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ICConline - octobre 2014

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150e anniversaire de l'AIT: un combat plus que jamais actuel!

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Il y a 150 ans, le 28 septembre 1864, naissait l'Association Internationale des Travailleurs au Saint-Martin's Hall à Londres. Après le long reflux de la lutte de classe suite à la défaite des grands soulèvements sociaux de 1848, le prolétariat d'Europe commençait à montrer des signes de réveil de sa conscience et de sa combativité. Le développement de mouvements de grève sur des revendications à la fois économiques et politiques, la formation des syndicats et des coopératives ouvrières, la mobilisation des ouvriers sur des questions de politique "étrangère" telles que le soutien à l'indépendance de la Pologne ou aux forces anti-esclavagistes dans la guerre civile américaine, tout cela a convaincu Marx que la période de défaite touchait à sa fin. C'est pourquoi il apporta son soutien actif à l'initiative des syndicalistes anglais et français de former l'Association Internationale des Travailleurs en septembre 1864. Comme le dit Marx dans le Rapport du Conseil Général de l'Internationale au Congrès de Bruxelles en 1868 : cette Association "n'est fille ni d'une secte, ni d'une théorie. Elle est le produit spontané du mouvement prolétaire, engendré lui-même par les tendances naturelles et irrépressibles de la société moderne". Ainsi, le fait que les raisons de beaucoup d'éléments qui formèrent l'Internationale n'aient pas eu grand-chose à voir avec les vues de Marx (par exemple, la principale préoccupation des syndicalistes anglais était d'utiliser l'Internationale pour empêcher l'importation de briseurs de grève étrangers), n'a pas empêché ce dernier d'y jouer un rôle prépondérant ; il a siégé au Conseil Général la plus grande partie de l'existence de celui-ci et a rédigé beaucoup de ses documents les plus importants. Comme l'Internationale était le produit d'un mouvement du prolétariat à une certaine étape de son développement historique, une étape où il était encore en train de se former en tant que force au sein de la société bourgeoise, il était à la fois possible et nécessaire pour la fraction marxiste de travailler dans l'Internationale à côté d'autres tendances de la classe ouvrière, de participer à leurs activités immédiates dans le combat quotidien des ouvriers, tout en essayant en même temps de libérer l'organisation des préjugés bourgeois et petit-bourgeois, et de l'imprégner autant que possible de la clarté théorique et politique requise pour agir comme avant-garde révolutionnaire d'une classe révolutionnaire.

C'est tout le sens de ce combat qu'illustre l'Adresse inaugurale rédigée par Marx à l'occasion du Congrès de création de l'Association, et dont les leçons restent parfaitement valables un siècle et demi après sa publication. Ce texte est empreint d'une remarquable combativité qui ne s'enferme ni dans la rage aveugle caractéristique de l'activisme sans lendemain, ni dans l'académisme pédant de ces Messieurs les docteurs dont il moque les "découvertes" avec beaucoup d'ironie. Mais derrière le mordant de l'ironie, apparaît aussi clairement l'indignation de l'auteur face à la misère -et particulièrement à la faim- infligée aux prolétaires et au cynisme inouï de la bourgeoisie. Les raisons de ce sursaut moral n'ont pourtant guère disparu de nos jours où la faim touche près d'un milliard de personnes, bien qu'une journée ne puisse passer sans que la classe dominante ne s'extasie encore devant "l'augmentation étourdissante de richesses et de puissance".

Face au cynisme de la bourgeoisie, Marx place également sans aucune ambiguïté la réponse du prolétariat au niveau international. Il n'y a rien de hasardeux dans le choix de reprendre la formule qui conclut seize ans plus tôt le Manifeste communiste : "Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !", car la solidarité internationale des travailleurs dont le socle se trouve dans le caractère associé de leur travail et de leur production est bien la condition sine qua non du triomphe de la révolution mondiale. La solidarité internationale n'est pas un vain mot ; elle ne se réduit nullement à une caisse de grève. Elle doit au contraire être mue par une dimension morale et politique déterminée. C'est pourquoi elle demeure actuellement l'atout majeur et essentiel, le moteur indispensable et déterminant du développement de la lutte de la classe exploitée contre la misère et la barbarie de ce système capitaliste aujourd'hui en pleine putréfaction.

En s'appuyant sur la dynamique de la lutte des classes depuis 1848, Marx inscrit également son analyse de la situation d'alors dans un contexte historique. Avec l'éclatement de la Commune de Paris en 1871, l'histoire prouva bientôt la validité de la méthode marxiste. L'approfondissement politique n'est à ce titre pas un "luxe" de révolutionnaires de salon mais une arme indispensable du prolétariat pour le développement de sa confiance en lui-même et dans la perspective du communisme. A l'heure où la décomposition du capitalisme pèse de tout son poids sur la société, où l'irrationalité et la pensée magique triomphent, ce combat pour la clarté théorique est plus que jamais valable.

RI

Adresse inaugurale de l'Association Internationale des travailleurs, Karl Marx (1864)

Ouvriers !

C'est un fait capital que la misère des masses travailleuses n'a point diminué de 1848 à 1864, dans cette période qui, pourtant, se distingue entre toutes par un accroissement inouï du commerce. En Grande-Bretagne, un organe modéré de la bourgeoisie, généralement bien informé, prédisait en 1850 que si les exportations et les importations s'élevaient de 50 %, le paupérisme tomberait à zéro. Hélas ! le 7 avril 1864, le chancelier de l'Echiquier affirmait, devant le Parlement ravi, que "le total des exportations et des importations se montait, en 1863, à la somme étonnante de 443 995 000 £, soit trois fois les chiffres de 1843, c'est-à-dire d'une époque assez récente". Il parlait pourtant avec la même éloquence de la "misère". "Pensez donc, s'exclama-t-il, à ceux qui sont au bord de la misère… aux salaires… qui ne se sont pas élevés, à la vie humaine qui, dans neuf cas sur dix, n'est qu'une lutte pour l'existence." Il ne parlait pas des Irlandais, qui sont peu à peu remplacés par des machines, au nord, par des troupeaux de moutons, au sud ; et pourtant le nombre de moutons diminuait dans ce malheureux pays – moins rapidement que les hommes, c'est vrai.1 Il n'a point répété ce que venaient de dévoiler, dans un violent accès de terreur, les représentants éminents de la haute société. Les étrangleurs semaient la panique. Un moment vint où la Chambre des Lords dut ordonner une enquêtes sur la déportation et les travaux forcés. C'est le gros Livre bleu2 de 1863 qui a vendu la mèche : il a prouvé, par des faits et des chiffres officiels, que les pires criminels des bagnes de l'Angleterre et de l'Ecosse travaillent bien moins durement et sont beaucoup mieux nourris que les travailleurs agricoles. Il y avait plus. La guerre civile en Amérique a eu pour conséquence de jeter sur le pavé les ouvriers du Lancashire et du Cheshire.3 Alors, la même Chambre des Lords a délégué un médecin dans les zones industrielles pour établir quelles quantités minimales de carbone et d'azote il faut administrer (sous la forme la plus simple et la moins coûteuse) à l'individu moyen "pour empêcher au moins les maladies entraînées par l'inanition". Le Dr Smith, médecin délégué, a calculé qu'en moyenne 28 000 grains de carbone et 1330 grains d'azote par semaine sont nécessaires pour maintenir un adulte ordinaire au-dessus du niveau d'inanition… Il a découvert en outre que cette dose, après tout, correspondait à la nourriture des ouvriers du coton ; et l'on sait en réalité à quelle portion misérable la détresse les a réduits.4 Mais attendez, il y a mieux. Ce même médecin, ce savant, a été chargé ensuite par le responsable médical du Conseil Privé, d'enquêter sur les conditions alimentaires des classes travailleuses les plus pauvres. Le Sixième rapport sur l'état de la santé publique, publié par ordre du Parlement dans le courant de l'année 1863, contient le résultat de ses recherches. Qu'est-ce qu'il a découvert, le docteur ? Que les tisserands en soie, les couturières, les gantiers, les tisseurs de bas, etc., ne reçoivent pas même, en moyenne, la misérable pitance des ouvriers du coton ; pas même la quantité de carbone et d'azote "strictement nécessaire pour prévenir les maladies d'inanition".

"En outre, (nous citons textuellement le rapport) l'examen de l'état des familles d'agriculteurs a démontré que plus du cinquième d'entre elles reçoit moins que le minimum d'aliments carbonés considéré comme suffisant ; plus du tiers reçoit moins que le minimum d'aliments azotés ; dans les districts de Berks, d'Oxford et de Somerset, l'insuffisance des aliments azotés est une constante du régime alimentaire local." "Il ne faut pas oublier, ajoute le rapport officiel, que la privation de nourriture est supportée de mauvais gré et qu'en règle générale ces grandes privations alimentaires ne font jamais que suivre bien d'autres restrictions… La propreté même est regardée comme une chose très chère et difficile et, quand le respect de soi-même s'efforce à l'entretenir, chacun de ces efforts représente une aggravation des affres de la faim." "Ce sont là des réflexions douloureuses, d'autant plus qu'il ne s'agit pas ici, notons-le, d'une pauvreté méritée par la paresse ; dans tous les cas, nous parlons de la pauvreté des populations travailleuses. En vérité, le travail qui n'assure qu'une si maigre pitance est, en général, prolongé à l'excès." Le rapport révèle un fait étrange, et même inattendu : "De toutes les parties du Royaume-Uni", c'est-à-dire l'Angleterre, le Pays de Galles, l'Ecosse et l'Irlande, "c'est la population agricole de l'Angleterre (c'est-à-dire de la partie la plus riche) qui est de loin la plus mal nourrie" ; quoique les journaliers eux-mêmes, dans les comtés de Berks, d'Oxford et de Somerset, soient mieux nourris que le grand nombre d'ouvriers qualifiés qui travaillent à domicile dans l'Est de Londres.

Telles sont les données officielles publiées par ordre du Parlement, en 1864, en plein millénium du libre-échange, au moment même où le chancelier de l'Echiquier raconte à la Chambre des Communes "que la condition des ouvriers anglais s'est améliorée, en moyenne, d'une manière si extraordinaire, que nous n'en connaissons point d'exemple dans l'histoire d'aucun pays, ni d'aucun âge". Mais un grincement vient de se faire entendre parmi ces congratulations officielles. C'est une remarque toute sèche du non moins officiel Rapport de la santé publique : "La santé publique d'un pays signifie la santé des masses, et il est presque impossible que les masses soient bien portantes si elles ne jouissent pas à tout le moins, jusqu'au plus bas de l'échelle sociale, d'une modeste prospérité."

Les statistiques dansent devant les yeux du chancelier. Ebloui par le "progrès de la nation", il s'écrie dans un délire extatique : "De 1842 à 1852, l'augmentation dans les revenus imposables de ce pays avait été de 6 % ; de 1853 à 1861, c'est-à-dire dans huit années, si l'on prend pour base le chiffre de 1853, elle a été de 20 % ! Le fait est si étonnant qu'il est presque incroyable !... Cette augmentation étourdissante de richesse et de puissance, ajoute M. Gladstone, est entièrement restreinte aux classes qui possèdent."

Si vous voulez savoir ce qu'il entre de santés brisées, de morale flétrie et de ruine intellectuelle dans cette "enivrante augmentation de richesse et de puissance, exclusivement restreinte aux classes possédantes" quand ce sont les classes laborieuses qui l'ont produite et qui la produisent, voyez la description des ateliers de tailleurs, d'imprimeurs et de modistes dans le dernier Rapport sur l'état de la santé publique ! Voyez le Rapport de la Commission d'enquête sur le travail des enfants où il est constaté, par exemple, que "comme classe, les potiers, hommes et femmes, représentent une population dégénérée au moral et au physique" ; que "les enfants mal portants seront un jour des parents mal portants" ; que "la dégénérescence de la race en est une conséquence absolue" ; que "la dégénération de la population du comté de Stafford serait beaucoup plus avancée, n'était le recrutement continuel dans les campagnes avoisinantes, et le croisement par mariage avec des races plus saines." Jetez les yeux sur le Livre bleu de M. Tremenheere sur les plaintes et doléances des journaliers de la boulangerie. Et qui n'a pas frémi d'indignation à la lecture des paradoxes des inspecteurs des fabriques, illustrés par le Registrar general : la santé des ouvriers du comté de Lancaster, alors même qu'ils en sont réduits à des rations de famine, s'est réellement améliorée, parce que le manque de coton les a chassés des filatures ; et la mortalité des enfants d'ouvriers a diminué, parce qu'enfin il est permis aux mères de leur donner le sein, au lieu de calmants opiacés.

Retournez la médaille encore une fois. Le relevé des impôts sur le revenu et sur la propriété, présenté à la Chambre des Communes le 20 juillet 1864, nous apprend que le 5 avril 1863, treize personnes ont grossi les rangs de ces heureux de la terre dont les revenus annuels sont évalués par le collecteur des impôts à 50.000 £ et plus : oui, leur nombre est monté, dans une seule année, de 67 à 80. Le même relevé laisse apparaître que 3000 personnes environ partagent entre elles un revenu annuel d'environ 25 millions de £, plus que le revenu total distribué annuellement entre tous les travailleurs agricoles de l'Angleterre et du Pays de Galles. Ouvrez le registre du cens de 1861, et vous trouverez que le nombre des propriétaires terriens du sexe masculin, en Angleterre et dans le Pays de Galles, s'est réduit de 16 934 en 1851 à 15 066 en 1861 ; qu'ainsi, la concentration des terres s'est accrue en dix années de 11 %. Si les terres de ce pays se concentrent dans quelques mains suivant le même rythme, la question agraire deviendra d'une simplicité singulière. Ce fut le cas dans l'Empire romain : ainsi Néron grinça des dents en apprenant que la moitié de la province d'Afrique était possédée par six chevaliers.

Nous nous sommes appesantis sur ces "faits si étonnants, qu'ils sont presque incroyables", parce que l'Angleterre est à la tête de l'Europe commerciale et industrielle. Il y a quelques mois, souvenez-vous en, un des fils réfugiés de Louis-Philippe félicitait publiquement les travailleurs agricoles anglais de la supériorité de leur sort sur celui, moins prospère, de leurs camarades d'outre-Manche. En vérité, avec un changement de couleur locale, et sur une échelle plus restreinte, la situation anglaise se reproduit dans tous les pays industriels qui progressent sur le continent. On assiste dans tous ces pays, depuis 1848, à un développement inouï de l'industrie ; leurs exportations et leurs importations prennent une ampleur dont on n'avait jamais rêvé. Partout "l'augmentation des richesses et de la puissance, exclusivement restreinte aux classes possédantes" a été véritablement "grisante". Là, comme en Angleterre, au sein des classes travailleuses, une minorité a obtenu un certain progrès du salaire réel ; alors que dans la plupart des cas la hausse des salaires en monnaie ne signifie pas un bien-être accru, pas plus que les pensionnaires de l'hôpital des pauvres ou de l'orphelinat ne se trouvent mieux de l'augmentation du coût de leur entretien (par personne, 9 £ 15 shillings 8 pence en 1862 contre 7 £ 7 sh. 4 p. en 1852). Partout on a vu le gros des classes travailleuses s’enfoncer plus profond, dans la même proportion, à tout le moins, ou les classes supérieures se sont élevées dans l'échelle sociale. Il y a une vérité que tout esprit non prévenu tient aujourd'hui pour démontrée, et que seuls dénient ceux-là qui ont intérêt à barricader les autres dans le paradis des imbéciles : cette vérité, c'est que dans tous les pays d'Europe, il n'y a pas de perfectionnement des machines, pas d'applications scientifiques dans la production, pas d'inventions pour communiquer, pas de colonies nouvelles, pas d'émigration, pas d'ouverture de marchés, pas de libre-échange, il n'y a là rien, et même si l'on met toutes ces choses ensemble, qui puissent mettre fin à la misère des classes laborieuses ; et qu'au contraire, sur cette base faussée, tout nouveau développement des forces productives doit aboutir à des contrastes sociaux plus vifs, à des antagonismes sociaux plus tranchés. Mourir de faim, mais c'est devenu une manière d'institution dans la métropole de l'Empire britannique, au cours de cette grisante époque de progrès économique. Cette époque est marquée dans les annales du marché mondial par la récurrence toujours plus rapide, par l'action toujours plus étendue, par les effets toujours plus mortels de cette peste sociale qu'on appelle la crise commerciale et industrielle.

Après l'échec des révolutions de 1848, une main de fer a broyé toutes les organisations et toute la presse de parti des classes travailleuses ; les plus éclairés des fils du travail perdirent tout espoir et se réfugièrent dans la république d'outre-Océan ; les rêves d'émancipation avaient été de courte durée : ils s'évanouirent devant la fièvre industrielle, le délabrement moral, la réaction politique. La défaite des classes travailleuses du continent, due pour une part à la diplomatie du gouvernement anglais qui, alors comme aujourd'hui, opérait dans une fraternelle solidarité avec le Cabinet de Saint-Pétersbourg, allait bientôt faire sentir ses effets de ce côté-ci de la Manche. Si la déroute de leurs frères du continent décourageait les travailleurs anglais, brisait la foi qu'ils plaçaient en leur propre cause, en revanche elle raffermissait chez les seigneurs de la terre et de la finance une confiance qui s'était trouvée quelque peu ébranlée. Ils retirèrent avec insolence des concessions qu'ils avaient déjà publiquement annoncées. On découvrait alors de nouveaux gisements d'or : l'exode fût immense, et laissa d'irréparables vides dans les rangs du prolétariat britannique. Certains de ses membres, autrefois actifs, se laissèrent prendre à une séduction pourtant bien passagère : travailler plus, gagner plus, et devenir politiquement des "jaunes". Tous les efforts pour maintenir le mouvement chartiste5, ou pour le refondre, connurent un échec retentissant ; les organes de presse de la classe ouvrière moururent l'un après l'autre de l'apathie des masses ; il faut dire que jamais la classe ouvrière d'Angleterre ne sembla si parfaitement résignée à l'état de nullité politique. Si donc, il n'avait point existé de solidarité d'action entre les classes travailleuses de l'Angleterre et du continent, il y avait, en tout cas, une solidarité de défaite.

Cependant la période qui a suivi la révolution de 1848 n'a pas été sans offrir quelques compensations. Contentons-nous d'y relever deux grands faits.

Après une lutte de trente ans, soutenue avec la plus admirable persévérance, les classes ouvrières de l'Angleterre, profitant d'un désaccord momentané entre les maîtres de la terre et les maîtres de la finance, réussirent à faire passer le bill6 de dix heures de travail. Les ouvriers des fabriques en retirèrent d'immenses avantages, physiques, moraux et intellectuels, qui depuis ont été enregistrés chaque semestre dans les rapports des inspecteurs des manufactures : on les reconnaît à présent de tous côtés. La plupart des gouvernements continentaux durent adopter la loi anglaise sur les fabriques, sous des formes plus ou moins modifiées, et le Parlement anglais lui-même se voit contraint d'étendre chaque année le champ d'action de cette loi.

Outre son importance pratique, autre chose encore relevait le merveilleux succès de cette mesure obtenue par les travailleurs. Par ses porte-parole scientifiques les plus fameux, tels le docteur Ure, le professeur Senior et autres sages de ce calibre, la classe moyenne avait prédit, et prouvé à qui mieux mieux, qu'à la moindre restriction légale des heures de travail, on allait entendre le glas funèbre de l'industrie anglaise. Car ce vampire ne pouvait vivre sans pomper le sang, et qui plus est, le sang des enfants. Au temps jadis, le meurtre des enfants était un rite mystérieux de la religion de Moloch ; mais il n'était pratiqué que dans certaines occasions tout à fait solennelles, peut-être une fois l'an ; et puis Moloch n'était pas exclusivement porté sur les enfants des pauvres.

Cette lutte pour la restriction légale des heures de travail se déchaîna d'autant plus furieusement, que tout en terrifiant l'avarice, elle intervenait dans la grande querelle entre l'aveugle loi de l'offre et de la demande, qui constitue l'économie politique de la bourgeoisie, et la production sociale dirigée par la prévision sociale, qui constitue l'économie politique de la classe ouvrière. C'est pourquoi le bill des dix heures n'a pas été seulement un succès politique ; il a été la victoire d'un principe. Pour la première fois, l'économie politique de la bourgeoisie succombait au grand jour devant l'économie politique de la classe ouvrière.

Mais il y avait en réserve une victoire plus grande encore de l'économie politique du travail sur l'économie politique du capital. Nous voulons parler du mouvement coopératif et surtout des manufactures coopératives montées, avec bien des efforts et sans aide aucune, par quelques "bras" audacieux. La valeur de ces grandes expériences sociales ne saurait être surfaite. Par des actions et non par des raisonnements, elles ont prouvé que la production sur une grande échelle, et en accord avec les exigences de la science moderne, peut marcher sans qu'une classe de maîtres emploie une classe de "bras" ; que les moyens de travail, pour porter fruit, n'ont pas besoin d'être monopolisés pour la domination et l'exploitation du travailleur ; et que le travail salarié, comme l'esclavage, comme le servage, n'est qu'une forme transitoire et inférieure, destinée à disparaître devant les travailleurs associés qui, eux, apporteront à leur tâche des bras bien disposés, un esprit alerte, un cœur réjoui. En Angleterre, la graine du système coopératif a été semée par Robert Owen. Les travailleurs du continent ont tenté des expériences qui donnaient une conclusion pratique à des théories qu'on n'a pas inventées en 1848, mais qu'on a alors préconisées bien haut.

Il y a une autre chose, que ces expériences faites entre 1848 et 1864 ont établie sans aucun doute possible : pour excellente qu'elle soit dans ses principes, et si utile qu'elle apparaisse dans la pratique, la coopération des travailleurs, si elle reste circonscrite dans un cercle étroit, si quelques ouvriers seulement font des efforts au petit bonheur et en leur particulier, alors cette coopération ne sera jamais capable d'arrêter les monopoles qui croissent en progression géométrique ; elle ne sera pas capable de libérer les masses, ni même d'alléger de façon perceptible le fardeau de leur misère. C'est sans doute pour cette raison-là que des lords à la langue dorée, des bourgeois philanthropes et sermonneurs, et même des économistes subtils nous ont servi des compliments nauséabonds sur ce même système coopératif qu'ils avaient cherché, vainement, à tuer dans l'œuf, qu'ils avaient tourné en dérision, pure utopie à leurs yeux, simple rêve ; ou qu'ils avaient stigmatisé chez les socialistes comme un sacrilège. Pour que les masses laborieuses soient affranchies, la coopération devrait prendre une ampleur nationale, et, par conséquent, il faudrait la favoriser avec des moyens nationaux. Mais ceux qui règnent sur la terre et sur le capital useront toujours de leurs privilèges politiques pour défendre et perpétuer leur monopole économique. Loin de faire avancer l'émancipation du travail, ils continueront à semer sur sa voie tous les obstacles possibles. Il faut se rappeler le persiflage de lord Palmerston, quand il repoussa les tenants du bill sur les droits des fermiers irlandais, à la dernière session du Parlement : "La Chambre des Communes, s'écria-t-il, est une chambre de propriétaires fonciers." Donc, la grande tâche des classes travailleuses, c'est de conquérir le pouvoir politique. Il semble qu'elles l'aient compris, car en Angleterre, en Allemagne, en Italie, en France, on a assisté à des réveils simultanés ; et l'on est en train de faire des efforts simultanés pour réorganiser le parti des ouvriers.

Ils ont entre leurs mains un élément de succès : le nombre. Mais le nombre ne pèse dans la balance que s'il est uni par l'entente et guidé par la connaissance. L'expérience du passé a montré qu'un lien de fraternité doit exister entre les travailleurs des différents pays et les inciter à tenir bon, coude à coude, dans toutes leurs luttes pour l'émancipation, et que si l'on dédaigne ce lien, le châtiment sera l'échec commun de ces efforts sans cohésion.

C'est cette pensée qui a déterminé les travailleurs de différents pays, dans une assemblée publique, le 28 septembre 1864, à St-Martin's Hall, à fonder l'association internationale.

Une autre conviction animait cette assemblée.

Si l'émancipation des classes travailleuses ne peut se faire sans leur concours fraternel, comment vont-elles remplir cette grande mission quand la politique étrangère ne nourrit que des desseins criminels, quand elle joue des préjugés nationaux, quand elle gaspille dans des guerres de flibustiers le sang du peuple et ses trésors ? Ce n'est pas la sagesse des classes dirigeantes, mais bien l'héroïque résistance opposée par les classes travailleuses d'Angleterre à leur folie criminelle, qui a retenu l'Europe occidentale de se jeter tête baissée dans une croisade pour la perpétuation et la propagation de l'esclavage d'outre-Atlantique. L'approbation sans vergogne, les singeries de compassion, ou l'indifférence stupide, avec lesquelles les classes supérieures d'Europe ont contemplé la conquête de la forteresse montagnarde du Caucase7, et l'assassinat de l'héroïque Pologne par les Russes8 ; les vastes empiètements, jamais contrecarrés, de cette puissance barbare dont la tête est à Saint-Pétersbourg et dont les mains agissent dans tous les Cabinets d'Europe, tout cela appris aux travailleurs qu'ils ont un devoir : percer les mystères de la politique internationale, surveiller les agissements diplomatiques de leurs gouvernements respectifs, les contrecarrer au besoin, par tous les moyens qui sont en leur pouvoir ; et s'ils ne peuvent les empêcher, s'entendre pour les dénoncer en même temps, et pour revendiquer les lois élémentaires de la morale et de la justice qui doivent régir les relations entre particuliers, comme règle souveraine des rapports entre les nations.

La lutte pour une telle politique étrangère fait partie de la lutte générale pour l'émancipation des classes travailleuses.

Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !

 

1 Marx fait ici référence à la Grande famine (ou famine des pommes de terre) qui frappa très durement l'Irlande entre 1845 et 1851. Cette catastrophe, loin d'être "naturelle", fit près d'un million de victimes. La bourgeoisie britannique fit preuve d'un cynisme inouï et put même tirer de l'hécatombe de juteux bénéfices fonciers. (NDLR)

2 Désigne les rapports présentés par le gouvernement britannique au Parlement. (NdR)

Désigne les rapports présentés par le gouvernement britannique au Parlement. (NdRNdlr)

3 Pendant la guerre de sécession, l'Union mis en place un blocus des ports Confédérés, privant de coton l'industrie britannique du tissu. (NdRNDLR)

4 Il serait superflu de rappeler au lecteur qu'à part l'eau et quelques substances inorganiques, ce sont le carbone et l'azote qui constituent la matière brute de la nourriture humaine. Mais pour nourrir l'organisme humain, ces simples éléments chimiques doivent lui être fournis sous la forme des substances végétales et animales. La pomme de terre, par exemple, contient des substances carbonées et azotées dans des proportions convenables.

5 Mouvement politique et syndical né au Royaume Uni au cours du XIXe siècle. (NdRNdlr)

6 Désigne une réforme accordée par l'Etat britannique. (NdRNDLR)

7 Marx fait ici référence à la conquête russe du Caucase dans la première moitié du XIXe siècle. (NdRNDLR)

8 Il s'agit de l'écrasement de l'Insurrectionl'insurrection polonaise de 1861-1864 par l'armée russe. (NdRNDLR)

 

Conscience et organisation: 

  • La première Internationale [1]

Rubrique: 

Histoire du mouvement ouvrier

Compte rendu de lecture: Paul Frölich, Impérialisme, guerre et lutte de classes en Allemagne (1914-1918)

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"Quiconque a vécu en tant qu'acteur politique la période qui s'est ouverte le 4 août 1914 pourra facilement se tromper sur le temps écoulé depuis cette date. (...) Dix ans ! Cela veut dire qu'une nouvelle génération est arrivée à maturité et est appelée à faire l'histoire. Cette génération doit connaître son passé pour connaître la totalité du présent. (...) Du point de vue prolétarien, il n'existe aucune synthèse sur cette période. Ce livre se veut donc un premier essai en vue de mener à bien cette tâche."  Tel était le postulat de Paul Frölich quand il décida, en 1924, d'écrire l'une des premières synthèses sur la Première Guerre mondiale. Ce travail n'était pas destiné à "s'adonner à l'histoire au nom même de l'histoire" mais de "transmettre au travailleur tout ce qu'il devait savoir sur la guerre." Ainsi, Paul Frölich voulait établir une synthèse du conflit permettant au prolétariat de comprendre le processus historique qui a conduit à une telle boucherie. Il s'agissait de dénoncer la barbarie et le cynisme de la bourgeoisie internationale mais aussi la trahison de la social-démocratie qui, dans de nombreux pays, s'était rangée du côté des partis bourgeois au moment de signer les crédits de guerre.

Issu d'une famille ouvrière, Paul Frölich adhère au marxisme et rejoint très tôt le parti social-démocrate allemand (Sozialdemokratische Partei Deutschlands, SPD). Il suit les cours de Rosa Luxembourg à l'école du parti. En 1914, il critique la position du SPD en faveur des crédits de guerre et participe à la Conférence de Zimmerwald. Appartenant à la gauche radicale de Brême, il participe à la formation des Communistes Internationaux d'Allemagne. En 1918, il est membre du parti communiste d'Allemagne (Kommunistische Partei Deutschlands, KPD). Ainsi, Paul Frölich est avant tout un militant révolutionnaire ayant participé aux combats majeurs de la classe ouvrière allemande au début XXe siècle.

Les réflexions qu'il mène dans ce livre réaffirment et complètent celles énoncées par Rosa Luxembourg dans sa Brochure de Junius en 1916. En s'appuyant sur des documents officiels de la bourgeoisie ainsi que sur la presse bourgeoise et socialiste, Frölich explique les causes de la guerre et décrit ses conséquences aux plans politique et économique. L'auteur décrit les conditions de vie du prolétariat allemand durant cette période et n'hésite pas à dénoncer l'exploitation accrue que ce dernier a dû subir au cours du conflit.

A l'heure de la "commémoration" de la guerre 14-18 au cours de laquelle la bourgeoisie entreprend résolument d’"héroïser" les millions d'ouvriers ayant servi de chair à canon pour les intérêts du capital, ce livre permettra au prolétariat du XXIe siècle de pouvoir critiquer les falsifications historiques distillées par la bourgeoisie au sujet de cette guerre. Le compte rendu qui suit vise à souligner les idées forces du livre et à montrer en quoi l'analyse de Frölich peut servir à aiguiser le niveau théorique du prolétariat actuel.

L'impérialisme plonge l'humanité dans la barbarie

Dans le sillage de Rosa Luxembourg, Paul Frölich voit dans l'impérialisme la cause principale de la guerre 14-18. En effet, à la fin du XIXe siècle, le monde est trop étroit pour engloutir le flot béant de marchandises émises par la machine capitaliste. Les puissances impérialistes se font une concurrence acharnée pour contrôler les dernières zones de la planète pas encore sous la domination capitaliste. En effet, jusqu'aux années 1880, l'Angleterre "était le pays capitaliste par excellence" et pouvait écouler abondamment ses marchandises en Europe et dans les colonies. Mais cette situation se modifie avec l'émergence de nouvelles puissances capitalistes : l'Allemagne et les Etats-Unis. Le développement rapide de l'industrie dans ces deux pays offre à leur bourgeoisie respective des perspectives de profit important. Ainsi, les concurrences commerciales s'accroissent et chaque pays capitaliste souhaite maintenir ses territoires coloniaux, voire s'implanter dans de nouvelles zones afin d'écouler la production de marchandises. Ces tensions commerciales deviennent plus courantes dans les premières années du XXe siècle et tendent à se transformer en conflits armés. En effet, Paul Frölich montre que la course aux armements est consubstantielle au développement de l'impérialisme. Dans les dix années qui précèdent la Première Guerre mondiale, les politiques commerciales agressives menées par les puissances capitalistes dans les colonies manquent d'engendrer des guerres ouvertes. L'aventure chinoise à la fin du XIXe siècle, la concurrence entre l'Autriche-Hongrie et la Russie dans les Balkans, le conflit entre la France et l'Allemagne à propos du Maroc en 1911, … sont autant de signes annonciateurs d'un drame mondial sans cesse retardé par l'impréparation des différents acteurs sur le plan militaire. Mais en 1913-1914, la situation devient intenable, les manœuvres de l'impérialisme austro-hongrois dans les Balkans (soutenues par l'Allemagne) afin de maintenir ses intérêts commerciaux et briser l'élan d'indépendance de la Serbie déplaisent fortement à la Russie, l'Angleterre et la France regroupées dans une Triple Entente depuis 1907.

La bourgeoisie présente l'assassinat de l'archiduc François-Ferdinand comme l'événement déclencheur de la guerre afin de mieux cacher les vraies raisons qui ont plongé l'humanité dans quatre années de folie sanguinaire. Paul Frölich relativise cet épisode qui n'est qu'une étincelle ayant fait s'embraser un feu qui couvait depuis plusieurs années. Voici ce qu'il nous dit sur la portée de cet événement : "En Europe, on ne prêta guère plus d'attention à la nouvelle de l'attentat que celle qu'on accordait, en règle générale, aux sensationnelles nouvelles de cet importance." L'assassinat permit à l'Autriche-Hongrie de légitimer l'ultimatum puis la déclaration de guerre imposés à la Serbie. Le jeu des alliances impérialistes fit le reste comme l'indique Frölich : "Une guerre contre la Serbie signifiait donc une guerre contre la Russie. Et une guerre contre la Russie, c'était une guerre de toute l'Europe."

Pour les marxistes, la Première Guerre mondiale marque l'entrée du capitalisme dans sa période de décadence. Les contradictions entre le développement des forces productives et les rapports sociaux de production sont telles qu'il n'est désormais plus possible à ce système de

permettre une évolution positive de l'humanité. L'impérialisme (identifié par Engels puis par Rosa Luxembourg) forme pour les marxistes la cause principale de la guerre. L'incapacité de la bourgeoisie à régler les contradictions du capitalisme (devant l'impuissance momentané du prolétariat à détruire ce système) laissait comme seule réponse une guerre généralisée : "Il y avait deux voies pour sortir de ce dilemme. La voie capitaliste, qui promettait d'apporter provisoirement un peu d'air à ceux qui se trouvaient désormais au bord de l'asphyxie : par la guerre, l'écrasement de l'adversaire et la destruction de ses forces productives, la redistribution du monde entre les vainqueurs. De là, nouvelle course effrénée et folle, nouvelle pression des forces productives, accroissement de la concurrence – jusqu'à ce que le monde soit redevenu trop étroit. Puis nouvelle guerre ; mais point de solution. L'autre voie, radicale et prolétarienne : abolition du mode de production dont le profit est le moteur et le régulateur ; destruction de l'exploitation et de la domination de classe." La guerre 14-18 marque donc l'entrée du capitalisme dans une impasse historique ne pouvant être surmontée que par l'abolition de ce dernier par le prolétariat.

Paul Frölich s'appuie sur les acquis théoriques du marxisme forgés par les grandes figures du mouvement révolutionnaire afin d'expliquer le processus historique qui a mené à cette guerre. Cette vision permet à la classe ouvrière actuelle de pouvoir réagir aux mystifications que la bourgeoisie distille à ce sujet. Cette dernière fait de ce premier conflit mondial une guerre justifiée par le désir de revanche de la France sur l'Allemagne. Parfois, elle n'hésite pas à en appeler au hasard, à faire de cet événement une parenthèse de l'histoire, un moment particulier dans lequel, l'humanité, l'espace de quatre années, a sombré dans la folie guerrière. Autant d'explications lamentables visant à rejeter la responsabilité du capitalisme dans le déroulement de cette boucherie insupportable.

L'impuissance de la Deuxième Internationale et la trahison de la social-démocratie

Dans la période de décadence, la guerre est la seule alternative proposée par la bourgeoisie pour limiter les contradictions du capitalisme. Seul le prolétariat est porteur d'une autre perspective : le communisme. Ainsi, en 1914, l'une des tâches historiques du prolétariat était de s'opposer à la guerre et d'impulser un mouvement révolutionnaire : "Lutte contre la guerre voulait dire lutte de pouvoir contre la bourgeoisie dans tous les pays, autrement dit lutte révolutionnaire." Or, le prolétariat n'a pas été en mesure de briser l'ardeur barbare de la bourgeoisie. La défaillance des organisations révolutionnaires explique en grande partie cet échec.

Depuis 1889, la classe ouvrière s'était réorganisée au niveau mondial. La Deuxième Internationale se composait de partis nationaux indépendants de tendance marxiste. Pour autant, la vie de l'organisation fut sans cesse perturbée par des luttes internes entre le courant opportuniste et l'aile internationaliste. L'histoire de la Deuxième Internationale montre à quel point cette organisation fut gangrénée par l'esprit routinier du rouage parlementariste et par la contradiction constante entre les positions de principe et la pratique. Le simplisme et le manque de rigueur avec lesquels la question de la guerre est traitée lors des Congrès Internationaux illustre cette attitude. Avec le développement de l'opportunisme en son sein, la Deuxième Internationale s'éloignait de l'internationalisme et de fait, transigeait avec le refus catégorique de la guerre et surtout avec la transformation de la guerre impérialiste en guerre révolutionnaire. Paul Frölich a identifié cette tendance à la dégénérescence de l'organisation : "Compte tenu de sa nature et de la façon dont elle était organisée, l'Internationale était condamnée à échouer lamentablement quand elle fut confrontée aux tâches immenses que la guerre exigeait d'elle." En définitive, la Deuxième Internationale "faisait grand cas de sa nature révolutionnaire, mais en réalité elle n'était pas révolutionnaire."

La fébrilité de la Deuxième Internationale fut renforcée par le développement progressif de l'opportunisme au sein de la social-démocratie des grandes puissances impérialistes (la SFIO en France, le SPD en Allemagne notamment). En effet, Paul Frölich démontre que, dans les pays traditionnels du capitalisme, le parlementarisme et le démocratisme ont facilité le basculement de la social-démocratie dans le camp de la classe dominante. "Les partis qui se sont effondrés, ce sont les partis où s'était manifestée la véritable nature de l'Internationale et qui avaient eu le temps, au cours d'une longue période de répit des luttes de classe, de constituer une politique nettement opportuniste ; ce sont aussi les partis des pays dans lesquels la bourgeoisie était assez riche pour entretenir et corrompre une aristocratie ouvrière.

Les partis qui se sont maintenus, ce sont les partis qui étaient soumis à une oppression constante, qui devaient être et rester révolutionnaires par la force des choses, qui ne laissèrent pas le temps à l'opportunisme de les avaler, qui s'appuyaient sur un prolétariat qui, effectivement, 'n'avait rien à perdre que ses chaînes'. Ces partis formèrent, avec les fractions révolutionnaires des grands partis, la base de la Troisième Internationale. Ici, dans l'effondrement de tout un monde, les forces se rassemblaient pour en construire un nouveau." Comme l'indique Paul Frölich, seuls les partis ouvriers des nations secondaires du capitalisme restèrent fidèles à l'internationalisme et luttèrent contre la guerre. Parmi eux, le parti bolchevik, le parti social-démocrate de Lituanie et de Pologne, le parti social-démocrate serbe, une fraction du parti socialiste italien, formaient le noyau dur de la gauche révolutionnaire dans l'Internationale. Mais la forte influence des partis traîtres sur les masses était un boulet trop lourd pour infléchir la conscience du prolétariat. Lorsque le 4 août 1914, le SPD en Allemagne et la SFIO en France votèrent les crédits de guerre, une partie non-négligeable de l'avant-garde du mouvement révolutionnaire "passa drapeau au vent dans le camp de l'ennemi". La classe ouvrière "perdait le fruit d'un demi-siècle de travail d'éducation socialiste, et seul un petit groupe, dispersé dans tout le pays, restait attaché au socialisme et à l'Internationalisme." La trahison des partis ouvriers n'est pas un événement anecdotique et doit

trouver un écho auprès de la classe ouvrière du XXIe siècle. Alors que la gauche de la bourgeoisie ne rate jamais une occasion de se réclamer de l'héritage politique du mouvement ouvrier, il est important de souligner que 1914 marque la chute irréversible de la social-démocratie dans le camp de la bourgeoisie. Autrement dit, en reniant l'internationalisme, ces organisations ont arrêté de servir les intérêts de la classe ouvrière. Cette trahison est largement passée sous silence par la bourgeoisie.

Pour autant, des membres de la social-démocratie sont restés dans le camp du prolétariat. En France, c'est le cas de Jean Jaurès qui paya de sa vie la défense de la cause ouvrière et son refus de la guerre. Même si la position de ce dernier restait ambiguë, il garda en lui la force morale pour ne pas trahir sa classe et dénonça âprement le malheur que laissait présager le conflit approchant. Seulement, à la guerre, Jaurès n'opposa que la paix. Des positions plus claires et plus lucides se faisaient entendre en Allemagne et en Russie au même moment : Rosa Luxembourg, Lénine et Martov opposaient à la guerre, non pas la paix, mais la révolution prolétarienne. Ces militants révolutionnaires ont été capables d'analyser avec clarté la situation historique et ainsi ont pu démontrer que l'humanité n'avait rien à gagner dans ce conflit généralisé. Mais si une personne illustre l'opposition à la guerre, c'est bel et bien Karl Liebknecht. Paul Frölich s'arrête sur l'action courageuse de ce dernier qui n'eut de cesse de dénoncer les horreurs de la guerre au parlement et dans la rue. Mobilisé en 1915, il mena le cortège lors de la manifestation des travailleurs berlinois le 1er mai 1916 et cria "A bas le gouvernement ! A bas la guerre !" avant d'être arrêté sur la Potsdamer Platz. Outre cet acte symbolique, Liebknecht porte en lui l'ardeur révolutionnaire, l'intransigeance face à l'opportunisme et au réformisme et la confiance dans le rôle historique de la classe ouvrière. Fusionnent en la personne de Liebknecht l'opposition à la guerre et la lutte révolutionnaire. Résonne dans l'attitude de ce révolutionnaire l'impératif moral qui l'appelait à s'indigner haut et fort face à la barbarie guerrière.

De fait, pour la bourgeoisie, le cas Liebknecht est irrécupérable. Contrairement à ce qu'elle veut nous faire croire, ce ne sont pas les réformistes qui se sont réellement opposés à la guerre mais bel et bien les militants révolutionnaires qui, comme l'ensemble de la classe ouvrière, portaient en eux l'espoir de l'avènement d'une société sans classe, sans exploitation, sans guerre.

La souffrance du prolétariat

Paul Frölich ne se contente pas d'analyser, de tirer les leçons d'un événement historique de grande ampleur dans la pure tradition marxiste. Ce dernier dénonce la barbarie de la guerre impérialiste, s'indigne face aux souffrances endurées par le prolétariat et accuse le cynisme de la bourgeoisie.

Durant les quatre années de guerre, la bourgeoisie a dû s'adapter aux nécessités d'un conflit impérialiste généralisé. Ainsi, la production d'armement et d'autres marchandises destinées aux secteurs militaires est devenue le cœur de l'activité économique. En Allemagne et chez les autres grandes puissances impérialistes, l'économie fut réorganisée en une "énorme usine de munitions", c'est-à-dire en une économie de guerre.

Frölich montre que les profits réalisés par la bourgeoisie allemande au sein de cette économie de guerre étaient basés "sur du vent". Ce mécanisme alliant État et grand capital montre toute l’irrationalité du militarisme dans la décadence du capitalisme : "Maintenant, il nous est possible de comprendre comment l'argent, le sang du grand corps capitaliste, circulait. Le Reich payait des prix élevés au moyen de papier-monnaie. Les prix élevés rapportaient des bénéfices élevés. Ils permettaient au capitaliste d'acheter des titres d'emprunt grâce aux bénéfices réalisés en papier-monnaie, et ainsi le Reich récupérait le papier-monnaie en retour, il pouvait de nouveau payer le capitaliste, faire des bénéfices, acheter des emprunts de guerre, etc. Le schéma est ici quelque peu simplifié, le procès général était bien plus complexe en réalité. En tout cas, il en tenait essentiellement ainsi, à une chose près ! A en juger par ce qu'on peut voir maintenant, les capitalistes se sont donc financés eux-mêmes et, ce faisant, ont financé la guerre. Avec quoi ? Avec du vent ! Et à cette occasion, ils ont ajouté à leur fortune les emprunts de guerre qui leur ont rapporté de jolis intérêts."

Le financement de la guerre reposait donc sur un cercle vicieux ne créant aucune richesse mais cela ne modifiait en rien la source du profit capitaliste : l'exploitation du prolétariat. Et dans une économie où la majeure partie de la production est destinée à être détruite, l'exploitation du prolétariat est accrue : "Les capitalistes ont en effet accru leur capital. Comment s'accomplit, en temps normal, cette accumulation de capital ? Le travailleur produit des marchandises, de la valeur ; plus de valeur que ce qu'il reçoit pour son travail. Il est exploité. L'employeur transforme, du moins en partie, la plus-value en capital. Pendant la guerre aussi, il ne tire des profits que du travail. Il fallait donc extorquer encore davantage des masses qui restaient employées, étant donné qu'une grande partie des produits étaient conçus pour être détruits tout en détruisant, qu'il fallait nourrir une gigantesque armée qui détruisait mais qui ne produisait rien, et que la promesse de très gros bénéfices pour les capitalistes était nécessaire afin que le Reich puisse sans cesse récupérer l'argent qu'il devait dépenser. Et ce fut bien évidemment le cas."

Ainsi, les conditions de vie du prolétariat allemand se dégradèrent considérablement. Les ouvriers mobilisés au front subissaient de plein fouet les horreurs de la guerre et ceux restés à l'arrière devaient résister aux réquisitions, à la cherté de la vie et à l'écart entre les prix et les salaires. Voilà comment Frölich décrit l'état déplorable du prolétariat allemand : "Les femmes se ruinaient la santé. Elles mangeaient moins. Elles mangeaient du pain fait de son, de pommes de terre et de navets (la falsification du pain était devenue un acte patriotique !) ; elles mangeaient de la graisse synthétique, du miel artificiel, des betteraves, de l'herbe, de la saleté. Leurs corps se desséchaient. Les enfants mouraient avant même d'avoir atteint la fleur de l'âge. Toute la classe ouvrière tombait malade. La grippe emportait des centaines de milliers de personnes (...) On assistait à une dégénérescence du peuple tout entier. De terribles épidémies faisaient des ravages. Au cours de la guerre, parmi la population allemande civile, on a compté 900 000 morts de plus qu'en temps normal : c'était dû à la famine." Dans tous les pays en guerre, la classe ouvrière a dû subir les mêmes conditions d'existence.

Le marxisme comme arme théorique face à l'idéologie bourgeoise

Un siècle après cette guerre, le climat de chaos s'est amplifié et généralisé à la planète toute entière. Ayant perdu tout rôle historique, la bourgeoisie est incapable de constater et d'expliquer cette descente dans la barbarie. Le marxisme a offert à la classe ouvrière les moyens de s'émanciper de l'idéologie bourgeoise en forgeant la vision dialectique de l'histoire. Cette méthode d'analyse a permis à Friedrich Engels en 1887 d'anticiper la Première Guerre mondiale : "Et enfin, il n'y a plus pour la Prusse-Allemagne, d'autre guerre possible qu'une guerre mondiale, et, à la vérité, une guerre mondiale d'une ampleur et d'une violence encore jamais vues. Huit millions de soldats s'entr'égorgeront ; ce faisant, ils dévoreront toute l'Europe comme jamais ne le fit encore une nuée de sauterelles. Les dévastations de la guerre de Trente ans, condensées en trois ou quatre années et répandues sur tout le continent ; la famine, les épidémies, la férocité générale, tant des armées que des masses populaires, provoquée par l'âpreté du besoin, la confusion désespérée dans le mécanisme artificiel qui régit notre commerce, notre industrie et notre crédit, finissant dans la banqueroute générale. L'effondrement des vieux États et de leur sagesse politique routinière est tel que les couronnes rouleront par douzaines sur le pavé et qu'il ne se trouvera personne pour les ramasser ; l'impossibilité absolue de prévoir comment tout cela finira et qui sortira vainqueur de la lutte ; un seul résultat est absolument certain : l'épuisement général et la création des conditions nécessaires à la victoire finale de la classe ouvrière... La guerre va peut-être nous rejeter momentanément à l'arrière-plan, elle pourra nous enlever maintes positions déjà conquises. Mais si vous déchainez des forces que vous ne pourrez plus maitriser ensuite, quelque tour que prennent les choses, à la fin de la tragédie, vous ne serez plus qu'une ruine et la victoire du prolétariat sera déjà acquise, ou, quand même, inévitable."

Ce passage prophétique n'est pas dû au génie d'un homme mais bel et bien à la mise en pratique de la méthode marxiste afin d'éclairer la classe ouvrière, pour lui faire comprendre le monde chaotique qu'allait générer l'entrée du capitalisme| dans sa période de décadence. Aujourd'hui comme hier, la réflexion et l’effort d’approfondissement théorique, la dénonciation des mystifications et de l'idéologie bourgeoise font partie ´des tâches des révolutionnaires afin d'éviter au prolétariat de tomber dans les pièges tendus par la classe dominante. Quand la bourgeoisie nie sa totale responsabilité dans le déchaînement de violence qu'a subi l'Europe entre 1914 et 1918, il est de notre devoir de rétablir la vérité, de dénoncer la barbarie engendrée et de donner des cadres d'analyse permettant au prolétariat de se forger une vision claire de la

période qui s'ouvre à partir de 1914. C'est en partie en élaborant une juste analyse du passé que le prolétariat pourra rehausser son niveau de conscience et identifier son véritable bourreau : le capitalisme. Alors, la bourgeoisie pourra trembler devant la détermination du prolétariat à briser ses propres chaînes.

Jodorowsky

 

Personnages: 

  • Paul Frölich [2]

Evènements historiques: 

  • Première guerre mondiale [3]

Rubrique: 

Histoire du mouvement ouvrier

Une dénonciation des dégâts du capitalisme sur la santé des travailleurs (courrier de lecteurs)

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Nous publions ci-dessous une contribution signée par « Des camarades algériens (Lecteurs de RI) ». En partant d'un sujet tel que les problèmes de santé, les camarades posent un regard historique et critique qui amène de façon militante à la remise en cause du système capitaliste : « Les maladies ne sont pas des calamités de la nature mais des catastrophes sociales liées au mode de production capitaliste ». Nous partageons l'indignation des camarades, saluons leur volonté de faire appel à la réflexion, à la conscience révolutionnaire des ouvriers et encourageons à poursuivre ce travail précieux. Cependant, en dehors de critiques plus secondaires[1], notre principale critique porte sur la forme anaphorique de leur appel adressé dans cette contribution aux « prolétaires algériens ». Ce que décrivent les camarades dépasse en réalité le cadre de la situation en Algérie. Mais surtout, au-delà même, l'interpellation du prolétariat d'une nation, l'Algérie, ne nous semble pas la meilleure façon de procéder pour défendre au mieux l'unité internationale du combat et partir du mouvement comme un tout. Ceci tend à atténuer le réel souffle internationaliste de la contribution. Nous préférons donc conclure en soulignant davantage la formule sans ambiguïté de la fin du texte : « cette transformation communiste de la société ne peut se faire sans une révolution qui va permettre le renversement du capitalisme au niveau mondial ».

Courrier des lecteurs

Algérie : La santé des prolétaires algériens

Selon l’OMS[2] « La santé est un état de complet bien-être physique [4], mental [5] et social [6], et ne consiste pas seulement en une absence de maladie [7] ou d'infirmité. »

Qu’en est-il de la santé des prolétaires algériens ?

Pour Hérodote[3], les Berbères[4] étaient une « race d’Hommes au corps saint, agile, résistant à la fatigue ; la plupart succombent à la vieillesse, sauf ceux qui périssent par le fer ou par les bêtes, car il est rare que la maladie les emporte »[5].

On voit bien, d’après Hérodote, que les berbères vivaient longtemps et mouraient de vieillesse et rarement de maladie. Quel est l’état de santé des prolétaires algériens aujourd’hui ?

Il ne s’agit pas de voir comment le système actuel de santé répond aux attentes des citoyens car nous savons, et nous allons le voir plus bas, qu’aujourd’hui, et cela est valable dans tous les pays capitalistes de ce monde, que la médecine ne peut rien face à ces maladies dites dégénératives.

Engagée dans un processus de développement dont l’ouverture à l’investissement étranger est le processus le plus visible, l’Algérie a pris certaines options sur les plans économique et social, ce qui a impliqué des mutations dans la structure sociale du pays et le chamboulement des habitudes et des comportements alimentaires. Bien entendu aux aspects que nous venons de citer, nous pouvons rallonger la liste de toutes les modifications et les chambardements vécus par la société algérienne.

Si ces mutations ont augmenté le niveau de vie des algériens, il en résulte des conséquences pour la santé de la population. La situation sanitaire mérite un examen attentif car si l’espérance de vie à la naissance s’améliore, l’état de santé se dégrade jour après jour.

La population algérienne est estimée, en 2012, à un peu plus de 38 millions d’habitants. Environ 60% de la population vit en milieu urbain. Mais aujourd’hui, il n’y a aucune différence entre la vie à la campagne et celle dans les villes ; les habitudes et les comportements alimentaires sont identiques ; on trouve dans pratiquement chaque maison au minimum un véhicule ce qui implique que les gens marchent peu et se déplacent en voiture.

Depuis le début des années 2000, les taux de prévalences des maladies chroniques sont en pleine hausse en Algérie. L’hypertension artérielle, les maladies cardiovasculaires, le diabète sucré, les affections respiratoires chroniques (asthme, bronchite chronique…), les maladies digestives (ulcères digestifs, lithiase biliaire, colopathies), l’insuffisance rénale chronique, les cancers, les maladies mentales, la maladie de Crohn (maladies inflammatoires chroniques de l’intestin), demeurent les plus grandes menaces pour l'état de santé des algériens, s'ensuivent la morbidité liée à l’environnement social comme : les suicides, les accidents de la route et du travail.

On recense en Algérie près de 20 millions de malades chroniques dont 9 millions d’hypertendus soit un quart de la population et que 44,5 % des décès sont dus aux maladies cardiaques.

Le nombre des diabétiques est passé de un million de personnes en 1993, à plus de 2,5 millions personnes en 2007. En 2011, Le diabète touche 5,1 millions de personnes selon le ministère de la Santé et 7,1 millions selon la fédération des associations des diabétiques, dont 80 000 enfants. Le taux d’atteinte est de 1% chez les familles démunies et 3,5% chez les familles aisées.

Le président du réseau des associations des maladies chroniques a également estimé que plus de 5 millions de la population serait atteinte d’une hépatite.

Concernant le cancer, selon une conclusion du cabinet de consulting et de recherche l’OBG[6], les résultats sont alarmants. OBG a révélé que le taux de prévalence[7] du cancer est passé de 80 cas pour 100 000 personnes dans les années 1990 à 120 cas en 2008. Il devrait atteindre 300 cas pour 100 000 personnes au cours des dix prochaines années et enregistrer un taux comparable à ceux que l’on retrouve aux Etats-Unis (400 cas par 100 000), au Canada et en France (300 cas pour 100 000). En moyenne 40.000 nouveaux cas de cancer sont recensés annuellement. Il faut rappeler que les essais nucléaires effectués par la France[8] à Reggane[9] sont en partie responsable de certains cancers notamment le cancer du sein chez les jeunes femmes.

Le pays compte en parallèle 2,5 millions d’asthmatiques et 5 millions de personnes souffrant de rhinite allergique. L’asthme est la première maladie chronique de l’enfant. La prévalence de cette pathologie serait de 10 à 15% dans les pays développés et de 5 à 10% au Maghreb.

En 2007, l’Algérie compte près de 100 000 personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, selon la société algérienne de neurologie, et près de 300 000 Algériens sont épileptiques.

Prolétaires algériens,

Ces chiffres démontrent à eux seuls, l’absence de prévention et de solutions efficaces afin d’inverser la tendance. Les victimes de ces maladies sont toujours les mêmes ; c’est les salariés : « Ces pensionnaires de l'asile, victimes des harengs infects ou du tord-boyaux frelaté, qui sont-ils ? Un employé de commerce, un ouvrier du bâtiment, un tourneur, un mécanicien : des ouvriers, des ouvriers, rien que des ouvriers. Et qui sont ces êtres sans nom que la police n'a pu identifier ? Des ouvriers, rien que des ouvriers ou des hommes qui l'étaient, hier encore. »[10]

Les maladies ne sont pas des calamités de la nature mais des catastrophes sociales liées au mode de production capitaliste qui induit des comportements et des habitudes alimentaires et autres. Pour se rendre compte de cette évidence, il suffit de regarder les statistiques : plus un pays est développé et plus le nombre de malades chroniques est élevé. Ou encore, il suffit de regarder les statistiques algériennes et vous verrez que le pourcentage de cancéreux algériens vivant en France ou au canada est plus élevé que ceux vivant en Algérie.

Le mode de vie (alimentation…), les facteurs environnementaux constituent des facteurs de risques importants des maladies non transmissibles. Selon l’OMS, il existe des facteurs déterminants qui influencent l’état de santé d'une population [8], on trouve :

- Le mode de vie comme l'activité physique, l'alimentation, le travail, les problèmes de toxicomanies. Les rythmes, les cadences de travail ; les gestes inadaptés sont des facteurs très importants sur la santé. Ils entraînent des troubles psychosomatiques et parfois des handicaps pour la vie.

- L’environnement qui est un déterminant majeur de la santé. La pollution [9] qu'elle soit biologique, chimique, due aux radiations ionisantes[11], aux nuisances  sonores ou lumineuses, est une source importante de maladies.

Cette hausse des maladies chroniques ou, comme on les surnomme, les maladies dégénératives, est due à ces facteurs de risque, cités plus haut, qui engendrent la détérioration des mécanismes d’autoréparation de l’organisme. Les grandes villes (Alger, Constantine, Oran, Annaba…) et les villes disposant d’industries polluantes constituent des zones à risque pour le développement de ces maladies. Il est à noter que l’on retrouve ces maladies dans les milieux ruraux avec les mêmes proportions que les villes.

Les maladies sont donc, et même l’OMS qui est une organisation bourgeoise l’admet, déterminées par le mode et les conditions de vie (la cadence de travail, l’alimentation, le stress, l’air que l’on respire,..) qui sont eux même déterminés par les exigences de la production. Ce qui nous pousse à dire que chaque mode de production, et donc chaque forme sociale qu’il engendre, a ses propres maladies.

Les maladies comme (le diabète, le stress, l’hypertension, etc.) sont des facteurs de risque de la maladie d’Alzheimer. En effet, l’Alzheimer apparaitrait suite à l’effet combiné de ces maladies, qui en franchissant un certain seuil, empêchent les mécanismes de réparation et d’auto-guérison du cerveau de fonctionner normalement.

Le capitalisme est responsable de toute ces maladies, c’est lui qui pollue, qui nous nourrit, qui augmente la cadence du travail et qui nous stresse : « Messieurs les Conseillers médicaux peuvent toujours rechercher au microscope le germe mortel dans les intestins des intoxiqués et isoler leurs " cultures pures " : le véritable bacille, celui qui a causé la mort des pensionnaires de l'asile berlinois, c'est l'ordre social capitaliste à l'état pur. »[12]

Nous vivons dans une société (mondiale) où tous les comportements et les marchandises tel que : la malbouffe, les logements pleins de produits toxiques (il suffit de penser à l’amiante), la pollution (l’air devient de plus en plus toxique), le dérèglement climatique…, sont déterminés par les nécessités de la production capitaliste. Une société stressée, un stress qui est généré par le travail salarié et une exploitation de plus en plus féroce des travailleurs.

Même la bourgeoisie est consciente de ce danger mais elle reste impuissante et elle essaye juste de limiter les dégâts. Elle ne peut pas faire de la prévention car faire de la prévention c’est se projeter dans le futur, or la société capitaliste est une société immédiatiste c'est-à-dire qu’elle n’a pas de programme et ne peut donc dominer son futur : « Dans la société bourgeoise, le passé domine donc le présent »[13]. Si le présent est dominé par le passé alors le futur est dominé par le présent.

La société bourgeoise agit en fonction des événements, elle n’est plus maîtresse de sa destinée, ce sont les lois du capitalisme qui dictent la voie à prendre. Vous allez nous dire que le capitalisme n’est pas une personne, certes, mais « Le capital n'est donc pas une puissance personnelle; c'est une puissance sociale »[14].

Alors qu’un disciple disait à Jésus : « Maître je te suivrai partout où tu iras, permets-moi d’aller d’abord enterrer mon père » et Jésus de lui répondre : « Suis-moi et laisse les morts enterrer leurs morts ». Cela veut dire beaucoup de choses. Ça veut dire qu’une société qui n’a pas de perspectives, qui ne peut se projeter dans le futur est une société morte. A l’époque, Jésus représentait la préfiguration de la société future et la société d’alors, qui représentait le présent, était déjà mourante.

De plus, pour la bourgeoisie l’homme n’est qu’une machine, elle a un mépris envers les prolétaires et la nature, cette idée est exprimée par Hobbes : « qu’est ce que le cœur, sinon un ressort, les nerfs, sinon autant de cordons, les articulations, sinon autant de roues ? »[15]. On voit bien le mépris qu’a Hobbes de l’homme. Ce Hobbes qui nous disait que l’homme est un loup pour l’homme.

Partant de cette idée, que l’homme est une machine, et en absence de toute perspective et de toute prévention, la médecine se contente de réparer les malades pour les exploiter par la suite. Tout comme le mécanicien qui répare les voitures en changeant des pièces pour qu’elle soit réutilisable par son propriétaire ; la médecine est réduite à la seule tâche de la maintenance pour que les travailleurs puissent être exploités à nouveau par leur propriétaire (patron).

Cela ne veut pas dire que la médecine n’est pas capable de faire de la prévention mais qu’elle ne peut pas car ce sont les exigences du capital qui déterminent le cheminement à suivre. Le développement de l'industrialisation est le seul facteur qui explique le développement de la santé publique : d'une part pour de simples critères de productivité des ouvriers, d'autre part par la pression des travailleurs.

Ceci prouve autre chose, que la science dans une société divisée en classes sociales est une science de la classe dominante (dans le sens qu’elle est orientée au service des intérêts de la classe qui domine). C’est ce que rappelle, à juste titre, Rosa Luxembourg en réponse au révisionnisme de Bernstein [10] : « Cette doctrine composée des fragments de tous les systèmes possibles sans distinction semble au premier abord complètement libre de préjugés. En effet, Bernstein ne veut pas entendre parler d’une " science de parti " ou, plus précisément, d’une science de classe, pas plus que d’un libéralisme de classe ou d’une morale de classe. Il croit représenter une science abstraite universelle, humaine, un libéralisme abstrait, une morale abstraite. Mais la société véritable se compose de classes ayant des intérêts, des aspirations, des conceptions diamétralement opposées, et une science humaine universelle dans le domaine social, un libéralisme abstrait, une morale abstraite sont pour le moment du ressort de la fantaisie et de la pure utopie. Ce que Bernstein prend pour sa science, sa démocratie, sa morale universelle tellement humaine, c’est tout simplement celles de la classe dominante, c’est-à-dire la science, la démocratie, la morale bourgeoises. »[16]

Prolétaires algériens,

Devant ce malheur qui nous tombe dessus, on va entendre deux voix qui vont essayer de nous consoler, elles vont nous apparaître différentes et opposées mais elles sont, en réalité, les deux faces d’une même médaille.

La première, c’est la voix des amis(es) du peuples, des opportunistes expérimentés, celle des bobos-gauchistes, les champions de l’individualisme tels que : Les trotskistes, maoïstes, staliniens, anarchistes, libertaires, écolos, ou autre Front de gauche. Cette voix nous dira : mangez bio est consommez moins et si on ne fait pas ça, elle nous taxerait de cons. Leur raisonnement absurde les a poussés à lancer un mot d’ordre réactionnaire et petit bourgeois : « Solution locale pour un désordre global», en gros : on s’occupe de notre petite vie et notre propre gueule et au diable le reste de l’humanité.

La deuxième, c’est celle du grand capital qui nous dira : ne vous inquiétez pas, faites confiance à la science, elle trouvera les solutions. Mais nous avons vu avec Rosa Luxembourg, qu’il n’y a pas de science universelle, que la science est une science au service des intérêts de classe dominante, et qu’elle répond aux impératifs de la production et à la logique du profit, en gros elle est au service du capital.

Cette deuxième voix va encore essayer de nous tromper en nous faisant miroiter que, grâce au progrès de la science et du capitalisme, la durée de vie des Algériens est passée de 50 ans en 1962 à presque 73 ans en 2010.

Pour répondre à ce mensonge longtemps véhiculé par la bourgeoisie, on aimerait laisser parler un chrétien qui a su déchiffrer les textes bibliques, au lieu de les prendre à la lettre comme le fait le religieux ordinaire ou les rejeter comme le fait le libre-penseur bourgeois ordinaire, voici ce qu’il dit :

« Il est encore une chose communément admise dans cette fin des siècles, c’est cet immense mensonge de plus de la part des scientifiques qui affirment avoir augmenté la durée de vie de l’homme de plus de trente ans ! De quarante ans, disent-ils, qui était sa durée de vie autrefois, nous l’avons portée à soixante-quinze ans aujourd’hui ! A la suite de quoi, vous dites : les scientifiques sont des dieux ayant le pouvoir de rallonger la vie des créatures ! Soutenons-les dans leurs recherches qui aboutiront à la vie éternelle.

Leur affirmation est une vanité et une confusion de plus car, dans les temps antiques, la durée de vie des hommes était égale à celle d’aujourd’hui. Moïse en témoigne dans le quatre-vingt-dixième psaume, lorsqu’il prie le Père de tourner ses regards sur eux. Il dit :

Tous nos jours disparaissent par ton courroux ;

Nous voyons nos années s’évanouir comme un son.

Les jours de nos années s’élèvent à soixante-dix ans,

Et, pour les plus robustes, à quatre-vingts ans ;

Et l’orgueil qu’ils en tirent n’est que peine et misère,

Car il passe vite, et nous nous envolons.

Puisque Moïse mentionne clairement que la durée de vie des hommes était autrefois de soixante-quinze ans en moyenne, et non de quarante ans, comment alors les scientifiques de ce jour osent-ils prétendre l’avoir portée à soixante-quinze ans ? Encore un peu, et ils affirmeraient sur les toits que les êtres sont les ouvrages de leurs mains !

Sachez également qu’avant Moïse les hommes déterminaient leur âge en années lunaires. A chaque nouvelle lune, ils ajoutaient une année au nombre de leurs années. Il suffit alors de diviser, disons, par treize (les treize mois lunaires) pour comprendre qu’Adam qui vécut neuf cent trente ans selon l’Écriture, vécut un peu plus de soixante et onze de nos années actuelles. Seth vécut neuf cent douze ans, soit : soixante-dix ans. Enosch vécut neuf cent cinq ans, soit : soixante-neuf ans et six mois. Et ainsi de suite pour tous les âges donnés en années lunaires. »[17]

On voit bien que non seulement le capitalisme n’a rien apporté à l’humanité en terme d’espérance de vie mais au-delà de ce mensonge que nous voyons s’effriter devant nos yeux, nous sommes en droit d’affirmer que ce système prive même ceux qui pourraient être en bonne santé de la possibilité de l’être, et les fins de vies arrivées comme l’aboutissement de la vitalité humaine et du passage de la vie vers la mort devient un exercice d’horreur et de souffrance et pour les mourants et pour leurs familles.

La citation qui va suivre est peut-être longue pour le lecteur, mais on n’a pas pu résister au désir de la citer en entier car elle nous parait résumer et projeter une lumière fulgurante sur l’état du monde dont lequel le capitalisme l’a mis « Oui, il se peut que vous y parveniez si les mensonges et les calamités du monde qui en sont les conséquences ne vous échappent pas :

Les intelligents règnent certes, mais les nations brûlent !

Les hommes s’entassent comme des sauterelles dans les villes et se corrompent ;

La violence progresse ;

Les pays se couvrent d’armes diaboliques et de militaires avides de sang ;

Les menaces s’accroissent, les guerres se multiplient ;

Les villes rongent les parties voisines en se développant comme des tumeurs ;

Des sites sont défigurés, d’autres contaminés ou interdits ;

Et la campagne effraie désormais.

La servitude s’intensifie ;

Les faibles sont méprisés, opprimés ou rejetés ;

Les pauvres sont délaissés, et les enfants manipulés ;

Les vieillards sont abandonnés ;

Des peuples entiers souffrent de famine.

Les espèces sont dénaturées par ceux qui ne font aucun cas de la création ;

Tout ce qui est naturel disparaît ou devient abominable aux yeux de tous.

La mer est pillée ;

La surface de la Terre est souillée et meurtrie, ses entrailles sont bouleversées ;

Les forêts disparaissent ;

Les cours d’eau se putréfient ;

L’eau potable diminue ;

Les machines de fer jettent les hommes et le bétail par-dessus bord, quand elles ne Les écrasent et les tuent ;

Les maladies prolifèrent, s’aggravent et augmentent leur étendue ;

Les espèces animales se raréfient, beaucoup ne sont plus que des souvenirs ;

L’ordre de la nature est gravement ébranlé.

Les valeurs de l’existence sont foulées au pied ;

La foi et l’espérance se sont envolées ;

La sagesse et le bon sens n’existent plus ;

Les jeunes gens se désespèrent, un grand nombre se donne la mort.

Et vous ne seriez pas en mesure de remettre en cause vos propres convictions ?

Ô ! Homme, où est ta gloire ? »[18].

Malgré son appartenance à la religion chrétienne, il n’en demeure pas moins que les faits et la description qu’il donne de notre monde colle comme un masque sur la réalité. C’est pour cette raison que nous sommes passés outre sa doctrine. La conclusion de cette citation envoie l’homme à un retour vers la gloire à travers la foi, mais vous le savez comme nous, chers prolétaires, que c’est ici bas, sur terre, que réside le combat de l’homme.

Prolétaires algériens,

Face à ce mensonge exprimé par les voix précédentes, il existe une autre voix, c’est la voix de la Gauche communiste, la voix du marxisme authentique, celle du marxisme révolutionnaire. La gauche communiste est anti-réformiste, antirévisionniste, antistalinienne et anti-trotskiste. Cette voix nous dit ceci : « Solution globale (qui est le communisme) contre le désordre global (qui est le capitalisme) ».

Dans la société communiste, « c'est le présent qui domine le passé. »[19] Et donc le futur va dominer le présent. La production sera orientée en fonction des besoins de l’humanité et non en fonction des besoins du capital et elle sera respectueuse de la nature et donc de l’homme : « Cependant, ne nous flattons pas trop de nos victoires sur la nature. Elle se venge sur nous de chacune d'elles. Chaque victoire a certes en premier lieu les conséquences que nous avons escomptées, mais en second et en troisième lieu, elle a des effets tout différents, imprévus, qui ne détruisent que trop souvent ces premières conséquences. Les gens qui, en Mésopotamie, en Grèce, en Asie mineure et autres lieux essartaient les forêts pour gagner de la terre arable, étaient loin de s'attendre à jeter par là les bases de l'actuelle désolation de ces pays, en détruisant avec les forêts les centres d'accumulation et de conservation de l'humidité. Les Italiens qui, sur le versant sud des Alpes, saccageaient les forêts de sapins, conservées avec tant de soins sur le versant nord, n'avaient pas idée qu'ils sapaient par là l'élevage de haute montagne sur leur territoire; ils soupçonnaient moins encore que, ce faisant, ils privaient d'eau leurs sources de montagne pendant la plus grande partie de l'année et que celles ci, à la saison des pluies, allaient déverser sur la plaine des torrents d'autant plus furieux. Ceux qui répandirent la pomme de terre en Europe ne savaient pas qu'avec les tubercules farineux ils répandaient aussi la scrofule. Et ainsi les faits nous rappellent à chaque pas que nous ne régnons nullement sur la nature comme un conquérant règne sur un peuple étranger, comme quelqu'un qui serait en dehors de la nature, mais que nous lui appartenons avec notre chair, notre sang, notre cerveau, que nous sommes dans son sein, et que toute notre domination sur elle réside dans l'avantage que nous avons sur l'ensemble des autres créatures, de connaître ses lois et de pouvoir nous en servir judicieusement.»[20]

Les vêtements et les produits cosmétiques, par exemple, seront fabriqués en respectant les fonctions biologiques du corps comme la transpiration, de même pour la nourriture, les pesticides seront bannis. Le stress au travail sera éliminé car le travail ne sera plus une exigence du capital mais comme disait Marx « il sera le premier loisir de l’homme ». La diminution drastique du temps de travail permettra à chacun de consacrer du temps à la lecture et à d’autres loisirs tels que la pêche, la musique, le sport, les études, l’art,… Cela permettra la fin de la division sociale du travail qui était, à un moment de l’histoire, un moteur de développement mais qui, aujourd’hui, représente un frein pour l’humanité. Cela permettra aussi la fin de la spécialisation : il n y aura plus de maçon, de médecin, d’artiste, de prof… mais chacun d’entre nous pourra être tout ça à la fois. Dans la société communiste « la production sociale, dans laquelle production et répartition sont planifiées peut élever les hommes au dessus du reste du monde anima; au point de vue social de la même façon que la production en général les a élevés en tant qu'espèce. »[21]

Mais cette transformation communiste de la société ne peut se faire sans une révolution qui va permettre le renversement du capitalisme au niveau mondial.

La classe ouvrière, avec son parti politique de classe, est la seule classe capable de mener à bien la révolution communiste. La lutte révolutionnaire conduit nécessairement la classe ouvrière à une confrontation avec l’État capitaliste. Pour détruire le capitalisme, la classe ouvrière devra renverser tous les États et établir la dictature du prolétariat à l’échelle mondiale : le pouvoir international des conseils ouvriers, regroupant l’ensemble du prolétariat.

La transformation communiste de la société par les conseils ouvriers ne signifie ni «autogestion», ni «nationalisation» de l’économie. Le communisme nécessite l’abolition consciente par la classe ouvrière des rapports sociaux capitalistes : le travail salarié, la production de marchandises, les frontières nationales. Il exige la création d’une communauté mondiale dont toute l’activité est orientée vers la pleine satisfaction des besoins humains.

Le cancer est pour le corps ce que le capitalisme est pour la société.

Parce qu’en étant sortis de la nature, nous nous sommes dénaturés forcément.

Des camarades algériens (Lecteurs de RI[22])

 


[1]              Notamment l’idée sous-jacente qui traverse la contribution selon laquelle l’espérance de vie n’aurait en rien progressé depuis l’époque de Moise. Cette vision schématique nous parait totalement erronée, réductrice et meme caricaturale, paraissant rejeter en bloc les progres de la médecine, y compris dans le capitalisme qui sont précisément, surtout aux 19e et 20e siécles réels et vérifiables.

[2]              Organisation Mondiale de la Santé

[3]              Hérodote né vers 484 avant notre ère [11] à Halicarnasse [12] en Carie [13] (actuellement Bodrum [14] en Turquie [15]), mort vers 420 av. J.-C. [16] à Thourioi [17], est un historien [18] grec [19]. Dans son quatrième livre, Hérodote énumère tous les peuples qui, selon lui, vivaient en Afrique du Nord et dans le Sahara.

[4]              Les Berbères (Imazighen et au singulier Amazigh), sont un ensemble d'ethnies [20] autochtones d'Afrique du Nord [21]. Ils occupaient, à une certaine époque, un large territoire qui allait de l'ouest de la vallée du Nil [22] jusqu'à l'océan Atlantique [23], Les îles Canaries et l'ensemble du Sahara et y fondèrent de puissants royaumes, formés de tribus confédérées. Connus dans l'Antiquité [24] sous les noms de Libyens [25], Maures [26], Gétules [27], Garamantes [28] ou encore Numides [29]. . « Tout le pays qui s'étend depuis l'Egypte jusqu'au lac Tritonis est habité par des Libyens nomades […] Les peuples à l'occident du lac Tritonis ne sont point nomades. » Hérodote, IV, 186-187.

[5]              Kaddache (Mahfoud), L’Algérie des Algériens, de la préhistoire à 1954, page 20.

 

[6]              Oxford Business Group

[7]              En épidémiologie [30], la prévalence est une mesure de l'état de santé d'une population à un instant donné.

[8]              Dans les années 1960, l'armée française [31] réalisa les premiers essais nucléaires [32] au Centre Saharien d'Expérimentations Militaires (CSEM), situé dans la région de Reggane en Algérie

[9]              Reggane est une commune [33] de la wilaya d'Adrar [34], située au nord du désert [35] du Tanezrouft [36].

[10]             Rosa Luxemburg, Dans l'asile de nuit, 1er janvier 1912

[11]             Un rayonnement ionisant est un rayonnement [37] capable de déposer assez d'énergie dans la matière [38] qu'il traverse pour créer une ionisation [39]. Ces rayonnements ionisants, lorsqu'ils sont maîtrisés, ont beaucoup d'usages pratiques bénéfiques (domaines de la santé [40], industrie [41]…) Mais pour les organismes vivants, ils sont potentiellement nocifs à la longue et mortels en cas de dose élevée.

[12]       Rosa Luxemburg, Dans l'asile de nuit.

[13]             Marx/Engels Le Manifeste du parti communiste, 1848

[14]             Marx/Engels , Ibid.

[15]             Hobbes, Le Léviathan 

[16]             Rosa Luxembourg, Réforme sociale ou révolution, 2e partie, chapitre « L’effondrement [42] », 1898

[17]             Le Livre de Vie de l'Agneau, Depuis le 15 décembre 2000, la version originale de cet ouvrage se trouve sur le site : www.lelivredevie.com [43]

[18]             Ibid.

[19]             Marx/Engels, Manifeste du parti communiste.

[20]             Engels, « Le rôle du travail dans la transformation du singe en homme », in La dialectique de la nature 1876.

[21]             Engels, Ibid .

[22]             Révolution internationale (organe de presse du Courant Communiste International en France)

 

 

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