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Des pluies torrentielles se sont abattues sur le département du Var dans la nuit du 15 au 16 juin, causant d’importants dégâts matériels et le décès de 25 personnes, victimes d’inondations spectaculaires et de coulées de boue, en particulier autour de la rivière de la Nartuby. Aussitôt, la meute politicienne et médiatique s’est fendue de communiqués hypocrites et de déclarations larmoyantes. Mais quelques semaines après les inondations sur le littoral atlantique, les coulées de boues en Amérique latine et le séisme en Haïti, la bourgeoisie étale une nouvelle fois tout son cynisme en désignant sottement les “événements naturels très éprouvants” (1), évacuant bien opportunément son impuissance et son incurie. Il est certes impossible d’empêcher la nature de se déchaîner, mais l’installation de populations dans des zones à risque n’est pas une “fatalité.”
Une catastrophe prévisible et des prévisions catastrophiques
Les caprices de la Nartuby, cours d’eau prenant sa source au sommet du plateau dominant Draguignan, commune où son débordement a occasionné le plus de victimes, étaient, non seulement prévisibles, mais récurrents. Cet événement s’ajoute en effet à une liste de cinq crues torrentielles très importantes depuis 1974. De nombreux arrêtés de catastrophe naturelle ont également été décrétés à la suite des inondations. Le Plan de Prévention des Risques d’Inondation (2) (PPRI) de la ville de Draguignan, adopté en 2005, souligne d’ailleurs le risque “de graves problèmes en cas de crue majeure.”
Dans ce contexte, et depuis la tempête de 1999, le Service central d’hydrométéorologie et d’appui à la prévention des inondations (SCHAPI) est chargé de surveiller, en lien avec le système de vigilance de Météo France, les risques de crues des rivières. Sauf que le SCHAPI n’est pas suffisamment performant, à tel point qu’il n’est pas encore mis en place dans la région de la Nartuby, secteur manifestement très sensible. Ainsi, alors que des moyens techniques existent, aucun plan d’évacuation n’a été mis en place, faute d’information : le lundi soir, le service de vigilance de Météo France passait seulement au niveau “orange.”
La catastrophe, c’est le capitalisme
Dans une région à risque, où les eaux menacent à chaque instant d’enlever des vies humaines, que fait la bourgeoisie ? Elle réalise des profits en multipliant, par exemple, les permis de construire sur ce que le PPRI de Draguignan qualifie désormais de “secteur le plus vulnérable de par les activités et les habitations implantées en zone rouge.” D’après l’association France Nature Environnement, près de 243 000 Varois habitent dans une zone à risque. Autrement dit, la bourgeoisie délivre des permis de construire, bâtit et vend des habitations au cœur de zones dont elle sait l’extrême dangerosité. Plutôt que freiner l’urbanisation, creuser des bassins de rétention des eaux pluviales, ou même équiper les communes d’alarmes pour avertir la population, les élus locaux préfèrent laisser la population se noyer dans la boue, pour le plus grand bonheur des promoteurs immobilier.
Mais la loi cynique du profit ne s’impose pas uniquement à la bourgeoisie locale. Nicolas Sarkozy, en visite dans la région, quelques jours après le drame, déclarait : “Tant que je serai président de la République, personne ne construira dans une zone reconnue comme dangereuse.” Nous voilà rassuré ! Simplement, un an plus tôt ce même Sarkozy déclarait qu’en matière d’urbanisme : “le problème, c’est la réglementation. Pour libérer l’offre il faut déréglementer, élever les coefficients d’occupation des sols et rétablir la continuité du bâti dans les zones denses, (...) rendre constructible les zones inondables pour des bâtiments adaptés à l’environnement et au risque.” Il n’y a d’ailleurs aucune illusion à se faire sur cette fameuse réglementation dont Sarkozy voulait “changer la philosophie.” Chaque catastrophe est l’occasion d’une série de promesses que l'État s’emploie méthodiquement à ne pas tenir. Il suffit, pour s’en convaincre, de se remémorer le spectacle pathétique que le gouvernement nous avait servi autour des “zones noires” après la tempête Xynthia. De gauche ou de droite, les gouvernements et leurs réglementations ne protègent que les profits de la classe dont ils sont l’expression. On estime ainsi à 2,7 millions le nombre de personnes résidant dans une zone inondable en France, chiffres notablement minimisés puisque, à titre d’exemple stupéfiant, les habitants de communes victimes de la tempête Xynthia ne font pas partie de ce triste décompte.
La seule loi que connaît le capitalisme, c’est décidément celle du profit. Si la nature produit des phénomènes spectaculaires, c’est le capitalisme qui fait les catastrophes.
Dupont (24 juin)
2) www.cdig-var.org/virtual/1/lots/draguignan_doc1_presentation.pdf.