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Le gouvernement attendait une échéance en juin. Il attend aujourd'hui pour juillet et toute sa politique tend à gagner du temps jusque-là.
Cette politique était censée depuis plusieurs mois sur la situation économique et sociale, point névralgique par où passe en France les rapports mondiaux. Elle se concrétise dans le plan Mayer. Asseoir une “stabilité” relative qui consacre définitivement la misère de la classe ouvrière (son niveau de vie a été réduit de près de 50 % au cours de la guerre, dans 20% depuis la “Libération”), les scènes de cette stabilité la base d'une participation au plan Marshall de préparation à la 3e guerre mondiale, tel était début poursuivi par le gouvernement. Aujourd'hui celui-ci s'attend à ses premiers succès, il signifierait pour le capital une reprise en mains plus ferme de la situation.
Pour la première fois, un renversement de la tendance inflationniste qui domine depuis 1939 est devenu possible. Les chiffres récents de la conjoncture et les prévisions officielles semblent au moins l'indiquer.
La balance commerciale accusé en septembre un déficit de 31,22 %, en novembre de 23,58%, et en janvier-février de 33,83%. Celui-ci est tombé vers Mars à 20, 73%. La pénurie de dollars qui dominait les échanges extérieurs depuis plusieurs mois va se trouver sérieusement réduite par l'entrée en scène des crédits Marshall. Ceux- ci s'élèveront pour les 12 mois à venir à 1,131 millions de dollars. Les paiements internationaux seront donc sensiblement améliorés.
La situation financière du gouvernement s'améliore elle aussi, puisque c'est rentré (impôts arriérés et prélèvements) ce sont accrues au point qu'il a pu rembourser 2,100 millions à la Banque de France, sur avance antérieurement consenti, entre le 20 et le 27 mai.
Le poids des facteurs monétaire (extérieur et gouvernementaux) sur l'économie et donc alléger, et l'effet s'en fait sentir sur la production et les prix qui manifestent des signes nets de redressement.
La production était répartie doucement en 1946 ; elle avait stagné pendant l'été 1947, puisque l'indice était le même à fin décembre au début janvier. Or depuis le début de l'année en cours, elle a brusquement démarré pour atteindre un accroissement d'environ 30%. L’indice c'est général est aujourd'hui à 112 par rapport à 1938. Il attend 122 pour l'acier, 135 pour les produits finis, 148 pour les pneus, 150 pour le ciment. Les stocks se reconstituent à la suite de cette poussée et s'il reste en dessous du niveau normal pour l'industrie, du moins gagnent -ils baissent pour les biens de consommation. Les Grands Magasins parisiens qui travaillaient encore en janvier sur un mois et demi de stock, dispose aujourd'hui d'approvisionnement pour trois mois et espacent les commandes. Les magasins de détails se garnissent, la clientèle commence à refuser les achats. On s'attend d'autre part à une récolte très supérieure à celle de 1947, voire une chute probable des prix alimentaires.
Quant aux prix, ils ont une tendance depuis plusieurs mois à plafonner. L'indice des prix de gros qui était par rapport à 1938 à 1217 en décembre, à 1463 en janvier et à 1537 en février redescend à 1535 en mars (dernier chiffre connu). Cette baisse de 2 points porte sur les produits alimentaires, et en particulier sur le porc, les œufs et les pommes de terre. Les hausses des produits industriels se poursuivent mais au ralenti : la chaux, le ciment, et les produits semi-ouvrés non ferreux augmentent de 1,77 pour cent.
Enfin, en signe d'une extrême importance, les conditions financières des affaires commencent à se renverser elle aussi. Alors que depuis la guerre non seulement le paiement content mais le paiement à l'avance était la règle pour toutes les transactions commerciales, depuis 2 mois le crédit (généralement 90 jours) réapparaît sur une certaine échelle. Aussi les nouveaux accroissements de la circulation monétaire n'ont-ils plus pour cause les sources anciennes de la pénurie, mais l'accroissement brusque d'un portefeuille commercial dans les banques qui reflètent l'amélioration générale, l'augmentation du nombre de marchandises. Ce portefeuille qui s'était réduit à 10,161 millions en mai 1945 pour passer à 117,902 millions au 31 décembre 1947 monte à 165.313 millions au 27 mai de cette même année. L'augmentation pour le mois de mai est de 16,013 millions et elle est en même temps de 2.895 pour les chèques postaux. Or, pratiquement, l'accroissement de circulation monétaire ainsi engendré par la nécessité devant laquelle se trouve les banques te faire des avances aux industrielles et commerçants, (escompte des traites) et temps parti compenser par le remboursement des avances antérieures auxquelles le gouvernement a procédé, ainsi que par l'augmentation des comptes créditeurs. L’inflation actuelle n'a par conséquent, plus du tout le même sens que par le passé.
Le bilan de cette situation et donc le suivant : reprise de la production, accroissement du nombre de marchandises, possibilité d'une chute subite de certains prix, ou du moins d'un maintien des prix.
Dans ces conditions va-t-on au-devant d'une crise ? il faut s'entendre. Si les prix tombaient brusquement, que cycle d'inflation s'arrête cela signifierait une vague de faillite, la paralysie partielle de l'économie, le chômage, le nouvel essor de la misère au milieu d'une production invendable.
À la vérité certains symptômes apparaissent déjà. Des stocks anciens (par exemple : des tissus de 1939) commencent à surgir sur le marché. Il existe pour certains articles (c'est surtout le cas du textile) une crise de méventes. Le chômage fait son apparition et gagne. Cependant le sens de CV de ses événements ne serait pas compris si on lui donnait le sens d'une crise classique.
Il y a crise en effet lorsque le développement de l'accumulation se trouve soudainement arrêté par ses lois mêmes. Telle est la nature des crises cycliques connues par le capitalisme au cours de son histoire. Or aujourd'hui la crise est devenue nécessaire pour l'accumulation elle-même elle correspondait à une stabilisation. Une chute subite des prix signifierait un dégonflement du système parasitaire édifier sur la base de la pénurie, un arrêt partiel et momentané, entretient de la bureaucratisation. Elle entraînerait l'élimination de toute une série d'entreprises, "assainissement", la reconstruction du système du crédit. C’est une crise que le capital appelle à la fois pour restaurer ses positions économiques, et pour freiner sa chute vers le capitalisme d'État.
Ce mouvement est-ce que c'est vers le plafonnement des prix de détails et vers la chute prochaine des prix des produits alimentaires et d'ailleurs qu'une tendance. C’est-à-dire que le cours inflationniste continue néanmoins. Les échanges extérieurs qui, pratiquement, domine la situation, ne peuvent en effet être rétabli étant donné la désorganisation du marché mondial. Malgré le plan Marshall, 400 millions de dollars manquerons dans l'année qui vient à l'équilibre de la balance française des paiements. D’autre part, les nouveaux prix industriels devront incorporer ceux des matières premières importées depuis la récente d'évaluation, c'est-à-dire plus cher que par le passé (jusqu'ici l'industrie travailler encore avec des matières incorporées avant l'alignement monétaire, dont aux anciens prix). Les prix montent aux États-Unis, stimuler par l'exécution du plan Marshall comme par la nouvelle conjoncture d'armement désormais engagé, et les importations les plus importantes proviendront de ce pays. En juillet Mayer devra relever certains prix industriels par trans successives. Il devra aussi relever celui du blé ce qui aura un grand effet sur les prix de revient industriels. Les nouvelles luttes syndicales se préparent de leur côté. C’est dire que les espoirs dont se nourrissent les forces capitalistes qui suivent Mayer, d'atteindre vers la décomposition du capitalisme continue, à plus long terme. Ce ne serait ni à la bourgeoisie ni à la bureaucratie d'État qu'il appartiendra de changer quoi que ce soit.
Cependant la nouvelle tendance déflationniste qui fait son apparition en France doit retenir l'attention de l'avant-garde. Le gouvernement joue cette carte, c'est son rôle. On sent qu'il cherche à gagner le temps nécessaire pour qu'une chute de certains prix se produisent. Il s'efforce d'éviter jusque-là une nouvelle offensive des ouvriers pour les salaires. Aussi le voit-on occupé le Parlement et l'opinion publique avec des problèmes qui ne mettent pas en question le cours de la conjoncture économique : usine nationalisée, laïcité problème extérieur. Toutes ces questions font en fait diversion, quel que soit leur importance propre. Mayer veut gagner une bataille des prix engagée depuis le début de l'année. La politique mondiale du bloc anti-soviétique a besoin de cette victoire. En cas d'échec, le stalinisme trouverait une nouvelle et sérieuse possibilité d'intervenir et de bouleverser l'exécution du plan Marshall, c'est-à-dire la préparation de la guerre contre le Kremlin. La stabilisation économique de l'Europe de l'Ouest et aujourd'hui nécessaire pour le camp de l'impérialisme américain. Elle commande la politique en Europe. Surtout le continent, la guerre des deux camps prend avant tout, au cours de ces mois d'été, la forme d'une guerre économique (réforme monétaire allemande, aide à l'Europe, trizone, etc.) c'est par là que passe actuellement la préparation effective de la guerre pour plus tard. Or la France est un point névralgique à cet égard.
Par conséquent ce que l'avant-garde révolutionnaire doit considérer, c'est la manière dont le cours vers la guerre pourrait passer au moins temporairement par de nouvelles voies. Jusqu’ici l'écrasement de la classe ouvrière se faisait par l'inflation ; aujourd'hui elle cherche à se réaliser par la déflation.
Les ouvriers doivent prendre conscience que dans l'un et l'autre cas il s'agit d'une politique de guerre de la préparation active au troisième carnage mondial. Une chute des prix si elle s'avérait possible demain servirait tout autant -et l'asservissement de la classe ouvrière, à l'État et sa soumission aux deux blocs mondiaux que ne le faisait hier la lutte bureaucratique pour les salaires. Le marché de consommation atteignant une certaine saturation avec la réduction du niveau de vie ouvrier, certaines entreprises se ferment, et certaines activités cessantes, ce serait autant de ressources disponibles pour l'armement. Les chômeurs créés par la chute des prix fourniraient de nouveaux ouvriers d'arsenaux. Par conséquent l'avant-garde doit mettre en garde la classe ouvrière contre l'”option tragique” entre l'un ou l'autre des cours économiques. Elle doit démasquer toutes les organisations syndicales, qu'elle fasse miroiter la baisse des prix ou la hausse des salaires. Elle doit à l'avance expliquer comment les nouvelles luttes sociales qui sont en vue -elles sont peut-être imminentes- n'auront pas pour objectif les aspirations de classe du prolétariat, mais la préparation de la guerre, l'épreuve de force économique et politique par laquelle les deux blocs mettent en place leur dispositif d'agression.
Face aux difficultés les efforts du capitalisme pour survivre économiquement, l'avant-garde doit continuer avant tout sa lutte révolutionnaire contre la guerre.
Morel