– En tout premier lieu, il faut saluer le ton militant, la volonté de se battre et de ne pas céder à la résignation et à l’atonie que peut générer la situation sociale, alors que la classe ouvrière connaît de réelles difficultés pour mener son combat : “nous faisons partie du prolétariat, nous faisons partie de la lutte”. La démarche de ce courrier évite ainsi les principaux écueils qui ne mènent qu’à la capitulation : céder à l’activisme ou, au contraire, au repli sur soi. En défendant l’importance du militantisme et du combat de classe, ce courrier exprime aussi son soutien et sa confiance envers les organisations révolutionnaires : “Nous nous souvenons de l’histoire et savons qu’avec la montée du prolétariat, des organisations surgiront”. Avec cette ferme volonté de participer au combat en considérant que les organisations révolutionnaires constituent bel et bien un pont indispensable vers le futur, une nécessité qu’il faut absolument défendre, le camarade valide ainsi totalement le besoin de réflexion théorique et de réappropriation politique comme des activités essentielles pour le développement de la conscience de classe et l’orientation du combat en vue de la création du futur parti mondial. Un tel état d’esprit, extrêmement positif, s’inscrit parfaitement dans la tradition du combat historique du prolétariat pour défendre son unité et sa conscience.

– Le prolétariat est aujourd’hui la seule classe révolutionnaire. Dans un contexte où la classe ouvrière rencontre d’immenses difficultés à s’identifier elle-même comme classe, sans cesse diluée et réduite à l’impuissance dans le grand bain inter-classiste du “peuple” et des “citoyens”, il est nécessaire de défendre le fait qu’elle demeure la seule classe capable de transformer le monde, d’abattre les rapports sociaux d’exploitation et les frontières qui ne produisent plus que la misère et la guerre.

– La révolution d’Octobre 1917 a bien été une expérience irremplaçable des masses exploitées pour tenter de détruire l’ordre capitaliste. En réaction à la barbarie guerrière, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, une classe exploitée prenait en main sa destinée et tentait de construire une nouvelle société, le communisme. Cet assaut révolutionnaire mondial constitue pour le prolétariat une source d’enseignement considérable en vue de la préparation aux futurs affrontements révolutionnaires.

– Comme l’a démontrée la vague révolutionnaire débutée en 1917, la révolution est vouée à l’échec sans s’étendre au niveau international et sans parti révolutionnaire, avant-garde la plus consciente de la classe, déterminé à défendre bec et ongles les principes politiques du prolétariat. Cela est d’autant plus remarquable que la propagande de la bourgeoisie, identifiant à la fois le communisme au stalinisme et le parti bolchevik à une clique putschiste, est permanente et insidieuse.

Le camarade se demande, par ailleurs, si le Manifeste du CCI sur la révolution d’Octobre 1917 n’aurait pas dû plus insister sur les raisons de la période de décadence et de sa phase actuelle de décomposition. Cette préoccupation est parfaitement légitime mais le Manifeste avait d’abord vocation à défendre la mémoire du mouvement ouvrier. Néanmoins, il est exact que certaines notions historiques ou questions théoriques simplement énoncées dans notre texte nécessitent peut-être d’être explicitées. Cela fait justement partie du travail d’appropriation et d’approfondissement nécessaire à la classe ouvrière.(1)

Ce courrier s’inscrit pleinement dans le processus de réflexion indispensable qui est mené pour tenter d’armer le prolétariat sur le plan théorique, l’arme théorique étant en elle-même une “force matérielle”.

RI, 9 mars 2018

 

1 Nous renvoyons à ce titre nos lecteurs à nos Thèses : La décomposition, phase ultime de la décadence capitaliste, ainsi qu’à notre série d’articles parut dans la Revue internationale : Comprendre la décadence du capitalisme.

 

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