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ICCOnline - juin 2020

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150 ans de Lénine: naissance d’un tyran ou d’un combattant pour l’émancipation de l’humanité?

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Il y a 150 ans, le 22 avril 1870, naissait Vladimir Ilitch Oulianov, dit Lénine, qui allait jouer un rôle central dans le mouvement révolutionnaire prolétarien du début du XXe siècle.

Alors que la bourgeoisie a fait de lui le “père du totalitarisme”, les révolutionnaires d’aujourd’hui se doivent de mettre en évidence que toute sa vie fut consacrée à la lutte pour l’émancipation de la classe ouvrière et non à l’établissement sur celle-ci d’une des formes les plus barbares d’exploitation et d’oppression capitaliste comme l’a été le stalinisme. L’article ci-dessous, déjà paru dans notre presse, retrace la trajectoire de ce grand combattant de la classe ouvrière que fut Lénine.

– “Lénine : un combattant du prolétariat ; Staline : un agent du capitalisme [1]”, brochure Effondrement du Stalinisme.

Conscience et organisation: 

  • La Seconde Internationale [2]
  • Le mouvement de Zimmerwald [3]
  • Troisième Internationale [4]

Rubrique: 

Histoire du mouvement ouvrier

La Libye, foyer de la barbarie capitaliste

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La Libye est régulièrement sous le feu des médias depuis 2011, l’année de la liquidation par les puissances impérialistes de l’OTAN (France, Royaume-Uniet États-Unis) de Mouammar Kadhafi qui dirigea le pays d’une main de fer pendant quarante ans.

“Cette malheureuse Libye, que la guerre franco-britannique de 2011 a transformé en paradis pour les terroristes de Daech et d’Al-Qaïda, hérite donc aujourd’hui d’une guerre civile. Les trafiquants d’armes, de drogue ou de migrants y prolifèrent et entrent rarement en conflit avec les djihadistes. Normal, ils sont souvent cousins en affaires…”. (1))

Après le passage du “printemps arabe” en Libye qui vit une partie de la population se soulever contre le régime sanguinaire et corrompu de Kadhafi, les puissances occidentales (au nom de “la protection de la population civile” que l’ex-dictateur réprimait brutalement) déclaraient la guerre au dirigeant libyen. Après avoir écrasé la population sous les bombes et liquidé Kadhafi, elles laissaient le pays entre les mains de multiples groupes sanguinaires qui se disputent toujours le contrôle du moribond État libyen.

Aujourd’hui, parmi la dizaine de groupes et de milices qui écument le pays, les deux plus importantes factions en présence prétendent au statut d’interlocuteurs privilégiés auprès des grandes puissances et de l’ONU : il s’agit du “Gouvernement d’accord national” (GAN) siégeant à Tripoli et dirigé par Faïse Sarraj, et “l’Armée nationale libyenne” (ANL) dirigée par Khalifa Haftar qui gouverne la région cyrénaïque. Chacun de ces deux “petits” gangsters bénéficie d’un nombre de soutiens, de parrains impérialistes plus ou moins affichés.

“Au cœur de ce chaos de tribus et de cités États qu’est devenue la Libye, le Kremlin siège dans le même camp que les Émirats, l’Arabie Saoudite, l’Égypte et… la France, alors que l’Italie, le Qatar et surtout la Turquie portent à bout de bras le gouvernement de Fayez al-Sarraj. Un soutien multiforme puisque la Russie est allée jusqu’à imprimer des conteneurs entiers de dinars libyens pour le compte de son protégé, dont le rival contrôle la Banque centrale, en échange de cargaisons de pétrole. Dans cette guerre sans issue, où les drones de combats chinois et turcs à 2 millions de dollars pièce tirent sur des miliciens en tee-shirt, jeans et baskets, le Kremlin joue un jeu qui est tout sauf stabilisateur. Mais qui en dehors d’une Union africaine presque totalement marginalisée sur ce dossier, veut réellement voir la Libye renaître de ses cendres ?” (2)

Sur le papier, deux groupes s’affrontent formellement sur le sol libyen. Mais en réalité, le chacun pour soi domine.

Ce spectacle barbare dévoile l’attitude hypocrite et abjecte des grandes puissances en Libye qui jouent toutes un double jeu : “La résurgence du conflit en Libye a révélé de nombreuses manœuvres d’ingérence que certaines puissances, régionales ou mondiales, auraient préféré garder dans l’ombre”. (3) À l’instar du gouvernement français pris en flagrant délit de mensonge quand il a tenté de nier l’existence des missiles fournis par ses services secrets au maréchal Haftar tout en affirmant que “la France est en Libye pour combattre le terrorisme”.

Quant aux deux chefs de guerre libyens, leurs objectifs sont aussi crapuleux : “Ainsi dressés l’un face à l’autre, les deux camps n’oseront jamais avouer le véritable mobile de leur affrontement. Le recours emphatique à une rhétorique justificatrice à usage externe (‘révolution’ ou ‘antiterrorisme’) camoufle mal le caractère brut d’une rivalité autour de l’appropriation des ressources, laquelle prend un sens très particulier dans cet ancien eldorado pétrolier qu’est la Libye. En dépit des perturbations causées par le chaos post-2011, le pétrole libyen continue de générer 70 millions de dollars (62,5 millions d’euros) de revenus par jour. Aussi la maîtrise des circuits de distribution de cette rente pétrolière aiguise-t-elle bien des appétits”. (4)

Voilà un autre aspect du conflit dont personne ne parle dans les discours officiels des dirigeants du monde capitaliste ! Cette course au “butin” pétrolier, ouverte par le chaos engendré après 2011, oppose un grand nombre de petits et grands gangsters locaux et internationaux sur le sol libyen.

Les impérialismes turc et russe se disputent violemment le contrôle de la Libye “en amis”

Non contents des atrocités perpétrées en Syrie, la Russie et la Turquie débarquent en Libye avec armes et bagages dans le but affiché de déloger les puissances rivales mafieuses en présence :

“Alors que les combats ravagent la périphérie de Tripoli depuis 2019, la Russie et la Turquie sont ces nouveaux acteurs se rêvant parrains d’une future solution politique en Libye. Édifiante, une scène a illustré ce grand retournement géopolitique en Méditerranée orientale : celles de retrouvailles, le 8 janvier, à Istanbul, entre le président turc, Recep Tayyip Erdogan, et le chef du Kremlin, Vladimir Poutine. Ce jour-là les deux hommes ont ostensiblement affiché leur complicité au moment d’annoncer le lancement de TurkS-tream, un gazoduc reliant la Russie à la Turquie via la mer noire. Plus important, ils ont lancé un appel conjoint à un cessez-le feu en Libye ‘à compter 12 janvier’ et, signe de leur influence croisant sur un terrain où ils étaient jusque-là discrets, la trêve a été relativement respectée par leurs affidés locaux. Dans la bataille en cours autour de Tripoli, Moscou soutient le Maréchal dissident Khalifa Haftar, patron de l’Armée nationale libyenne (ANL), surtout enracinée en Cyrénaïque (Est). De son côté, Ankara appuie le gouvernement d’accord national (GAN) de Faïz Sarraj, basé à Tripoli et formellement reconnu par la communauté internationale.

Neuf mois après l’assaut déclenché par Haftar contre la capitale libyenne, Russes et Turcs ont ainsi démontré qu’ils étaient maîtres du tempo sur ce front, capables d’alterner à leur guise escalades et accalmies”. (5)

Comme le souligne la presse, dans la nouvelle situation libyenne, l’Europe et les États-Unis ne sont plus que des figurants tandis que l’OTAN est totalement paralysée par ses propres divisions. Les dirigeants russe et turc peuvent ainsi occuper le terrain librement et s’affronter militairement (certes par affidés interposés) comme pour exporter en Libye les atrocités sanglantes qu’ils ont déjà perpétrés en Syrie. Certes ces deux pays sont des puissances émergentes aux capacités limitées. (6)

Mais les deux États sont bien décidés à avaler le “gâteau libyen”. Ils ont ainsi pu dépêcher leurs mercenaires respectifs (2 000 “Wagner” russes et 3 000 combattants syriens, des brigades à la solde d’Erdogan) en vue de fermement soutenir leurs champions locaux du moment. Chacun de ces monstres tente, d’ailleurs, de “légitimer” son intervention, comme lorsque Erdogan ose affirmer : “Nous sommes sur ces terres où nos ancêtres ont marqué l’histoire, parce que nous y avions été invités pour résoudre l’injustice”. Mais la véritable motivation du dirigeant turc en Libye se trouve dans les perspectives de contrats “alléchants” : Erdogan espère, par exemple, faire valoir les 25 milliards de dollars de contrats signés sous le régime de Kadhafi et se sont envolés en 2011. La Turquie affiche ses ambitions impérialistes non seulement envers ses voisins proches (Syrie, Liban, Israël, Grèce) mais elle essaie aussi de s’implanter en Afrique et dans le Golfe Persique. De fait, la Libye constitue un “gros gibier” pour les ambitions impérialistes turques.

Cependant, Erdogan allume des feux et sème le trouble partout où il peut en sachant que la Turquie n’a pas les moyens de sa politique aventureuse ni au plan militaire (l’OTAN ne veut pas le suivre dans sa confrontation avec la Russie) ni sur le plan financier. (7)

Quant à la Russie il faut se rappeler que l’URSS fut le premier État à reconnaître le régime du colonel Kadhafi après le coup d’État militaire de ce dernier en 1969. Elle resta son principal fournisseur d’armes jusqu’à l’assassinat du “dictateur libyen” en 2011. Poutine a, d’ailleurs, fortement insisté sur le fait que Moscou a effacé, en novembre 2019, 4,6 milliards de dollars de la dette libyenne remontant à l’époque soviétique (en matériels militaires) et qu’il entend récupérer son “bien” les armes à la main, c’est-à-dire avec ses discrets mercenaires Selon Le Monde du 26 janvier 2020 : “En 2017 le maréchal Haftar a commencé un appui russe, principalement l’envoi de mercenaires liés au ‘groupe Wagner’ créé au début du conflit ukrainien, en 2014, et qui, depuis, a opéré en Syrie, au Soudan, en Centrafrique ou encore au Mozambique […]. Cette connexion avec Wagner présente l’avantage de pouvoir être nié. ‘S’il y a des citoyens russes là-bas, ils ne représentent pas les intérêts de l’État russe et ne reçoivent pas d’argent de l’État russe’, assurait ainsi Vladimir Poutine, le 11 janvier”.

Poutine est d’un cynisme hors norme, s’exprimant comme un ex-membre du sinistre KGB surdoué en matière de mensonge et de falsification de l’histoire.

La Libye va donc demeurer longtemps encore un grand champ de bataille des vautours capitalistes, petits ou grands, pour qui tous les moyens sont bons pour défendre leurs sordides intérêts quitte à foncer à peine masqué dans l’accomplissement de leurs crimes.

“Libye : petits meurtres entre amis”

“C’est un rapport de quatorze pages cosigné par un Ghasan Salamé [...]. Publié à la fin de janvier par la mission des Nations unies en Libye, cette autopsie d’un meurtre de masse commis il y a 6 mois à une vingtaine de kilomètres à l’ouest de Tripoli est de celle que l’on glisse aisément sous le tapis pour une raison simple : les victimes sont africaines, et le coupable a des relations si haut placées que l’enquête se contente de suggérer son identité, sans jamais la dévoiler. Nous sommes à Tadjourah, donc, bourgade de 50 000 habitants non loin de la frontière tunisienne, plus précisément au camp de détention de Daman. Gardé par une brigade de miliciens relevant du ministère de l’intérieur du Gouvernement de l’union nationale, de Fayez al-Sarraj, Daman est l’un des 34 centres d’enfermement du Nord-Ouest libyen où s’entassent quelque 10 000 migrants et réfugiés dont nul ne sait quoi faire. Le camp abrite un atelier de réparation de véhicules militaires et, distants d’une centaine de mètres, deux hangars aux toits de tôle où logent les détenus, femmes et hommes séparés. Ils sont 600 environ, africains dans leur grande majorité ; dont le rêve d’Europe s’est mué en un cauchemar quotidien fait de privations, d’humiliations et d’exactions.

La chaleur est étouffante en cette nuit du 2 au 3 juillet 2019, quand les habitants du camp entendent le bombardement d’un drone qui les survole à basse altitude. Les gardiens sont nerveux, les détenus inquiets. En mai, pareille apparition avait précédé le bref mitraillage de Daman par un petit appareil ennemi de l’armée nationale libyenne de Khalifa Haftar, le maréchal de Benghazi. On en avait été quitte pour quelques blessés et une belle frayeur. Mais à 23h30 cette nuit-là, c’est le hurlement du réacteur d’un chasseur bombardier qui précipite tout le monde au sol. Téléguidée avec précision, une bombe pulvérise l’atelier de réparation, vide d’occupants. Ce qui se passe alors, au cours des dix minutes qui suivent, est tragique. Paniqués, les migrants cherchent à fuir les hangars pour se mettre à l’abri hors du camp. Dirigés par un commandant surexcité, les miliciens de la brigade tirent en l’air à la kalachnikov pour les en empêcher. Puis dans le tas. Trois détenus s’effondrent, les autres refluent en désordre dans les entrepôts, où on les enferme. À 23h40, un second avion identique au premier lâche sur le hangar bondé des hommes une bombe de 300 kg qui transperce le toit et explose au sol, creusant un cratère de quatre mètres de large et profond de trois. C’est une boucherie. Les gardiens de Daman dénombrent à la va-vite au moins 57 corps déchiquetés, 96 disparus dont on ignore s’ils sont morts ou en fuite et 80 blessés graves. Tous anonymes. [...]

Dès le lendemain du carnage, le porte-parole de Khalifa Aftar revendique non sans forfanterie un raid des ‘forces aériennes de l’Armé nationale libyenne’ contre le camp de Daman, qualifié de ‘cible militaire’ dont les défenseurs utilisaient les migrants comme boucliers humains. L’annonce fait sourire les observateurs : chacun sait que la petite armée de l’air du maréchal ne possède ni les appareils ni les pilotes capables d’effectuer des pilonnages nocturnes avec des bombes à guidage laser/GPS. En revanche, relève avec une prudence toute diplomatique le rapport de l’ONU, ‘un État étranger’ parrain et allié du maréchal a positionné sur les bases de Jufra et d’Al-Khadim ‘un certain nombre d’avions’ tout à fait en mesure d’effectuer ce genre d’opération. Aux yeux des spécialistes, ces précautions sémantiques cachent un secret de polichinelle : l’État, ce sont les Emirats arabes unis du prince héritier Mohammed Ben Zayad (MBZ), et les avions, des Mirage 2000-9 vendus à Abou Dhabi par la France”. (8)

Autrement dit, c’est bien l’impérialisme français qui se cache derrière les auteurs de cet horrible massacre des migrants directement perpétré par les Émirats arabes unis , gros clients et alliés de Paris dans cette zone. La responsabilité criminelle de la France est tellement évidente que la presse bourgeoise parle ouvertement de crime de guerre impliquant le gouvernement français du fait qu’Abou Dhabi et Dassault Aviation ont signé un contrat de modernisation de la flotte des Mirage 2000-9 en novembre dernier, ce qui expose Paris à l’accusation de “complicité de crime de guerre, en vertu du traité sur le commerce des armes dont la France est signataire”. L’ONU n’est également pas étrangère à cet abominable carnage. Son rapport montre qu’elle connaît parfaitement l’identité des véritables assaillants des camps de réfugiés tout en se gardant bien de la dévoiler.

“Aux côtés des Émirats arabes unis, de l’Égypte et de l’Arabie Saoudite (les véritables alliés de l’ANL), la Russie a aujourd’hui pris la place de la France dans la liste des principaux protecteurs de Haftar, notamment au Conseil de sécurité de l’ONU. Mais en attendant la prise de Tripoli, l’appui français est toujours recherché par le clan de Benghazi”. (9) De fait, l’impérialisme français se trouve, en “bonne compagnie”, au cœur du sanglant chaos libyen. Mais sa responsabilité criminelle de la France ne s’arrête pas là : elle partage avec ses homologues européens la responsabilité de l’existence de monstrueux “camps d’accueil” pour migrants refoulés ou en escale en Libye dans l’attente d’un embarquement mortifère vers l’Europe.

La politique crapuleuse de l’Union européenne en Libye

En plus du chaos sanglant provoqué par les grandes puissances impérialistes, la Libye est devenue un véritable “marché” et un cimetière pour réfugiés dont l’Union européenne est directement responsable.

Le 14 novembre 2017, des images de marchés aux esclaves en Libye étaient diffusées par CNN où l’on pouvait voir des êtres humains vendus aux enchères comme du bétail. Il s’agit de migrants, dont le nombre varie entre 700 000 et 1 million, tombés dans le piège des réseaux et des trafiquants criminels avec la complicité active des États (européens et africains) : Selon un rapport publié par l’Unicef, “Les centres de détention dirigés par les milices ne sont rien d’autre que des camps de travail forcé, des prisons où l’on se fait tout voler sous la menace d’une arme. Pour des milliers de femmes et d’enfants, la vie dans ces prisons est faite de viols, de violences, d’exploitation sexuelle, de faim et d’abus répétés”.Tout cela illustre l’ampleur de la barbarie impliquant directement les puissances impérialistes qui par leur politique jettent les migrants dans les bras d’esclavagistes d’un autre âge.

L’Union européenne exige une “politique active” envers des États défaillants et terriblement corrompus (Niger, Nigéria, Libye, etc.) en les subventionnant pour construire des murs et des camps de mort. L’Union européenne encourage ainsi des pratiques mafieuses, des marchandages entre bandits en fournissant notamment les fonds et le matériel nécessaires aux gardes-côtes libyens qui se chargent d’intercepter les bateaux de migrants et de conduire ces derniers dans des “centres de rétention”. C’est une politique abominable et terriblement inhumaine que mènent les grandes démocraties européennes !

Le marché aux esclaves côtoie le marché aux soldats

“Ils sont Tchadiens ou Soudanais et s’achètent pour une bouchée de pain au ‘grand bazar des mercenaires au rabais’ […]. La marchandise humaine vient ainsi s’exposer de bonne heure sur les trottoirs défoncés (des dizaines d’Africains qui attendent en chaussons, les pieds aussi poussiéreux que leur vie, leur avenir aussi noir que leur peau), et ceux qui défilent en pick-up s’arrêtent quelques minutes, examinent les ouvriers en solde, passent commande : Aujourd’hui il faut quelqu’un pour pousser la brouette, un autre capable de crépir un immeuble à la chaux, et un pour décharger les camions. À moins qu’ils ne recherchent quelqu’un pour faire la guerre : prendre les armes dans les milices s’il est bon ; rester à l’arrière s’il ne sait rien faire d’autre. Certains acceptent, car au moins, à 300 euros par moi, nourris, logés, le boulot rapporte. D’autres déclinent l’offre, refusant de payer de leur vie”. (10)

En Libye les migrants sont plus que jamais dans la même situation de misère, de détresse, au milieu des périls qui les conduisent par milliers à la mort en tentant de traverser la Méditerranée, comme le montre ce récit :“Sur la plage d’Aghir de l’île de Djerba, dans le nord de la Tunisie, il y a plus de cadavres que de baigneurs, en ce début de mois. Lundi 1er juillet, un canot a coulé au large. Une embarcation partie à l’aube de la ville libyenne de Zouara, à 120 kilomètres à l’ouest de Tripoli, avec 86 personnes à bord. Trois ont été repêchés vivants. La mer rend les autres, une à une.‘Moi, j’en peux plus. Là, c’est trop.’ Chemsedddine Marzog, le pêcheur qui, depuis des années, offre une dernière demeure aux corps que la mer rejette, dit son ras-le-bol. ‘J’ai enterré près de 400 cadavres et, là, des dizaines vont encore arriver dans les jours qui viennent. Ce n’est pas possible, c’est inhumain et nous ne pouvons pas gérer ça tout seuls’, se désespère le gardien du cimetière des migrants de Zarzis, ville située au sud-est de la Tunisie, près de la frontière avec la Libye”. (11)

Pendant ce temps les “démocraties occidentales” ferment les yeux et se bouchent le nez sur cette cruelle barbarie et poursuivent leur lutte pour la “sécurisation” (fermeture) de leurs frontières contre les “illégaux” tout en chantant sur tous les toits leur “humanisme universaliste”.

Mais il n’y a pas que les pays de l’UE qui mènent une politique barbare envers les migrants, il y a aussi leur “grand ami/client” saoudien. En effet Ryad matraque, emprisonne, expulse les “indésirables” migrants se trouvant sur son territoire. “10 000 Éthiopiens sont expulsés chaque moi d’Arabie Saoudite depuis 2017, date à laquelle les autorités de ce pays ont intensifié leur campagne sans merci pour renvoyer les migrants sans papiers. Environ 300 000 personnes sont rentrées depuis mars de cette année-là, selon les derniers chiffres de l’Organisation internationale pour les migrants (OIM), et des vols spéciaux chargés de déportés arrivent chaque semaine à l’aéroport d’Addis-Abéba. […] Des centaines de milliers d’Ethiopiens ont été déportés lors d’une précédente vague de répression chaotique menée entre 2013 et 2014”. (12)

Voilà l’œuvre d’un froid criminel, grand acheteur et fournisseur des pays européens et de la France en particulier, qui se trouve dans le même camp que Paris en Libye pour semer la terreur. À dire vrai on a affaire ici à une bande de “grands” et de “petits princes” du Golfe, nouveaux richissimes capitalistes (grâce à l’or noir), assoiffés de pouvoir et de sang, en quête permanente d’influence impérialiste. C’est ainsi qu’on les voit à l’œuvre en première ligne en Libye, en Syrie, au Yémen, etc., dans les zones de massacres de masse. Les États sanguinaires

Compte tenu de l’importance du “gâteau libyen” aucun des bandits capitalistes ne voudra laisser sa “part” à d‘autres. De ce fait la situation en Libye ressemble terriblement à celle de la Syrie avec son lot de tueries et destructions permanentes sans reconstruction possible.

Contre le chaos sanglant et la barbarie capitaliste en Libye et ailleurs, seule la lutte de classe internationale et unitaire portée par la fraction de la classe ouvrière la plus expérimentée peut tordre le bras meurtrier du capitalisme mondial.

D. 22 mars

1 Le Canard enchaîné (24 avril 2019).

2 Jeune Afrique (17-23 novembre 2019).

3 Courrier international (14-21 août 2019).

4 Le Monde (3 mai 2019).

5 Le Monde (26 janvier 2020).

6 Le PIB de la Russie est à peine égal à celui du Texas et les ressources de la Turquie sont encore plus limitées.

7 D’où son chantage avec l’Union européenne sur la question des réfugiés et plus particulièrement vis-à-vis du gouvernement grec en première ligne.

8 Jeune Afrique (9-15 février 2020).

9 Jeune Afrique (15-21 mars 2020).

10 CI (6-12 février 2020).

11 Le Monde, (10 juillet 2019).

12 The Guardian (août 2019)

Géographique: 

  • Libye [5]

Rubrique: 

Barbarie du capitalisme

Grande-Bretagne : Solidarité avec les travailleurs de la santé contre leur employeur, le NHS capitaliste

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De nombreux articles et programmes détaillent l’insuffisante préparation du National Health Service (NHS) face à la pandémie actuelle. Panorama (un documentaire de la BBC) nous dit que le stock d’équipement de protection personnelle (PPE) ne contenait pas de blouses, le Kings Fund (un groupe de réflexion sur le système de santé britannique) a mis en évidence le nombre peu élevé au Royaume-Uni de docteurs, infirmières, hôpitaux et lits en soins intensifs comparé aux autres pays développés, The Economist a révélé comment en avril les tests pour le coronavirus destinés au Royaume-Uni sont restés quelque part entre les États-Unis et l’Equateur.

Au même moment, nous sommes invités non seulement à applaudir le NHS une fois par semaine mais aussi à nous identifier à cette institution présentée comme un modèle pour tous les autres services de santé. Mais le NHS n’est rien d’autre qu’une institution de l’Etat capitaliste qui envoie ses employés s’occuper de patients infectés sans l’équipement de protection personnelle nécessaire et déporte les patients âgés des hôpitaux vers des maisons de retraite sans pratiquer de tests durant cette crise. Le véritable NHS, c’est celui qui, pendant des années nous a habitués a de longues attentes aux urgences et à d’interminables listes d’attente pour des opérations.

La pandémie de coronavirus a mis en évidence les faiblesses et les défaillances de tous les services de santé sous le système capitaliste. Malgré de véritables différences dans leurs ressources, ou manque de ressources, le degré d’organisation par l’Etat et le niveau de participation des entreprises privées, ils sont tous basés sur deux aspects essentiels du capitalisme : l’Etat-nation et le besoin d’extraire autant de bénéfices possible de ceux qui travaillent dans ce secteur tout en les rémunérant au salaire minimum avec lequel ils peuvent à peine s’en sortir.

« Protéger le NHS »… des patients !

A la mi-mars, les hôpitaux furent sommés d’évacuer 15 000 patients, âgés pour la plupart, soit en les renvoyant chez eux, soit en les parquant dans des maisons pour personnes âgées afin de libérer des lits pour ceux atteints du Covid-19. Le NHS a fait face à la situation aux dépens de ces patients ainsi que des résidents des maisons de retraite et de leur personnel soignant qui ont contracté le virus au contact de ceux qui parmi ces patients étaient infectés. Plusieurs milliers en sont morts [1]. Ce n’est pourtant pas comme si le monde n’avait pas été prévenu de la nécessité de se préparer à une pandémie ; l’OMS, les virologues et les épidémiologistes alertent à ce sujet depuis des décennies. Ce n’est pas comme si le gouvernement britannique n’avait pas été averti du niveau d’impréparation à une pandémie durant l’Exercice Cygnus en 2016 qui montrait que le NHS serait incapable d’y faire face. Les résultats n’ont jamais été publié car jugés trop effrayants. [2]

Tout au long de l’histoire du NHS, il y a eu une pression constante sur les ressources disponibles. En 1949, le NHS disposait de 10,2 lits pour 1000 habitants, essentiellement pris sur les hôpitaux bénévoles ou dispensaires ; en 1976, cette proportion était tombée à 8,3 pour 1000 [3]. A cette époque, l’usage des antibiotiques s’était largement répandus pour combler la différence et les vieux services contre les maladies coloniales tropicales ou la tuberculose (sanatoriums) pouvaient être largement supprimés. Cependant, le nombre de lits a continué de baisser jusqu’à atteindre seulement 2,5 pour 1000 en 2017, les lits pour hospitalisation de courte durée et pour les services de médecine générale ayant chuté de 34 % depuis 1987/88. Surtout, le taux d’occupation des lits est passé de 87,1 % en 2010/11 à 90,2 % en 2018/19 et dépasse régulièrement les 95 % durant l’hiver, ce qui représente un niveau dangereux comme le montre le rapport du Kings Fund : « Les hôpitaux du NHS n’ont sans doute jamais été autant mis à l’épreuve qu’aujourd’hui ». L’augmentation de la population, combinée avec une proportion croissante de personnes âgées qui nécessitent généralement plus de soins de santé, entraine une demande accrue du traitement hospitalier par le NHS. […] Le NHS arrive seulement à la limite d’une pression financière prolongée et se trouve en pleine crise d’effectifs. Les services de l’assistance sociale pour adultes sont soumis à une saturation des demandes qui continuent à augmenter et attendent toujours la réforme financière fondamentale dont ils ont urgemment besoin. Les niveaux actuels d’occupation signifient que l’hôpital moyen en Angleterre court le risque d’être incapable de prendre en charge efficacement le flux des patients, le laissant à la merci de la fluctuation de la demande » [4]. Un des résultats de cette austérité a été le nombre bien médiatisé de morts au-dessus de la moyenne pour cette période de l’année, qui à cette date a presque atteint les 60 000, particulièrement dans les hôpitaux et les maisons de type EHPAD durant la pandémie de Covid-19.

En comparaison avec d’autres pays, la Suède, avec un taux similaire de 2,2 lits d’hôpitaux pour 1000 habitants a pu protéger son système de santé aux dépens des EHPAD avec la moitié des décès chez les plus de 70 ans dans ces dernières.

Le système de santé allemand est mieux pourvu avec 8 lits pour 1000 habitants mais est toujours confronté à des mesures d’austérité. La baisse du nombre de lits d’hôpitaux est une tendance générale observable à l’échelle internationale.

“Protéger le NHS »… des “étrangers” !

Par exemple, « une enfant atteinte de leucémie nécessitait un traitement en soins intensifs et commencer une chimiothérapie […] L’hôpital s’est montré réticent à commencer la chimiothérapie jusqu’à ce que les fonds soient déposés sur son compte et par conséquent le traitement a été reporté. » Pour ceux qui atteignent l’âge de la retraite, particulièrement ceux qui ont travaillé dans les services de santé, c’est exactement le genre de choses dont on nous disait que cela ne pouvait pas arriver ici avec le NHS. C’était exactement comme ce qui se passait aux États-Unis avec le recours à la médecine privée. Continuons la lecture du document : " ce cas nécessitait d’être examiné par un centre spécialisé afin de déterminer les options de traitement possible mais on a refusé de recevoir cette enfant sous prétexte qu’elle « n’était pas en droit d’accéder aux soins du NHS »… » [5] Et ce ne sont pas seulement les enfants de familles récemment immigrées qui se sont vus refuser les traitements. Une partie du scandale Windrush [6] fut qu’on a refusé un traitement à un certain nombre de patients qui ne pouvaient pas prouver qu’ils y avaient droit même après avoir vécu dans le pays depuis l’enfance et même si leur vie était en danger.

On nous parle de plus en plus ces derniers temps du “besoin” de protéger le NHS du « tourisme de la santé ». Cette campagne xénophobe ne date pas seulement du populisme de Boris Johnson ni de « l’environnement hostile » pour les migrants sous le gouvernement de Theresa May : on trouve déjà les mêmes arguments mis en avant à l’époque du dernier gouvernement du Labour lorsque Jack Straw, le Secrétaire d’Etat à l’Intérieur, faisait la chasse aux « faux demandeurs d’asile » qui pourraient entrer sur le territoire et profiter de “nos” services publics.

Cependant la classe dominante connaît certaines difficultés avec sa propagande sur le besoin de protéger le NHS de ces prétendus « touristes de la santé » qui soi-disant « pilleraient continuellement les ressources du NHS » alors que beaucoup d’entre eux travaillent en fait dans le secteur de la santé ou de l’aide sociale et mettent leur vie en danger durant la pandémie en travaillant pour le NHS. La majoration de prélèvements sur les salaires pour l’accès aux soins des travailleurs immigrés devait passer de 400 £ à 600 £ en octobre et jusqu’au récent recul opéré par le gouvernement sur le sujet, il était prévu que les nombreux travailleurs de la santé et du secteur social issus de l’immigration à l’exception des médecins paient cette majoration. En fait le NHS, et l’Etat-Providence plus généralement, n’a jamais été un “cadeau” ni une réforme « gagnée par les travailleurs ». Son but était de garantir un revenu de subsistance sous condition de service et de contribution afin d’améliorer le rendement de leur exploitation et maintenir les prolétaires « en forme pour le service » pour reprendre les mots de Beveridge [7]. Il s’agissait de maintenir les travailleurs en meilleure forme pour le travail ou le service militaire.

Le capitalisme est basé sur l’Etat-nation et dans cette pandémie globale qui affecte le monde entier, chaque État, chaque service de santé national, doit se battre pour obtenir les équipements de protection, les ressources et les tests, dans un esprit de concurrence et de chacun pour soi. Les États-Unis menacent l’OMS de retirer leur contribution. Plusieurs pays ont accusé la Chine d’espionnage industriel sur un vaccin. Au lieu de la coopération nécessaire pour faire face à une menace globale et produire un vaccin, chaque nation protège son service de santé, ses profits, ses intérêts impérialistes. La coopération limitée qu’elles ont réussi à mettre en œuvre dans le passé laisse place désormais à l’égoïsme national débridé et cela au détriment de leur capacité à limiter le danger de cette pandémie.

« Protéger le NHS »… au détriment des travailleurs de la santé et du secteur social

Une étude menée par le Royal College of Nursing (école d’infirmières) a montré que la grande majorité des personnels infirmiers et des sage-femmes avaient la sensation qu’ils étaient, eux et leurs familles, en danger à cause de leur travail et que s’ils étaient “redéployés” vers d’autres hôpitaux pour s’occuper des patients victimes du Covid, ils ne seraient pas suffisamment formés entrainés. Plus de la moitié ont travaillé au-delà des heures réglementaires et la majorité ne s’attendait pas au attendent le paiement des heures supplémentaires [8]. Pendant ce temps, les porte-paroles du gouvernement mentaient sur la disponibilité des équipements de protection personnelle et des tests tout en appelant la population à applaudir tous les jeudis soirs et à accrocher des drapeaux (?) arc-en-ciels à ses fenêtres afin de soutenir le NHS. Le même NHS qui néglige la sécurité des infirmiers et des autres travailleurs face à une infection mortelle ! Comme des soldats au front, comme de la chair à canon ! La Belgique de son côté a menacé de réquisitionner les travailleurs de la santé, ce qui a suscité une vive indignation.

Ceci n’est pas juste une aberration durant la pandémie mais la manière dont les services de santé, comme n’importe quelle autre entreprise capitaliste, traitent leurs employés. Il y a eu une augmentation de l’intensité au travail dans les hôpitaux avec le nombre de lits réduits de moitié alors que le nombre de patients traités augmentait. Les postes non pourvus d’infirmiers sont en augmentation et cette lacune est comblée par du personnel de soutien comme les aides-soignants. Cela a empiré depuis 2016 avec une chute du nombre d’infirmiers européens venant s’intaller au Royaume-Uni. Dans ces circonstances, il y a toujours un chantage moral effectué sur les travailleurs de la santé pour « fournir un effort supplémentaire » dans le soin des patients. Tout cela s’additionne à un accroissement de l’exploitation, phénomène que nous pouvons observer dans tous les services de santé au niveau mondial comme dans tous les secteurs de l’économie.

La solidarité avec les travailleurs de la santé ne se fait pas à travers des applaudissements hebdomadaires pour leur employeur mais à travers la solidarité prolétarienne, la solidarité avec ces travailleurs exploités dont les intérêts sont en conflit avec le NHS et dont la lutte pour de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail est inévitablement une lutte contre leur employeur, l’Etat capitaliste.

Nationalisé ou privatisé, le NHS demeure une institution capitaliste.

La gauche de la bourgeoisie voudrait que nous nous opposions à la privatisation du NHS, affirmant même qu’un système de santé nationalisé serait d’une manière ou d’une autre « socialiste ". C’est la version de gauche du mensonge affirmant que c’est « notre NHS » parce qu’il est administré par l’Etat. Nous parlons d’une institution de l’Etat capitaliste : « Le salaire même est dépendant de l’Etat. La fixation, à sa valeur capitaliste, en est dévolue à des organismes étatiques. Une partie du salaire est enlevée à l’ouvrier et est administrée directement par l’Etat. Ainsi, l’Etat « prend en charge » la vie de l’ouvrier, il contrôle sa santé (lutte contre l’absentéisme), dirige ses loisirs (répression idéologique)" [9]. L’Etat prend donc en charge une partie du salaire pour maintenir la santé des travailleurs et éviter que les employeurs n’aient à payer une assurance santé, de la même façon que l’Etat paye une partie des salaires à travers le « crédit universel " et les allocations logement permettant ainsi aux capitalistes de payer des salaires plus bas. Dans le secteur public ou dans le secteur privé, les travailleurs de la santé sont exploités par le capital, que ce soit par l’Etat pour le bénéfice du capital national comme un tout, ou par une compagnie qui vend ses services à une assurance ou à l’Etat. C’est pourquoi tous les services de santé, qu’ils soient publics ou privés, appliquent la même politique et avant tout, la même politique d’exploitation.

Un des avantages du service de santé privatisé pour l’Etat est qu’il est directement sujet aux lois du marché et peut faire faillite, le gouvernement n’a pas à le renflouer. C’est pourquoi il y a eu partout des mesures pour faire en sorte que les hôpitaux et d’autres institutions de soins de santé respectent leurs budgets, tout en lançant des appels d’offres sur les services, particulièrement depuis les années 80 sous le gouvernement Thatcher et durant les années Blair. Parce que la bourgeoisie britannique compte tant sur l’idéologie du NHS, elle a beaucoup insisté sur le contrôle de l’Etat en matière de ce qui devrait être fait et également sur ce qui ne devrait pas être entrepris ou réalisé car non “rentable”.

Comme nous le disions dans un article sur la réponse apportée par le système de santé allemand : « le plus important est que la gestion des hôpitaux a été durement soumise aux lois de l’économie capitaliste pour tous les organismes de financement (autorités publiques et religieuses incluses). Ceci s’applique, par exemple, à la rationalisation des processus de travail… Les employés sont pressés comme des citrons afin de pousser le plus loin possible l’accumulation de la valeur dans l’industrie des soins de santé. Le patient se retrouve face au soignant dans une situation où il devient une marchandise, la relation sociale devient un service, le processus de travail est sujet à d’énormes pressions et contraintes temporelles. Cette perversion décrit très bien ce que Marx a analysé comme la réification, la déshumanisation et l’exploitation ».

Alex, 23.5.20

 

[1] https://en.internationalism.org/content/16848/british-governments-herd-i [6]…

[2] https://en.internationalism.org/content/16834/profound-impact-covid-19-c [7]…

[3] https://en.internationalism.org/wr/303/nhs-reforms [8]

[4] https://www.kingsfund.org.uk/publications/nhs-hospital-bed-numbers?gclid... [9]

[5] https://bmjpaedsopen.bmj.com/content/4/1/e000588 [10]

[6] Durant lequel beaucoup de ceux qui étaient arrivés, légalement, au Royaume-Uni lorsqu’ils étaient enfants, furent traités comme immigrés illégaux. voir : https://fr.internationalism.org/content/9988/scandale-windrush-nationali... [11]

[7] L’économiste et politicien libéral dont le rapport durant la Seconde Guerre Mondiale pour le gouvernement de coalition a formé les bases de « l’Etat-Providence » mis en place par le gouvernement Atlee après la guerre.

[8] https://www.cardiff.ac.uk/news/view/2326580-research-highlights-concerns [12]…

[9] 1952 Internationalisme : « L’évolution du capitalisme et la nouvelle perspective », https://fr ; [13] internationalism.org/rinte21/evolution.htm

Récent et en cours: 

  • Coronavirus [14]
  • COVID-19 [15]

Rubrique: 

La réponse chaotique de la bourgeoisie américaine face à la pandémie

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“Si les gens crèvent et tombent aujourd’hui comme des mouches, au cœur même des pays les plus développés, c’est en premier lieu parce que les gouvernements, partout, ont réduit les budgets destinés à la recherche sur les nouvelles maladies. Ainsi, en mai 2018, Donald Trump a supprimé une unité spéciale du Conseil de Sécurité Nationale, composée d’éminents experts, chargée de lutter contre les pandémies”. (1)

Fin décembre 2019, des rapports indiquaient que la Chine était en train d’enquêter sur une épidémie de maladie respiratoire dans la ville de Wuhan. Entre le 6 et le 8 janvier de cette année, les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies publiaient une série d’avertissements et d’alertes tandis que le premier cas signalé de Covid-19 aux États-Unis était repéré le 21 janvier. Le jour suivant, le Président américain Donald Trump, déclarait que les États-Unis avaient le coronavirus “totalement sous contrôle. Il s’agit d’une personne qui revient de Chine, et nous avons la situation sous contrôle. Ça va très bien se passer”.

Au milieu du mois de mai, il était devenu évident que “la situation” ni n’était sous contrôle, ni ne se passait bien. Les statistiques ont montré que sur les 1,3 millions d’Américains infectés par le virus du Covid-19 (un tiers des cas mondiaux à l’époque), plus de 80 000 en sont officiellement morts ; le coronavirus a désormais tué plus d’Américains que la guerre du Vietnam qui, elle, a duré presque deux décennies ! (2)

Dans les grandes villes, des corps – victimes du virus – ont été exposés gisant en train de pourrir dans des camions de location devant des pompes funèbres débordées, ou stockés dans des fourgons réfrigérés, garés près d’établissements absurdement étiquetés “maisons de santé”. A la campagne : “Les régions rurales d’Amérique étaient déjà confrontées à une épidémie lorsque le virus a frappé… [dans des régions] dévastées en raison des décès dus à l’oxycontin, au fentanyl et à l’alcool – des “maladies du désespoir”… Parmi les 38 millions d’Américains qui vivent en dessous du seuil de pauvreté fédéral, nombre d’entre eux sont contraints de cumuler plusieurs emplois pour pouvoir survivre. Actuellement, plus de 27,5 millions n’ont pas d’assurance maladie – contre les 25,6 millions de personnes non assurées en 2017, avant que l’administration Trump ne commence ses attaques contre la Loi sur la Protection des Patients et les Soins Abordables (Obamacare) – et des millions d’autres ont un ticket modérateur et doivent payer des franchises élevés pour une faible couverture de soins. Les infections se propageront facilement parmi les détenus dans les conditions de promiscuité des prisons saturées et les plus de deux millions de personnes qui se trouvent dans les quartiers proches des prisons. Les agents et le personnel pénitentiaires sont également menacés, habitant souvent au sein de communautés pour lesquelles les prisons constituent la seule source de travail et où la “crise des opioïdes” a engorgé les prisons rurales. Quelque 10 millions d’immigrants sans papiers ont peur de se faire soigner par crainte d’attirer l’attention des services des douanes et de l’immigration…”. (3)

De plus, durant les six semaines précédant la fin du mois d’avril, plus de 30 millions de travailleurs américains (1 sur 5) a demandé à bénéficier de “l’allocation” chômage, témoignant d’un taux de chômage sans précédent atteignant entre 16 et 20 %. Les demandeurs n’ont pas tous bénéficié de l’ensemble ou même d’une partie des aides d’urgence de l’État fédéral.

A de nombreux égard, l’Amérique est toujours “la plus puissante nation sur terre”. Comme les bourses mondiales se sont effondrées du 24 au 28 février et que les demandes de crédit s’est accrue, c’est la Réserve fédérale des États-Unis qui a avancé des fonds aux principales institutions financières nationales et qui a permis aux banques centrales du monde entier d’échanger leurs propres devises contre des dollars grâce à des “accords de swap”. (4)

Ainsi, rien n’illustre mieux le blocage historique et mondial des rapports capitalistes que le contraste entre le potentiel d’innovation, technologique et productif des États-Unis, face à la détresse, la division et la mort dans les rues comme à huis clos dans le pays le plus avancé au monde ; entre la mise à disposition des meilleures ressources médicales au monde et l’accès socialement limité à de tels “avantages”.

Grosse bourde, complot ou décomposition ?

En vérité, la réponse de l’administration Trump face à la crise du Covid-19 – dans les grandes lignes – a fortement ressemblé à celle de la plupart des grands États-nations : mensonge, déni, manœuvres dilatoires puis dénonciation avant d’être contrainte, à contrecœur, d’agir en interrompant partiellement l’activité économique dans la perspective d’un “retour à la normale” le plus tôt possible.

Mensonge : Trump a déclaré que l’Organisation Mondiale de la Santé n’avait pas émis d’avertissements clairs. En réalité, le dénigrement de l’administration Trump ainsi que sa menace de réduire les fonds alloués à l’OMS, (5) qui avait contribué à coordonner une réponse relativement centralisée et mondiale face à l’épidémie de SRAS en 2003, illustrent la manière dont le capitalisme va de l’avant – en abandonnant les structures internationales et les connaissances accumulées qu’il avait auparavant érigées précisément pour faire face à des situations comme celles de la pandémie actuelle. Ceci révèle un glissement général du multilatéralisme vers le bilatéralisme, associé à l’abandon de la politique de “gendarme du monde” que les États-Unis avaient tenté de maintenir depuis la fin de la guerre froide, en faveur d’une politique populiste de “l’America first”, une acceptation claire du fait qu’au niveau des affaires internationales comme de la politique intérieure, c’est le “chacun pour soi”. Cet épisode – ainsi que le vol de fournitures médicales destinées à d’autres pays – n’est qu’une preuve supplémentaire que l’ancien gendarme mondial tient désormais un rôle majeur dans la propagation du banditisme et du chaos mondial, et qu’il est un élément actif dans le démantèlement des institutions et des accords internationaux existants. De même, les confiscations de matériel et de fournitures médicales aux États-Unis, qui doivent être stockées par les autorités fédérales ou détournées vers des États soutenant la clique de Trump ou vers des États marginaux “hésitants” requérant des pots-de-vin, témoignent d’un niveau de corruption et de mépris des protocoles nationaux tel, que cela met mal à l’aise le clan Bush ou le parti républicain lui-même.

Déni : Après avoir nié la véracité de la crise du COVID19 (“c’est un canular”), ignoré la gravité de l’épidémie (“Ça va disparaître. Un jour, comme par miracle, ça disparaîtra”), puis colporté une tripotée de bobards et de remèdes de charlatan, en suggérant notamment que les injections de désinfectant pourraient être une bonne idée, le Président Trump a prétendu à plusieurs reprises qu’il avait hérité de l’administration Obama un “placard vide” en termes de kits de tests, que toute personne ayant besoin de tests et/ou d’équipement de protection individuelle (PPE) y avait accès, avant de dire que rien de tout cela ne relevait de sa responsabilité – tout dépendait des gouverneurs des États. D’où le spectacle ridicule des différents États fédéraux qui se disputent les masques, les blouses, les gants, faisant monter les prix à la grande joie des profiteurs et au grand désespoir des “travailleurs contraints de continuer à bosser dans les secteurs estimés essentiels de l’économie nationale” qui eux, en ont besoin. Ainsi, le chaos déclenché sur la planète par la décomposition des rapports sociaux capitalistes s’est reflété au sein-même de l’Amérique au fur et à mesure que la pandémie se développait.

Manœuvre dilatoire : La volonté de protéger l’économie et les profits au détriment des personnes, la dissimulation et la tromperie venant d’en haut, ont favorisé les retards dans l’acquisition de matériel PPE et de kits de dépistage ainsi que dans l’obtention de ventilateurs, de lits d’hôpitaux et de personnel médical spécialisé, faisant par conséquent augmenter les taux d’infection et de mortalité. Faire semblant d’abandonner la prise de décision aux États fédéraux a entraîné des approches diverses entre les différents États – et parfois au sein-même de chaque État, par exemple entre les villes et les zones rurales, ces divisions apparaissant souvent en fonction des clivages entre les partis. Cela s’apparente à une sinistre expérience en laboratoire grandeur nature, où l’on oppose une mise en quarantaine imposée de manière enthousiaste et une attitude de “laisser-faire” face à la distanciation sociale et au “confinement”. En réalité, aucune de ces deux approches ne peut ou ne pourrait concilier l’inconciliable du “profit avant les gens”. Et pour comprendre où réside le vrai pouvoir – Washington, le Pentagone et Wall Street – il suffit de se rappeler que c’est finalement l’état d’urgence national déclaré par Trump le 13 mars (avec effet rétroactif !) qui a ouvert la voie à l’émission d’un plan de sauvetage sans précédent de 2,3 milliards de dollars à destination des États fédéraux, des sociétés, des entreprises et des particuliers face au chômage de masse et à l’effondrement de l’économie. Et c’est Washington qui doit faire face à l’augmentation des prêts internationaux pour couvrir le déficit de 3 milliards de dollars qui en résulte…

Dénonciation : Louant initialement les efforts du président chinois Xi Jinping, l’administration Trump a rapidement décidé de faire pression sur son rival extrême-oriental en qualifiant l’épidémie de “virus de Wuhan” et en menaçant de nouvelles sanctions commerciales la Chine et ses partenaires. Elle a également pris part à des théories conspirationnistes naissantes, qui brouillent les pistes et la perception de la réalité en Amérique, en suggérant que le Covid-19 avait été produit dans un laboratoire chinois et que la Chine pourrait l’avoir délibérément diffusé dans le monde entier. En ce sens, au niveau des antagonismes inter-impérialistes, l’administration Trump poursuit clairement la politique de “pivot” asiatique d’Obama visant à contenir les intérêts économiques et impérialistes propres de la Chine. En cela, il est habilement soutenu par le présumé candidat démocrate à la présidence Joe Biden, qui reproche à Trump d’être “trop mou” avec la Chine. Au cours d’une catastrophe sanitaire sans précédent, les États-Unis cherchent ainsi à prendre l’avantage sur l’arène mondiale en recourant à la grandiloquence et à la force. Ils ont choisi ce moment (21 mars) pour annoncer le lancement réussi d’un prototype de missile hypersonique. La Chine n’a pas agi différemment : elle a tenté de se couvrir de la même manière que les États-Unis, et a essayé de gagner des points de propagande en se servant de son apparent succès dans la lutte contre la propagation du virus. Les deux grandes puissances économiques et militaires de la planète sont guidées par le même appât du gain et se comportent de la même manière. (6)

Une perte de contrôle certaine

Le même chaos, qui a été déclenché par les États-Unis en réponse à la pandémie, a été reproduit alors qu’ils cherchaient à mettre fin aux mesures de quarantaine et à “déconfiner” l’économie.

À la fin de la première semaine du mois de mai :

Les ordres demandant de “rester chez soi” ou de “s’abriter sur place” ont été levés dans certains États et étendus dans d’autres. Trump a annoncé son intention de dissoudre le groupe de travail du gouvernement sur le coronavirus, mais il a semblé se rétracter après un tollé. En tout état de cause, alors que les infections et les décès continuent d’augmenter dans de nombreux États, l’administration Trump fait état de son impatience à “déconfiner” l’économie, “pas question de garder l’Amérique en quarantaine pendant cinq ans”. Le chef de file du groupe de travail, le Dr. Anthony Fauci, qui est le visage public de la “lutte contre le virus”, était l’un des trois membres du personnel de la Maison Blanche à se mettre en quarantaine après avoir été en contact avec des personnes infectées.

Le président a encouragé des manifestations (dont certaines armées) contre les ordres de confinement dans une douzaine d’États, a rejeté les recommandations de ses propres conseillers sur la manière dont devrait s’ouvrir très progressivement l’économie, mais n’a actuellement toujours pas pris de mesures positives pour légiférer en vue d’une reprise de l’activité économique (les paroles ne comptent pas).

Trump avait prévu de promulguer une loi, la Defence Production Act, pour obliger les travailleurs des usines de conditionnement de viande – zones à risque de transmission du virus – à retourner au travail face à la menace de pénurie alimentaire, mais bon nombre de ces établissements sont restés fermés.

Les détracteurs démocrates du président – dont Obama – ont accusé le gouvernement de présider le chaos. Ses partisans républicains ont déclaré que le maintien du confinement n’était pas une option et que cela nuisait autant que cela aidait. D’une certaine manière, ils ont tous raison : la classe dirigeante américaine n’a pas de solutions.

Robert Frank, 11 mai 2020

 

1Voir sur notre site COVID-19 : Barbarie capitaliste généralisée ou Révolution prolétarienne mondiale (Tract international) [16].

2Au moment où nous publions cette traduction, ce décompte macabre a dépassé 112 000, soit près de deux fois plus que les victimes américaines de la guerre au Vietnam (60 000).

3Voir l’article : When a Pandemic Strikes Americans Who Are Already Suffering [17] (New York Times-Opinion, 20/03/2020)

4Accords conclus entre banques centrales pour pouvoir échanger en liquides des devises entre elles.

5En réalité, Trump est depuis allé beaucoup plus loin puisqu’il a suspendu “indéfiniment” le versement des fonds américains (450 millions de dollars par an) à l’OMS le 19 mai en estimant que celle-ci “était une marionnette de la Chine” puis a décidé le 29 du même mois de rompre toute relation avec cet organisme.

6Voir l’article Hong Kong arrests and Taiwan flybys : China advances its interests during Covid-19 crisis (The Guardian, 26/04/2020)

Récent et en cours: 

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Links
[1] https://fr.internationalism.org/brochure/effondt_stal_II_2 [2] https://fr.internationalism.org/en/tag/conscience-et-organisation/seconde-internationale [3] https://fr.internationalism.org/en/tag/conscience-et-organisation/mouvement-zimmerwald [4] https://fr.internationalism.org/en/tag/conscience-et-organisation/troisieme-internationale [5] https://fr.internationalism.org/en/tag/5/230/libye [6] https://en.internationalism.org/content/16848/british-governments-herd-i [7] https://en.internationalism.org/content/16834/profound-impact-covid-19-c [8] https://en.internationalism.org/wr/303/nhs-reforms [9] https://www.kingsfund.org.uk/publications/nhs-hospital-bed-numbers?gclid=EAIaIQobChMI18eT1r7-6AIVWeN3Ch2RLAXkEAAYASAAEgKCw_D_BwE#how-does-the-uk-compare-to-other-countries [10] https://bmjpaedsopen.bmj.com/content/4/1/e000588 [11] https://fr.internationalism.org/content/9988/scandale-windrush-nationaliste-orchestree-bourgeoisie [12] https://www.cardiff.ac.uk/news/view/2326580-research-highlights-concerns [13] https://fr ; [14] https://fr.internationalism.org/en/tag/recent-et-cours/coronavirus [15] https://fr.internationalism.org/en/tag/recent-et-cours/covid-19 [16] https://fr.internationalism.org/content/10095/pandemie-covid-19-barbarie-capitaliste-generalisee-ou-revolution-proletarienne [17] https://www.nytimes.com/2020/03/20/opinion/coronavirus-poverty-homelessness.html