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Comme l’a écrit le quotidien Libération, c’est à un véritable scénario digne d’un film de science-fiction auquel nous avons assisté : sans aucun avertissement, la Russie a envoyé un missile détruire l’un de ses propres satellites hors d’usage à 400 km d’altitude. En générant un nuage de milliers de débris (dont quatorze très gros), elle a provoqué un début de panique dans la station spatiale internationale, qui a failli se transformer en « dommage collatéral » : située sur la même orbite basse, elle aurait pu être touchée par un débris, et il aurait alors fallu l’évacuer d’urgence, ce à quoi l’équipage s’est immédiatement préparé.
Il a fallu deux jours pour que l’État russe reconnaisse être l’auteur du tir ; comme lors de la guerre froide, on s’est alors retrouvé dans l’ambiance mortifère des « expériences » secrètes, reconnues du bout des lèvres par leurs auteurs pour cause de « secret d’État ». (1) Il faut dire que la destruction d’un satellite en vol, fût-il hors d’usage, fait entrer la Russie dans le club fermé des États capables d’atteindre directement les satellites de leurs ennemis : Chine, Inde, États-Unis. L’Europe et notamment la France n’ont pas encore démontré leur « capacité » à faire de même. Cela fait donc plusieurs fois que des satellites sont transformés en confettis mortels sur des orbites où ils sont dangereux, ce qui constitue une démonstration de plus de l’irresponsabilité totale de la bourgeoisie dès lors qu’il s’agit de défendre bec et ongles ses intérêts impérialistes nationaux. La reconnaissance de cette « expérience » par la Russie a aussitôt été suivie d’une hypocrite dénonciation par les autres « puissances spatiales », conspuant son mépris total des conséquences, notamment vis-à-vis de la station spatiale internationale où, pourtant, se trouvaient deux Russes… La bourgeoisie a, d’ailleurs, transformé l’espace en véritable poubelle dans lequel les débris orbitent par millions autour de la Terre, mettant également en péril les astronautes.
Comme nous l’avons déjà écrit, cela fait longtemps que l’espace fait partie intégrante du champs de bataille impérialiste entre grandes puissances ou aspirant à le devenir, depuis longtemps. Il est même indispensable pour tout pays voulant protéger ses intérêts d’être capable de défendre ses intérêts spatiaux. Comme l’écrit le journal Le Monde, « le tir antisatellite russe démontre que l’espace est en train de devenir un champ de conflictualité comme un autre ». (2) Car ce n’est pas une première : la Chine, l’Inde, les États-Unis ont déjà affirmé leur capacité à défendre leurs intérêts militaires jusque dans l’espace en détruisant un satellite (à chaque fois un des leurs hors d’usage), et soyons confiants dans la volonté des autres bourgeoisies nationales de faire de même dès qu’elles en auront les moyens techniques et financiers. Derrière la présentation des « héros » spatiaux, comme Thomas Pesquet en France, et l’objectif affiché par les Etats-Unis d’envoyer des hommes sur la Lune, voire sur Mars, se cachent, comme pendant la guerre froide, les féroces appétits de tous ces gangsters impérialistes. La militarisation de l’espace a déjà une longue histoire, et on ne peut que sourire devant les cris d’orfraie des officiels américains, du général James Dickinson, chef de l’US Space Command, qui nous dit que « la Russie a fait preuve d’un mépris délibéré pour la sécurité, la sûreté, la stabilité et la durabilité à long terme du domaine spatial pour toutes les nations », (3) au porte-parole du Département d’État américain, qui a qualifié cet essai de « dangereux et irresponsable », alors même que les États-Unis ont par deux fois déjà procédé à la même expérience ! Quant à la ministre française de la Défense, Florence Parly, qui a publié un message sur Twitter nous affirmant que « l’Espace est un bien commun […]. Les saccageurs de l’Espace ont une responsabilité accablante en générant des débris qui polluent et mettent nos astronautes et satellites en danger » (4) elle n’a évidemment pas mentionné que, le même jour, par coïncidence, la France lançait depuis Kourou trois satellites-espion baptisés Ceres, capables de faire du « renseignement d’origine électromagnétique » et d’affranchir l’armée française d’une pesante tutelle américaine en matière d’espionnage électronique.
Le fait d’envisager d’ores et déjà de s’emparer de portions de la Lune ou de Mars, ou d’astéroïdes géologiquement riches, au-delà de la possibilité (et de la rentabilité !) de le faire réellement, montre le rêve de tous ces capitalistes endurcis : mettre la main sur de plus en plus de ressources, de territoires, de moyens de peser sur leurs rivaux, voire de les menacer ouvertement !
Il ne suffit pas à ces bourgeois rapaces d’avoir transformé le monde en champs clos de la concurrence, du chacun contre tous : pour paraphraser un célèbre film d’espionnage, le monde ne suffit plus ! La barbarie rejoint et rejoindra le moindre espace sur Terre, mais aussi dans l’espace, partout où le système capitaliste décadent impose les lois barbares de la concurrence et du profit !
HD, 29 novembre 2021
1 En complément, nous invitons nos lecteurs à lire ou relire : « Nouvelle course à l’espace: un champ de bataille impérialiste pour le capitalisme », disponible sur notre site internet.
2 « Le tir antisatellite russe démontre que l’espace est en train de devenir un champ de conflictualité comme un autre », Le Monde (17 novembre 2021).
3 « En détruisant l’un de ses satellites, la Russie ajoute de la tension dans l’espace », Le Monde (16 novembre 2021).
4 « L’ISS prise dans un nuage de débris : Moscou reconnaît sa responsabilité », Libération (16 novembre 2021).