Milieu politique : salut a "Comunismo" n° 1

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Nous avons déjà présenté dans cette revue le COLLECTIF COMMUNISTE ALPTRAUM du Mexique (REVUE INTERNATIONALE N° 40). Nous y avions publié les thèses par lesquelles les camarades du C.C.A. se situaient et se présentaient au milieu révolutionnaire et au prolétariat international. Les thèses ne constituaient pas la plateforme d'un groupe politique prolétarien. Le C.C.A. n'est pas encore un groupe politique constitué, mais un "collectif" en évolution et en pleine clarification politique. Les positions qui étaient  présentées dans ces thèses s'inscrivaient sans doute   possible  dans le camp révolutionnaire.

En particulier, les camarades rejetaient tout nationalisme et tout mouvement de lutte de libération nationale.

Salut à COMUNISMO ! C'est avec joie et enthousias­me que nous voulons présenter ici le premier numéro de la revue semestrielle du Collectif Communiste Alptraum du Mexique : Comunismo.

Comunismo paraît au moment où l'histoire connaît une terrible accélération de par l'accentuation de la crise économique et par l'existence d'une troisième vague internationale de lutte d'un prolétariat international qui n'accepte pas la misère et la barbarie croissantes du capitalisme.

La publication de Comunismo et l'existence d'articles sur la situation de la lutte de classe tant au Mexique qu'au niveau international sont la preuve d'un souci militant d'intervention dans la lutte de classe. C'est la preuve de la compréhension croissante des camara-du CCA du rôle actif des révolutionnaires dans le développement de la lutte de classe et de la perspec­tive de la révolution prolétarienne. Comunismo N° l et le surgissement d'un petit milieu révolutionnaire au Mexique est aussi la preuve que l'heure n'est pas à la dispersion et à la disparition des énergies révolutionnaires comme dans les années de contre-révolution , mais bien au contraire au sur­gissement et au regroupement de nouvelles forces partout dans le monde, dans le cadre d'un cours histo­rique au développement de la lutte de classes et aux affrontements de classes, face à l'alternative histori­que que nous impose le capitalisme : socialisme ou barbarie.

L'apparition d'une nouvelle voix prolétarienne en Amérique Latine est un pas important pour le prolé­tariat international. Historiquement, économiquement, politiquement et géographiquement, le Mexique tient une place centrale sur le continent américain ; et le prolétariat y est appelé à jouer un grand et diffi­cile rôle dans la généralisation et l'unification du combat de classe entre le prolétariat des U.S.A. et celui d'Amérique Latine.

La volonté politique d'intervention des camarades du C.C.A.dans la lutte de classe s'accompagne d'un effort de réappropriation historique et de débat avec le milieu révolutionnaire international :

- c'est tout à l'honneur des camarades de reprendre le nom de la publication des années 30 du Groupe des Travailleurs Marxistes du Mexique dont nous avons déjà publié des textes dans cette revue (Nos 10, 19 et   20).   Rappelons  que  le G.T.M. était en contact avec la Fraction Italienne et la Gauche Communiste Inter­nationale. Comunismo N°1 contient un texte de 1940 dénonçant la guerre impérialiste et l'antifascisme ;

- les camarades du C.C.A. publient une série de textes de discussion avec le Bureau International pour le Parti Révolutionnaire (BIPR) et nous promettent leur réponse a notre critique de leurs thèses dans le pro­chain numéro.

QUELQUES  CRITIQUES

C'est donc un bilan positif que nous tirons de l'évolu­tion et des discussions qu'ont menées les camarades du C.C.A. depuis plus de quatre ans avec le milieu révolutionnaire international. Alors, le lecteur sera peut-être surpris de nous voir maintenant adresser des critiques aux camarades après tant d'éloges. Mais l'ac­tivité révolutionnaire est ainsi faite qu'elle exige la discussion, la contradiction et la critique pour pouvoir se développer. Dans la mesure où nos critiques sont situées à leur place, c'est-à-dire dans le cadre d'une évolution et d'une dynamique positive tant de la part des camarades que de la situation historique actuelle, elles peuvent être à leur tour un facteur dynamique et actif dans la discussion et la clarification politiques.

Groupe en évolution, le C.C.A. n'a pas encore des positions politiques clairement définies et arrêtées. Il n'est donc nullement étonnant de trouver des positions contradictoires entre les différents articles, voire dans les articles mêmes. Nous voulons en relever deux ici. Deux qui renvoient à des questions de première impor­tance. Nous n'allons pas développer notre position. Nous voulons juste avertir les camarades des contra­dictions et des dangers qui, à notre avis, peuvent les guetter s'ils n'y prennent garde.

1) Les camarades restent des plus vagues et des plus flous sur l'entrée en décadence du capitalisme. Ils considèrent "que le système se trouve en décadence" et que nous "pouvons situer le début de la décadence globale du système capitaliste à partir de 1858". Affir­mation pour le moins originale que nous avons rapide­ment critiquée sur le plan "économique" dans la Revue Internationale"  n°40.

Nous voulons souligner ici les contradictions dans les­quelles les camarades risquent de s'enfermer. Leur af­firmation sur "1858" reste abstraite et sans aucune ré­férence historique. Mais dès qu'ils sont amenés à fon­der les positions politiques de classe qu'ils défendent, dès qu'ils sont obligés de défendre dans les discussions leur position juste sur le cours historique et le déve­loppement de la lutte de classe (voir la réponse au BIPR dans Comunismo) ils ne se réfèrent plus à 1858, mais à la rupture historique que constitue 1914 et la première guerre mondiale qui marque le passage du capitalisme dans sa phase de décadence "par sa situa­tion irréproductible et unique dans l'histoire..." selon les propres termes du C.C.A.

Et ne croyez pas que cette question ne concerne que des historiens pointilleux sur les dates, ni qu'elle cons­titue une question théorique en soi sans implications pratiques pour les révolutionnaires. La reconnaissance et la compréhension de la fin de la période historique­ment progressiste du capitalisme et son entrée en dé­clin sont à la base de la formation de la IIIème In­ternationale sur les ruines de la IIème Internationale morte en 1914. Elles fondent la cohérence de l'ensem­ble des positions de classe que les camarades parta­gent avec le CCI. Et en particulier la dénonciation des syndicats comme organes de l'Etat capitaliste au 20ème siècle et des mouvements de libération nationa­le comme moment des antagonismes inter-impénalistes aujourd'hui.

2) Deuxième point que nous voulons soulever. Les con­tradictions des camarades dans leur effort de clarifi­cation sur la question des organisations et du parti po­litiques du prolétariat. Les camarades pensent que "la question de l'organisation des révolutionnaires et la constitution du parti politique du prolétariat sont des aspects centraux de toute réflexion théorique-politique qui essaie de se situer dans une perspective communis­te". Nous sommes d'accord.

Mais du coup les camarades - pour le moins dans ce numéro de Comunismo- ont tendance à reprendre tels quels les thèses et les textes de l'Internationale Communiste et de Bordiga sans esprit critique et sans référence aux différents apports des fractions de gau­che sur cette question. Camarades du C.C.A., vous ris­quez de tomber dans les erreurs du bordiguisme :

-   en affirmant à tort l'invariabilité du programme communiste (cf. Revue Internationale n°32). Nous nous contenterons de réaffirmer l'unité et la continuité his­toriques du programme communiste. Ce qui ne change pas, ce qui est invariable c'est le but : la destruction du capitalisme et l'avènement du communisme. Les moyens et les implications immédiats, eux, varient, changent et sont enrichis par l'expérience même de la lutte de classe, du prolétariat. Pour ne donner que deux exemples de ces enrichissements : l'impossibilité pour le prolétariat de s'emparer de l'Etat bourgeois pour l'utiliser à ses fins révolutionnai­res et la nécessité de le détruire pour imposer sa dic­tature de classe est la leçon principale que tirèrent Marx et Engels de la Commune de Paris contrairement à ce qu'ils avaient exprimé auparavant ; l'impossibilité d'utilisation par le prolétariat du syn­dicat dans la période de décadence contrairement au 19ème siècle.

C'est Bordiga et ses "héritiers" qui ont développé dans les années 40 et 50, contre les idées que le marxisme était dépassé, l'idée poussée jusqu'à l'absurde de l'in­variance du programme communiste depuis 1848, de­puis la première édition du Manifeste Communiste. Au contraire, c'est justement une des forces de la fraction italienne de la Gauche Communiste - avec laquelle était en rapport et en accord le GTM du Mexique dont se revendiquent les camarades du C.C.A. -d'avoir su passer au crible de la critique la vague ré­volutionnaire des années 1917-23 et les positions de la IIIème Internationale ;

-   en reprenant telle quelle la citation de Bordiga (I1 Soviet, 21 septembre 1919) :"Tant qu'existe le pou­voir bourgeois, l'organe de la révolution est le parti ; après la liquidation du pouvoir bourgeois, c'est le réseau des conseils ouvriers". Là, Bordiga commet une erreur en confondant les organisations politiques du prolétariat dont le rôle sera sans aucun doute plus im­portant après la prise du pouvoir par le prolétariat, d'avec les organisations unitaires de la classe que sont les conseils ouvriers existant sur la base des assem­blées regroupant tous les ouvriers ; et ces "soviets (les conseils) sont les organes de préparation des masses à l'insurrection et, après la victoire, les organes du pou­voir." (Trotsky, Histoire de la Révolution Russe). Camarades du C.C.A., cette vision de Bordiga et du bordiguisme d'une "invariance du programme" et d'un parti pouvant se substituer à la classe ouvrière mène aujourd'hui soit à la sclérose, soit au néant, soit à la contre-révolution comme l'a illustré l'évolution récente du courant "bordiguiste".

LE REGOUPEMENT  DES REVOLUTIONNAIRES.

La publication de Comunismo et le développement d'un petit milieu révolutionnaire autour du C.C.A., aussi faible soit-il, confirme la possibilité d'apparition et de regroupement d'éléments révolutionnaires dans le mon­de entier, y compris dans les pays du "Tiers-Monde". Mais ' pour cela, les éléments révolutionnaires doivent rompre clairement, nettement et sans hésitation avec le "tiers-mondisme", avec tout type de nationalisme et le gauchisme. C'est à ce prix qu'ils pourront dévelop­per une réelle clarification politique et une réelle ac­tivité révolutionnaire. C'est ce qui constitue la force de Comunismo.

Les organisations politiques du prolétariat déjà existan­tes (principalement situées en Europe) doivent être très fermes sur cette indispensable rupture avec tout nationalisme si elles veulent assumer la tâche de pôle de référence et de regroupement au niveau internatio­nal, si elles veulent participer et aider au surgissement d'éléments et de groupes révolutionnaires. C'est une des tâches essentielles que le CCI s'est tou­jours donnée et qu'il essaie de remplir avec ses faibles forces : "concentrer les faibles forces révolutionnaires dispersées dans le monde est aujourd'hui, dans cette période de crise générale, grosse de convulsions et de tourmente sociales, une des tâches les plus urgentes et les plus ardues qu'affrontent les révolutionnaires" (Revue  Internationale  n°1, avril   1975).

C'est dans ce sens que le CCI aidera autant qu'il le peut les camarades du C.C.A. dans leur effort militant d'intervention dans la lutte de classe et dans leur vo­lonté de débat dans le milieu révolutionnaire. L'accom­plissement de ces tâches par Comunismo permettra le développement d'un milieu révolutionnaire au Mexi­que et surtout, à terme, - et là est le plus împortant- une réelle présence politique du prolétariat. Pour cela Comunismo est l'instrument indispensable dont avait besoin le prolétariat au Mexique. Longue vie à Comunismo !

CCI

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