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1 - Le 5e Congrès du CCI constatait, dans sa ré solution sur la situation internationale ([1]) que "la crise qui maintenant atteint de -plein fouet les métropoles du capitalisme, obligera le prolétariat de ces métropoles à exprimer ses réserves de combativité qui n’ont pas été jusqu'à présent entamées de façon décisive". "La crise se révèle la meilleure alliée du prolétariat mondial". Ce qui n'était qu'annoncé au moment du Congrès, sans qu'il n'en soit prévu l'imminence, est devenu aujourd'hui une réalité. Depuis le milieu de 1983,- la classe ouvrière est sortie du recul marqué du sceau de la défaite en Pologne en 81 et s'est engagée dans une nouvelle vague de combats contre le capitalisme. En moins de 6 mois, ce sont des pays comme la Belgique, les Pays-Bas, la France, les Etats-Unis, l'Espagne et dans une moindre mesure, l'Allemagne, la Grande Bretagne et l'Italie qui ont connu des mouvements importants et significatifs de la classe.
2 - La reprise actuelle des luttes exprime le fait que, dans la période présente d'aggravation inexorable et catastrophique de la crise du capitalisme située dans un contexte général de cours historique aux affrontements de classe, les moments de recul du prolétariat sont et seront de plus en plus de courte durée. Ce qui se révèle dans cette reprise, c'est qu'aujourd'hui, les défaites partielles et la désorientation momentanée qui les permet ou qu'elles provoquent, ne sauraient entraver de façon décisive la capacité du prolétariat à riposter de façon croissante aux attaques économiques de plus en plus violences que lui assène le capital. Elle illustre une nouvelle fois le fait que, depuis 1968, c'est la classe ouvrière mondiale qui détient l'initiative historique, qui est passée globalement à l'offensive face à une bourgeoisie qui, malgré une défense pas à pas et un déploiement massif et impressionnant de son arsenal anti-ouvrier, n'a pas les mains libres pour apporter sa réponse propre à sa crise : la guerre impérialiste généralisée.
3 - La vague présente de lutte s'annonce d'ores et déjà comme devant dépasser en ampleur et en importance les deux vagues qui l'ont précédée depuis la reprise historique de la fin des années 60 : celle de 1968-74, et celle de 1978-80.
La première vague a eu comme caractéristiques majeures :
- d'annoncer avec fracas et de façon spectaculaire (notamment avec Mai 68 en France, le Mai rampant italien, les affrontements de Pologne) la fin de la période de contre-révolution, l'entrée du capitalisme dans une période nouvelle dominée par la confrontation entre les deux classes décisives de la société,
- de surprendre la classe bourgeoise qui avait perdu l'habitude de voir le prolétariat comme acteur de premier plan dans la vie de la société,
- de se développer à partir d'une situation économique encore relativement peu dégradée, ce qui laissait la place pour de nombreuses illusions au sein du prolétariat et notamment celle de l'existence d'une "alternative de gauche".
La deuxième vague se distingue par les éléments suivants :
- elle se base sur une dégradation beaucoup plus avancée de l'économie capitaliste, des attaques beaucoup plus sévères contre les conditions de vie de la classe,
- elle se situe à une période charnière entre deux moments du développement de la situation historique : les "années d'illusion" et les "années de vérité",
- elle voit la bourgeoisie des pays avancés réorienter sa stratégie face au prolétariat, remplacer la carte de "la gauche au pouvoir" par celle de "la gauche dans l'opposition",
- elle fait pour la première fois depuis plus d'un demi-siècle, avec les combats de Pologne 80, l'expérience de cette arme décisive de la classe dans la période de décadence:1a grève de masse,
- elle culmine dans un pays de la périphérie appartenant au bloc le plus "arriéré", ce qui met en évidence l'aptitude retrouvée de la bourgeoisie des métropoles du capital à opposer des lignes de défense encore considérables aux luttes ouvrières.
La vague de luttes actuelles tire sa source de l'épuisement' de ce\qui avait permis le recul de 1'après-Pologne :
- reste des illusions propres aux années 70 qui ont été définitivement balayées par la très forte récession de 1980-82,
- désarroi momentané provoqué tant par le passage de la gauche dans l'opposition que par la défaite en Pologne.
Elle démarre :
- à partir d'une longue période d'austérité et de montée du chômage, d'une intensification des attaques économiques contre la classe ouvrière dans les pays centraux,
- à la suite de plusieurs années d'utilisation de la carte de la gauche dans l'opposition et de l'ensemble des mystifications qui y sont associées.
Pour ces raisons, elle va se poursuivre par des engagements de plus en plus puissants et déterminés du prolétariat des métropoles contre le capitalisme dont le point culminant se situera de ce fait à un niveau supérieur à celui de chacune des vagues précédentes.
4 - Les caractéristiques de la vague présente, tel les qu'elles se sont déjà manifestées et qui vont se préciser de plus en plus, sont les suivantes :
- tendance à des mouvements de grande ampleur impliquant un nombre élevé d'ouvriers, touchant des secteurs entiers ou plusieurs secteurs simultanément dans un même pays, posant ainsi les bases de l'extension géographique des luttes, tendance au surgissement de mouvements spontanés manifestant, en particulier à leur début, un certain débordement des syndicats,
- simultanéité croissante des luttes au niveau international, jetant les jalons pour la future généralisation mondiale des luttes,
- développement progressif, au sein de l'ensemble du prolétariat,de sa confiance en soi, de la conscience de sa force, de sa capacité de s'opposer comme classe aux attaques capitalistes,
- rythme lent du développement des luttes dans les pays centraux et notamment de l'aptitude à leur auto organisation, phénomène qui résulte du déploiement par la bourgeoisie de ces pays de tout son arsenal de pièges et mystifications et qui s'est réalisé une nouvelle fois dans les affrontements de ces derniers mois.
5 - Contrairement à 1968, et en continuité avec ce qui s'était passé en 1978, la reprise actuel le ne trouve nullement devant elle une bourgeoisie sans préparation. Elle va se heurter à l'éventail complet des dispositifs que cette classe a déjà opposé à la combativité et à la prise de conscience du prolétariat, et qu'elle n'aura de cesse de perfectionner :
- mise en oeuvre de sa solidarité à l'échelle internationale qui se manifeste notamment par le black-out sur les luttes ou leur dénaturation par les médias,
- organisation de campagnes de diversions de toutes sortes (pacifisme, exploitation de scandales, etc.)
- mise en avant dans les luttes de revendications bourgeoises (défense de "l'économie nationale" ou de tel secteur économique ou encore des syndicats "menacés par la bourgeoisie"),
- faux appels à "l'extension" ou à la "généralisation" par les syndicats destinés à prévenir la menace d'une réelle extension,
- utilisation sélective et "intelligente" de la répression ayant pour but tant de démoraliser les ouvriers que de créer des "abcès de fixation" destinés à détourner la combativité de ses objectifs initiaux.
6 - La prise en considération et la dénonciation des moyens considérables et des obstacles mis en oeuvre par la bourgeoisie ne doit pas cependant conduire à un manque de confiance envers la capacité du prolétariat à les affronter et les surmonter. Cet arsenal sera responsable du développement lent, progressif des luttes dans les métropoles du capital (ce qui n'exclut pas la possibilité de brusques accélérations à certains moments, notamment là où la bourgeoisie n'a pas pu placer ses forces de gauche dans l'opposition comme en Espagne et surtout en France). En cela, les pays centraux continueront à se distinguer des pays de la périphérie (Europe de l'Est et surtout Tiers Monde) qui pourront connaître des explosions de colère et de désespoir, des "révoltes de la faim" violentes et massives mais sans perspectives propres et condamnées à une répression féroce. Cependant, l'utilisation permanente et de plus en plus intensive et simultanée par la bourgeoisie des pays avancés de tous ses moyens de sabotage des luttes, va nécessairement provoquer leur usure :
- les black-out et falsifications conduiront à une perte de confiance absolue envers les médias bourgeois,
- les campagnes de diversion montreront de plus en plus leur vrai visage face à la réalité des luttes sociales,
- les contorsions, même radicales, de la gauche, des gauchistes, des syndicats et du syndicalisme de base à force de conduire dans des impasses et à la défaite, provoqueront une méfiance croissante envers ces forces du capital comme cela se révèle déjà dans la période actuelle, notamment par une tendance nette à la désyndicalisation (en termes d'effectifs ou d'implication des ouvriers dans la vie syndicale),
- l'emploi de la répression, même s'il sera "modéré" dans les pays avancés dans la période qui vient, conduira en fin de compte à une prise de conscience de la nécessité de s'affronter directement et massivement à l'Etat.
En fin de compte, l'impasse économique totale du capitalisme, la misère croissante dans laquelle ce système va plonger la classe ouvrière, vont épuiser progressivement l'ensemble des mystifications qui ont permis jusqu'à présent à la bourgeoisie de maintenir son contrôle sur la société et, notamment, celles du "Welfare State". S'il est donc vain de s'attendre dans les pays centraux du capitalisme pour la période qui vient à des "sauts qualitatifs" brusques, à de soudains surgissements de la grève de masse, il est par contre nécessaire de souligner la tendance des affrontements qui ont d'ores et déjà commencé, à prendre un caractère de plus en plus massif, puissant, et simultané.
En ce sens, comme il l'a déjà été dit, "la crise reste la meilleure alliée du prolétariat mondial".