Les campagnes démocratiques contre la conscience de la classe ouvrière

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Avec la course à la présidentielle aux États-Unis et les élections européennes, les différentes fractions bourgeoises de l’appareil d’État ont développé une vaste campagne idéologique en défense de la démocratie et de ses institutions « menacées » par la montée du populisme.

La classe ouvrière ne doit pas céder au chant des sirènes démocratiques

Une telle campagne, faite pour durer, représente un réel danger pour la classe ouvrière : elle pourrait affaiblir la tendance qui existe en son sein depuis plusieurs décennies, à se détourner du cirque électoral alors qu’il devenait de plus en plus clair, à ses yeux, que voter ne permet en rien de défendre ses conditions de vie sans cesse attaquées par l’État et les patrons, et que la gauche défend et défendra toujours les intérêts du capitalisme.

En instrumentalisant le rejet spontané du populisme, de sa xénophobie assumée, de son discours ouvertement autoritaire… qui existe dans une grande partie de la classe ouvrière, les fractions bourgeoises de gauche ou de droite tentent de ramener les ouvriers sur le terrain pourri de la démocratie à travers laquelle la bourgeoisie impose de la façon la plus sournoise sa dictature sur l’ensemble de la société. Les discours alertant sur « la démocratie menacée » par le populisme ont eu un certain effet sur les esprits avec une participation en très nette hausse lors des élections européennes, en France notamment (d’abord aux Européennes, aux législatives ensuite).

Suivre la bourgeoisie sur ce terrain revient à défendre des intérêts qui ne sont pas ceux de la classe ouvrière, à choisir la défense d’un camp bourgeois contre un autre, alors que le seul camp que la classe ouvrière doit choisir, c’est celui de sa lutte autonome contre le capitalisme en crise et fauteur de guerre. Une telle mise en garde s’impose d’autant plus que le chaos et l’action du populisme sont appelés à prendre encore plus d’importance et, avec eux, les campagnes de la bourgeoisie pour la défense de sa « démocratie ».

Le chaos à l’œuvre aux États-Unis

Le populisme et son idéologie putride existent depuis longtemps aux États-Unis et, pendant des décennies, la bourgeoisie a été en mesure d’empêcher qu’elles aient une influence trop importante sur l’appareil d’État. Aujourd’hui, leur implantation croissante paraît inexorable et les tentatives pour l’enrayer semblent infructueuses. Bien que les fractions les plus responsables de la bourgeoisie s’emploient encore à freiner sa montée en puissance, à l’image de ce qu’on a pu voir en France, récemment, même avec la défaite de Trump, le populisme est déjà et ne cessera d’être un facteur d’affaiblissement des États-Unis, aussi bien au sein de l’appareil d’État et de la société américaine qu’au niveau international. De son côté, le camp Démocrate discrédité, à la tête d’un État qui a multiplié les attaques et incapable d’écarter rapidement la candidature d’un Biden affaibli, aborde les élections avec un indéniable handicap. On doit donc s’attendre à une confrontation sans merci entre Démocrates et Républicains pour les prochaines élections américaines.

La campagne électorale est, en effet déjà plus violente que la précédente, dans les discours et pas seulement. Ainsi, les hostilités entre les deux camps ont déjà été ponctuées par rien de moins qu’une tentative d’assassinat contre Trump. Le fait que Trump y ait échappé, avec une morgue incroyable, lui permet d’apparaître plus puissant que jamais, situation qu’il ne manquera pas d’exploiter à son avantage. Et si, un court moment, se parant de l’auréole de martyr, il a tenté de jouer la carte de la « réconciliation nationale », il l’a très vite abandonnée en renouant avec celle de la démolition du camp adverse, sans se soucier des conséquences sur le fonctionnement des Institutions étatiques à l’avenir. Par ailleurs, un certain nombre des obstacles à sa nouvelle candidature que le camp Démocrate avait mis en place, en particulier sur le plan juridique, ont récemment été balayés par un système judiciaire dont une partie est clairement à la botte de Trump.

Le style de Trump, bâti sur le baratin, les menaces et la violence n’est pas une nouveauté puisqu’il avait déjà lourdement marqué les campagnes électorales précédentes où le président sortant avait violemment contesté sa défaite, notamment en encourageant l’assaut du Capitole par une foule de ses supporters fanatisés. Une nouvelle défaite du camp Républicain pourrait donner lieu à des troubles d’une portée encore supérieure. Dans un pays où la population est lourdement armée, les supporters de Trump, chauffés à blanc pendant des mois, gavés de théories complotistes, pourraient se lancer dans des aventures séditieuses et répandre le chaos dans tout le pays. La promesse de Trump de se venger des fonctionnaires d’État qu’il considère comme ses ennemis, en remplaçant 400 000 d’entre eux s’il est élu, augure également de troubles après les élections. D’un autre côté, si Trump l’emporte, sa politique considérée comme dangereuse pour le capital américain et de ses intérêts impérialistes sera contestée au sein de différents corps de l’État comme l’armée et les services secrets.

Ainsi, la seule certitude, c’est que, quel que soit le résultat des élections, les tensions et le chaos sont appelés à se développer dans la première puissance mondiale, même si c’est sous des formes et à un rythme sans doute différents selon que les Démocrates ou les Républicains remportent les prochaines élections. Quoi qu’il arrive, cela aura des répercussions catastrophiques dans le monde entier. Alors que Biden a fini par laisser sa place à sa vice-Présidente Harris, l’alternative entre les Républicains et les Démocrates ne peut en être une pour la classe ouvrière qui devra résister à ce faux choix dans un contexte très difficile.

La perspective d’une Union européenne déstabilisée

Les tensions entre les États de l’Union européenne se renforcent, promettant là aussi le développement de l’instabilité dans le cœur historique du capitalisme. La décomposition du capitalisme exacerbe la tendance au chacun pour soi entre États et se trouve également à l’origine du phénomène de montée du populisme. Les facteurs de division pèsent de plus en plus lourdement.

Les bouleversements politiques aux États-Unis impactent la stratégie des États européens confrontés à un avenir incertain à l’égard de l’Amérique, notamment dans le contexte de la guerre en Ukraine et d’une Russie menaçante. La confrontation entre les États-Unis et la Chine, au centre des enjeux impérialistes mondiaux, exacerbe les tensions au sein même de l’Union européenne : entre les pays, comme la Pologne, qui privilégient clairement l’option atlantiste, et ceux, comme la France, qui souhaitent faire valoir une certaine indépendance vis-à-vis des États-Unis, chaque pays est confronté à une série d’intérêts contradictoires à l’égard de la Chine, tant sur le plan économique qu’impérialistes.

À ce titre, les tensions se sont également accrues depuis le début de la guerre en Ukraine. Même le « couple franco-allemand », moteur de l’Union européenne, a fait la démonstration de sa fragilité. L’Allemagne, alors dépendante des approvisionnements énergétiques russes, pâtit de la guerre tant sur le plan économique qu’impérialiste avec l’affaiblissement de son influence sur les pays de l’Est.

Alors que les fractions populistes de la bourgeoisie s’imposent de plus en plus à la tête des gouvernements, leur irresponsabilité dans la gestion des affaires de l’État, menace ouvertement l’unité de l’Union européenne.

Sur fond de guerre et de crise, les tensions sur le plan économique et du budget « commun », notamment la question énergique (qui est étroitement connectée à la question militaire, s’agissant en particulier de l’énergie nucléaire), se sont également renforcées. Les États ont de plus en plus tendance à privilégier leurs propres intérêts au détriment de l’unité européenne.

Avefka (30/07/2024)

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Élections en Europe, aux États-Unis…