La guerre des "chefs" au PS est un problème pour la bourgeoisie, pas pour la classe ouvrière

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Le Congrès du parti socialiste, qui s’est tenu à Reims à la mi-novembre, vient confirmer la réalité de la crise politique profonde qui affecte ce parti. Alors que la déroute économique plonge avec une violence et une rapidité inouïes des milliers d’ouvriers dans une misère noire, la principale force d’opposition institutionnalisée censée proposer une “ alternative politique ”, en réalité de la poudre aux yeux destinée à endormir la classe ouvrière, est en proie à une guerre digne des règlements de comptes de la mafia.

Les politiciens de gauche, qui se sont toujours vantés de “ débattre pour des projets au service des citoyens ”, viennent d’exhiber au grand jour le spectacle grand’guignolesque de leurs mesquines rivalités et de leurs haineux règlements de comptes. Alors qu’il y a peu de temps, ils stigmatisaient hypocritement avec une feinte indignation le fait que la droite puisse afficher ses rivalités de cliques et étaler sur la place publique ses intérêts particuliers sordides, ils démontrent aujourd’hui que la gauche possède sur le fond les mêmes mœurs de gangsters et les mêmes méthodes de voyous. Les masques tombent lamentablement. Du coup, les médias ne peuvent couvrir ce sinistre spectacle sans pouvoir empêcher de lever un coin du voile sur ce qu’on peut qualifier de véritable panier de crabes. Manœuvres électorales de couloir, fraude des urnes, chantage, crocs en jambes, coups bas, dénigrements, les accusations réciproques de “ tricheries ” et les “ noms d’oiseaux ” vociférés par les différents clans opposés, débouchent sur une intronisation brutale, aux forceps, de la nouvelle secrétaire générale Aubry. Ses tentatives pour faire bonne figure, soit en parlant de “ rassemblement ”, soit en prétendant qu’il existe “ deux lignes politiques ”, n’atténuent en rien l’image d’une guerre intestine au sein d’un PS devenu une véritable “ pétaudière ” ayant perdu toute crédibilité de “ parti responsable ”1. Même le plus abruti des supporters de l’un ou l’autre camp ne peut croire à une “ confrontation des idées ” ! Comme le dit si bien Julien Dray à propos des textes politiques livrés au congrès : on ne “ voit pas d’énormes différences, à moins de vouloir cultiver les virgules et nuances ”. Seules les rivalités de personnes et de clans sont à l’œuvre !

Est-ce, comme tendent à le marteler les médias aux ordres, un simple problème “ d’ego boursouflé ” ? Est-ce, comme ils veulent le faire croire encore, un “ drame ” pour l’ensemble des exploités ?

En réalité, ce chaos dans le parti socialiste, s’il se nourrit bien “ d’un choc d’ego boursouflés ”, trouve surtout ses origines dans sa nature bourgeoise, dans l’impasse, la faillite du système capitaliste, dans les miasmes de sa phase historique de décomposition. Le capitalisme ne peut plus rien offrir d’autre que les fléaux qui s’abattent sur le monde. Et les vernis idéologiques du PS sont usés jusqu’à la trame, incapables de susciter le moindre élan d’adhésion des populations. La réalité dément tous les beaux discours ! Ils ne font pas rêver du tout les “ petites gens ”, selon l’expression de Ségolène Royal. L’état lamentable du PS en France n’est d’ailleurs un cas ni unique, ni isolé. Ses difficultés, sous formes diverses, se rencontrent aussi dans d’autres partis d’opposition et dans d’autres pays, comme on le voit par exemple avec la gauche émiettée en Italie.

De plus en plus, le “ chacun pour soi ” tend à exacerber la concurrence au sein même des différentes fractions et cliques bourgeoises. Le gâteau se rétrécit ; même le sens de l’intérêt de l’Etat, qui était un certain apanage des partis de gauche, et en particulier du PS, et qui faisait sa force, est perdu de vue ! Chacun se lance dans une course éperdue pour défendre bec et ongles sa carrière, mêlant par exemple au PS le siège convoité de premier secrétaire à des ambitions pour les présidentielles de 2012. Chacun voulant sa place réservée au soleil, joue des coudes, fait jouer ses réseaux, soigne sa carrière et avance ses pions. Un Kouchner n’a d’ailleurs jamais trahi les siens en entrant au gouvernement : il est allé “ à la soupe ”, vers ce qu’il a jugé le meilleur “ créneau ” pour sa carrière ! La leçon est claire : les bourgeois n’ont pas de conviction, ils n’ont que des intérêts carriéristes assujettis non seulement à la logique concurrentielle et individualiste du système qu’ils défendent mais aussi à ses mœurs corrompues et cyniques de gangsters.

La classe ouvrière n’a donc rien à déplorer ou à regretter par rapport au délabrement actuel du PS, comme organe de la classe dominante. C’est au contraire la bourgeoisie qui s’inquiète du fait qu’elle se trouve dans une situation plus délicate pour encadrer la classe ouvrière, sans opposition vraiment crédible. La classe ouvrière n’est pas affaiblie par le sort minable de ceux qui sont en réalité ses ennemis. Elle ne doit pas compter sur les politiciens bourgeois, sur les faux amis que sont les partis de gauche qui n’ont fait qu’attaquer ses conditions de vie avant l’arrivée au pouvoir de Sarkozy.

Ce n’est que sur sa conscience et sa force collective, dans les luttes massives et unies, par la solidarité de classe à l’échelle internationale, que le prolétariat devra puiser son énergie, montrer qu’il est la seule véritable force d’avenir pour changer le monde.

WH (17 décembre)

1 On a parlé aussi de “ guerre des deux roses ”, allusion à un terrible conflit meurtrier (à la fin du XVe siècle), opposant les maisons royales rivales d’York et de Lancastre, toutes deux revendiquant l’accession légitime au trône d’Angleterre et ayant quasiment mené à l’autodestruction de l’aristocratie anglaise.

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