Irak, Moyen-Orient : l'enfer du chaos capitaliste

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Bagdad est paralysée par la peur. Toutes les nuits, des tirs de mortiers résonnent dans cette ville martyrisée. Prendre sa voiture pour ceux qui en possèdent encore une, met immédiatement ses occupants en danger de mort. Des bandes lourdement armées peuvent à chaque instant arrêter le véhicule et en abattre froidement les occupants. Chaque jour apporte son lot d’attentats sanglants. Il est devenu indécent de tenir à jour le nombre de tués dans ce pays plongé dans la plus grande des barbaries. En une semaine, fin janvier, plus de 200 personnes ont été tuées à Bagdad, et plus de 16 800 civils en 2006. De son coté, l’armée américaine a annoncé, pendant la même période, la mort de 3068 militaires et personnels assimilés. Et chaque jour qui passe ne fait que confirmer l’amplification de ce désastre humain. Les Chiites ont été chassés du quartier sunnite d’Al-Amariyah, situé dans la partie occidentale de la capitale. Un parti sunnite, Baas, y fait régner sa loi. Des inscriptions à la peinture sur les murs délabrés proclament violemment : "Mort à Mouqtada (Mouqtada al-Sadr, religieux nationaliste chiite) et à son armée d’imbéciles !". Cette situation reflète ce qui se passe actuellement dans l’ensemble du pays. Dans d’autres quartiers de la capitale, comme celui d’Al-Hurriya, ce sont les Sunnites qui ont été obligés de fuir, sous peine d’être également assassinés. La tension et le chaos sont à leur comble dans Bagdad. Chacun s’attend à une explosion généralisée de la violence. Une majorité de Sunnites s’attend également, à tout moment à une offensive des bandes armées du Mahdi chiite, visant à tuer ou à expulser les Sunnites hors de la ville. Dans tous les camps, on accumule les armes et les munitions. Bagdad est ainsi en train de devenir une véritable poudrière. Quatre ans après son intervention en Irak, l’armée américaine ne contrôle plus dans ce pays que quelques zones fortifiées, laissant le reste du pays plongé irrémédiablement dans la pire des anarchies sanglantes.

L’enlisement américain en Irak

Il y a quelques semaines, aux Etats-Unis, la victoire des Démocrates aux dernières élections au Congrès et au Sénat avait répandu un vent d’optimisme dans les médias bourgeois. Cet optimisme avait été renforcé par les propositions du fameux plan Baker, conseiller de Bush Junior. L'opinion publique américaine désormais majoritairement anti-guerre pouvait rêver à un retrait des troupes dans un délai raisonnable. Peut-être même, à la fin de la guerre en Irak. Tout cela n’était que pure illusion ! Les Démocrates n’ont de fait aucune politique alternative à proposer. La réalité est venue immédiatement et dramatiquement confirmer qu’il ne peut plus y avoir de paix en régime capitaliste dans cette région du monde. Le projet de budget, présenté par l’administration américaine, prévoit au contraire une nouvelle augmentation des dépenses militaires. Il sera alloué 622 milliards au Pentagone, dont 142 milliards pour l’Irak. Englué dans le bourbier irakien, la fuite en avant de l’impérialisme américain ne peut que se poursuivre. 21 500 soldats supplémentaires devraient être rapidement envoyés sur le terrain des opérations. L’armée américaine, en coopération avec les bataillons de la police gouvernementale de Bagdad, s’apprête à lancer une offensive généralisée sur la capitale. Celle-ci a officiellement pour but de nettoyer les secteurs occupés par des milices armées anti-américaines. Cette nouvelle offensive, comme les précédentes depuis quatre ans, ne peut se solder que par des massacres supplémentaires et un chaos encore plus grand. Elle ne fera que pousser encore plus ces groupes armées et ceux qui les rejoindront dans une surenchère de plus en plus violente . Il y a une dizaine de jours, un hélicoptère des marines de type CH-46 s’est écrasé dans la province sunnite d’Al-Anbar, à l’Ouest de Bagdad, faisant sept morts parmi les membres de l’équipage. Cela fait maintenant officiellement six appareils de ce type qui sont abattus, en moins de trois semaines. Dans cette guerre infâme, les moyens de destruction utilisés sont ainsi de plus en plus meurtriers. L’armée américaine affirme que l’Iran fournit des armes aux insurgés en Irak. Et ceci est, sans aucun doute, tout à fait exact. C’est pour cela que les forces américaines viennent de boucler les frontières de l’Irak avec la Syrie et l’Iran. Mais comme le dit le Washington Post, daté du 12 février dernier et cité par Courrier International : "Ce même genre d’affirmation et de mise en scène, mais à propos d’armes de destruction massive, avait été le prélude à l’invasion américaine de l’Irak, avant que cela se révèle être une manipulation."

Le Moyen-Orient s'enfonce dans l’horreur des massacres inter-impérialistes

La perte de contrôle accélérée de la puissance américaine au Moyen-Orient aiguise férocement l’appétit de tous les impérialismes de la région. L’Iran s’affirme de plus en plus comme une puissance régionale aux dents longues. Au Liban, en Irak, partout où cela est possible, elle pousse en avant ses "pions chiites" , participant ainsi elle-même activement à la guerre et aux massacres en cours. Les Etats-Unis sont actuellement en train d’amener dans le Golfe persique la deuxième formation navale américaine, conduite par l’US-Stennis. La montée accélérée des tensions impérialistes dans tout le Moyen-Orient provoque une course nouvelle au nucléaire dans les pays de l’ensemble de la région. En décembre dernier, les pays membres du conseil de coopération du Golfe, Arabie saoudite, Koweït, Emirats Arabes Unis, Qatar, Bahreïn, Oman ont annoncé, à l’issue de leur sommet annuel, qu’ils envisageaient un programme nucléaire civil commun. Ces pays du Moyen-Orient étaient rejoints, au mois de janvier, par la Jordanie et le Yémen. Autant de pays qui possèdent des réserves importantes de pétrole et donc d’énergie civile. Mais à l’égal de l’Iran derrière l'alibi du nucléaire civil, ce sont inévitablement les programmes nucléaires militaires qui progressent partout. Pour ces pays arabes du Golfe, la montée en puissance de l’Iran chiite est intolérable. Tout le Moyen-Orient à l’image de l’Irak est en train de se scinder en deux. Communautés chiites et sunnites se retrouvent de plus en plus face à face et, à l'intérieur de chaque camp, des bandes rivales s'entre-déchirent déjà. Les risques non seulement d'éclatement de l'Irak mais aussi de propagation de la guerre civile dans toute la région comme il y a quinze ans dans l'ex-Yougoslavie sont désormais une menace concrète. Le capitalisme en pleine crise de sénilité n’est plus en mesure de freiner le développement de la barbarie et du chaos. Bien plus, il est en train de masser dans cette région du monde de quoi y anéantir la quasi-totalité de la population.

Tino (17 février)


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