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Lors de sa campagne électorale, François Hollande nous avait promis un demi-mandat d'efforts pour un autre demi-mandat de répartition des richesses. Sachons reconnaître que, pour une fois, un candidat aux présidentielles n'aura qu’à moitié menti. Depuis un an, effectivement, les coups tombent sur un peu tout le monde. Les allocations familiales, la Sécurité sociale, les retraites... les attaques pudiquement baptisées réformes vont bon train. Comme à chaque fois, une réforme est présentée comme un correctif aux politiques passées, pas assez justes, pas assez égalitaires, pas assez protectrices et soucieuses des besoins des plus démunis, etc. Le problème est qu'au lieu de corriger le tir, chaque réforme appuie un peu plus là où la précédente faisait déjà sacrément mal ! L'effort à consentir est justifié par le fait que nos valeurs de solidarité et nos "acquis" les plus précieux sont en danger : couverture maladie, retraite par répartition, assurance chômage, prestations familiales... tout peut disparaître si on ne se serre pas immédiatement – et encore un peu plus – la ceinture. Au moins les médecins qui, sous l’antiquité ou au moyen-âge, pratiquaient la saignée et précipitaient la mort du malade, croyaient sincèrement au bien fondé de leur remède. Aujourd’hui, ce gouvernement qui nous saigne aux quatre veines, le fait en toute connaissance de cause !
Au nom de l’égalité et même de l’équité, tous les ouvriers dégustent, sans distinction. Quand il s'agit de taper dessus, il n'y a plus de sexe, de couleur de peau ou de religion qui compte. Les jeunes, les vieux, les fonctionnaires, les employés du secteur privé, tout le monde a droit à son coup de massue ! Ceci n'est évidemment pas une spécificité française, ni même une spécificité actuelle : depuis bien des années, les gouvernements successifs de droite comme de gauche dans tous les pays développés ont mené ces types de "réformes". La bourgeoisie elle-même n'hésite pas à y faire référence : regardez en Allemagne ou en Espagne, la retraite est à 67 ans ! Regardez en Italie, les efforts que le "peuple" fait ! Et la Grèce !
Effectivement, s'il faut s'aligner sur ce qui se fait de plus misérable en chaque domaine, il y a encore un peu de chemin, mais nous ne sommes plus très loin ! Cependant, on nous assure qu'on n'arrivera jamais à ce niveau car en France, on a des valeurs, on est attachés à la solidarité et à la justice... balivernes. Ça, c'est le discours de la gauche, son emballage hypocrite. Cette solidarité-là, cette justice là, c'est le chemin vers la culpabilisation de ceux qui n'ont pas encore tout perdu, c'est la comparaison entre les régimes ou les statuts différents, les secteurs variés, ou avec d’autres pays pour finir inexorablement par un alignement de tous vers le bas. On y arrivera bien sûr, les attaques ne cesseront pas au nom de quelconques "valeurs" auxquelles la bourgeoisie n'a cure de s'attacher. Bien au contraire, en pointant les parties de la classe les plus touchées, elle imprime son propre mode de pensée, ses propres références, ses propres valeurs, marquées par la compétitivité, la concurrence, le chacun-pour-soi, véritable loi de la jungle où la morale n'a plus droit de Cité. Elle s'offre la possibilité de diviser les prolétaires en comparant les plus solidaires, ceux qui font des efforts à ceux qui pourraient en faire un peu plus. On nous rabâche que ce seront les plus riches qui paieront, que les plus pauvres seront épargnés, mais c'est faux ! La réforme des allocations familiales, pour ne parler que d'elle, touchera tous ceux qui gagnent 2500 euros et plus. Avec 2500 euros, on n'est pas riche, on peut même être en difficulté si nos charges sont importantes, et elles le sont pour de plus en plus d'ouvriers.
C'est là toute l'intelligence de la bourgeoisie : bien sûr que tout le monde est attaqué, aucun ouvrier n'est à l'abri quel que soit sont statut, mais tous ne seront pas frappé simultanément. Ce n'est pas nouveau : en 1987, les cheminots avaient "leur" attaque, à part des autres secteurs ; en 2003, c'étaient les enseignants, etc. Les exemples ne manquent pas et aujourd'hui encore, on se prépare à nous démontrer que tous les régimes de retraite ne sont pas au même niveau, que certaines entreprises licencient légitimement, mais pas d'autres, etc. En cela, les syndicats jouent pleinement leur rôle en focalisant leurs revendications sur ce qu'il y a de plus catégoriel, sectoriel, voire spécifique à l'entreprise. C'est ainsi qu'on fait passer l'idée de plus en plus répandue, qu'on ne lutte pas de la même façon dans une PME que dans une multinationale, dans le privé que dans le public...
La solidarité, ce n'est pas consentir aux mêmes sacrifices que ceux à qui l’Etat a infligé le plus. La solidarité, c'est refuser pour les autres comme pour soi de faire ces sacrifices qui ne mènent à rien d'autre qu'à préparer le constat que finalement, ce n'était pas assez, qu’il faut continuer à en faire davantage, qu’il faut une nouvelle fois rentrer le ventre et serrer la ceinture d’un cran. A quoi aboutissent aujourd'hui les efforts déjà faits par la classe ouvrière ? Par un chômage record, un déficit public qui n'arrête pas de se creuser, les systèmes de santé, d'éducation qui se dégradent. A quoi serviront ceux que l’on prévoit de nous imposer demain ? A la même chose ! Il est temps de voir que quelque chose cloche et de refuser de verser une goutte de sueur de plus pour ce système qui nous broie lentement mais sûrement.
GD (25 juin)