Conflits au Sahel:l’impérialisme français enlisé dans le bourbier africain

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Pris à la gorge depuis son entrée dans le bourbier malien, le Président français tente d’en sortir en imposant l’organisation d’élections (fin juillet) aux cliques maliennes qui se disputent le pouvoir de Bamako. Malgré le chaos sanglant qui y règne, François Hollande a déjà tout programmé dans son bureau et comme il l’a annoncé lui-même (à la télé) : "A la fin du mois d’avril, nous allons nous retirer. En juillet, il n’y aura plus que 2000 soldats au Mali. A la fin de l’année, un millier de soldats seront présents". Pur cynisme à la "hollandaise", "flagrant délire électoral français", comme l’a si bien dit Le Canard enchaîné. En fait le "Moi président" se mystifie en parlant de sa "victoire sur les groupes terroristes" alors qu’il sait très bien que ces derniers sont en train de harceler la France dans toute la zone du Sahel. Et en ce moment même, l’impérialisme français doit faire face à de redoutables concurrents, à commencer par l’impérialisme américain qui n’arrête pas de lui mettre des bâtons dans les roues.

"L’ONU s’apprête à déployer une opération de maintien de la paix dans un nouveau contexte géopolitique, avec des menaces jamais rencontrés jusqu’ici. (…) Plus grave, la menace terroriste s’exporte, preuve en est l’attentat au Niger. (…) Enfin, la tenue de l’élection présidentielle le 28 juillet, comme souhaitée par Bamako, n’est pas le moindre défi pour l’ONU censée aider à son organisation. (…) Des élections dans ces circonstances seront inévitablement faussées". (Le Monde du 12 juin 2013) Effectivement, depuis la déclaration tapageuse de François Hollande, la situation du Mali est marquée par la persistance des affrontements sanglants entre les deux camps criminels ("libérateurs" et "terroristes") sous forme d’embuscades meurtrières et d’attentats à la voiture piégée, sans parler de la confrontation sanglante entre les forces maliennes encadrées par l’armée française et celles du groupe touareg MNLA qui se disputent le contrôle de la ville de Kidal. En fait, Hollande tient un double discours car, derrière son opération de communication sur sa "victoire" contre les terroristes qu’il veut parachever par des élections "libres" au Mali, en coulisses il exprime son inquiétude et celle de son entourage : "Les plus hauts dirigeants du Quai d’Orsay le reconnaissent : pendant plusieurs mois, ils ont sous-estimé le ‘risque islamiste’ au Mali et en Libye. Comme pour s’en excuser, certains diplomates affirment que leurs collègues militaires, eux non plus, n’avaient pas bien mesuré le danger. Aujourd’hui, changement de ton : les nouvelles en provenance de Libye sont inquiétantes, les télégrammes diplomatiques alarmistes, et tous les dirigeants des pays du Sahel -Burkina, Mali, Tchad, Niger, Mauritanie- appellent les Occidentaux à l’aide. (…) Sans en oublier d’autres : Algérie, Tunisie ou Egypte. (…) Idriss Déby président du Tchad s’est voulu le porte-parole de ses collègues inquiets : ‘Il ne faut pas se leurrer, nous, les pays du Sahel, a-t-il déclaré au Figaro, le 8 juin, nous allons tous être touchés. Le Mali et le Niger hier, demain cela va être le Tchad. Et aucun pays ne peut s’en sortir seul, face à cette armada (sic). Tous les radicaux islamistes sont aujourd’hui en Libye, (un Etat) au bord de l’explosion’". (Le Canard enchaîné du 12 juin 2013). Donc, comme on le voit, Hollande qui prétend avoir libéré le Mali des groupes terroristes, pour justifier l’organisation d’un processus électoral, ne fait que mentir cyniquement : tout au plus il n’a fait que disperser ces groupes comme l’indique l’hebdomadaire Jeune Afrique daté du 3 mars 2013 commentant un dessin de Willem publié dans le quotidien français Libération. : "(…) un point que l’on devine français, tape sur le Mali et, au lieu de les écraser, projette les djihadistes qui s’y trouvent chez les voisins immédiats. En Mauritanie, au Burkina, au Niger, au Tchad…". Visiblement, les groupes djihadistes n’ont pas été "écrasés" mais projetés aux alentours du Mali et n’ont pas tardé à s’attaquer partout aux intérêts français comme ceux des pays considérés comme soutiens de la France.

Niger :

Le jeudi 23 mai, un groupe armé islamiste a fait exploser deux véhicules piégés dans un camp militaire nigérien à Agadez et sur le site de l’entreprise française Areva, suivi d’un assaut des forces nigériennes et françaises. L’affrontement a fait plus de trente morts et des dizaines de blessés, y compris parmi le personnel d’Areva. Le président français a beau crier "victoire sur les terroristes", la réalité l’a très vite rattrapé…

Nigeria :

Encore un pays entraîné dans la guerre du Sahel. Pour le Président nigérian, Goodluck Jonathan, les actions de Boko Haram sont une tentative délibérée d’ébranler l’Etat nigérian, du coup : "L’armée nigériane a lancé, jeudi 16 mai, une offensive dans le nord-est du pays contre les islamistes du groupe Boko Haram. Plusieurs milliers de soldats, selon un porte-parole des armées nigérianes ont été déployés ainsi que des avions et des hélicoptères de combat. Le président Goodluck Jonthan, qui a déclaré mardi 14 mai, l’état d’urgence dans les Etats de Borno, Yobe et Adamawa, a présenté comme ‘une déclaration de guerre’ les dernières violences du groupe et il a pour la première fois reconnu que Boko Haram avait pris le contrôle de certaines parties de l’Etat de Borno. Boko Haram a revendiqué les attaques de Baga, le 16 avril, suivies d’une violente répression par l’armée ayant fait au total 187 morts, et celle de Bama, le 7 mai, qui s’était soldée par au moins 55 morts. L’insurrection et sa répression par les forces de sécurité ont fait quelque 3600 morts depuis 2009, selon l’organisation Human Rights Watch". (Le Monde du 18 mai 2013). En effet, depuis le début de la guerre au Mali, il était de notoriété publique que Boko Haram avait des liens étroits avec le groupe terroriste Aqmi et tous deux s’entraînaient dans les mêmes camps dans le nord malien.

Tunisie :

"Depuis le 29 avril, la traque du groupe djihadiste (salafiste tunisien) commencée il y a deux semaines a pris une autre tournure avec l’explosion de plusieurs mines qui ont fait vingt-sept victimes dans les rangs de l’armée et de la garde nationale. Parmi elles, trois militaires sont morts, cinq autres ont dû être amputés. (…) Les armes proviennent de Libye, et les enquêteurs ont acquis la certitude que le groupe entretient d’étroites relations avec les djihadistes installés dans le nord du Mali". (Le Monde du 18 juin 2013)

Libye :

Le 23 avril, un "attentat terroriste" a touché l’ambassade française en Libye causant des destructions importantes et blessant grièvement deux gendarmes français. Et là aussi, comme le reconnaît le Ministre français des affaires étrangères Laurent Fabius, derrière cette attaque contre l’ambassade il y a le groupe armé Aqmi qui a récemment appelé à frapper les intérêts français "à l’intérieur comme à l’extérieur du Mali". Justement, la Libye est devenue le sanctuaire de la plupart des groupes sanguinaires en guerre contre les puissances criminelles étatiques qui les traquent. On se souvient qu’au lendemain de la liquidation physique de Kadhafi et son régime (fin octobre 2011) par les forces de l’OTAN, les dirigeants français et britanniques (Sarkozy et Cameron) avaient publié des communiqués triomphalistes en prétendant avoir réglé la crise et apporté la paix aux populations en organisant des élections "libres et transparentes" ! Mais en réalité, derrière l’image d’une Libye "libre" en route vers la "prospérité" brandie par les propagandistes des grandes puissances, se cache un pays miné par un sanglant chaos et en totale décomposition. En effet, la Libye est un pays dominé par des tribus ou entités féodales dotées de leurs propres seigneurs et de forces armées. Par exemple, à Misrata, la 3e ville du pays, on dénombre quelques 150 milices pour 450 000 habitants. Deux ans après la "libération" de la Libye de son dictateur Kadhafi, l’Etat libyen est aujourd’hui encore en lambeaux : "(…) les ex-thuwar (révolutionnaires) disposent d’un atout considérable : les armes, qu’ils refusent toujours de déposer, plus d’un an et demi après la capture et la mort du Guide libyen. Mardi 30 avril, pour la troisième journée consécutive, des dizaines de pick-up équipés de mitrailleuses lourdes barraient ainsi l’accès au ministère des affaires étrangères, perçu par les jusqu’au-boutistes comme un bastion de l’ancien régime. En février et en mars, les mêmes avaient assiégé à plusieurs reprises le bureau du premier ministre et le siège du parlement, allant jusqu’à ouvrir le feu sur le convoi de Mohamed Al-Magaryef, son président". (Le Monde du 2 mai 2013).

L’impérialisme français se heurte aussi à ses concurrents, notamment américain

"Le plan de paix élaboré par Hollande avant même l’envoi de troupes au Mali est aujourd’hui rejeté par la Maison Blanche et le Pentagone. Un diplomate français, et il n’est le seul, n’apprécie guère cette rebuffade subie par l’Elysée. Et il résume ainsi la stratégie imposée par Washington : ‘les forces africaines qui, en principe, seront bientôt placées sous mandat de l’ONU ne doivent pas combattre les djihadistes, mais se limiter à un simple rôle d’interposition. La traque de ces groupes armés est réservée aux seuls français’. Et le secrétaire d’Etat adjoint aux affaires africaines John Corson de préciser : ‘une opération contre-terroriste dans le Nord du Mali se révèle nécessaire, et il revient probablement (sic) aux français de la mener, mais en aucun cas cette opération n’est à mettre dans les mains des Nations unies’. (…) Selon plusieurs diplomates, les Américains ne veulent pas que la France soit ‘en position de leader’ dans cette zone sahélienne où uranium, pétrole et gaz peuvent être prospectés". (Le Canard en chaîné du 20 février 2013). Derrière les bavardages sur les "négociations de paix" ou l’unité de façade contre les groupes terroristes pour la "sécurisation" du Mali, il y a cette autre guerre (non déclarée) qui oppose grands et petits brigands qui se disputent le contrôle de la région et de ses matières premières. Et c’est bien cela l’enjeu principal et la motivation de l’engagement des divers vautours impérialistes présents dans cette région, qui comme la France et les barbares djihadistes, n’ont que misère et massacre à offrir aux populations.

Amina (20 juin)

 

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Conflits impérialistes