Courrier des lecteurs (RI n°86) )

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Deux sympathisants du C.C.I., décident de créer, en avril 81, un comité ouvert à tous pour rompre leur isolement et en faire un lieu de discussion et d'intervention. Ils ont pris contact avec l'organisation et nous ont envoyé la lettre suivante : "Comme prévu, nous vous envoyons l'exemplaire du tract que nous voulons diffuser sur "J.". Nous vous demandons si le CCI peut prendre en charge la réalisation technique de ce tract (2 000 tracts). Il est évident que nous participerons aux frais. Nous ne nous étendrons pas sur cette initiative. Nous en avons déjà discuté avec vous. Nous pensons que cette intervention est nécessaire, sans pour autant privilégier celle-ci".

Voici le contenu du tract :

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"OUVRIERS, CHOMEURS, BRISONS L'ISOLEMENT !"

Notre silence nous rend complices et satisfait l'ordre capitaliste. Nous sonnes tous des chômeurs ou en passe de le devenir. Ne nous laissons pas gagner par la misère morale qui nous conduit tôt ou tard au suicide. Ne nous laissons pas illusionner par des charlatans (UDF, RPR, PS, Syndicat, Gauchistes...) qui n'ont qu'un seul but : maintenir le capital en nous envoyant à la 3ème boucherie mondiale.

NOUS NE POUVONS PLUS ETRE PASSIFS ET SILENCIEUX, ORGANISONS-NOUS !

Seules, l'extension et la généralisation de nos luttes peuvent mettre fin aux funestes projets que nous réserve la bourgeoisie de l'Est contre de l'Ouest.

TRAVAILLEURS ACTIFS, TRAVAILLEURS SANS EMPLOI, TRAVAILLEURS IMMIGRES, NOUS APPARTENONS A IA MEME CLASSE, LA CLASSE OUVRIERE INTERNATIONALE.

Organisons-nous, ne cooptons que sur nous-mêmes, luttons et manifestons notre unité par la lutte contre le capital de droite comme de gauche en reprenant l'exemple de nos frères en Pologne.

Camarades, nous t'invitons à une réunion qui aura lieu le 15 avril afin que nous organisions tous ensemble un comité dont les tâches et les actions seront à définir par nous-mêmes. CAMARADES, DANS L'ISOLEMENT, NOUS NE SOMMES RIEN !

ORGANISONS-NOUS NOUS-MEMES ET SOYONS TOUT !"
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Dans la mesure où ces éléments sympathisants du CCI depuis un certain temps demandaient le soutien du CCI pour ce projet, nous avons engagé la discussion avec eux

Le CCI appuie et participe à toute tentative de la classe de former des lieux de luttes, de discussions servant à tous : comités de chômeurs, cercles de discussions, noyaux ouvriers... etc...

Ces comités sont le produit direct de la vie de la classe, à un moment donné de sa réflexion et de son organisation. Ils surgissent, en général, du besoin créé par la lutte de classe de se regrouper pour lutter -hors du syndicat, de la gauche et des gauchistes, de poursuivre la réflexion engendrée par la lutte.

Cela dit, il serait erroné de croire que l'intervention des révolutionnaires suffit pour faire naître la vie au sein de la classe. L'activité la fébrile et dévouée qui soit ne peut jamais remplacer l'activité de dizaines, centaines ou milliers d'ouvriers agissant et réfléchissant ensemble, créant eux-mêmes leur propres assemblées.

En même temps, que ces éléments formulaient le besoin et le désir de créer ce comité, ils critiquaient le CCI sur son peu d'intervention au sein de la classe.

Mais de quelle intervention s'agit-il ?

La création d'un comité ouvert à tous, lieu de réflexion et de lutte, est un pas positif pour la vie de la classe. Positif, dans la mesure où il matérialise une dynamique, une vie potentielle qui se fait jour au sein d'un groupe d'ouvriers ou de chômeurs. Mais nous pensons qu'il serait erroné de vouloir les créer artificiellement, en utilisant des sympathisants comme moyen d'établir le "contact" avec les ouvriers. Notre tâche n'est pas de travailler à l'aide de nos contacts, de nos sympathisants à la formation de petits groupes ou cercles, "courroies de transmission" entre l'organisation politique -"celle qui a la conscience"- et l'ensemble de la classe, qu'elle soit à l'usine ou au chômage.

Notre tâche pour contribuer à la clarification de toutes les questions posées par la lutte de classe :

  • au sein du milieu révolutionnaire lui-même, à travers les polémiques, la participation active aux discussions ;
  • au sein de la lutte de classe : à travers la participation active aux grèves, comités divers, cercles de discussions,

est de développer une organisation politique à l'image de sa classe internationale. La création de liens solides et organisés à l'échelle mondiale est la base indispensable pour développer une intervention révolutionnaire internationale et non éphémère. La diffusion des idées révolutionnaires dans tous les pays du monde, tâche fondamentale d'une organisation politique, ne peut être réalisée sans une presse régulière, diffusée dans toutes les langues, reposant sur l'existence d'un pôle solide et uni à l'échelle internationale[1].

L'organisation ne peut, ni créer, ni développer une base d'intervention internationale à partir d'activités locales et ponctuelles.

Seul le développement d'une organisation révolutionnaire internationale permet aux révolutionnaires d'intervenir et de participer activement aux luttes ouvrières et aux manifestations de la vie de la classe, chaque fois que cela est possible.

L'intervention des révolutionnaires, pour être efficace, ne peut se concevoir que comme une activité volontaire et décidée, et de longue haleine, à long terme.

Pour cela, elle doit se garder de deux dangers essentiels :

  • celui de 1'activisme, immédiatisme, localisme qui disperse une activité effrénée tous azimuts mais ne produit que du "vent" en général ;
  • celui de l'attentisme qui, par peur de se laisser happer par la lutte de classe, ne produit que des sectes isolées dans leurs tours d'ivoire, Occupées â "bavarder" sur la lutte de classe.

La lutte en Pologne a marqué un pas important dans le processus de développement de la lutte de classe[2]. Elle a montré la nécessité de l'internationalisation des luttes, de l'unification des luttes prolétariennes â l'Est avec celles des prolétaires â l'Ouest. Elle est venue rappeler la nécessité de l'intervention d'une organisation révolutionnaire internationale.

L.A.


[1] Voir articles dans RInt 21 sur "l'organisation du prolétariat en dehors des périodes de luttes ouvertes", RI n° 60 (avril 69) : "Salut au comité de chômeurs d'Angers", RI n° 77 (sept. 80) : "Manifeste sur le chômage".

[2] Voir notre brochure sur la Pologne (â paraître)

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