Il n’y a rien à attendre des élections présidentielles de 2012, il faut lutter !

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En France, comme partout dans le monde, la crise économique est de plus en plus synonyme de pauvreté. Ainsi, fin août, un nouveau plan de 12 milliards d’Euros d’économies a été annoncé. Le Premier ministre, François Fillon s’est fendu d’un long discours pour enrober cette énième aggravation de l’austérité et faire croire à une répartition juste et équitable de “l’effort national”. Il n’en est rien, bien entendu. La hausse sur le prix du tabac, des alcools, des sodas et surtout de la taxation des mutuelles de santé vont inévitablement se répercuter lourdement sur les revenus les plus modestes. Ce qui a été présenté comme la mesure-phare de ce plan, la taxation exceptionnelle pour 2 ans de 3 % supplémentaires sur les plus hauts revenus, n’est que de la poudre aux yeux. Non seulement elle ne va représenter qu’une part ridicule (220 millions) des économies escomptées mais le battage publicitaire dont elle a bénéficié risque même d’être contre-productif tant cela frôle le ridicule. Qui peut croire à la sincérité de la déclaration, publiée dans le Nouvel Obs’, des 16 d’entre les plus grandes fortunes du pays (dont l’inénarrable Liliane Bettencourt) réclamant en chœur “d’être taxés plus” (à l’instar du milliardaire américain Warren Buffett). La ficelle est trop grosse : un article de Marianne daté du 20 août intitulé “Y a un truc”, lève d’ailleurs le lièvre, non sans humour : “Certains membres de la nomenklatura du business ont dû profiter de leurs vacances pour revoir le Guépard de Luchino Visconti et réfléchir à la fameuse phrase du comte de Lampedusa, proposant de tout changer pour que rien ne change.” L’article rapporte que le principal promoteur de cette campagne pour la “taxation exceptionnelle des nantis”, “Maurice Lévy, président de Publicis et patron de l’Association française des entreprises privées (le gratin du gratin) sait qu’il est des moments où il faut soulever le couvercle de la bouilloire pour éviter qu’elle n’explose (...) Il essaie de sauver ce qui peut l’être pour éviter le pire.” Et le pire, ce n’est pas pour la droite de perdre les élections prochaines, comme tous les médias et les politicards nous le laissent entendre, mais c’est le risque d’explosions sociales incontrôlées. La classe dominante est parfaitement consciente que le risque en France est particulièrement élevé. Comme le rapporte toujours l’article de Marianne :Un autre parrain du capitalisme, Claude Bébéar, ex-PDG d’Axa, président de l’Institut Montaigne avait déjà tiré la sonnette d’alarme. Dans un texte publié par le Figaro (...), il lançait : “Nous pouvons craindre bien plus qu’un énième krach : un rejet radical et violent du capitalisme””. On ne saurait être plus clair. D’ailleurs, c’est cette crainte qui explique aussi le caractère timoré des nouvelles mesures proposées par le gouvernement, bien en deçà des autres plans d’austérité en Europe face au coup d’accélérateur de la crise et à l’explosion de l’endettement : 93 milliards d’euros en Italie annoncés en deux temps, près de 100 milliards en Grande-Bretagne, 78 milliards en Grèce, 55 milliards en Espagne (malgré la pression sociale du mouvement des Indignés) ou encore en Allemagne où les économies à réaliser seront de 80 milliards en 3 ans. C’est pourquoi, dans sa présentation du plan français, Fillon l’a justifié en invoquant des “obligations économiques et sociales”. C’est que la bourgeoisie nationale redoute des réactions sociales très fortes dans un pays où non seulement existe une longue tradition de luttes (de la Commune de Paris à Mai 68) mais aussi où s’est affirmé ces dernières années une claire volonté de lutter massivement et de dépasser le carcan corporatiste et sectoriel comme l’ont prouvé la tenue de très nombreuses assemblées générales lors mouvement des étudiants contre le CPE en 2006 et l’apparition de comités interprofessionnels, autonomes et non syndicaux lors de la lutte contre la réforme des retraites en 2010. D’ailleurs, les déclarations de B. Thibault, Secrétaire général de la CGT dans Libération du 29 août dernier (à la veille d’être reçu par Fillon lui-même) sont édifiantes. Il appelle les autres syndicats à se mobiliser contre l’austérité le 11 octobre alors que cette énième journée d’action apparaît déjà pour beaucoup comme une simple parade stérile, une gesticulation d’ailleurs d’ores et déjà promise au spectacle lassant de la division syndicale (FO a fait savoir qu’elle était contre une mobilisation de rue, la CFDT s’est déclarée “pas très chaude”). En réalité, si certains syndicats prennent ainsi les devants pour jeter de l’eau sur le feu, tout en se partageant les rôles, il s’agit d’une manœuvre délibérée destinée à prendre les devants pour freiner toute possibilité d’élan de mobilisation massive, spontanée, et donc hors du contrôle syndical.

De fait, les travailleurs comme ceux réduits au chômage seront d’emblée confrontés à une rentrée plus dure que jamais avec :

– un chômage et une précarité qui se sont aggravés durant l’été (notamment avec l’amplification du phénomène de chômage de longue durée) ;

– l’enfoncement d’une part croissante de prolétaires dans la grande misère (1). L’été a une nouvelle fois fait plus de morts dans la rue que l’hiver alors que les centres d’hébergement du Samu social sont complètement débordés, au point que son président, l’ancien ministre Emmanuelli, a démissionné de son poste, écœuré par l’étranglement croissant des moyens budgétaires réservé aux sans-abri ;

– la suppression de 16 000 postes supplémentaires à la rentrée 2011 dans l’Education nationale (dont 9000 dans le primaire et 4800 dans le secondaire – alors qu’il y a 80 000 élèves de plus que l’an dernier dans les lycées et collèges). Les syndicats enseignants se sont d’ailleurs empressés d’organiser une journée de mobilisation spécifique dans ce secteur dès le 27 septembre ;

– de même sont particulièrement touchés le milieu hospitalier où les fermetures d’hôpitaux et de lits se multiplient, comme l’ensemble de la fonction publique, avec le non-remplacement systématique de plus d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ;

– un nouveau coup sur les retraites a été porté en catimini début juillet par le Conseil d’orientation des retraites avec l’aval du gouvernement qui légalisera une nouvelle mesure par décret d’ici la fin de l’année : le prolongement de la durée des cotisations à 166 trimestres (41 ans et demi pour tous les salariés nés après 1954 afin de pouvoir toucher une retraite à taux plein alors que la réforme de 2010 a entériné le recul de l’âge de la retraite à 62 ans). Ce qui était naguère présenté comme une mesure alternative au recul de l’âge légal fait désormais office de “double peine” : il s’agira désormais de travailler plus longtemps pour toucher moins de pension… Aujourd’hui, cela nous est présenté comme une “mesure d’ajustement technique” de la réforme alors que l’an dernier, promis, juré, on nous avait dit que la réforme dispenserait de toute autre retouche… d’ici 2020 !

Bref, nos conditions de vie sont en train de se dégrader brutalement. Et il ne faut pas avoir d’illusion, les présidentielles de 2012, quel qu’en soit le résultat, n’y changeront rien. Pendant les huit mois à venir, la bourgeoisie va tenter de nous abrutir sans discontinuer avec ses boniments électoraux. “Votez ! Votez ! Votez !”, tel va être le message que ses médias vont tenter de nous enfoncer de force dans le crâne. Mais il suffit de regarder en Espagne ou en Grèce pour constater que les Partis socialistes au pouvoir réservent le même triste sort aux populations. Que ce soit la gauche ou la droite qui gouverne, les mêmes attaques pleuvent sur nos têtes, la même crise économique fait ses ravages. Le seule voie dans laquelle nous devons résolument nous engager, c’est de nous préparer à nous mobiliser massivement sans attendre pour défendre pied à pied nos conditions de vie en développant, en élargissant, en unifiant et en organisant nous-mêmes nos combats contre le système capitaliste et son exploitation.

W (2 septembre)

 

1) Un rapport de l’INSEE vient d’établir officiellement que 8,2 millions de personnes vivaient sous le seuil de pauvreté en France en 2009, soit 13,5 % de la population (contre 7,8 millions l’année précédente), confirmant les effets ravageurs de la crise de 2008 sur les plus déshérités. Le Secours populaire prévoit que ces chiffres, sous-évalués, vont augmenter vertigineusement pour les années suivantes.

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