Fête annuelle de Lutte Ouvrière : comment LO sabote l'unité de classe

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Lors de sa traditionnelle fête de la Pentecôte à Presles, Lutte Ouvrière (LO) a, comme à son habitude, organisé deux types de débats : "forums politiques" et "forums d'entreprises".

La distinction n'est pas gratuite. Pour LO, il s'agit avant tout de séparer les discussions d'ordre " général " (conflits sociaux à l'étranger, histoire du mouvement ouvrier ou actualité politique...) confinées, soit dit en passant dans un espace ridiculement petit et confidentiel nommé " Cité politique ", des questions prétendument particulières à telle ou telle entreprise, disséminées en une multitude de forums aux quatre coins de la fête, consacrés exclusivement, tour à tour, à Alcatel, Peugeot-Citroën, la Sécurité sociale, etc.

Ainsi, lors d'un de ces " forum de boîte " intitulé "De Peugeot-Citroën à Renault, les travailleurs de l'automobile face aux suppressions de poste et aux pressions patronales", le CCI est intervenu pour mettre en avant la nécessité de briser l'enfermement corporatiste dans les luttes en s'appuyant sur le fait que, dans la plupart des secteurs, les ouvriers sont confrontés en même temps exactement aux mêmes attaques : à la fois aux suppressions massives d'emploi, à la question des salaires et à la détérioration des conditions de travail. Pour montrer qu'il n'était pas possible de s'en tenir au seul secteur de l'automobile, nous avons illustré nos propos par les exemples édifiants d'Airbus et d'Alcatel. Aussitôt, un militant de LO a rétorqué qu'il "ne fallait pas tout mélanger" et qu'ici c'était "un forum sur les problèmes de l'automobile" : "Si tu veux parler de l'aéronautique ou d'Alcatel, il y a d'autres forums prévus pour cela." Voilà bien une réaction caractéristique de la méthode et du rôle de LO ! Derrière des slogans comme "Tous ensemble !" et des phrases ronflantes dans sa presse ou ses discours sur "l'unité et la solidarité des travailleurs", dans sa pratique, LO n'a de cesse de morceler et diviser les ouvriers, cherchant à isoler, à enfermer, à engluer chacun d'eux dans les problèmes particuliers de "son" entreprise, de "son" secteur.

Mieux encore, au moment même où se tenait ce forum sur "l'automobile française", LO organisait séparément une autre discussion "sur la situation politique et sociale en Espagne" centré sur les suppressions d'emplois chez l'équipementier automobile Delphi à Puerto Real ! Cette lutte, sans conteste, concernait pourtant bien le secteur de l'automobile mais ce qui prévalait là, selon LO, c'était les "spécificités nationales". Rien à voir avec la France puisque, là-bas, de l'autre côté de la frontière, les attaques sont menées sous la houlette du gouvernement "socialiste" de Zapatero (sic !). LO met en avant cette "spécificité" dans le seul but de masquer ce que révèle à l'évidence la lutte des ouvriers de Delphi : droite ou gauche au pouvoir, ce sont les mêmes attaques qui pleuvent sur la classe ouvrière. Cette vérité toute nue est aujourd'hui fort gênante pour LO, faisant tomber l'alibi essentiel de son appel à voter pour la candidate socialiste Ségolène Royal : "faire barrage aux mesures de la droite sarkozyste"1. Quand le CCI est intervenu dans ce débat pour souligner l'unité du combat de la classe ouvrière, rappelant que dans cette région d'Espagne les ouvriers d'Airbus avaient commencé à se joindre à la lutte et à développer une solidarité ouvrière2, la seule réponse de LO a été que cette mobilisation n'avait servi à rien puisqu'elle n'avait pas suffi à empêcher les licenciements. C'est pourquoi LO prônait "une autre orientation politique" : il fallait plutôt "faire pression sur le gouvernement pour réclamer l'expropriation des employeurs qui licencient et demander l'ouverture et le contrôle des livres de compte de l'entreprise".

Quelle surprise ! On reconnaît là un des refrains favoris entonnés par LO tout au long de sa campagne électorale en France. Les recettes de LO pour saboter la solidarité ouvrière ne connaissent certes pas de frontières. Chaque fois que le prolétariat affirme et développe quelque part la solidarité dans ses luttes, LO s'y oppose toujours et partout plus ou moins directement sous prétexte que "ce n'est pas le lieu", ni le "bon moment", ni encore la "bonne stratégie". Cette organisation dévoile ainsi sa véritable nature et sa véritable fonction : diviser et saboter les luttes aux côtés des autres organes bourgeois chargés d'encadrer la classe ouvrière.

W (21 juin)

 

1  Rappelons en passant que le CCI se trouve interdit de stand depuis 1992 pour avoir osé brandir les Unes de LO appelant à voter Mitterrand en 1974 et en 1981.

2  Lire notre article "Fermeture de l'usine Delphi en Espagne : Nous ne serons forts que dans la lutte massive et solidaire" publié dans RI n°378 d'avril et disponible sur notre site Internet www.internationalism.org


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