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Toute organisation ouvrière de caractère permanent doit être analysée à partir des objectifs qu’elle poursuit. Dans le cas des commissions ouvrières, il existe une véritable résistance de la part des militants dits de "gauche" ou d’"avant-garde" à accepter l’idée que celles -ci soient orientées par une politique définie. Il existe toute une tendance qui voit dans les commissions ouvrières l’embryon de la future organisation de la classe sans autre objectif, dans le présent, que la "lutte contre l’exploitation".
Dans ce contexte, il est logique que ces militants pensent aussi que tout ouvrier combatif qui lutte se doive de rejoindre les commissions ouvrières. Il est logique également que, devant une dénonciation du caractère contre-révolutionnaire des C.O, ils n’y voient qu’une tentative de les liquider.
Pourtant, les C.O. ont effectivement une politique, et de plus bien définie et concrète : "La lutte contre la dictature et la lutte pour un syndicat de classe". Et ces objectifs politiques nous pouvons les trouver dans n’importe quel tract des commissions; nous les trouvons dans l’activité-pratique de ses militants.
Quels que soient leurs efforts pour faire semblant de l’ignorer, tous ceux qui appuient les commissions sont en fait en train de défendre la même politique qui en 36 s’est concrétisée par la consigne : "D’abord gagner la guerre, contre le fascisme, après la Révolution socialiste". La même qui essaye de faire croire à la classe ouvrière qu’en renversant le régime de Franco et en donnant le pouvoir à la fraction démocratique de la bourgeoisie, l’exploitation sera moins dure.
Le fait que les commissions ouvrières soient dans la pratique la seule organisation qui regroupe un minimum d’ouvriers en Espagne ne peut servir de justification à l’ouvriérisme de faux ouvriers disposés à accepter n’importe quelle politique, à la condition que la classe ouvrière s’organise.
Il est évident qu’il existe toujours des organisations "ouvrières" au sein du capitalisme. La preuve en est l’existence des syndicats de différentes tendances, des organisations corporatistes, etc. Mais le fait que ces organisations soient composées d’ouvriers ne signifie pas nécessairement que ce soient des organisations de la classe ouvrière.
Ce qui fait qu’une organisation est révolutionnaire, ce sont ses objectifs de classe. Si la classe ouvrière est la seule classe révolutionnaire, c’est uniquement par la défense des objectifs de la classe ouvrière qu’une organisation peut jouer un rôle révolutionnaire.
Les positions défendues par les commissions ouvrières (lutte purement corporatiste, lutte syndicale, lutte antifasciste), ainsi que leurs formes organisatrices (hiérarchisation, bureaucratisation, domination occulte des partis politiques), les invalident comme organisations de la classe ouvrière, et ceci quel que soit le nombre d'ouvriers qui peuvent les rejoindre. La tâche des révolutionnaires est de lutter pour empêcher la classe de leur faire confiance.
Cependant, parler aujourd'hui des commissions ouvrières, c’est parler d’une poignée de militants des partis de "gauche" qui, dans l’usine, s’organisent en commission ouvrière. Plus de dix années de pratique syndicale et volontairement réformiste ont été suffisantes pour commencer à dévoiler au prolétariat le mensonge et la mystification constitués par les commissions ouvrières.
Mais, le fait que les commissions soient en crise ne signifie pas que la lutte de la classe ouvrière ne continue pas à se développer. La disparition de ses militants dans beaucoup d’entreprises, l’abandon de la commission par beaucoup d’ouvriers ont signifié dans un grand nombre de cas le renforcement de la lutte à travers d’autres organes, comme les assemblées d’usine, avec des comités contrôlés et révocables par l’Assemblée.
C’est à partir des années 69-70, quand -principalement en Catalogne et dans le nord de l’Espagne- coïncidant avec le début de la crise des commissions ouvrières, commencent à surgir des luttes d’une extrême dureté, qui sont toutes menées et dirigées par des assemblées d’usine, que la classe peut ainsi se passer des bons offices des C.O.
C’est pour cela que la critique des C.O. et leur dénonciation ne sont, d’aucune façon, une activité liquidationniste : C’EST LE MOUVEMENT OUVRIER LUI-MEME QUI PAR SA PROPRE LUTTE LIQUIDE LES COMMISSIONS. Mais, en même temps, le fait que les C.O. soient en crise ne signifie pas qu’elles aient disparu ou qu’elles soient en train de disparaître.
Le pouvoir contre-révolutionnaire des C.O. résident dans les positions qu’elles défendent, et ces positions, parce qu’elles sont celles de la bourgeoisie, ne disparaîtront pas avec les commissions mais, uniquement, avec la liquidation de la bourgeoisie. C’est pour cela que notre devoir de révolutionnaires consiste à dénoncer toutes les tentatives qui aujourd’hui, sous le nom de commissions ouvrières, et demain sous n’importe quel autre, tendent à faire dévier le prolétariat du chemin de la révolution prolétarienne pour le conduire dans l’impasse des luttes antifascistes, démocratiques ou de libération nationale.
NAISSANCE ET DEVELOPPEMENT DES COMMISSIONS OUVRIERES
Coïncidant avec l’accélération du développement industriel, la lutte pour l’amélioration des conditions de vie s’est peu à peu généralisée à toute l’Espagne.
En 1962, les conditions particulières et conjoncturelles de ce développement industriel - étape suivant le plan de stabilisation de 1959 - permettent aux ouvriers pour la première fois depuis 1939, de tenter de défendre leurs conditions d’existence contre les détériorations subies jusqu’alors, d’oublier les guerres et les cartes de rationnement des années précédentes et revivre à nouveau l’illusion du réformisme, sans craindre une répression inexpiable du capital. Avec l’apparition des conventions collectives, s’ouvre une étape de négociation salariale dans laquelle les travailleurs interviennent activement en faisant pression par leur lutte.
C’est dans cette situation (théoriquement favorable pour qu’aussi bien les vieilles organisations syndicales: C.N.T., U.G.T., que d’autres nées dans l’après-guerre d’Espagne : USO, OSO, ASO, puissent jouer un rôle significatif) qu’apparaît, indépendamment de tout groupe politique une forme d’organisation ouvrière pour la lutte revendicative, qui rapidement éclipse les autres organisations illégales: les commissions ouvrières, COMMISSIONS D’OUVRIERS ELUS PAR L’ASSEMBLEE D’USINE.
Cependant, il serait faux de déduire que la crise et le rejet des organisations syndicales existantes ont signifié le rejet du syndicalisme par la classe ouvrière. Les organisations syndicales qui existaient comme l’USO, l’OSO, l’ASO n’ont jamais réussi à se développer dans la classe ouvrière comme syndicats d’opposition au syndicat vertical CNS.
En réalité, ces organisations étaient constituées uniquement et exclusivement de quelques groupes de militants d’organisations politiques (PSOE, PCE) s’employant à maintenir les vieilles positions de la période républicaine.
Débordés par les premières assemblées massives et confrontés à la nécessité de contrôler le mouvement ouvrier, ils ont démonté leurs organisations syndicales pour tenter de dominer les commissions ouvrières en en faisant le syndicat qu’eux-mêmes n’avaient jamais réussi à construire. C’est pour cela que la rupture avec les anciennes organisations ne signifie pas la rupture avec les conceptions syndicalistes.
Les fait démontrent clairement que les C.O. se sont donné comme activité fondamentale la défense des intérêts économiques des travailleurs. A la base de toutes les luttes des C.O. on trouve depuis le premier instant les revendications économiques.
Bien qu’un grand nombre de luttes aient été, du point de vue revendicatif de grandes défaites, il n’est pas moins certain également que dans certains cas (principalement avant la récession internationale de 1967-1968, fortement ressentie en Espagne) le prestige et le renforcement numérique des commissions étaient dus justement à la possibilité d’obtenir des améliorations immédiates à travers leur lutte. La convention collective provinciale de la branche de la métallurgie, les améliorations obtenues par les mineurs asturiens, etc. ont constitué un important tremplin pour le développement des commissions dans toute l’Espagne.
Et ceci est tellement vrai, que rares ont été les usines où la lutte ne se soit accompagnée de l’apparition d’une C.O., soit que celle-ci ait été le produit de la lutte, soit qu’elle ait été créée pour l’impulser et la diriger[1].
Mais, même dans les cas où une victoire a été remportée, celle-ci n’a pas tardé à se transformer en défaite. L’inflation permanente, les augmentations de productivité obtenues principalement à travers les accélérations des cadences et la hausse constante des prix alimentaires et des biens de consommation se sont chargées de récupérer amplement les augmentations salariales arrachées avec difficulté. Ce n’est un secret pour personne que les salaires perdent progressivement leur pouvoir d’achat et que la situation de la classe ouvrière espagnole, au même titre que celle de la classe ouvrière dans le monde entier (bien qu’il reste des gens pour penser qu’il s’agit dans le premier cas d’une ’’mauvaise gestion” du capitalisme espagnol), ne fait qu’empirer.
Avec la récession de 1968 et l’état d’exception qui l’a suivie, les "illusions" de victoire des années antérieures se sont évanouies. Avec elles, les assemblées massives dans les champs, l’utilisation des "possibilités légales", la semi-légalité des dirigeants des commissions ouvrières, l’occupation des locaux syndicaux, les succès revendicatifs à l’occasion de la négociation des conventions collectives, etc. ont fait place aux arrestations, emprisonnements, déportations, expulsions ou démissions des charges syndicales, à l’impossibilité d’obtenir des améliorations réelles et durables. Tout cela a mis en lumière clairement et ouvertement le véritable visage d’un système devenu incapable d’accorder à la classe ouvrière la moindre amélioration.
LE SYNDICALISME DE GAUCHE
La crise des commissions ouvrières, leur incapacité à encadrer la classe ouvrière espagnole derrière les objectifs de lutte pour un ’’syndicat de classe” et pour la démocratie bourgeoise, ont provoqué le départ d’un nombre important de leurs militants et leur organisation autonome en dehors des dirigeants permanents du mouvement.
Cette rupture, qui dans certains cas suppose la, critique de la politique des commissions ; (syndicalisme, pacte pour la liberté), république démocratique, etc.), s’accordage en règle générale de 1’organisation de nouvelles commissions situées à la gauche du PCE et de "Bandera roja’.* Au sein de ces nouvelles commissions, on voit ndJliter en grande majorité des éléments d'organisations politiques minoritaires.
Mais pour la majorité de ceux-ci, la crise des commissions ouvrières se réduit à la "bureaucratisation", au manque "d'organisation réelle dans les entreprises" et au contrôla des partis politiques". Ce seraient les dirigeants' qui empêcheraient 1’extension et la consolidation des commissions ouvrières.
Dans un document édité par les "Groupes ouvriers autonomes", on trouve l’analyse suivante de la crise des C.O. :
- "Ceux qui ont supporté les conséquences de ce sectarisme, ce sont nous les travailleurs, à cause de notre inexpérience. Pendant que nous étions en train de lutter dans les usines et dans les mines, nous avons laissé nos prétendus représentants détruire ce que nous avions commencé à construire. Déboutés, déçus, nous avons abandonné tous ces faux représentants de la classe ouvrière et nous continuons de lutter sur nos lieux de travail ; Nous organisons des grèves comme on n’en avait vu depuis de nombreuses années. Au Pays basque : laminoirs de Bandas, hauts-fourneaux, la "Naval"; aux Asturies : les mines et la métallurgie; à Pampelune : "Eaton Ibérica" et "Potasses de Navarre". "Harry-Walker", "Blausol" , "Macosa", "Maquinista" à Barcelone; "Aviation" et "Saca" à Séville; "hauts-fourneaux à Sagunto, etc., sont des noms qu’on n’oubliera pas, car ils correspondent à des grèves héroïques, quelquefois modèles d’organisation, auxquelles il a manqué pourtant la solidarité et l’appui que permet seule une union large et solide."
"Le prolétariat espagnol a montré sa combativité, mais il a été incapable de créer une organisation en rapport avec ce haut niveau de lutte et facteur de son amplification. Pendant ce temps, les bureaucrates et les membres des partis se distribuaient la dépouille de ce qui aurait pu être la grande organisation de la classe.
Il ne faut accuser personne, sinon nous-mêmes, du fait que nous n’ayons pas encore été capables de créer une organisation ouvrière, capable de défendre nos intérêts. La tâche de la bourgeoisie et de ses alliés dans le mouvement ouvrier est de créer la division entre les travailleurs. Ce serait trop facile d’accuser les capitalistes qui essayent de défendre leurs intérêts. C’est là leur "mission.
- "Mais le nôtre est de nous organiser et d’empêcher l’infiltration d’éléments étrangers à notre organisation ; Pour cela les travailleurs, nous qui menons la lutte dans l’entreprise devons prendre la responsabilité d’établir la coordination indispensable entre les entreprises en vue du soutien mutuel et de l’élaboration d’un programme d’action. Cela doit être notre tâche, tâche que nous ne devons pas laisser entre les mains de professionnels au service d’intérêts de groupes qui ont la tête pleine de faux problèmes idéologiques, pour la défense desquels ils sont capables de détruire une organisation dont la construction nous a coûté des années d’efforts et de sacrifices..."
Pour eux donc tout le problème se résume à empêcher que les "dirigeants" des "partis” ne se glissent dans l’organisation des ouvriers. Comment l’empêcher?... En expliquant aux ouvriers la nécessité de s’organiser pour la lutte pour des améliorations économiques et sociales de tous types (plus de la moitié du document cité est consacrée à expliquer toutes les revendications capables d’impulser ou de radicaliser la lutte dans l’usine), en expliquant comment s’organise une commission ou autre organisation similaire, en expliquant comment élaborer une plate-forme revendicative qui ait un écho parmi la majorité des travailleurs de l’entreprise, ou les moyens pour la faire connaître (bombages, tracts, papillons, etc.), en organisant les ouvriers les plus conscients, etc.
La seule chose qu’ils ne proposent pas est la dénonciation constante de la politique desdits groupes -les intérêts de classe deviennent pour eux des intérêts de groupe !-, groupes avec de "faux problèmes idéologiques" qui détruisent l’organisation mise en place avec tant de sacrifices... Il s’agit seulement de "bureaucrates", "d'hommes de parti", de "professionnels", "d'éléments extérieurs".
Dénoncer les intérêts de classe défendus par les politiques de ces groupes supposerait de leur part la définition d'une autre politique distincte de celles-ci, et cela les convertirait automatiquement en un autre groupe du type de ceux qu'ils veulent combattre.
Ainsi, en évitant d'aborder les questions qui pourraient diviser la classe ouvrière en plusieurs fractions[2] (voir note 2 page suivante), telles que le syndicalisme dans la phase de décadence du capitalisme, les luttes de libération nationale, le capitalisme d'Etat, etc., ils proposent eux-mêmes le plus grand confusionnisme et finissent par défendre les mêmes positions que le PCE ou très semblables.
A la page 44 du même document déjà cité, ils donnent un exemple des avantages qu’apportera d'après eux au prolétariat "l’union" pour l'union :
..."Là où elle fut obtenue (il s’agit de l’union) : Russie, Chine, Cuba, Syrie, Algérie, Zambie, Vietnam, etc., les travailleurs ont arraché le pouvoir aux capitalistes. En d’autres endroits, ils sont sur le point d’atteindre ce résultat (Amérique du sud) et dans d’autres enfin, ils disposent d’organisations capables de défendre leurs droits les plus élémentaires : France, Angleterre, Italie" (souligné par nous).
C’est à dire, dans une série de pays où règne le capitalisme d’Etat, à différents degrés de son développement, les travailleurs auraient "arraché le pouvoir aux capitalistes". Dans d’autres d’Amérique latine où le prolétariat se débat dans la mystification de la lutte anti-impérialiste que fait peser sur lui ses différentes bourgeoisies nationales, il serait "sur le point d’atteindre ce résultat". Enfin, dans une série de pays d’Europe occidentale, où ces organisations (PC, syndicats) présentées comme un modèle, se révèlent être un des obstacles essentiels à leur lutte, les ouvriers disposeraient d’organisations "capables de défendre leurs droits les plus élémentaires"...
C’est pourquoi, quelles que soient les extinctions de voix gagnées à crier contre le bureaucratisme, entendant par intérêt de classe le droit de vote au sein d’organisations qui n’ont rien à voir avec la classe, entendant par autonomie ouvrière 1’exclusion des groupes politiques, "les groupes ouvriers autonomes" NE PEUVENT EVITER QUE LEURS COMMISSIONS ANTI-BUREAUCRATIQUES NE RESSEMBLENT COMME UNE GOUTTE D’EAU A UNE AUTRE, AUX COMMISSIONS DU PCE, DU PCI, OU DE "BANDERA ROJA".
Partir de la base, comme ils disent, et en s’appuyant sur leur longue expérience de lutte dans les usines, concevoir l’idée que pour pouvoir parler de socialisme aux ouvriers il est d’abord nécessaire de "gagner leur confiance" (vivre avec eux, parler des mêmes choses qu’eux) considérer que dans un premier temps les ouvriers ne s’organisent que pour la lutte économique et que par suite les révolutionnaires doivent baser leur travail d’organisation sur ce type de lutte comme condition nécessaire, pour pouvoir passer ultérieurement à un "niveau supérieur" et enfin qualifier toute cette activité de simple "procédé pédagogique " pour atteindre l’objectif fondamental (la révolution socialiste), tout cela suppose dans la pratique la défense des mêmes positions que celles des commissions ouvrières qu’ils accusent de bureaucratisme, suppose aussi agir de la même façon dirigiste et manœuvrière que celle de ceux qu’ils accusent d’être de "faux dirigeants" et des "éléments extérieurs" à la classe. En fait, il ne s’agit de rien d’autre que de bureaucratisme anti-bureaucratique.
A ces camarades attelés à la création de nouvelles C.O. nous disons : Ce ne sont pas les révolutionnaires qui créent à l’avance les organisations dans lesquelles le prolétariat s’affirmera comme classe dominante. C’est là PRATIQUE de la classe elle-même, à travers les différentes étapes de la société qui la conduit à la conscience de ses intérêts économiques et politiques. SON ORGANISATION est inséparable de sa CONSCIENCE. La tâche des révolutionnaires consiste à montrer à tout moment la véritable raison du combat et JAMAIS ni par pédagogie ni par "tactique", ni pour toute autre raison, ceux-ci ne peuvent cacher à la classe le véritable sens de sa lutte.
Si aujourd’hui les commissions ouvrières n’arrivent pas à s’implanter, à englober la majorité des travailleurs, être en définitive l’organisation unitaire, démocratique, autonome et représentative, ce n’est pas parce que certains groupes pleins de bureaucrates les boycottent.
C’est ailleurs qu’il faut chercher les raisons de leur crise. Et c’est dans la maturation de la conscience du prolétariat, dans l’assimilation de toutes les expériences de la lutte -aux côtés des commissions- qu’on les trouvera. Le syndicalisme, le réformisme impossible, la démocratie bourgeoise, la pactisation, la négociation, les formes de luttes civiques... toute une politique en définitive profondément étrangère aux intérêts du prolétariat. C’est cela qui constitue la raison de leur crise et de l’existence du bureaucratisme en leur sein.
Les bureaucrates sont le produit de leur politique. Attribuer la crise des commissions aux bureaucrates sans dénoncer leur politique contrerévolutionnaire équivaut à défendre l’idée qu’en remplaçant quelques dirigeants déloyaux par des révolutionnaires, il serait possible de changer toute l’organisation et de la rendre révolutionnaire. Mais ce ne sont pas les chefs qui font l’organisation, sinon exactement le contraire.
COMMISSIONS OUVRIERES ET LUTTE REVENDICATIVE
A la base des CO, qu’elles soient "locales", "de secteurs" ou de "plateformes", on trouve un même objectif : l’organisation de la classe ouvrière de façon permanente pour la lutte revendicative, la formulation de programmes "tactiques" plus ou moins réformistes.
C’est pourquoi, en tant que portes paroles infatigables de la lutte revendicative, les CO deviennent le frein le plus puissant pour l’unification de la classe ouvrière parce que celle-ci ne peut s’unir qu’à travers le mouvement qui la mène vers la révolution socialiste, c’est à dire à travers le mouvement qui brise les chaines qui tentent de la maintenir attachée à des programmes tactiques masquant ses véritables objectifs révolutionnaires.
Dans la période de décadence du capitalisme, toute organisation permanente de 1’ensemble de la classe ne peut exister que sur la base de la révolution socialiste.
En général, toutes les luttes revendicatives (pour des salaires plus élevés, des journées de travail plus réduites, des cadences moins épuisantes, etc.) conduisent à un affrontement avec l’état (occupations d’usine, heurts contre les forces répressives de l’état, arrestations, etc.) c’est à dire que de revendicatives, la majorité des luttes TENDENT A PRENDRE DE PLUS EN PLUS UN CARACTERE REVOLUTIONNAIRE.
L’activité systématique des commissions ouvrières dans ce processus est révélatrice : négociations constantes avec le patron, justification de l’affrontement avec l’état UNIQUEMENT à travers le caractère fasciste de celui-ci en masquant le fait que c’est la BOURGEOISIE COMME CLASSE QUI EXPLOITE LE PROLETARIAT et non les secteurs fascistes... En définitive les C.O. ne cessent d’agir comme le bouchon d’une bouteille pour que la force révolutionnaire qui existe à l’état latent en chaque lutte, pour petite qu’elle soit, ne puisse trouver de sortie.
De cette façon, l’unité de tout le mouvement ouvrier dont on jacasse tant, les mène à identifier l’organisation des commissions avec celle de la classe et celle-là avec un "syndicat de classe".
Voyons ce que dit le compte-rendu de la première réunion nationale des "secteurs de commissions ouvrières":
- "Avec toutes leurs imperfections, traînant avec elles de nombreux défauts et surtout avec un grand décalage entre leurs possibilités réelles et les véritables nécessités organisationnelles de la classe ouvrière, ces nouvelles commissions[3] apparaissent déjà comme l’embryon d’un syndicat de classe. Et elles le sont, non seulement parce qu’elles font de la conquête d’un syndicat leur objectif politique le plus important, mais aussi parce qu’elles essaient dès maintenant d’assumer les taches propres à un véritable syndicat ouvrier : améliorer les conditions de salaire et de vie des travailleurs, forger leur unité, impulser la lutte solidaire et la généralisation des conflits, encadrer tous les ouvriers derrière des objectifs politiques clairs et enracinés dans les masses" (document cité plus haut, p.3).
Il apparaît donc d’une façon parfaitement claire que la lutte revendicative pour laquelle elle se propose d’organiser la classe ouvrière n’exprime pas la nécessité d’une révolution prolétarienne sinon la nécessité de conquérir le droit au... "syndicat de classe".
En d’autres mots, elles veulent dire que pour la bonne marche de la lutte revendicative, pour obtenir des améliorations, il est nécessaire de faire appel à un syndicat. Ceux qui pensent ainsi doivent croire fermement dans les possibilités encore progressistes du système capitaliste ; pour eux, parler de la décadence et de la crise doit sonner comme une plaisanterie de mauvais goût : le capitalisme -nous diront-ils s’ils sont conséquents- n’est ni un système social mondial, ni un frein au développement des forces productives...!
Dans le cas contraire, comment peuvent- ils prétendre qu’un syndicat est l’instrument pour obtenir des améliorations de toute sorte (fondamentalement économiques) de la part d’un système qui, pour survivre, ne peut offrir autre chose qu’une exploitation tous les jours plus effrénée ?
Quant aux "objectifs politiques clairs derrière lesquels ils se proposent d'encadrer toute la classe travailleuse", ils les définissent comme la lutte contre la DICTATURE pour une DEMOCRATIE bourgeoise qui doit se concrétiser dans la "République Démocratique Bourgeoise".
C’est cela la clarté politique des ’’Commissions ouvrières de secteurs” et de "Bandera Roja". Nous ne pouvons faire moins que les féliciter pour la "clarté" et la "cohérence" avec lesquelles ils oublient et mettent aux archives la révolution prolétarienne. Au moins, la classe ouvrière et leurs propres militants ne se feront pas d’illusions sur les objectifs de ces organisations.
Devant cette définitions de la lutte revendicative identifiée avec la lutte syndicale, nous devons prendre en considération les faits qui se produisent dans le monde entier et qui indiquent la perspective révolutionnaire : c’est vrai que la lutte pour un "syndicat de classe" est une lutte "revendicative’,' mais sont également des luttes revendicatives toutes celles qui se déroulent dans les pays capitalistes (où les syndicats ouvriers existent) en dehors et contre les syndicats. Nous voulons parler concrètement des grèves dites "sauvages". Dans ce cas les luttes économiques qui sont aussi des luttes revendicatives, ne peuvent en aucune façon s’identifier avec la lutte syndicale. Aujourd'hui, dans le monde entier, et particulièrement en Europe, la lutte de la classe ouvrière pour ses revendications économiques tend à se développer avec de plus en plus de force en dehors des syndicats.
Et en même temps que se développe cette tendance, nous voyons comment les syndicats (ET L’EXEMPLE DU PORTUGAL LE REAFFIRME EN TOUTE CLARTE) sont les premiers à réclamer de leurs gouvernements respectifs la promulgation de lois contre les "grèves sauvages", en même temps qu’ils sont devenus les fers de lance de la répression de toute lutte qu’ils ne contrôlent pas : la grève général de mai 1968 en France a été un exemple limpide de l’efficacité de la CGT française (courroie de transmission du PC français) dans la tâche de liquidation de la lutte. En Pologne, en 70, les ouvriers de la Baltique ont été obligés d’affronter et de détruire matériellement leur "syndicat ouvrier".
Quand en Espagne, les Commissions ouvrières affirment que leur objectif fondamental est la conquête d’un "syndicat de classe", elles préparent dans la pratique, la subordination de toute lutte à l’atteinte de cet objectif. De cette façon, sous le slogan de "liberté syndicale", on essaie de mystifier le véritable contenu de la lutte. Quand celle-ci déborde à intervalles de plus en plus rapprochés le cadre syndical et fait montre de sa véritable perspective révolutionnaire, les C.O font tout leur possible pour canaliser toute l’énergie et le potentiel révolutionnaire du prolétariat et les DEVIER vers le syndicalisme stérile et contre-révolutionnaire. C’est là le sens véritable de la consigne ’’pour un syndicat de classe”.
Dans un autre paragraphe du document de la réunion nationale des C.O de secteur, sont analysées les causes de la crise des commissions. Voici les arguments :
- ”Et il ne s’agit pas seulement de l’existence de ces organisations -les C.O-, mais aussi de leur fonctionnement, de leurs critères organisationnels et de travail, de leurs objectifs politiques. Là se trouve réellement le problème.
Nous ne faisons rien de neuf en parlant des C.O. Nées comme on le sait en 1962, dix années de vie ont montré l’évidence que les orientations qu’elles ont reçu pendant une longue période n’ont pas contribué à faire des C.O une organisation vraiment unitaire, vraiment développée, vraiment enracinée. Dans beaucoup de cas, c’est le contraire qui est advenu, ces orientations (de concevoir les commissions comme un mouvement désorganisé, appuyé seulement sur des chefs plus ou moins prestigieux, de forcer la légalité au-delà-de-ce qui pouvait se faire sans mettre à découvert tout son appareil et squelette organisationnels, de transférer toute la responsabilité dans la direction des luttes à ceux de leurs militants occupant des charges syndicales) ont conduit les CO de plusieurs centres industriels importants à perdre leur efficacité, à être victimes de la répression, à l’incapacité à faire face aux nécessités croissantes de la lutte ouvrière" (document cité, page 2).
La remise en cause de toutes ces "PETITES CHOSES" facilement corrigibles(mettre leurs propres dirigeants à la place des autres, ne pas laisser la direction de la lutte à des chefs "prestigieux” ou assumant des charges syndicales)s’est traduite dans la pratique par la manipulation des luttes par de nouveaux dirigeants avec plus de "prestige’’(plus crédibles par les ouvriers)se substituant aux assemblées d’usine, par la direction des luttes en accord avec la légalité ,(en essayant de toujours respecter la législation bourgeoise du travail),par le pacte et la négociation et par leur canalisation à travers le syndicat vertical.
Avec ces "petites choses", les commissions "locales" et les autres ont boycotté la lutte de Macosa et encore plus clairement celle d’Harry Walker. Dans celle-ci, une des plus longues et dures de ces dernières années à Barcelone, parce qu’il n’y avait pas de commission pour se mêler du combat, parce qu’il n’y avait pas de charges syndicales qui puissent le "diriger" , c’est l’Assemblée Générale de tous les travailleurs de l’usine qui a dirigé leur propre lutte et Leur a permis de ne pas se laisser tromper aussi facilement.
Le seul fait d’observer que bien qu’ils n’arrivent pas à étendre les commissions, à les implanter réellement dans les entreprises, la lutte du prolétariat, AU LIEU DE FAIBLIR SE REFORCE CONSTAMMENT (même sans commission renforcée et coordinatrice) devrait suffire à ces gens pour les faire réfléchir sur la validité de leur politique, sur les intérêts de classe que celle-ci défend. Et encore plus quand leur tâche fondamentale ,1a lutte revendicative,(pour de meilleurs salaires, la durée du travail les cadences, etc. ;) est menée à bien, de façon spontanée, par les travailleurs sans une commission qui ait à leur dire : "camarades, il faut lutter.”
Mais non, il ne s’agit pas d’une question d'objectifs politiques. Il s'agit simplement de quelques "défauts" facilement corrigibles... quatre retouches par-ci par-là et le tour est joué ! Nous avons des commissions ouvrières toutes neuves!
C'est de cette façon que ceux qui défendent avec le plus d'abnégation la lutte revendicative du prolétariat, ceux qui se trouvent le plus souvent à sa tête, deviennent ses bourreaux les plus impitoyables quand celle-ci montre son caractère révolutionnaire. Et ils ne font pas cela par mauvaise foi ou mauvaise volonté.
TOUTE ORGANISATION SYNDICALE EST' INEVITABLEMENT CONDAMNEE A JOUER CE ROLE DANS LA PERIODE DE DECADENCE DU CAPITALISME.
Quelle est notre position à l'égard de la lutte revendicative ?
Depuis que le prolétariat existe comme classe, c'est à dire comme un ensemble d'individus socialement déterminés par une situation matérielle commune, sa lutte révolutionnaire garde inévitablement un caractère de lutte revendicative.
L'histoire du mouvement ouvrier se refuse obstinément à marquer une séparation entre lutte revendicative et lutte révolutionnaire.
Aussi bien la majeure partie des luttes n'ont pas réussi à dépasser le cadre purement revendicatif et n'ont pu être que potentiellement révolutionnaire, aussi bien il n'a pas existé une seule lutte révolutionnaire qui n'ait été simultanément revendicative.
Le mouvement révolutionnaire de 17 en Russie est extrêmement éloquent à cet égard. La classe ouvrière se lance dans la lutte révolutionnaire poussée par la misère économique et par la guerre. Le mouvement s'unifie et se renforce à travers la lutte pour une revendication : la PAIX.
La bourgeoisie ne peut céder à cette revendication et pour l'obtenir le prolétariat ne peut que poursuivre le combat jusqu'au bout: LA."DESTRUCTION DE L'ETAT BOURGEOIS.
Ce qui a distingué la fraction la plus avancée du prolétariat, le parti bolchevik, des fractions de la bourgeoisie russe(mencheviks et socialistes révolutionnaires) CE NE FUT PAS DE DEFENDRE LA LUTTE POUR LA PAIX CONTRE LA GUERRE, MAIS DE MONTRER LA VERITABLE SIGNIFICATION, LA VERITABLE RAISON DU COMBAT DU PROLETARIAT RUSSE : LA REVOLUTION PROLETARIENNE.
De la même façon, la réponse contre l'attaque fasciste de juillet 1936 était potentiellement révolutionnaire. Si elle a conduit à la défaite la plus tragique ce fut parce que la gauche du capital (les partis communistes dirigés par le P.C. d'Union Soviétique) a réussi à mystifier, encadrer et vider de son contenu révolutionnaire, le véritable sens du combat du prolétariat. La défaite du prolétariat espagnol a été la préparation au massacre du prolétariat mondial ; la seconde guerre impérialiste mondiale. La crise capitaliste a pu se résoudre momentanément à travers la guerre impérialiste et la perspective de la révolution socialiste a du s'éloigner.
En Espagne, durant la guerre de 1936, s'est exprimé le caractère révolutionnaire de la lutte contre le fascisme. Les partis socialiste, communiste, la C.N.T et le P.O.U.M, en compagnie des bourgeois républicains et nationalistes ont réussi à mystifier et encadrer le prolétariat derrière la république bourgeoise, et à vaincre la révolution. Octobre 1934 aux Asturies et mai 1937 à Barcelone sont des exemples clair: de la façon dont les partis du capital déguisés par les noms de "communiste" ou "socialiste" sont les bourreaux de la révolution.
On nous dira alors que nous, révolutionnaires, avons pour tâche principale de provoquer les luttes revendicatives. A ceux qui pensent ainsi, nous répondons que ce n'est PAS NOTRE TACHE. LA LUTTE REVENDICATIVE N'EST L'INVENTION GENIALE D'AUCUN REVOLUTIONNAIRE INSOMNIAQUE, elle existe depuis la naissance même du prolétariat et avec celle-ci, sa potentialité révolutionnaire.
Dans la phase ascendante du capitalisme (quand c'était un système social capable de développer les forces productives jusqu'à des limites insoupçonnables) le capital a connu ses moments de plus grande richesse et développement. Celui-ci pouvait concéder des réformes et des améliorations réelles et durables à la classe ouvrière en lutte, aussi bien dans le domaine économique (diminution de la journée de travail, augmentation de salaires, etc.) que social (droit à la libre association, à la syndicalisation, suffrage universel, etc.) sans que l’économie soit mise en danger. Il y avait dans le monde de nouveaux marchés à conquérir. Seuls, des "débordements révolutionnaires” des luttes revendicatives marquent cette période.
Pendant celle-ci, la classe ouvrière unifiée à travers les syndicats et les partis parlementaires, développe sa lutte sans que celle-ci conduise directement à l’affrontement avec l’Etat bourgeois. Le Capital est suffisamment riche et les marchés suffisamment nombreux pour que le système puisse ne pas être mis en péril par les concessions que la lutte ouvrière l’oblige à faire. La révolution sociale ne peut pas être à l’ordre du jour.
Quand le Capital entre dans sa phase de décadence, les luttes se transforment beaucoup plus rapidement et fréquemment en luttes révolutionnaires parce qu’il ne peut pas concéder de véritables réformes, parce que toute concession doit être rapidement RECUPEREE, parce que c’est AU SEUL PRIX DE LA CONSTANTE DEGRADATION DES CONDITIONS DE VIE ET DE TRAVAIL DE LA CLASSE OUVRIERE QU’IL PEUT RETARDER SA CRISE DEFINITIVE.
Ce qui a changé dans la phase de décadence du capitalisme, c’est que ces luttes revendicatives sont de moins en moins de simples luttes économiques, QUE LEUR NATURE ET LEUR POTENTIEL REVOLUTIONNAIRE SURGIT BEAUCOUP PLUS RAPIDEMENT QU’AU SIECLE DERNIER.
Mais aujourd’hui comme hier, la lutte revendicative de la classe ouvrière n’est l’invention d’aucun révolutionnaire, le résultat d’aucune "tactique miraculeuse". En elle, aujourd’hui comme hier, est contenue sa potentialité révolutionnaire. Et c’est fondamentalement parce que la classe ouvrière commence, après 50 années de contre-révolution, à comprendre le sens véritable de sa lutte, qu’elle rejette de plus en plus souvent à l’ECHELLE MONDIALE les tentations du Capital pour l'encadrer et l’intégrer.
Aujourd'hui les organes qui peuvent paraître idéaux pour mener à bien sa lutte (syndicats, organisations permanentes pour sa lutte revendicative, etc.) sont non seulement ABANDONNES par la classe mais aussi, POUR ETRE DEVENUS DES INSTRUMENTS DU CAPITAL, doivent être affrontés et détruits par celle-ci si elle veut développer de façon conséquente sa lutte.
Ceci est la leçon, entre autres, des luttes de la classe ouvrière polonaise, quand, en 1970, devant la hausse des prix décidée par le gouvernement "socialiste" de Gomulka, elle s'est jetée dans la lutte, affrontant les milices du gouvernement, le P.C polonais et les syndicats. Dans sa lutte elle a organisé des conseils ouvriers dans les usines et a généralisé la grève sauvage contre les syndicats. Ce n'est qu'avec les armes que les "socialistes" et les "syndicats ouvriers" ont pu vaincre la classe ouvrière polonaise.
Alors que la tâche des agents du Capital au sein de la classe ouvrière est de CACHER le caractère révolutionnaire de la lutte revendicative de la classe ouvrière, de la FREINER et de 1'ENCADRER derrière les objectifs du Capital pour qu’elle perde sa potentialité révolutionnaire, la tâche des révolutionnaires est de montrer à chaque instant son véritable contenu.
- "Nous ne nous présentons pas devant le monde en doctrinaires, armés d’un nouveau principe : voici la vérité, mets-toi à genoux ! Nous ne lui disons pas : abandonne tes luttes car ce sont des sottises ! Nous ne faisons que lui montrer la vraie raison de sa lutte : la conscience est quelque chose qu'il doit faire sienne qu’il le veuille ou non !" (Marx, lettre à Ruge)
NOTRE OBJECTIF N'EST PAS DIFFERENT. Ce qui distingue les révolutionnaires aujourd’hui ce n'est pas leur "popularité", leur "capacité à attirer les masses" ou leur talent pour "gagner la confiance des secteurs bourgeois".
Contrairement à ceux qui vendent la révolution et trahissent le prolétariat en défendant les objectifs du Capital pour ne pas "se voir isolés des masses ouvrières", les révolutionnaires savent qu’en indiquant les buts véritables de la lutte ils seront très souvent "impopulaires" qu’ils seront traités de "provocateurs gauchistes" dans les moments de recul de la lutte, de "diviseurs de la sacro-sainte unité", d’"Agents de la réaction", et même de collaborateurs avec le fascisme quand ils dénonceront le populisme et les fronts démocratiques tant à la mode, comme les feuilles de vigne du Capital.
ACCIÓN PROLETARIA.
[1] Durant toute une période, les commissions ont surgi dans une multitude d’usines, au feu des mouvements de grève qui se sont développés en Espagne à partir du début des années 60. Elles surgissaient, disparaissaient, reparaissaient au rythme des progressions et des reculs de la lutte.
Cette instabilité dans leur continuité, en tant qu’organisations, constituait une entrave énorme pour la formation d’un ’’syndicat de classe”. C’est pour cela que les partis de gauche avec en tête le PCE ont impulsé la création d’organismes permanents hiérarchisés et exécutifs (coordinations locales, régionales, provinciales, nationales) qui, indépendamment de la conjoncture et de la lutte, se sont efforcé d’orienter politiquement tous les ouvriers et toutes les luttes - aussi partielles et éparses qu’elles aient pu être - vers un même but : la lutte contre la dictature et pour des réformes corporatistes.
Et ce fut le PCE, grâce à son potentiel financier et propagandiste, qui put, dans presque toute l’Espagne, se rendre maître de ces organisations. Il n’a pu développer sa politique de "réconciliation nationale "et de" pacte pour la liberté" qu’à la condition de disposer d’un certain poids et d’un certain contrôle parmi les travailleurs. Avec les commissions ouvrières il a trouvé sa ’’chair à canon”.
L'impossibilité d'obtenir des améliorations réelles et durables a provoqué chez les ouvriers une apathie et une résistance à s'organiser de façon stable dans les commissions ouvrières. De plus en plus, et principalement à partir des années 70, les luttes -qui n’ont décru ni en quantité ni en intensité- se sont déroulées en marge de l’organisation officielle des commissions ouvrières.
De nouveau, les luttes se déroulent avec des assemblées d’usine, comités unitaires, etc. ; en dehors et quelquefois contre les commissions.
Aujourd'hui, on peut dire que les commissions ouvrières ne sont rien d’autre qu’une organisation formée uniquement par les militants des groupes politiques qui refont de celles-ci des organisations identiques à ce qu'étaient les USO, OSO, etc.
[2] la classe ouvrière ne peut se diviser en deux moitiés : l’une révolutionnaire, l’autre réactionnaire. La classe ouvrière est la classe révolutionnaire dans son ensemble. Des ouvriers pris comme individus (bien qu’en nombre ils puissent constituer une majorité) peuvent faire leurs les intérêts d’une autre classe et par là s’opposer aux intérêts de leur classe.
[3] Il s’agit des "secteurs" de C.O. opposés aux vieilles commissions "locales" où le PCE est prédominant.